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Dans le cadre de leur activité ou fonction de formateur en établissement, les enseignants interrogés sont unanimes quant à l’idéal qu’ils visent : apporter « son » métier à l’étudiant.

Cette personnalisation de la fonction et l’importance mise sur la singularité de l’expérience

du stage nous laisse penser que l’action des FEE est guidée par une image de la profession qu’ils exercent.

Les paramètres de la situation de recherche ne nous permettant pas de procéder à l’évaluation de plus de compétence, c’est par obligation que nous avons restreint le nombre de compétences retenues. Le choix de ces dernières n’est pas anodin et repose sur l’image que les enseignants construisent et véhiculent concernant leur profession d’enseignant. Le commentaire de Paul nous montre que ces valeurs que nous partageons et qui ont guidé notre choix semblent l’être aussi pour la cohorte de FEE :

TP 92, min 19 : y'en a quatre hein↑ à mon avis c'est quand les même parmi les quatre essentielles […] // quelle impression tu donnes dans tous les points de vue↓ ta manière d'être ta manière de parler et puis d'amener les choses puis ensuite heu ce que tu enseignes est-ce que tu le maîtrises ou pas parce que c'est quand même rudement important c'est-à-dire

L’ensemble des personnes interrogées s’accordent à reconnaître que les compétences pro-posées dans cette démarche expérimentale semblent parmi les plus importantes et font par-tie des compétences qui sont le plus souvent discutées avec les étudiants lors des stages.

Peut-on s’autoriser à réduire l’évaluation des gestes professionnels aux quatre compé-tences choisies? Sans pouvoir l’affirmer pour autant, nous pensons que ces dernières sont des macro-compétences qui forment l’ossature de l’identité professionnelle d’un enseignant.

Il est évidemment un peu réducteur de réduire une profession à quatre items. Cependant, cette synthèse forcée a pour avantage de mettre en exergue les points essentiels qui font débat dans la reconnaissance des gestes professionnels. Ainsi, la compétence « sert de référence à l’élève » fait appel nécessairement à d’autres compétences plus spécifiques. Au vu des remarques qui ont été formulées par les FEE engagés dans notre recherche, nous formulons l’hypothèse que le découpage de l’activité des enseignants en une multitude de compétences est certainement très pertinent dans les premiers temps de la formation pro-fessionnelle pratique. En effet, un découpage précis peut permettre au stagiaire de voir son activité évaluée avec une focale d’observation très pointue. Par la suite, on peut toutefois espérer que l’activité du futur enseignant soit jugée selon une approche plus globale tenant compte bien évidemment des micro-compétences certifiées préalablement. Il s’agit à notre sens de ne pas décortiquer l’activité au point de ne plus pouvoir porter un regard global sur la performance d’un stagiaire en troisième année de formation, période durant laquelle ce dernier porte la responsabilité de la classe.

Pouvant certainement être déstabilisante, cette proposition d’éviter le découpage d’une acti-vité complexe en une multitude de tâches à observer n’est sans doute pas novatrice. Les propos des FEE nous montrent d’ailleurs qu’ils accordent de l’importance au stade de forma-tion dans lequel se trouve l’étudiant qu’ils accueillent comme l’illustre l’échange entre Paul et Oscar :

TP 81, min 18 : deuxième moitié↓ donc c'est des élèves qui devraient après en S3 en [S3/2 qui devraient quand ils arrivent chez nous devraient être prêts

TP 82, min 18 : [si si j'avais su ça j'aurais été un peu plus sévère moi

TP 83, min 18 : c'est des ensH c'est des c'est des enseignants qui doivent // presque être prêts disons (3 sec) presque dans ce sens-là

Dès lors que le niveau d’exigence semble dépendre du niveau d’étude des étudiants, on remarque que les FEE vont vers une lecture globale de l’activité observée. Il s’agit pour eux de pouvoir certifier la fin d’un parcours d’étude en constatant que l’étudiant devrait « être prêt ». Au vu de cette remarque, on peut se demander si l’habilitation décernée par un di-plôme d’enseignement ne repose pas essentiellement sur deux questions très générales :

- est-il capable de tenir une classe ?

- peut-il enseigner les savoirs essentiels aux yeux du public ?

Une remarque formulée par Oscar nous encourage à croire qu’un critère implicite guide l’observation des pratiques :

TP 84, min 18 : moi je me suis posé la question si c'était mes propres enfants est-ce que // est-ce que je serais tranquille de les laisser avec eux dans ma classe quoi (3 sec) est-ce qu'en voyant ça est-ce que j'aurais souci est-ce que mon enfant en fin d'année arrivera voilà c'est ça // c'est un des critères que je me suis posé.

Ce positionnement implique d’adopter une vision globale de l’activité enseignante et d’être capable de synthétiser l’ensemble des compétences afin de pouvoir s’exprimer sur la capaci-té de mener une classe. Est-ce pour autant plus objectif ? Certainement pas.

Est-ce que je confierais ma classe ou mes enfants à ce novice ? Nous postulons que beau-coup de FEE se posent immanquablement cette question dès lors qu’ils sont amenés à vali-der les compétences acquise par un étudiant arrivé au terme de sa formation. Reposant en-tièrement sur un jugement professionnel, cette approche a pour mérite d’aborder l’évaluation

de manière globale. En jugeant le pour et le contre, la certification liée à la réussite du stage permet de donner un signal clair à l’étudiant : les compétences nécessaires pour entrer dans le métier sont acquises ou pas encore. Dans une perspective de formation, la grille de com-pétence doit pouvoir expliciter les attentes de l’évaluateur et permettre une discussion entre les partenaires. Le recours à un référentiel de compétences, quel qu’il soit, doit pouvoir per-mettre un dialogue entre le mentor et le stagiaire. Nous le voyons comme un formidable outil de formation, permettant à l’étudiant de progresser dans l’affirmation de ses compétences professionnelles. De plus, il est aussi une aide à l’objectivation d’une observation qui se con-clurait en ces termes : je lui confie ma classe.