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1.2 Données et analyse descriptive

1.2.2 Statistique descriptive

Nous cherchons dans un premier temps à dégager des différences et des spécificités par zone géographique en termes de corruption et d’allocation des dépenses publiques20. La

figure 1.1 représente la moyenne des niveaux de corruption par zone en 1996, 1998 et 2000. Les pays de l’OCDE se démarquent nettement des pays émergents et en développement. En effet, si le volume monétaire des transactions impliquées dans la corruption de ces pays peut approcher voire dépasser celui des pays en développement, en revanche, la fréquence et l’étendue de la corruption y sont plus limitées. En particulier, l’indice de corruption utilisé est un agrégat composé de perceptions non seulement concernant la grande corruption mais aussi la petite corruption, plus ancrée dans les régions en développement ou les régions émergentes que dans les pays développés.

À l’opposé, la corruption est sensiblement plus répandue dans les pays d’Afrique sub- saharienne et son niveau reste constant sur toute la période (entre 2.96 et 3.03 pour un indice échelonné de 0 à 5). Le Botswana et l’Ile Maurice ont les plus faibles indices de

Fig. 1.1 – Indice de Corruption par zone

Indice de corruption

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 1996 1998 2000

Afrique PECO/CEI Asie Amérique Latine MENA OCDE

corruption de la zone, la République Démocratique du Congo et le Cameroun les indices les plus élevés. Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ont à l’inverse les niveaux de corruption les plus faibles de l’ensemble des pays en développement et ceux-ci ont très légèrement diminué, de façon régulière, entre 1996 (2.47) et 2000 (2.38).

Quant à l’Asie, l’ensemble PECO-CEI et l’Amérique Latine, leurs niveaux de corruption sont assez proches et varient peu sur la période. En Amérique Latine, la corruption tend toutefois à diminuer depuis 2000.

La figure 1.2 présente les parts respectives de chaque secteur dans la dépense publique totale. Ces parts correspondent à une moyenne sur la période 1996-2000 et entre pays de

chaque zone.

De la même façon, l’examen de la structure budgétaire par zone fait apparaître quelques spécificités. En particulier, deux types de structure budgétaire émergent. Le premier type re- groupe les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA), d’Afrique sub-saharienne et d’Asie qui orientent principalement leurs dépenses vers la défense, l’ordre et les services publics et le secteur de l’énergie. Le second est composé de l’Amérique Latine, de la zone PECO-CEI et de l’OCDE qui consacrent des parts élevées de leur budget aux secteurs sociaux tels que la santé, la protection sociale et, dans une moindre mesure, l’éducation – ainsi qu’à la culture pour l’ensemble PECO-CEI : la plupart des pays de ces régions ont connu des régimes communistes, qui ont investi massivement dans les secteurs favorables au développement humain. À l’inverse, les pays d’Amérique Latine, les PECO et les pays de la CEI allouent une part très faible de leurs dépenses publiques à la défense et au secteur énergétique. La particularité de la structure budgétaire des pays de l’OCDE tient au fait d’une part qu’ils sont les seuls à consacrer une plus grande part de leur budget à la santé qu’à l’éducation, d’autre part qu’il ont le plus faible pourcentage de dépenses d’ordre et services publics. L’Afrique sub-saharienne a au contraire le pourcentage le plus élevé de dépenses d’ordre et services publics : 20% de son budget.

Au total, les pays de l’OCDE combinent de faibles niveaux de corruption et des parts importantes de dépenses dans le secteur de la protection sociale et de la santé, tandis que dans les pays d’Afrique sub-saharienne, la corruption est à l’inverse largement répandue et les parts des dépenses de santé et protection sociale dans le budget sont les plus faibles, tandis que le pourcentage de dépenses d’ordre et services publics y est élevé. Ces résultats descriptifs invitent à penser qu’il peut y avoir une corrélation positive entre le niveau de corruption et la part des dépenses d’ordre et services publics et négative entre la corruption et la part des dépenses sociales.

Une analyse des corrélations entre niveau de corruption et dépenses sectorielles devrait permettre de dégager des tendances au-delà des spécificités régionales. Nous présentons donc dans le tableau 1.1 les coefficients de corrélation entre le niveau de corruption et les parts de budget allouées aux différents secteurs, en pourcentage des dépenses totales dans

la première colonne, en pourcentage du PIB dans la deuxième. Les coefficients sont calculés à partir des données annuelles cumulées entre 1996 et 2000.

Tab. 1.1 – Coefficient de corrélation avec le niveau de corruption

Secteurs de dépense Dépenses allouées en pourcentage... des dépenses totales du PIB

Éducation 0.19b -0.05

Santé -0.55a -0.58a

Protection sociale -0.51a -0.52a

Logement 0.11 -0.00

Autres activités économiques 0.23a 0.07

Ordre et services publics 0.38a 0.20b

Culture 0.08 -0.07

Énergie et combustible 0.18b 0.13c

Défense 0.11 0.01

Dépenses totales – -0.33a

Notes : Les coefficients marqués a, b, c sont significatifs respective-

ment au seuil de 1%, 5% et 10%.

La catégorie « Autres activités économiques » regroupe les secteurs Transport, Manufacture et Agriculture.

La part des dépenses totales dans le PIB est corrélée négativement et significativement à la corruption (-0.33). Ces résultats vont à l’encontre du mécanisme décrit par Tanzi et Davoodi (1997) selon lequel la corruption induit un gonflement artificiel des dépenses publiques. Des niveaux élevés de corruption vont plutôt de pair avec de faibles parts de dépense publique dans le PIB. Il semble que le gonflement artificiel s’opère au niveau de certaines dépenses sectorielles et que ce gonflement soit compensé par des pertes dans d’autres secteurs de dépense.

En effet, de hauts niveaux de corruption semblent associés à de faibles parts de budget allouées aux « secteurs sociaux ». Le niveau de corruption est en effet corrélé négativement et de façon significative avec les parts des dépenses de santé et de protection sociale. Ces deux secteurs paraissent lésés non seulement en termes de répartition dans le budget mais aussi en pourcentage du PIB. En revanche, la corruption est positivement corrélée aux parts et montants de dépenses dans les domaines de l’ordre et des services publics et d’énergie et

combustible. Les parts des dépenses totales consacrées aux « secteurs économiques » tels que les transports et communications, l’agriculture et les industries manufacturières ainsi qu’à l’éducation semblent d’autant plus élevées que la corruption est forte mais ceci n’est pas vrai pour leur part dans le PIB. En effet, puisque les dépenses totales rapportées au PIB sont négativement et significativement liées au niveau de corruption, la combinaison d’une corrélation positive de la corruption avec Depeduc

Deptot (et

Depeco

Deptot) et d’une corrélation négative

avec Deptot

P IB implique qu’il peut y avoir une indétermination de la corrélation entre corruption

et Depeduc

P IB (respectivement Depeco

P IB ), comme l’indique l’équation (1.1). Quant aux secteurs du

logement, de la culture et de la défense, leur part dans le budget n’est pas significativement corrélée avec le niveau de corruption.

L’étude du tableau de corrélation laisse ainsi supposer que les pratiques de corruption affectent non seulement la répartition des dépenses publiques mais aussi leur part dans le PIB. Cependant, la mise en évidence d’une relation de causalité entre le niveau de corruption et la répartition des dépenses publiques d’une part, et leur montant d’autre part requiert l’utilisation de méthodes économétriques qui permettent de contrôler pour d’autres déterminants des dépenses publiques et pour le biais d’endogénéité.