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14113 Notre série chronologique (1997-2012) débute au moment où la loi C-68 est entrée en vigueur, ce qui nous empêche de

considérer les effets de tendance. Il se pourrait, en fait, que les crimes de violence commis avec une arme à feu aient commencé à chuter bien avant l’arrivée de cette loi.

14 En 2012, 215 événements de violence commis avec ces «autres armes à feu», ont été signalés aux policiers alors qu’on en comptabilisait 76 en 1997.

15 L’évolution des infractions relatives aux armes à feu est présentée à la figure 4, en Annexe. Il est à noter que ces infractions, tout comme celles concernant les stupéfiants, représentent, habituellement, des indicateurs de l’intensité des efforts répressifs de la part des policiers. 16 On y retrouve, par exemple, le nombre d’abonnements à des magazines spécialisés (tel que

Guns and Ammo), le pourcentage de crimes (homicides, vols, voies de faits) commis avec une arme, le nombre d’adhésions au National Rifle Association (NRA), le taux d’arrestation pour arme à feu par 100 policiers ou la proportion de suicides par arme à feu.

baisse considérable13. Toutefois, il faut se rappeler que c’est l’arme de poing (à autorisation

restreinte) qui est la plus couramment utilisée lors de la commission de crimes. En moyenne, depuis les 15 dernières années, 75 % des crimes violents commis avec une arme à feu l’ont été avec une arme de poing. Et bien que l’enregistrement de ces armes soit obligatoire depuis 1934, nous remarquons que les crimes violents qui y sont associés ont tout de même diminué de 68 %.

Figure 3 • Évolution des crimes contre la personne commis avec des armes à feu, selon le type d'arme, 1997-2012 0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 -50 0 50 100 150 200 250 300 Arme de poing Carabine ou fusil (Tronqué ou non) Arme automatique Autre arme à feu

1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

Arme de poing

Autres types d’arme à feu

Il est à noter que la catégorie des crimes commis avec d’« autres armes à feu » est la seule qui affiche une hausse depuis le début des années 200014. Nous retrouvons dans

cette catégorie des armes telles que les fusils à plomb ou à air comprimé. Plusieurs hypothèses, qui expliqueraient cette augmentation, peuvent être émises. Elles sont, d’abord, beaucoup plus accessibles, puisque la plupart sont en vente libre, et les victimes pourraient facilement les confondre avec de vraies armes à feu. Il est également possible que la réglementation plus sévère quant au contrôle des armes à feu ait précipité cette hausse. Nous pouvons aussi penser que les délinquants utilisent ce type d’arme pour éviter

des peines d’emprisonnement plus lourdes, dans l’éventualité où ils seraient appréhendés par les policiers. D’ailleurs, il a été mentionné que la majorité des crimes a été commise avec une arme de poing, mais il est très probable qu’une proportion non négligeable de ces armes soient, en fait, des imitations.

2 – Marché et trafic d’armes à feu illégales La disponibilité des armes à feu

La diminution marquée du volume de crimes violents commis avec une arme à feu indique- t-elle que le bassin d’armes disponibles est également plus restreint ? En d’autres mots, y a-t-il moins d’armes en circulation illégale dans les rues de Montréal aujourd’hui, que durant les années 9015 ? Fournir une réponse précise à cette question est assez complexe

mais quelques raisons nous portent à croire que ce n’est pas le cas. D’abord, les infractions relatives aux armes à feu, qui ont trait à la possession illégale, à l’entreposage et au trafic d’armes à feu, sont plus fréquentes aujourd’hui qu’à la fin des années 90. Il est aussi important de se rappeler que la plupart des délinquants font l’acquisition d’une arme à feu dans le but de se protéger plutôt que dans l’intention de commettre un crime (Decker et Caldwell, 1997 ; Morselli et autres, 2010). D’autre part, la possession et le trafic d’armes à feu sont fortement associés à une participation dans les marchés de drogues (Bennett et Holloway, 2004 ; Felson et Bonkiewicz, 2011). Et puisque la population de délinquants actifs dans les marchés de drogues serait en croissance à Montréal depuis la fin des années 90, (Charest, 2010), il est alors probable que la demande en armes, provenant du milieu criminel, suive la même tendance.

Mesurer le volume d’armes à feu qui intègrent le marché montréalais et qui circulent sur notre territoire est un exercice difficilement réalisable. Il est possible, toutefois, de comparer le taux de possession d’armes à feu (légales et illégales) ou leur niveau de disponibilité entre différentes unités géographiques (villes, états, pays). En fait, plusieurs indicateurs de disponibilité sont couramment utilisés par les chercheurs qui tentent de comprendre l’association entre le taux de possession d’armes et le taux de décès (homicides, suicides) par armes à feu. Leur validité fait cependant l’objet de nombreux débats. Dans le but de tirer cette question au clair, Kleck (2004) a entrepris de mesurer la validité d’une vingtaine d’indicateurs16 en les comparant à des données issues de sondages menés auprès de la

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20 Quelques répondants ont fait part d’expériences d’achat auprès de fournisseurs fixes, particulièrement ceux situés dans les réserves autochtones en banlieue de Montréal. Ces sources étaient cependant réputées pour vendre des armes de moins bonne qualité. 21 Les auteurs précisent que les armes acquises dans le but de se protéger étaient généralement le fruit d’une recherche mais que celles

qui avaient comme motifs la revente ou la commission d’actes criminels relevait d’occasions fortuites.

22 Les auteurs précisent que la tenue de périodes d’amnistie, où des armes illégales pourraient être rendues sans conséquence judiciaire, pourraient permettre de réduire le bassin d’armes illégales en circulation.

23 Les informations qu’on peut tirer d’une arme sont limitées lorsque son numéro de série a été oblitéré. 17 À titre indicatif, la proportion de suicides commis avec une arme à feu à Montréal est de 2 % (Perrron, 2011),

comparativement à une proportion de 50 % aux États-Unis (Murphy et autres, 2013). Il serait intéressant d’effectuer une analyse comparative de cet indicateur à travers les grands centres urbains canadiens, mais les données disponibles à cet effet sont rares.

18 Il serait possible de les distinguer, mais aucune donnée n’est disponible sur la proportion de suicides par armes à feu commis par des individus ayant des antécédents judiciaires ou faisant partie du milieu criminel.

19 Treize entretiens ont été menés avec des individus incarcérés dans des pénitenciers fédéraux et les sept autres avec

arrive à mesurer adéquatement le niveau de disponibilité d’armes à feu, sur un territoire donné, soit la « proportion de suicides commis avec une arme à feu »17. Le chercheur

indique, par contre, que cette mesure ne permet pas de distinguer le taux de possession d’armes entre le milieu criminel et la population en général18 et qu’il faut éviter de l’utiliser

sur plusieurs années afin d’en dégager des tendances. La structure du marché des armes à feu illégales au Québec

Au Canada, et particulièrement au Québec, peu d’études se sont intéressées à la problématique des armes à feu illégales et de leur trafic, ce qui limite notre capacité à en saisir la dynamique et à, conséquemment, mettre en place des stratégies d’interventions efficaces et ciblées.

L’étude de Morselli et autres (2010) est l’une des seules à analyser les modes d’acquisitions d’armes à feu illégales achetées au Québec et d’émettre des hypothèses quant à la structure de ce marché. Pour ce faire, les auteurs ont procédé à des entretiens avec 20 acquéreurs d’armes à feu illégales au Québec19. Les principales constatations de leur étude

concordent avec les résultats issus de recherches antérieures, menées principalement aux États-Unis. D’abord, les entretiens ont permis de confirmer et de souligner l’importance des canaux d’acquisition informels. C’est-à-dire que les vendeurs d’armes illégales étaient généralement des amis, des membres de la famille ou des contacts fiables plutôt que des fournisseurs centraux, opérant à grand volume20. La plupart des répondants avaient

également la capacité de se porter acquéreurs d’une arme à feu à travers une multitude de sources, ou grâce à des intermédiaires qui servaient de liaison vers différents fournisseurs. Les répondants, qui avaient accès à un nombre limité de vendeurs étaient plutôt rares. L’étude révèle aussi que l’acquisition d’armes illégales s’effectue, généralement, dans un contexte opportuniste plutôt qu’au terme d’une recherche active et planifiée21.

Bien que le faible nombre de répondants (20) constitue une limite qui empêche la généralisation des résultats, les chercheurs ont, tout de même, tenté d’entrevoir sous quelle forme le marché des armes illégales au Québec est structuré. La flexibilité des réseaux d’acquisition et la prédominance des contacts informels comme sources de vente donnent à penser que ce marché n’est pas centralisé autour d’importants fournisseurs ou joueurs-clés. Face à un marché décentralisé, les opérations policières qui ciblent, préférentiellement, les chargements importants d’armes, se révéleront inefficaces et ne

réussiront pas à déstabiliser le commerce d’armes illégales. Les auteurs ajoutent que pour provoquer un impact sur le marché, « il faut exercer un contrôle continu sur la circulation des armes qui entrent sur le marché et mettre en œuvre une stratégie efficace pour réduire les stocks d’armes déjà en circulation »22.

L’ouverture des réseaux de trafic d’armes et pièces

Dans leur étude, Morselli et autres (2010) identifient plusieurs facettes du marché des armes à feu illégales qui mériteraient d’être approfondies ou surveillées. L’une d’entre elles concerne l’influence croissante d’Internet, qui permet d’élargir les sources d’approvisionnement possibles et qui facilite l’accès vers un éventail d’armes à feu de calibres différents. Cette tendance a d’ailleurs également été relevée par le Service canadien de renseignement criminel (SCRC, 2010). Ce type de trafic demeure une préoccupation importante au SPVM, d’autant plus qu’elle se complexifie. En effet, il a été noté que de nombreux fournisseurs transigent des armes à feu, mais par pièces détachées, ce qui complique les efforts de détection des policiers. Ces pièces peuvent être usinées, de manière artisanale, et vendues par la suite. L’essor du commerce des pièces d’armes offre aussi la possibilité de rendre les imitations d’armes à feu fonctionnelles, donc létales. Ces répliques, qui sont en vente libre et qui ressemblent en tout point aux originaux, peuvent aisément servir lors de la commission d’un crime et deviennent dangereuses du moment qu’elles sont modifiées.

La compréhension du marché des armes à feu illégales

Une arme à feu, saisie lors d’une opération policière, est d’abord considérée comme un élément de preuve. Toutefois, il s’agit d’un bien durable, qui est fréquemment transigé entre délinquants, et qui parcourt de multiples frontières. Nous pouvons considérer, en fait, qu’elle dispose d’une « carrière criminelle », qui a la capacité de nous informer sur la structure que prend le marché des armes à feu illégales, l’origine des sources d’approvisionnement et les routes qu’emprunte ce trafic. Certaines caractéristiques de cette «carrière» s’obtiennent à travers une analyse de dépistage qui permet, dans certains cas23,

d’identifier la provenance et la chaîne de possession d’une arme. Bien que les informations relatives à la provenance des armes utilisées au Canada sont peu nombreuses, il y a lieu de croire qu’une proportion importante d’armes à feu qui ont servi lors de crimes ont été importées illégalement des États-Unis (Cook et autres, 2009)24, en effectuant un transit

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