• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 Introduction générale

1.3 Étude de la guérison des plaies cutanées et potentiel des cellules souches extraites

1.3.2 Potentiel des cellules du tissu adipeux en guérison des plaies cutanées

1.3.2.1 Sécrétion de molécules bioactives

Les cellules souches extraites du tissu adipeux présentent un potentiel important pour favoriser la guérison de plaies chroniques. Ces cellules se caractérisent par leur capacité à produire une quantité notable de substances favorisant la réépithélialisation, la prolifération des cellules du derme ainsi que l’angiogenèse (Cherubino et al., 2011). Des molécules produites par les adipocytes ont également un potentiel notable pour favoriser la fermeture de plaies. Parmi ces substances, la leptine, le VEGF et l’angiopoïétine-1 présentent un intérêt particulier pour leurs effets multiples dans le processus de guérison.

1.3.2.1.1 Leptine

La leptine occupe une place importante dans la physiologie adipeuse et constitue une molécule d’intérêt dans la compréhension de l’obésité et de ses effets depuis sa découverte en 1994 (Friedman et al., 1998, Auwerx et al., 1998, Zhang et al., 1994). La leptine agit sur le contrôle de la satiété au niveau de l’hypothalamus. Lorsque sécrétée, elle diminue la faim et augmente la lipolyse ayant lieu dans les réserves adipeuses. Elle majore aussi à la hausse la sensibilité des cellules à l’insuline. Une mutation de son récepteur entraine chez la souris comme chez l’homme une obésité importante (Mantzoros et al., 2011). Cette observation a d’ailleurs donné lieu à divers modèles pour l’étude de l’obésité, du métabolisme des lipides et de la guérison des plaies (tel que revu dans la section 1.3.1).

La leptine a aussi fait l’objet d’études sur son rôle dans la guérison des plaies de la peau. Elle serait un facteur important dans la réépithélialisation des plaies chez les souris diabétiques. L’administration topique et systémique de leptine chez ces animaux réduirait entre autres l’atrophie des langues de migration aux marges de la plaie, favorisant ainsi une fermeture plus rapide des lésions (Frank et al., 2000, Ring et al., 2000). Les kératinocytes en marge d’une plaie seraient d’ailleurs particulièrement sensibles à la leptine grâce à un sous-type de récepteur (ObRb) exprimé durant la guérison d’une plaie (Frank et al., 2000). L’application topique de leptine aurait également un effet favorable sur les plaies non diabétiques (Frank et al., 2000).

La sécrétion locale de leptine est augmentée durant la guérison, suggérant que la leptine aurait potentiellement un effet de régulateur dans les mécanismes physiologiques (Murad et al., 2003, Poeggeler et al., 2010). La leptine agirait sur l’épithélium en guérison en favorisant entre autres la production de VEGF (Stallmeyer et al., 2001). Les cellules endothéliales seraient également influencées par la présence de leptine, favorisant ainsi positivement l’angiogenèse associée à la guérison cutanée (Poeggeler et al., 2010, Liapakis et al., 2008).

1.3.2.1.2 VEGF

Le facteur de croissance de l’endothélium vasculaire, ou VEGF, est une protéine principalement impliquée dans la migration et la prolifération endothéliale lors de la genèse de nouveaux vaisseaux sanguins (Ferrara et al., 2003). Elle est surtout produite par les cellules endothéliales, mais elle est également retrouvée dans le sécrétome des cellules stromales (Rehman et al., 2004) et des adipocytes du tissu adipeux (Rega et al., 2007).

En plus de l’effet angiogénique du VEGF qui contribue à la guérison des plaies, la molécule aurait un effet direct sur les kératinocytes en guérison. Les kératinocytes seraient munis de récepteurs VEGFR-1 et VEGFR-2 sur leur membrane cytoplasmique. En exposant les kératinocytes en monocouche à du VEGF, il y aurait augmentation du taux de prolifération et de la vitesse de migration (Man et al., 2006). L’effet du VEGF en guérison

des plaies serait donc médié par deux mécanismes, c’est-à-dire en agissant à la fois sur l’angiogenèse et directement sur les kératinocytes.

1.3.2.1.3 Angiopoïétine-1

L’angiopoïétine-1 est un facteur de croissance vasculaire sécrété entre autres par les cellules stromales adipeuses (Nakagami et al., 2006) et les adipocytes (Dallabrida et al., 2003). Il y a une production endogène accrue d’angiopoïétine-1 autant dans les plaies de souris normales que de souris diabétiques (Kampfer et al., 2001). L’application d’angiopoïétine-1 exogène sur des plaies chez la souris diabétique accélèrerait la vitesse de fermeture des plaies en augmentant la vitesse de régénération du derme et de l’épiderme. Cet effet serait médié entre autres par une angiogenèse accrue (Cho et al., 2006).

1.3.3 Peaux reconstruites et contribution du génie tissulaire (méthode

d’auto-assemblage)

La méthode d’auto-assemblage est une technique de culture cellulaire in vitro favorisant la production et l’organisation de matrice extracellulaire endogène et permettant de créer des tissus manipulables tridimensionnels. Il s’agit d’une technique d’intérêt à la fois pour la création de modèles d’études de la peau humaine de même que pour l’utilisation des CSTA sous la forme de tissus manipulables.

La culture en présence de sérum et de vitamine C permet ainsi de produire des tissus reconstruits totalement humains et exempts de biomatériau synthétique ou exogène (L'Heureux et al., 1998). Cette technique a été utilisée pour la reconstruction cutanée et permet d’obtenir des peaux reconstruites représentatives de la peau normale humaine (Pouliot et al., 2002, Michel et al., 1999). Ces peaux ou substituts cutanés sont dotés d’un derme reconstruit à partir de fibroblastes sur lesquels des kératinocytes sont ensemencés et stimulés à former un épiderme présentant une couche cornée. La peau produite présente histologiquement toutes les couches épidermiques et exprime aux endroits appropriés des marqueurs tels que la kératine 10 et le collagène de type IV.

Un modèle in vitro de réépithélialisation des plaies cutanées humaines a été développé au LOEX à partir de ces substituts cutanés (Laplante et al., 2001)et a été utilisé précédemment dans l’étude de la réépithélialisation (Dube et al., 2010). Il consiste à réaliser une plaie circulaire sur une peau reconstruite et d’apposer par la suite un feuillet migratoire de fibroblastes dermiques sous la plaie pour permettre aux kératinocytes de proliférer et de migrer vers le site de la plaie. Le modèle est entièrement conçu à partir de cellules humaines. Il est possible à partir de photos macroscopiques de visualiser avec une bonne précision le front de migration des kératinocytes (Laplante et al., 2001).

La méthode d’auto-assemblage a également été adaptée à la culture des cellules stromales extraites du tissu adipeux par l’équipe de Dre Fradette au LOEX. Cette technique permet de produire des stromas à partir de CSTA sur lesquels des kératinocytes peuvent être ensemencés pour former des substituts cutanés (Trottier et al., 2008). La technique adaptée, qui consiste à procéder à l’induction des CSTA vers la lignée adipeuse tout en stimulant la production de matrice, permet la création de substituts adipeux manipulables reconstruits à partir de CSTA (Vermette et al., 2007). Elle permet également la reconstruction de peaux tricouches, c’est-à-dire dotée d’un hypoderme sous le derme et l’épiderme (Trottier et al., 2008). La technique d’auto-assemblage adaptée permet donc de produire des tissus manipulables contenant des adipocytes matures à partir de CSTA, et ce, sans l’ajout de biomatériau exogène. L’épaisseur de ces tissus peut être ajustée par le regroupement de plusieurs feuillets cellulaires cultivés individuellement.