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2. RECENSION DES ÉCRITS

2.3 Rôle déterminant de la mère

2.3.1 Scolarité, statut matrimonial et allaitement

Quelques études se sont intéressées au lien entre la scolarité de la mère et la santé de l’enfant. Une étude africaine suggère une relation significative entre l’éducation de la mère et la santé de l’enfant, mesurée par la mortalité infantile, la transmission du VIH et la vaccination (Nkonki, Chopra, Doherty, Jackson, & Robberstad, 2011). Une étude sur près de 4000 enfants néerlandais et leurs parents arrive à une conclusion similaire. La scolarité de la mère influence la santé de l’enfant dès la petite enfance et persiste durant l’enfance. En comparaison avec les enfants dont la mère est plus scolarisée, les enfants dont la scolarité des mères est faible présentent plus de symptômes d’asthme, ont une moins bonne santé générale, ont des infections respiratoires plus fréquemment et présentent plus fréquemment de l’embonpoint et de l’obésité (Ruijsbroek, et al., 2011).

Selon l’ELDEQ, 16% des enfants québécois de 4 ans avaient, en 2002, une mère qui n’avait pas de diplôme d’études secondaires alors que 38% des enfants de 4 ans avaient une mère sans diplôme post-secondaire. Vingt-sept pour cent des enfants de cette enquête avaient une mère ayant obtenu un diplôme universitaire (Desrosiers, 2005). Cependant, aucune relation significative n’a été obtenue entre la scolarité de la mère et le statut pondéral de l’enfant québécois dans l’ELDEQ (Desrosiers, 2005).

La scolarité de la mère est reconnue comme étant reliée à l’alimentation de l’enfant. Il est suggéré que plus la scolarité est faible, plus l’enfant consomme des aliments peu nutritifs et moins il consomme d’aliments à forte densité nutritionnelle (North & Emmett, 2000). Les mécanismes par lesquels la scolarité de la mère influencerait l’alimentation de l’enfant s’effectuent directement et indirectement.

L’influence directe de la scolarité de la mère sur l’alimentation de l’enfant n’a pas fait l’objet de beaucoup d’études. Cependant, une revue de littérature sur le sujet suggère qu’une faible scolarité de la mère est associée à des connaissances moindres à l’égard de la saine alimentation, ce qui engendrerait une alimentation moins saine chez son enfant (Cochrane, Leslie, & O'Hara, 1982; Desrosiers,

2005).

Indirectement, la scolarité influence le statut socio-économique des ménages qui influence à son tour l’alimentation de la famille. La pauvreté engendre l’insécurité alimentaire, c'est-à-dire avoir un « accès limité ou incertain à une nourriture saine et adéquate du point de vue nutritionnel » (Desrosiers, 2005). Les quartiers plus pauvres peuvent aussi être situés dans un désert alimentaire caractérisé par peu ou pas d’épicerie où les denrées seraient plus saines et moins dispendieuses que dans les dépanneurs (Cummins, et al., 2009; Smith & Morton, 2009). Selon les données de l’ELDEQ, les enfants vivant dans un ménage à faible revenu et ceux vivant dans un ménage présentant de l’insécurité alimentaire sont plus nombreux à présenter un surpoids (embonpoint ou obésité) (Desrosiers, 2005; Wang, Patterson, & Hills, 2002). Une étude australienne portant sur un sous- groupe du NNS (National Nutrition Survey) chez 1581 enfants de 7 à 15 ans conclut que les garçons vivant dans une famille avec un revenu élevé sont significativement moins susceptibles de présenter un surpoids que les garçons vivant dans une famille dont le revenu est faible (Wang, et al., 2002).

Quant à la qualité nutritionnelle, une étude espagnole s’est intéressée à la qualité des déjeuners des enfants et jeunes adultes (2-24 ans). Il y est suggéré que les sujets de faibles niveaux socio-économiques de même que ceux de parents (père et mère) présentant un faible niveau d’éducation obtiennent de plus faibles scores de qualité nutritionnelle au déjeuner par rapport aux sujets provenant d’un ménage favorisé quant aux statuts socio-économique et éducationnel (Aranceta, Serra-Majem, Ribas, & Perez-Rodrigo, 2001).

Deux études, une américaine et une australienne, suggèrent que le fait d’avoir une mère monoparentale augmente les risques pour son enfant d’âge scolaire de présenter un surpoids ou de l’obésité, autant pour les filles que pour les garçons (A. Y. Chen & Escarce, 2010; Gibson, et al., 2007). Chez les enfants américains, alors que la prévalence de l’obésité chez les 10-17 ans a augmenté de 10% entre 2003 et 2007, cette augmentation s’élève à 15,6% chez les enfants de mères monoparentales (Singh, Siahpush, & Kogan, 2010). Une étude suédoise

montre que bien que les mères monoparentales n’aient pas un IMC plus important que les mères mariées ou en cohabitation, leur fille présente un poids plus élevé que celles de familles biparentales. Ces filles de mères monoparentales présenteraient une consommation plus importante de boissons gazeuses, un plus haut niveau de comportement alimentaire restrictif et une plus faible estime de soi (Elfhag & Rasmussen, 2008).

Selon les données de l’ELDEQ, plus la mère est scolarisée et plus l’enfant à de chance d’être encore allaité à l’âge de 4 mois. L’enfant de mère monoparentale a moins de chance d’être allaité à la naissance et d’être exclusivement allaité à 1 mois ainsi qu’à 4 mois (Dubois, Bédard, Girard, & E., 2000).

Une étude portant sur trois comportements maternels, soit le tabagisme durant la grossesse, le gain de poids excessif durant la grossesse et la durée de l’allaitement inférieure à 12 mois montre que ces 3 facteurs augmentent ensemble ou séparément la probabilité que l’enfant présente un surpoids à l’âge de 3 ans (Gillman, et al., 2008). L’effet protecteur de l’allaitement sur le statut pondéral de l’enfant ne fait toutefois pas consensus. Certaines études suggèrent que l’allaitement protège l’enfant d’un surpoids. C’est le cas d’une étude portant sur l’allaitement et le statut pondéral d’enfants écossais d’âge préscolaire (39 à 42 mois). Il y est constaté que l’allaitement durant la période de la 6e à la 8e semaine de vie est associé à une réduction du risque d’obésité chez l’enfant d’âge préscolaire, comparativement à l’utilisation de formule pour nourrisson à cette même période (Armstrong, Reilly, & Child Health Information, 2002). De plus, une étude de cohorte américaine nommée Growing Up Today Study suggère que les bébés allaités ont moins de risque d’être en surpoids lors de l’enfance et l’adolescence que les bébés nourris avec une formule pour nourrissons. Cette étude suggère aussi que l’allaitement durant les 7 premiers mois de vie du bébé, comparativement à l’allaitement pour une durée de 3 mois ou moins, diminue les risques de présenter un surpoids chez l’enfant et l’adolescent (Gillman, et al., 2001). Une étude conclut aussi à une relation entre la durée de l’allaitement et le risque de surpoids à l’âge de 4 ans. Cependant, cette relation significative devient

non significative après avoir contrôlé les analyses pour différents facteurs de risque. L’effet protecteur de l’allaitement sur le statut pondéral de l’enfant pourrait donc être diminué par des facteurs culturels et environnementaux (poids à la naissance, ethnie, IMC de la mère, utilisation de préparation lactée) (Procter & Holcomb, 2008).

D’autres études n’établissent pas d’association significative entre l’allaitement et le statut pondéral de l’enfant. C’est le cas d’une étude portant sur les données de l’ELDEQ ne montrant aucune relation entre l’allaitement et le poids de l’enfant à 4 ans et demi (Dubois & Girard, 2006). L’absence de relation entre l’allaitement et le poids de l’enfant est aussi rapportée dans une étude de cohorte comportant 17733 participants anglais où l’IMC a été calculé à 7, 11, 16 et 33 ans. Aucune relation n’a été rapportée entre l’allaitement et l’IMC des enfants (7 et 11 ans). Les filles de 16 ans et celles de 33 ans qui ont été allaitées ont un IMC significativement inférieur à celles non allaitées pour ces mêmes groupes d’âge. Quant aux garçons, ceux de 33 ans qui ont été allaités ont un IMC significativement inférieur à ceux non allaités du même âge. Toutefois, ces relations ont disparu ou sont devenues non significatives après contrôle pour la classe sociale (basée sur l’emploi du père : « professionnel/intermédiaire », « qualifié non-manuel », « qualifié manuel », et « semi-qualifié ou non qualifié »), l’IMC de la mère (basé sur son poids avant la grossesse) et le tabagisme durant la grossesse (Kwok, Schooling, Lam, & Leung, 2010; Parsons, Power, & Manor, 2003). Aucune relation entre l’allaitement et le statut pondéral à l’âge de 7 ans chez des enfants chinois (Kwok, et al., 2010) et à l’âge de 21 ans chez des enfants australiens (L. Shields, Mamun, O'Callaghan, Williams, & Najman, 2010) n’a été observée.