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Représentation spatiale

Cette réflexion sur la représentation spatiale d’un objet nous amène à nous questionner plus en profondeur sur la spatialité elle-même. Quelle spatialité représentons-nous ? Il n’est pas possible de représenter tout à fait fidèlement un objet géographique du monde réel. Une interprétation ou une généralisation est toujours nécessaire et est fortement dépendante de l’échelle d’analyse. La représentation ne capture qu’une partie des propriétés d’un objet et qu’une interprétation de sa spatialité via un filtre mathématique. Nous avons communément l’habitude de regarder la spatialité au travers de la représentation géométrique euclidienne.

Celle-ci nous permet d’appréhender des coordonnées planes ou tridimensionnelles des points caractéristiques d’un objet géographique. Cependant, il est tout à fait envisageable de ne pas se concentrer sur une représentation géométrique euclidienne mais sur d’autres types de géométries. Par exemple, lorsque nous analysons un plan de métro, nous nous focalisons sur les différentes connexions possibles entre les lignes, la position dans l’espace de ces mêmes lignes et de leur parcours n’a que peu d’importance. Dans ce cas, nous parlons de

12 Source : OpenGis Implementation Specification for Geographic information – Simple feature access.

L’identité à travers l’espace et le temps Chapitre II.

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représentation topologique d’un réseau. La spatialité peut même être envisagée via des géométries non continues (Stell and Webster 2007). La figure suivante permet d’appréhender les différentes géométries mathématiques possibles à l’interprétation de la spatialité d’un objet. La Figure II-4 représente différents pays de l’Union Européenne. Chaque représentation symbolise une vision géométrique différente de cette zone géographique. La géométrie utilisée est surimposée à chaque représentation.

B

Figure II-4 Exemple de représentations géométriques de quatres pays européens. En haut à gauche, la représentation classique de ces pays avec la distance séparant les différentes capitales de ceux-ci. En haut à droite, sur la représentation classique est surimposée une vision topologique des connexions possibles entres les capitales.

Seule la relation de connexion importe dans ce type de représentation. En bas à gauche, la représentation dans un espace temporel du temps de parcours nécessaire afin de rejoindre les différentes capitales. En bas à droite, une représentation spatiale qualitative de l’orientation de chaque capitale par rapport à la ville de Bruxelles.

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i. Géométrie euclidienne – métrique

C’est la géométrie que nous avons tous pour habitude d’utiliser. Celle-ci fait appel aux notions métriques de qualification des objets. Ceux-ci y sont toujours représentés de manière quantitative via une mesure. Chaque pays est dimensionné en fonction d’une unité de mesure.

La position d’un objet particulier est donnée par rapport à son écart à des directions de référence. On parle alors de coordonnées. Cette géométrie, bien que quasi toujours utilisée dans les analyses afin de présenter un résultat, n’est cependant que rarement choisie pour effectuer des raisonnements spatiaux. En effet, elle consomme énormément de ressources et n’est pas facilement modélisable via une série de relations simples telles que pourraient l’être des relations topologiques.

ii. Géométrie topologique

La géométrie topologique ou géométrie de la feuille de caoutchouc a été discutée très longuement dans le domaine des mathématiques (Asher and Vieu 1995; Cohn 1996;

Clementini and Di Felice 1998; Vasardani and Egenhofer 2009). L’idée d’une telle géométrie est de ne se focaliser que sur les propriétés de connexion entre les objets. La position spatiale de ceux-ci n’intervient plus dans la géométrie topologique. Dans ce contexte, seule l’information de contenance des capitales par leurs pays respectifs est retenue (Figure II-5). L’image de la feuille de caoutchouc permet à l’utilisateur de se rendre compte que, quelle que soit la déformation homéomorphique que peut subir le plan, les relations topologiques resteront identiques. Ce type de géométrie peut fournir des informations telles la ville de Commines est à la frontière de deux pays ; le Rhin est également la frontière entre l’Allemagne et la France.

Elle ne rend pas compte de la distance qui sépare Bruxelles de Berlin.

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Paris

Berlin

Bruxelles Amsterdam

Commines

Rhin France

Allemagne

Belgique Pays-Bas

France

Allemagne Belgique

Pays-Bas

Berlin

Rhin Paris

Bruxelles

Amsterdam

Commines

Figure II-5 Représentation de deux situations équivalentes d’un point de vue de la géométrie topologique.

Les relations qu’il est possible d’établir entre les villes et les pays sont identiques dans les deux représentations.

iii. Géométrie projective

La géométrie projective fournit plus d’informations que la géométrie topologique. Elle permet notamment la description de concepts de convexité, concavité, d’alignement (Billen 2002). Avec celle-ci il est possible de détailler la relation qui lie la Croatie à la Bosnie Herzégovine comme présenté à la Figure II-6 (partie de droite). La géométrie peut également être à la base de concepts tels les notions de gauche et de droite. Lorsque l’on raisonne avec trois objets, il est possible de déterminer si un objet est à gauche ou à droite d’un axe. Dans l’exemple de la Figure II-6 partie de gauche, on voit que la ville d’Amsterdam est à gauche de l’alignement de Bruxelles et Berlin.

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Berlin Amsterdam

Bruxelles

Bosnie Herzegovine Croatie

Figure II-6 Représentation en géométrie projective de configurations spatiales de pays et capitales européennes. A gauche, la position projective de la ville d’Amsterdam par rapport à Bruxelles et Berlin. A droite, la représentation de l’inclusion de la Bosnie Herzegovine dans la Croatie. Cette géométrie rend compte des convexités et des concavités des formes géométriques.

3. Raisonnement spatial

Une partie importante du raisonnement spatial est dédiée à l’étude des relations spatiales qualitatives qu’il existe entre deux objets. Ces relations sont utilisées lors de la modélisation des relations existantes entre des objets géographiques mais également lors de l’inférence de nouvelles connaissances notamment via ce qui est appelé des tables de composition. Ces tables fournissent l’information suivante : connaissant la relation qu’il existe entre les éléments A et B et les éléments B et C, quelles peuvent-être les relations possibles entre les éléments A et C :

(

1 2 3

)

, , ( ( , ) ( , )) ( , )

A B C r A B r B C r A C

∀ ∀ ∀ ∧ →

(2.4)

Les relations spatiales peuvent être décrites via plusieurs modèles mathématiques. Elles sont le plus couramment décrites via une approche qualitative. Dans le cadre des relations spatiales qualitatives plusieurs modèles possibles sont à nouveau différenciables. Il s’agit des approches topologiques telles qu’utilisées dans le modèle des 9 intersections (9-i), du CBM et des L-L orientées. Une approche se basant sur une géométrie projective peut également être envisagée. Dans ce cas, les relations ne décrivent plus uniquement les connexions qu’il peut exister entre deux objets mais y ajoutent des concepts projectifs de mathématique tels que les notions d’alignement, de convexité et de concavité. Les notions d’avant, d’arrière, de gauche et droite peuvent également être étudiées par l’analyse de trois objets.

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