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Retour d’expérience sur le rôle des opérateurs dans l’amélioration continue et proposition d’une formation à l’analyse du travail

3 Méthodologie de l’intervention

3.1 Retour d’expérience sur le rôle des opérateurs dans l’amélioration continue et proposition d’une formation à l’analyse du travail

Durant une période d’un an, nous avons construit une réflexion sur « La participation et le rôle des opérateurs dans l'amélioration continue » avec un groupe de six ergonomes internes à l’entreprise14 (le groupe de travail ❶). La formalisation de nos retours d’expérience et l’analyse des documents de référence sur les démarches participatives, nous ont conduit à proposer une formation à destination des opérateurs visant à améliorer leur contribution dans ces démarches En effet, le déploiement des démarches participatives dans l’entreprise n’avaient pas apporté les résultats escomptés et les opérateurs étaient de moins en moins volontaires pour y participer. Les séances de travail se sont tenues mensuellement pendant un an. Le groupe de travail était piloté par l’ergonome à l’origine de sa création.

Amélioration continue : différentes voies de réflexion

L’amélioration continue dans l’entreprise renvoie à différents modes d’action pouvant se déployer « au quotidien » comme les « déclics » qui sont traités par les « Equipes de Progrès » (composées du RU et du TEP et qui font appel à d’autres fonctions d’appui) ou à l’occasion de chantiers. De manière générale nous avons caractérisé les démarches d’amélioration continue impliquant les opérateurs comme des démarches leur permettant de s’exprimer sur leur travail. Au sein du groupe de travail nous avons fait le choix de nous centrer dans un premier temps sur les chantiers dont les résultats impactent directement les postes existants et donc l’activité des opérateurs. Les questions structurant les échanges au sein du groupe de travail ont été les suivantes : Comment faire en sorte que les opérateurs s’expriment sur leur activité plutôt que sur la tâche ? Quel accompagnement des « concepteurs » pour qu’ils puissent différencier les marges de manœuvre des gaspillages ? Pour qu’ils puissent différencier la « non-valeur ajoutée » nécessaire de la « non-valeur ajoutée » ?

Construction et résultats du REX

Nous avons travaillé premièrement à partir des retours d’expérience REX de chacun des ergonomes sur les chantiers lean. Plus spécifiquement, les REX visaient à instruire les questions suivantes : Quelles sont les informations que donnent les opérateurs pendant les chantiers ? A quel moment ? Quelles sont les informations qu’ils ne remontent pas ? Pourquoi ? Par ailleurs nous avons également cherché à rapporter des retours d’opérateurs ayant participé à des chantiers. Les REX étaient animés par une des ergonomes du groupe qui formulait des questions permettant aux autres participants d’évoquer des récits de chantier, enrichis des traces des issues des chantiers.

Concernant la méthode d’analyse utilisée dans les chantiers nous avons relevé que les observations et analyses réalisées en chantier étaient guidées uniquement par les comportements. Les régulations, les intentions des opérateurs échappaient aux observateurs. La principale question que nous avons dégagée est : comment les opérateurs peuvent-ils faire voir en chantier qu’ils ont besoin de marges de manœuvre ?

Concernant la participation des opérateurs plus spécifiquement, celle-ci serait fonction de la phase, du type (projet, vie courante) et de la taille du chantier et des transformations. Du point de vue de l’intégration des opérateurs dans les différents temps des chantiers, nous avons relevé que les contributions des opérateurs étaient essentiellement attendues lors des « journées intensives ». Durant les phases de préparation et de suivi des chantiers, les opérateurs n’étaient pas intégrés. L’ergonome responsable du groupe de travail synthétise ainsi les retours d’expérience :

Dans les chantiers de grande ampleur comme les chantiers de rééquilibrage, les opérateurs ne sont pas intégrés. En revanche dans les « petits chantiers » où ils sont intégrés, il s’agit de 14 Les ergonomes impliqués dans ce travail étaient : Chloé De Guerpel, Caroline Heurtaut, Emilie Marc,

« Il (l’opérateur) valide les modifications en vie série si leur mise en place est immédiate. Il est absent si la phase de mise en place est longue. Si la phase de mise en place est très décalée par rapport à la phase intensive, l'opérateur change d'avis et perd un peu l'historique, le fil des discussions lors des groupes de travail précédent. Et ils ne sont pas les seuls, exemple le médecin. Lors de la mise en place, les acteurs ne sont pas forcément les mêmes et tout peut être remis en cause : pour des raisons de communication ou d'environnement modifié par la vie série. »

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petites transformations comme des modifications des hauteurs de meubles où les enjeux sur leur travail ne sont pas très importants. Par ailleurs, les opérateurs n’ont pas la capacité de mesurer les compromis réalisés durant les chantiers par rapport aux transformations actées. En fait, dans les chantiers, les solutions envisagées sont rarement testées.

Concernant le point de vue des opérateurs, il ressort des différents REX que les opérateurs ne veulent plus être impliqués dans les chantiers car ils se rendent compte qu’ils contribuent eux-mêmes à la réduction de leurs marges de manœuvre et donc à une intensification de leur travail. Cependant, nous avons identifié différents types de chantiers selon leur mode de conduite notamment du point de vue du rôle des opérateurs.

Analyse des documents prescripteurs et définition de recommandations

Nous avons réalisé une analyse des différents documents de prescription des chantiers : les Eléments du système de fabrication (ESF) et les fiches standards des chantiers. Nous avons analysé leur contenu phase par phase en essayant de repérer ce qui est dit sur la participation des opérateurs aux chantiers et les éléments manquants. Nous avons ensuite repéré et essayer d’interpréter les écarts entre ces prescriptions et les REX.

A partir de l’analyse de ces écarts, nous avons formulé des recommandations pour transformer la conduite des chantiers. Chacune des recommandations était associée à des actions que nous devions mettre en œuvre préalablement. Par exemple pour « Améliorer la prise en compte de l’activité en phase de préparation » une des actions à déployer était la formation socle à tous les pilotes et animateurs des chantiers. Pour « aider l’opérateur à se projeter dans le futur probable » une des actions à mettre en place était la systématisation du maquettage en tant que méthode permettant l’anticipation des conditions de réalisation de l’activité dans des conditions données en s’inspirant de ce qui est proposé en ergonomie de conception (Maline, 1994, Daniellou, 2004).

Outiller les acteurs des chantiers : une formation à l’analyse du travail

Alexandre Morais, Nathael Papalia et Maria Sol Perez

« Il (l’opérateur) participe à la mise en place des petits aménagements (meuble, posage, ..) mais dès que l'aménagement est plus important ceux sont les services compétents qui prennent le relais sans suivis par les opérateurs.»

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Nous détaillons ici un des principaux résultats du groupe de travail qui a permis la mise en œuvre de recommandations. Il s’agit de la réalisation d’une formation-action à destination des opérateurs impliqués dans les chantiers « Formation des opérateurs avant un chantier » et d’un guide pour l’opérateur avant le démarrage d’un chantier « Comment bien se préparer au chantier ». La méthode s’est insérée dans notre intervention lors des chantiers lean. Ces supports étaient orientés vers la formation à l’analyse ergonomique du travail. Nous avons constaté que les principaux « acteurs de la conception », notamment le RU et le TEP, disposaient déjà de formations et d’outils réalisés par les ergonomes, destinés à conduire des observations et analyses avec un point de vue s’appuyant sur l’ergonomie. En revanche, les opérateurs ne disposaient d’aucun outil ou formation orientés vers des formes d’auto-analyse du travail leur permettant ainsi de faire les liens entre les déterminants du travail, leur activité et ses effets sur eux et sur la production. Il s’agissait par ailleurs de les aider à formaliser l’expression de leurs besoins et la recherche de solutions. Dans ce sens, il s’agit d’une formation pour l’action dans le sens de Teiger et Laville (1991). Nous avons formalisé un premier support de « sensibilisation » qui visait à s’intégrer dans une démarche de formation plus large. La sensibilisation portait sur 4 principaux points : 1) Qu’est-ce qu’un chantier : les étapes du chantier, les phases clé où vous intervenez, ce que vous pouvez apporter à chaque phase et comment ; 2) Vous représentez le terrain : qu’est-ce que le travail ? La variabilité ? ; 3) La mise en situation : le maquettage, la simulation, comment ces outils peuvent vous aider à voir les effets possibles des transformations ; 4) Vos contributions durant les différentes phases du chantier.

3.2 Présentation du protocole d’intervention aux directions des usines

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