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Le service de la culture : spécificités des villes

Chapitre 1 - Le référentiel culturel des villes

I.3. Le service de la culture : spécificités des villes

Guy Saez (1996) définit la mission d’une direction des affaires culturelles comme celle d’une « médiation administrative entre les services de l’État et des autres collectivités locales et la municipalité d’une part, et d’autre part, entre la municipalité et les acteurs locaux du développement culturel ». Si, de ce point de vue, les villes de l’étude ne se distinguent pas, les missions et prérogatives de leur service culturel ne sont cependant pas similaires.

Les villes sont, en effet, des territoires culturellement diversifiés, héritiers d’une histoire et de pratiques singulières. La direction bordelaise, comme son équivalent québécois, gère un réseau de bibliothèques municipales. Mais à l’inverse de Québec, Bordeaux a également en charge de nombreux établissements publics : des musées (CAPC musée d’art contemporain, musée d’Aquitaine, musée des Beaux-arts, musée des arts décoratifs et du design, museum d'histoire naturelle), des lieux d’exposition tel celui de la Base sous-marine, des établissements d’éducation artistique, à l’instar du conservatoire de musique et de danse. Liste à laquelle, il faut encore ajouter l’Opéra, les archives municipales, ainsi que la gestion et la mise en valeur du patrimoine de la ville, inscrite depuis 2007 sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

L’organisation du service ainsi que son autonomie, ou à l’inverse son rattachement éventuel à une autre direction, signifient des disparités méthodologiques et idéologiques entre les villes.

À Bordeaux, la Direction générale des affaires culturelles se compose de trois directions : Direction des établissements culturels, Direction du développement et de l’action artistique, Direction de la maîtrise d’ouvrage et des finances. La Direction des

5 Plan d’action Québec orizon Culture, disponible en ligne, URL :

http://www.mcc.gouv.qc.ca/fileadmin/documents/publications/QHC_plan_action_2009-2014.pdf, consulté le 13 décembre 2011

établissements se divise en sous-domaines, chacun correspondant à un établissement dont la ville a la charge, alors que la Direction chargée du développement est organisée en sous-directions sectorielles renvoyant au patrimoine, aux arts de la scène ou encore aux arts visuels. On retrouve là une organisation proche de celle du ministère de la culture, reproduisant la catégorisation classique des champs d’intervention en matière culturelle.

Si le service culturel de la ville de Québec semble autonome dans la définition et la mise en œuvre de ses missions, il relève cependant d’une direction générale aux prérogatives larges qui comprend le développement culturel, touristique, sportif et social. L’association, dans une même direction (Services à la communauté), du service culture avec les services du tourisme, des grands événements, du sport et du loisir, suggère une certaine volonté de transversalité de l’action culturelle municipale. Dans le même sens, l’organisation interne du service culture (annexe 2), si elle ne déroge pas totalement à la sectorisation habituelle du champ culturel, s’en éloigne en cela qu’elle semble répondre à la fois à une plus grande transversalité mais également à une répartition pragmatique des tâches et responsabilités, selon une approche par projet. Ainsi la division regroupant le théâtre et la danse comprend également l’animation des bibliothèques ; la division chargée du loisir culturel et de la médiation culturelle inclut aussi le programme Première Ovation, alors que la division musique et littérature se préoccupe également de communication.

L’intervention de la ville de Québec, concernant le soutien aux arts et à la culture, se traduit principalement par des programmes de subvention s’adressant aux organismes professionnels de production et de diffusion. Toutefois, Québec se différencie de Bordeaux par une attention toute particulière portée au soutien de la « relève » artistique professionnelle de la ville, au travers de la mesure Première Ovation. Il s’agit d’accompagner, par un programme de tutorat, l’émergence artistique de la ville en s’appuyant sur l’expertise des institutions culturelles, mobilisées, à la fois, dans la formation des lauréats et dans l’administration du programme.

Le service de la culture a également pour mission de favoriser l’accès de la population aux arts et à la culture par le biais de l’entente de développement culturel qui le lie au ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine (MCCCF). Il est responsable du réseau des bibliothèques, et gère également le palais Montcalm, établissement dédié à la musique. Chargé de la diffusion du patrimoine, le service de la culture n’est pas responsable de sa gestion, qui se trouve confiée au service de

l’aménagement du territoire, avec qui la culture partage la dotation de l’entente de développement avec le ministère.

En outre, le service a également pour mission de soutenir les arrondissements de Québec dans la réalisation de leurs mandats en matière de culture. Enfin, il est responsable de la mise en œuvre du plan d’action Québec Horizon Culture.

Peu dotée en nombre d’équipements culturels en gestion directe, à l’exception du Palais Montcalm et du réseau des bibliothèques, les charges de centralité de Québec ne sont donc pas comparables à Bordeaux qui consacre 30% de son budget culture à la seule gestion de l’Opéra. Québec, investie du statut de capitale, est cependant privilégiée au travers de l’entente de développement avec le ministère qui lui octroie près de 30 millions de dollars répartis entre le service de la culture et celui de l’aménagement du territoire. Le budget propre du service culturel s’élève à près de 29 millions de dollars soit 22 millions d’euros. Le réseau des bibliothèques absorbe à lui seul près d’un tiers du budget, en deuxième position, le programme de subventions aux arts vivants totalise 4,3 millions de dollars6

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Avec 61,45 millions d’euros, le budget culturel bordelais représente le deuxième pôle des dépenses municipales de la ville après le social (102,82 millions d’euros)7. Alors que le budget culturel bordelais équivaut à 18,6% du budget global de la ville, celui de Québec ne représente qu’environ 3% du total et reste ainsi dans la moyenne des villes québécoises.

Il est à noter que la politique événementielle québécoise est gérée par le Bureau du développement touristique et des grands événements qui dispose d’un budget de 20 millions de dollars. Toutefois, les subtilités des logiques administratives n’expliquent pas à elles seules la différence entre les deux villes. La raison est également historique et culturelle. Les municipalités françaises sont depuis de nombreuses années les premiers financeurs de la culture, dépassant les échelons supérieurs et les autres collectivités. Avec 18,6% de ses dépenses consacrés à la culture, Bordeaux fait tout de même figure d’exception dans sa catégorie et s’impose en tête des municipalités en termes de financement culturel.

Les villes québécoises, à l’inverse, constituent un échelon administratif inférieur dans la chaîne administrative de l’intervention culturelle. La ville n’entrant qu’à hauteur de

6 Détails répartition du budget culture : Bibliothèques : 9 381 625 $ ; Lieu de diffusion des arts de la scène (Palais Montcalm) : 2 664 000 $; Patrimoine : 473 475 $; Arts vivants : 302 270 $; Programmes de subventions en arts vivants : 4 391 364 $; Gestion et soutien : 656 953 $ (source ville de Québec)

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10% environ dans le financement des activités des institutions et opérateurs culturels. En outre, la municipalisation de la culture est venue plus tardivement qu’en France, lorsque l’État Québécois se dote en 1992 d’une politique culturelle et institue les principes de décentralisation et de partenariat avec les collectivités locales.

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