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quantification de biomarqueurs dans le plasma et l’urine

III.2. Linéarité de la réponse et performances comparées des modes MRM et MRM3MRM3

III.3.2. Sélection des ions en MRM 3

La sensibilité d’une méthode de quantification par spectrométrie de masse va être directement reliée à la réponse des ions sélectionnés, comme discuté dans le Chapitre 1 (section II.5.). Le choix des ions fragments est déjà relativement complexe en MRM, puisqu’il est difficile de prévoir lesquels fourniront une réponse importante. L’infusion du peptide standard est généralement nécessaire pour développer une méthode fournissant le maximum de sensibilité.

185 La stratégie de développement usuelle par MRM, mise en place lors de l’infusion du peptide standard, est présentée sur la Figure 65.

Figure 65. Stratégie d'optimisation usuelle en MRM, par infusion du peptide cible. Le cheminement est le suivant :

- les ions précurseurs di et tri-chargés sont suivis en mode Q1 MI afin de contrôler l’intensité de chacun d’eux

- chaque état de charge de l’ion précurseur est ensuite sélectionné pour produire un spectre de fragmentation MS2

- les X ions fragments les plus intenses sont sélectionnés pour mettre au point la méthode MRM finale

Lors du développement d’une méthode MRM3, le fait d’ajouter une étape de fragmentation implique un niveau supplémentaire de sélection des ions lors du développement de la méthode.

Selon l’état de charge de l’ion sélectionné pour être fragmenté, son spectre de fragmentation peut être grandement modifié. Ainsi, un ion fragment très intense issu d’un précurseur di-chargé pourra alors être très peu observé lors de la fragmentation de ce même précurseur tri-chargé. Lors d’un développement MRM, il est généralement facile de contrôler cela par l’intermédiaire de seulement 2 spectres de fragmentation : celui de l’état di-chargé et celui de l’état tri-chargé. Le problème est bien plus complexe lors du développement MRM3 en raison de l’étape de fragmentation supplémentaire. Idéalement, il faudrait alors optimiser et fragmenter chaque ion fragment primaire issu de chaque

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état de charge du précurseur, pour contrôler la réponse des ions fragments secondaires. Ainsi, il est parfois possible que l’état de charge du précurseur le moins intense soit celui qui fournisse le signal MRM3 le plus intense, comme illustré sur la Figure 66.

187 Figure 66. Spectres de fragmentation MS2 et MS3 pour les 2 états de charge des ions précurseurs, et des ions fragments primaires les plus intenses, pour les peptides APLTKPLK (a) et GPGGVWAAEAISDAR (b).

Pour chaque peptide optimisé ici, les spectres MS2 de chaque état de charge de l’ion précurseur sont représentés, ainsi que le spectre MS3 correspondant à la fragmentation de l’ion fragment primaire le plus intense.

Ainsi, comme on peut le constater, même si l’ion précurseur tri-chargé est globalement de même niveau que l’ion précurseur di-chargé (Figure 66a) ou bien moins intense (Figure 66b), il est possible

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que l’ion MS3 issu de sa fragmentation soit celui qui fournit le signal le plus intense. Cette observation est d’autant plus étonnante que l’ion fragment primaire issu de l’ion précurseur tri-chargé est moins intense que celui issu de l’ion précurseur di-tri-chargé. On peut supposer que le fait d’avoir un état de charge plus élevé de l’ion précurseur va générer des ions plus stables en MS2 (moins d’énergie de collision est nécessaire pour fragmenter l’ion), qui vont alors fournir une fragmentation plus douce en MS3 et des ions à leur tour plus stables.

Cette stabilité vis-à-vis de l’état de charge de l’ion fragmenté peut également être vérifiée à partir des ions fragments primaires sur un certain nombre d’exemples, comme présenté sur la Figure 67.

Figure 67. Comparaison des intensités des ions fragments secondaires générés en MRM3 selon l'état de charge de l'ion fragment primaire utilisé.

189 Comme on peut le voir ici, l’état de charge de l’ion fragment primaire utilisé pour générer les ions MS3 semble avoir une influence. La Figure 67 présente les chromatogrammes reconstitués obtenus lors de l’injection de 3 peptides, en suivant les transitions correspondantes :

- aux 2 états de charge de l’ion fragment primaire utilisé pour la fragmentation MS3

- à l’ion fragment secondaire le plus intense issu de chaque état de charge de l’ion fragment primaire

Ainsi, dans les 3 cas présentés ici, on peut voir que même si l’état de charge di-chargé de l’ion fragment primaire présente une intensité plus faible que celle de l’état de charge mono-chargé, il fournit des ions MS3 plus intenses. Encore une fois, on peut supposer que le fait de disposer d’un état de charge plus élevé permet d’obtenir une fragmentation plus douce par la suite.

Le choix des transitions utilisées représente une étape critique dans le développement d’une méthode de quantification par spectrométrie de masse, en MRM, mais encore plus en MRM3 comme le démontre les exemples ci-dessus. Le comportement de fragmentation de chaque peptide n’est pas prévisible d’après sa séquence, et pour obtenir les performances optimales de quantification, il sera souvent nécessaire d’optimiser les paramètres par infusion du peptide standard. Cette affirmation est d’autant plus exacte en MRM3, dont la réponse finale semble fortement impactée par l’état de charge des ions sélectionnés pour la fragmentation.

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IV. Conclusions et perspectives

La quantification ciblée des protéines faiblement concentrées au sein de matrices biologiques représente souvent un challenge important, en raison du manque de spécificité qui peut résulter. Dans ce chapitre, les bénéfices apportés par la MRM3 pour mener ce type d’études ont été présentés, comparativement aux performances obtenues en MRM. L’obtention de performances quantitatives supérieures en terme de limite de quantification a été rendue possible par l’utilisation d’un appareil hybride quadripôle/trappe ionique linéaire, permettant d’utiliser alternativement l’un des 2 modes de quantification développés ici. Ainsi, selon la protéine considérée, il a pu être observé un abaissement des LOQ de facteur allant de 2 à 4 en utilisant la MRM3, par rapport à ce qui était observé en MRM. De plus, la spécificité supplémentaire apportée par la méthode représente un grand intérêt pour la simplification du processus analytique, étant donné qu’il peut permettre de se passer d’une préparation d’échantillon poussée à base de fractionnement SCX par exemple pour évacuer un interférent. De plus, le fait de n’observer qu’un pic chromatographique net et sans interférence pourrait permettre d’automatiser le processus d’intégration des pics (en se basant par exemple sur le temps de rétention), simplifiant encore le traitement de longues séries d’échantillons. Dans l’idée de développer des méthodes robustes et abordables financièrement, cette simplification du processus représente aujourd’hui un avantage certain quand l’analyse de centaines ou milliers d’échantillons est menée.

Les performances quantitatives liées à une analyse LC-MS/MS sont fortement liées au système chromatographique utilisé, que ce soit pour une analyse MRM ou MRM3. Comme indiqué précédemment, l’utilisation de la MRM3 pourrait permettre de simplifier grandement le processus analytique et de limiter les coûts en termes de préparation d’échantillon. La plate-forme narrow-bore utilisée ici, parfaitement robuste et adaptée à ce type d’analyses, peut cependant poser problème en termes de consommation de solvant et de sensibilité limitée. Afin de tenter de contourner ces problèmes, un type de plate-forme alternative de type micro-bore, peu utilisée pour l’analyse de mélanges protéiques complexes, a été évaluée dans le chapitre suivant.