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Méthodes expérimentales

____________________________________________________________________________________________________________________ Laves naturelles

2.6 La spectroscopie Raman

2.6.3 Spectres Raman de silicates amorphes et détermination du rapport rédox

Dans le cas de cristaux, les spectres de diffusion Raman sont caractérisés par des pics fins correspondant aux divers modes vibratoires des différentes entités structurales (voir les spectres Raman en Annexe 4 des minéraux utiles à la calibration de la spectroscopie XANES au seuil K du fer). Dans le cas d’un solide amorphe (verre) on obtient un spectre plus diffus où les bandes sont relativement larges et peu résolues (Fig. 2.32).

200 400 600 800 1000 1200 1400 1600

Intensité normalisée (u.a.)

Fréquence cm-1

Figure 2.32: Spectre Raman normalisé du verre de borosilicate de

sodium NBF67.18.0 à température ambiante.

La largeur des bandes augmente avec le désordre de la structure des amorphes et la distribution des forces de liaisons [Brawer, 1975]. Cependant, grâce aux multiples travaux cités en introduction de cette partie 2.6 nous savons aujourd’hui interpréter ces vibrations aussi bien dans un silicate cristallin que dans un silicate vitreux.

a) Structure des alumino-borosilicates amorphes

Les spectres Raman présentent donc des bandes caractéristiques de groupes structuraux. La longueur et la force des liaisons chimiques dépendent du cation impliqué, de la coordinence de celui-ci et de la présence d’oxygène pontant ou non-pontant. Les bandes Raman varient alors suivant le type et la quantité de cations, la nature des cations (tétraédriques), la distance T-O (T=formateurs de réseau), le nombre d’oxygènes pontants et les angles T-O-T [Mysen et al., 1982]. Les bandes Raman sont alors représentatives des unités structurales coexistant dans les silicates vitreux et fondus, faisant de la spectroscopie Raman un outil puissant pour sonder la structure et l’état de polymérisation des silicates [Brawer, 1975; Furakawa et al., 1981; Mysen et al., 1980b, 1981]. Plusieurs régions caractérisent les spectres Raman des alumino-borosilicates amorphes :

- région 200-500 cm-1 : elle représente les modes de vibration d’étirement des liaisons M-O avec (M=cation modificateur). L’intensité des bandes et leur domaine de fréquence augmentent lorsque la polymérisation augmente [Mysen et al ., 1980b; Seifert et al., 1982; McMillan et al., 1982].

- région 500-800 cm-1 : pour les silicates, les bandes entre 500 et 700 cm-1 sont dues aux vibrations de courbure des liaisons O-T-O avec T=Si et des tétraèdres TO4, plus particulièrement au mouvement de Si dans sa cage tétraédrique accompagné d’un mouvement léger des atomes d’oxygène [Mc Millan, 1984]. Dans le cadre des borosilicates, les bandes situées dans la gamme de fréquence 550-830 sont

caractéristiques des modes de respiration d’anneaux boratés [Meera et Ramakrishna, 1993].

- l’enveloppe 800-1200 cm-1 représente les vibrations d’étirement symétrique des liaisons T-O-T (avec T=Si,Al) [Mysen et al., 1980b ; Mc. Millan, 1984]. Pour certaines compositions de borosilicates, des bandes caractéristiques d’anneaux boratés à six membres contenant des espèces BO4 se trouvent vers 900-950 cm-1.

- présentes uniquement dans le cadre des borosilicates, les bandes à haute fréquence (1200-1600 cm-1) sont caractéristiques des vibrations d’étirements des liaisons B-NBO attachées à des groupements boratés BO3 ou BO4- [Kamitsos et al., 1987 ; Akagi et al., 2001]

Nous allons maintenant uniquement nous intéresser au fer dans les silicates vitreux et à la spectroscopie Raman qui, une fois calibrée, permet de déterminer l’état rédox d’échantillons vitreux.

b) Spectroscopie Raman et fer dans les silicates vitreux

Des compositions de silicate vitreux contenant du fer ont fait l’objet d’études Raman, essentiellement pour interpréter le rôle structural du fer et relier équilibre rédox et structure du silicate vitreux [Mysen et al., 1980a ; Fox et al., 1982; Wang et al., 1995; Mysen, 2006]. Les vibrations des liaisons dépendent, entre autres, de la substitution du silicium par d’autres cations formateurs (Al3+, voire Fe3+). L’enveloppe 800-1200 cm-1 peut alors être représentative du comportement du fer.

En effet dans les spectres Raman de silicates de fer vitreux, la présence de Fe3+ est indiquée par des bandes à différentes fréquences selon la composition du silicate :

- à 905-915 cm-1 pour des compositions NS2 riches en fer (Wang et al. [1995] et cette étude), et des verres à base de compositions de pyroxène (CaO-MgO-SiO2) [Magnien et al., 2006, 2008],

- entre 925 et 970 cm-1 pour des verres de Na2SiO3, MgSiO3, CaSiO3, CaMgSi2O6

[Mysen et al., 1980a, 1984],

- à 965 cm-1 pour des compositions d’aluminosilicates riches en silicium (Albite : [Wang et al., 1995]; Jadeite : cette étude) et pour le basalte de cette étude,

- 975-980 cm-1 pour les borosilicates de riches en silice à 18 mol % B2O3 de la présente étude.

- 980 cm-1 pour des compositions naturelles telles que pantellerite et basaltes étudiées par Di Muro et al. [2009].

Les figures 2.33a,b montrent ces évolutions pour la composition de borosilicate de sodium et fer, NBF67.18.x (avec x=0, 1, 5 et 10 mol % FeO).

200 400 600 800 1000 1200 1400 1600

Intensité normalisée (u.a.)

Fréquence cm-1 1 10 5 0 mol % "FeO" Fe3+/!Fe = 0.85 ± 0.05 a 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600

Intensité normalisée (u.a.)

Fréquence cm-1 0.87 0.70 0.62 0.71 0.92 0.97 0.22 Fe3+/!Fe b NBF67.18.5

Figure 2.33: Spectres Raman (a) des compositions NBF67.18.x (avec x = mol % FeO = 0, 1,

5 ou 10) à rédox constant Fe3+/ΣFe = 0.85 ± 0,05 ; (b) spectres Raman de la composition NBF67.18.5 avec différents rapports rédox.

L’augmentation de la bande à 980 cm-1 est clairement corrélée à l’augmentation du pourcentage molaire de fer (ajouté sous forme FeO) à rédox constant Fe3+/ΣFe = 0.85 ± 0.05. Sur la figure 2.33b, l’augmentation de la bande à 980 cm-1 est liée à l’augmentation du pourcentage de Fe3+ à taux de fer constant (5 mol % FeO). Ces observations sont similaires à celles de Mysen et al. [1980] et Magnien et al. [2006, 2008].

Les variations nettes des spectres Raman dans la région 800-1200 cm-1 avec le taux de Fe3+ permettent de déterminer de façon quantitative l’évolution du rédox du fer à l’aide de la spectroscopie Raman. Récemment, les travaux de Magnien et al. [2006, 2008] ont montré l’utilité de la spectroscopie Raman pour déterminer l’état rédox du fer pour des verres de compositions de silicate de calcium et magnésium. Di Muro et al. [2009] sont aussi parvenus à une calibration de la spectroscopie Raman pour déterminer l’état rédox du fer dans des rhyolites et basaltes alcalins.

c) Déconvolution des spectres Raman

Figure 2.34: Déconvolution des spectres Raman des

échantillons (a) 800 et (b) NBF67.18.5-R15. Images issues du logiciel IGOR Pro®.

Dans les domaines de fréquences spécifiques, les spectres sont déconvolués en bandes individuelles (Figs. 2.34a et b) à l’aide du logiciel IGOR PRO® commercialisé par Wavemetrics. Dans le protocole de déconvolution, tous les paramètres de déconvolution (intensité, position, largeur) sont généralement indépendants et non contraints. Le processus de déconvolution donne des incertitudes sur la largeur des bandes d’environ ± 0.04 cm-1.

Une description détaillée de la déconvolution des spectres Raman, pour les borosilicates de sodium et fer NBF67.18.X (X= 1, 5 et 10 mol % FeO) sera donnée dans le chapitre relatif aux résultats pour les borosilicates de sodium et fer. Notamment, l’attribution des bandes et de leurs évolutions en fonction du pourcentage de fer et de son état rédox, sera discutée pour cette composition. Ici, nous ne nous intéressons qu’à la détermination du rapport rédox par spectroscopie Raman.

Région 800-1200 cm-1 : calibration de la spectroscopie Raman et détermination du rapport rédox L’utilisation de fonctions gaussiennes symétriques semble adaptée et communément admise pour reproduire la largeur des bandes Raman entre 800 et 1200 cm-1 [Mysen et al., 1982]. Dans ce domaine, le seul paramètre fixé lors de la déconvolution est la largeur à mi-hauteur des gaussiennes qui doit être inférieure à 90-100 cm-1.

Le nombre de gaussiennes nécessaires pour reproduire l’enveloppe spectrale 800-1200 cm-1 a été déterminé selon un compromis entre l’amélioration de l’ajustement de moindres carrés effectué (diminution de χ2-test statistique qui mesure la signification des différences entre les données ajustées et les données observées-) et la réduction du nombre de paramètres impliqués. Plus le nombre de gaussiennes est élevé, meilleure sera la modélisation, mais plus il y a de paramètres qui entrent en jeu dans cette modélisation. La figure 2.35 représente l’évolution de χ2

en fonction du nombre de gaussiennes pour la déconvolution de la composition NBF67.18.5-800 (Fig. 2.34a). Pour cette composition 5 bandes gaussiennes sont nécessaires pour reproduire l’enveloppe spectrale 800-1200 cm-1. 0 1 10-6 2 10-6 3 10-6 4 10-6 5 10-6 0 1 2 3 4 5 6 7 ! 2 Nombre de gaussiennes

Figure 2.35 : Évolution du χ2 en fonction du

nombre de Gaussiennes utilisées lors de la déconvolution de l’enveloppe 800-1200 cm-1 du spectre Raman du verre NBF67.18.5 (Fig. 2.34a).

Les déconvolutions de la partie 800-1200 cm-1 fournissent la position, l’intensité et l’aire de chaque gaussienne. Pour toutes les compositions, l’intensité de la bande située entre 900 et 990 cm-1 selon la composition, augmente de façon importante avec le pourcentage de fer à rédox constant (Fe3+/ΣFe = 0,85 ± 0,05) et avec l’état rédox Fe3+/ΣFe à taux de fer constant (Figs 2.33