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8.2.1 Méthodologie et données à propos de la valeur absolue

La méthodologie suivie, et en particulier l‟étude clinique, m‟a permis de rencontrer différents objets d‟enseignement concernant le numérique. Ainsi j‟ai pu observer directement celui de valeur absolue dans les deux classes de Clotilde et de Mathieu en étant présente pendant les séances d‟enseignement. Je vais décrire et analyser la place et le rôle de cet objet en lien avec les RDN (les reprises du numérique) dans le savoir enseigné. Le curriculum officiel inscrit la notion de valeur absolue dans le cadre numérique, c‟est la distance entre deux nombres, c‟est la raison pour laquelle l‟étude de cet objet est dans la section des dynamiques inter-numérique. J‟ai développé précédemment les attentes relatives au savoir à enseigner pour la valeur absolue (Cf. section 5.6 p. 72). Je rappelle cette précision du document d‟accompagnement : « Aucune étude particulière n‟est demandée. Cette notation sera présentée essentiellement pour exprimer la distance entre deux nombres. »

Les données recueillies dans la réalisation effective des séances chez ces deux professeurs ont été étudiées pour analyser et comparer les choix concernant l‟enseignement de la valeur absolue. Il s‟agit en particulier de la séance observée le 2 décembre 2006 chez Mathieu et de la séance observée et filmée le 22 octobre 2007 chez Clotilde. L‟étude des cahiers des élèves

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(cours et exercices), ainsi que des devoirs (à la maison et en classe), a permis de décrire les organisations mathématiques choisies et de les comparer sur la durée de la séquence. Des entretiens avec les professeurs et avec quelques élèves représentatifs des différents niveaux de la classe ont complété ces données.

Après avoir donné une vision globale de la séquence, j‟étudierai les données dynamiques des séances observées – ce qui m‟amènera à m‟intéresser à des types de tâches algébriques – j‟explorerai ensuite les données statiques pour compléter l‟étude de l‟objet valeur absolue.

8.2.2 Les connaissances institutionnalisées dans le savoir enseigné

Le tableau suivant détaille la trame de la séquence relative à la valeur absolue à partir des cahiers de cours des deux professeurs.

Trame du cours de Mathieu Trame du cours de Clotilde

1°) Définition

Soit x un nombre réel et M le point d’abscisse x sur la droite des réels, la valeur absolue de x notée |x| est la distance de O à M.

Conséquence :

- la valeur absolue de x est toujours positive - si 𝑥 ≥ 0 alors 𝑥 = 𝑥 - si 𝑥 ≤ 0 alors 𝑥 = −𝑥 2°) Application : Résoudre l‟équation |𝑥| = 𝑎 Résoudre l‟équation |𝑥| ≤ 2 Résoudre l‟équation |𝑥| ≥ 3 3°) Définition :

Soit A le point d‟abscisse a et B le point d‟abscisse b, la distance AB est égale à |b-a|. Résoudre |𝑥 − 5| = 7 |1 − 𝑥| ≤ 3 |𝑥 + 2| ≥ 3

1°) Distance de deux nombres et définition de

𝑝 − 𝑞

La distance entre deux nombres réels p et q est celui des deux nombres p-q et q-p qui est positif ou nul. Cette distance se note |p-q| et se lit « valeur absolue de p moins q ».

Conséquence : la valeur absolue de x, notée |x|, est la distance de x à zéro.

2°) Propriétés Pour tout x réel 𝑥 ≥ 0

si 𝑥 ≥ 0alors 𝑥 = 𝑥 et si𝑥 ≤ 0 alors 𝑥 = −𝑥 3°) Résolution d‟équations du type : 𝑥 − 𝑎 = 𝑏

Exemples traités : |x-3|=2 |x+5|=4 et 5 autres spécimens

4°) Résolution d‟inéquations du type 𝑥 − 𝑎 > 𝑏 Exemples : |x|>3 |x-5|≥2 |5-3x|≥7

5°) Résolution d‟inéquations du type x a b Exemples : |x|<4 |x-3|≤7 |5-3x|≤2

Tableau 28: trame du cours de Clotilde et de Mathieu sur la valeur absolue

Un premier constat apparaît à la lecture de ce tableau : les deux professeurs prennent la valeur absolue comme un prétexte qui leur sert pour développer des types de tâches dans le cadre algébrique. La valeur absolue, nouvel objet du numérique, est pour eux une clé d‟entrée vers l‟algèbre avec en particulier la résolution d‟équations et d‟inéquations. C‟est en quelque sorte

une dynamique numérico-algébrique qui est mise en œuvre par les professeurs comme si la raison d‟être de la valeur absolue était de faire vivre ce travail algébrique. Je vais donc

Q P

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analyser l‟enseignement de ces professeurs en suivant le fil de l‟objet valeur absolue qui m‟amènera à m‟intéresser momentanément à l‟algèbre.

À l‟échelle de la séquence, de nombreuses similitudes existent dans les progressions choisies, toutes les deux ambitieuses par rapport aux prescriptions officielles à cause de ce travail très important réalisé dans le cadre algébrique. Cependant, à l‟échelle de la séance, si des choix sont communs sur les contenus abordés, les conceptions sont différentes concernant les objets traités. Les définitions de la valeur absolue données par les deux professeurs sont différentes. Pour Mathieu c‟est l‟articulation entre les cadres géométrique et numérique qui permet la définition de la valeur absolue d‟un réel, ce réel étant considéré comme l‟abscisse d‟un point. Clotilde ne donne pas directement la valeur absolue d‟un réel, le point de départ est la distance de deux réels, le cadre est alors numérique. Cependant, sans que cela ne soit explicitement dit, les deux réels sont les abscisses de deux points de la droite réelle. Il faut implicitement comprendre que les réels p et q sont respectivement les abscisses des points P et Q représentés sur la droite ∆. La définition donnée s‟appuie donc également pour Clotilde sur une dynamique numérico-géométrique.

Des praxéologies différentes ont été choisies pour les mêmes types de tâches privilégiés par les professeurs et pourtant pratiquement hors programme. Les tâches sont du type « résoudre une équation du style |ax+b|=c » ou du type « résoudre une inéquation du style1 |ax+b|<c », les nombres a et b étant des réels et c étant un réel positif. Mathieu privilégie une technique géométrique utilisant la droite graduée quand Clotilde privilégie une technique algébrique

fondée sur le signe du binôme ax+b. Ces praxéologies mathématiques seront explicitées dans l‟analyse a priori des séances. Les interviews avec les professeurs et l‟analyse approfondie des éléments technologiques développés en classe permettront de découvrir les logiques de ces professeurs ainsi que les raisons profondes qui pilotent leurs choix. Des entretiens avec des élèves donneront accès aux conceptions en cours de développement pour l‟objet valeur absolue.

L‟objet valeur absolue est véritablement nouveau en seconde mais une première rencontre a pourtant nécessairement eu lieu en classe de cinquième pour définir la somme de deux nombres relatifs ainsi que la notion d‟opposé. C‟est sous l‟appellation la plus courante de distance à zéro en lien avec la droite graduée que ce concept en acte de valeur absolue a été travaillé implicitement. Cette référence à la distance à zéro semble présente pour Mathieu qui commence le cours par le lien entre |𝑥| et la distance OM. Dans la classe de Clotilde c‟est également la distance de deux points d‟une droite graduée qui semble jouer un rôle important dans la construction de la séquence, même si ce lien est juste évoqué en illustration et n‟est pas justifié mathématiquement. Des notions déjà travaillées en collège sont par conséquent

1

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présentes dans les choix de Mathieu et de Clotilde, mais il faudra analyser plus précisément la réalisation effective de cet enseignement pour savoir comment ont été réalisées ces reprises du collège.

8.2.3 Les types de tâches privilégiés dans la séquence valeur absolue

Avant d‟étudier l‟objet valeur absolue respectivement chez Mathieu puis chez Clotilde, je donne dans le Tableau 29 un aperçu des types de tâches travaillés par les deux professeurs en comptabilisant tous les spécimens que j‟ai trouvés dans les cahiers de cours et d‟exercices ainsi que dans les devoirs (à la maison et en classe).

Types de tâches

Nombre de spécimens pour chaque type de tâches

(à gauche pour Mathieu, à droite pour Clotilde)

Cours Ex. Dev. Tot.

Tn1 : Calculer la valeur absolue d‟un nombre |𝑎|, a réel donné sous une forme

canonique

Avec a positif : 1/ 2

Avec a négatif : 1/ 2 0 / 0 0/0 2/4

Tn2 : Calculer |𝑎 − 𝑏|, a et b réels donnés 0 / 6 0 / 0 0/1 0/7

Tn3 : Exprimer sans valeur absolue une expression numérique comportant

plusieurs valeurs absolues. Ex : 2 2 3 2 1

0 / 4 6 / 5 2/4 8/13

Tn4 : Conversion (ou association) entre un intervalle, une inégalité simple ou

double, un ensemble de points de la droite réelle, une expression avec valeur

absolue Ex :x  2; 2 x 2 0 / 0 7 / 14 4/4 11/18 Ta1: résoudre l‟équation |ax-b|=c 𝑎; 𝑏 ∈ ℝ2 (𝑐 ∈ ℝ∗) a=1 et b=0 2 / 0 2 / 0 0/0 23/19 a1 et b=0 0 / 0 1 / 0 0/0 a=1 et b>0 1 / 3 6 / 3 0/0 a1 et b0 0 / 1 6 / 6 3/0 a=1 et b<0 0 / 3 0 / 1 2/2 Ta2 : résoudre l‟inéquation 𝑎𝑥 + 𝑏 ∘ 𝑐 𝑎; 𝑏 ∈ ℝ2 (𝑐 ∈ ℝ∗)

(∘ remplace l‟une des inégalités)

1er cas : a=1 et b=0 2 / 2 2 / 0 0/0

24/22 2e cas : a1 et b=0 0 / 0 1 / 0 0/0

3e cas : a=1 et b0 1 / 2 3 / 6 2/0 4e cas : a1 et b0 1 / 1 9 / 9 3/2

Ta3: Résoudre un système de deux

inéquations du type 𝑎𝑥 + 𝑏 ∘ 𝑐 0 / 0 6 / 5 2/1 8/6

Tableau 29 : organisations mathématiques chez Mathieu et chez Clotilde

Dans le tableau précédent je n‟ai comptabilisé que les types de tâches trouvés dans les traces du travail réalisé pendant l‟étude du thème de la valeur absolue. Je n‟ai pas tenu compte de

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reprises éventuelles de ce thème, comme cela s‟est produit par exemple dans un devoir commun qui a eu lieu le 29 janvier 2007 dans la classe de Mathieu. L‟inventaire présenté montre encore des choix similaires pour les deux professeurs avec un grand nombre d‟activités qui sont dans le cadre algébrique, mais ce détournement du numérique vers l‟algébrique est plus marqué chez Mathieu dont la préoccupation essentielle est d‟entrainer les élèves à réussir la résolution d‟équations et d‟inéquations comportant des valeurs absolues. J‟ai compté globalement les tâches respectivement numériques et algébriques, les effectifs sont présentés dans le tableau suivant.

Mathieu Clotilde

tâches dans le cadre numérique (repéré par Tn)

19 (soit 26% des tâches travaillées chez Mathieu)

38 (soit 45% des tâches travaillées chez Clotilde)

tâches dans le cadre algébrique

(repéré par Ta) 55 (74% des tâches) 47 (55% des tâches)

Je vais nuancer le classement du type de tâches Tn4 du côté du numérique. En fait ce type de tâches appartient à cette zone frontalière entre numérique et algébrique qui a été définie précédemment et qui est appelée le NAA (Cf. p. 7). Je reprends l‟exemple donné dans le tableau :

L‟intervalle [−2; 2] étant donné, il faut le convertir avec des valeurs absolues, les réponses suivantes sont possibles :

c‟est l‟ensemble de tous les réels dont la valeur absolue est inférieure à 2 ;

(𝑥 ∈ ℝ) et 𝑥 ≤ 2

La première réponse est encore dans le domaine numérique et s‟exprime sous la forme de tous les nombres caractérisés par une contrainte, être inférieurs à 2. En revanche la deuxième réponse suppose de partager un implicite au sujet du nombre 𝑥. Il apparaît unique mais il représente en fait une infinité de nombres, cette conversion du langage naturel vers le langage symbolique s‟accompagne d‟un saut conceptuel du domaine numérique vers le domaine algébrique. Cet exemple illustre la rupture entre le numérique et l‟algébrique.

Les objets convoqués dans le type de tâches Tn4 sont donc des objets du numérique, mais les réponses attendues, comme dans l‟exercice 67 de la page 48 qui sera analysé plus loin (Cf. p. 163), nécessitent la mise en œuvre d‟une pensée algébrique. En conclusion Tn4 est typiquement un type de tâches du NAA.

Je précise également que tous ces types de tâches sont travaillés en tant qu‟objets et jamais en tant qu‟outils de résolution de problèmes. Les deux professeurs ont choisi un style d‟enseignement qui est un entrainement systématique pour travailler certaines techniques des domaines numérique et algébrique, en cela ils ne suivent pas le curriculum officiel.

Dans ce tableau le type de tâches Tn1 est marginal et les professeurs ne contrôlent pas cette connaissance lors des devoirs, elle est pourtant élémentaire et elle réalise le lien avec l‟ancien du collège. Je montrerai plus loin que des élèves de ces classes, pourtant reconnus comme de

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bons élèves, ne savent pas répondre à la question « quelle est la valeur absolue du nombre – 5 ? ».

Pour les types de tâches numériques, le choix des expressions numériques (notamment pour Tn3) se complexifie très vite en particulier grâce aux nombres irrationnels qui sont utilisés à cette occasion pour jouer un rôle de service auprèsde la valeur absolue. Le même phénomène de complexité croissante est observé pour les types de tâches algébriques. Par exemple les résolutions d‟inéquations sont très nombreuses dans les deux classes, même lors des contrôles. Pour le quatrième cas répertorié de Ta2 (Ta2 : résoudre l‟inéquation 𝑎𝑥 + 𝑏 ∘ 𝑐), le plus complexe, c‟est un total de 13 spécimens chez Mathieu (dont 3 en contrôle en classe) et 12 chez Clotilde (dont 2 en contrôle en classe).

L‟inventaire quantitatif qui vient d‟être présenté sera complété par une analyse plus approfondie de certaines tâches dans la suite de cet écrit.

8.2.4 Des questions particulières dans la séquence valeur absolue

Je n‟ai pas intégré dans le Tableau 29 des activités trouvées dans les cahiers d‟exercices ni certaines questions posées dans les devoirs et qui sont atypiques par rapport aux types de tâches repérés chez Mathieu et chez Clotilde. Je fais l‟inventaire de ces questions particulières ci-dessous.

8.2.4.1 Un genre de tâches qui se dégage

Chez Mathieu dans le devoir en classe du 2 décembre 2006 (Cf. annexe 11.11) se trouve la question suivante :

Déterminer une inéquation, comportant une valeur absolue, dont l‟ensemble des solutions est : a) ]−∞; −7[ ⋃]5; +[ ;

b) [−12; 5] ; c) ]6,5; 18,5[ .

J‟analyserai plus loin cette question grâce aux devoirs de plusieurs élèves. Dans le devoir donné par Clotilde du 16 novembre 2007 se trouve une question proche de celle posée par Mathieu :

Déterminer une équation ou une inéquation ayant pour ensemble de solutions : a. L‟ensemble des solutions est −1 et 5.

b. 𝑆 = 3 − 2 ; 3 + 2

L‟énoncé dans le devoir de Clotilde est plus ouvert que celui de Mathieu. J‟analyserai également les productions de quatre élèves de Clotilde pour cette question (Cf. section 8.5.1). Ces questions appartiennent à un genre de tâches qui pourrait se dire ainsi : « trouver soit une équation soit une inéquation connaissant l‟ensemble de ses solutions », je note Ta4 ce type de tâches.

Ce genre de tâches n‟a pas été travaillé dans la séquence bien qu‟il puisse se rapprocher du type de tâches Tn4 (Conversion (ou association) entre un intervalle, une inégalité simple ou double, un ensemble de points de la droite réelle, une expression avec valeur absolue (Cf. Tableau 29 p. 140). J‟ai explicité la raison pour laquelle j‟avais qualifié Tn4 comme étant un

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type de tâches numérique, de même Ta4 est qualifié comme étant un type de tâches algébrique puisque qu‟il faut rechercher un objet de l‟algèbre : une équation ou une inéquation. Cependant Tn4 comme Ta4 contribuent à explorer la zone frontalière entre numérique et algébrique : le NAA.

8.2.4.2 Différence entre Mathieu et Clotilde relativement à la nature des tâches

Chez Clotilde j‟ai trouvé des questions relatives à la valeur absolue, ou encore des situations servant de contexte au travail de la valeur absolue, qui ne figurent pas du tout dans la séquence de Mathieu sur la valeur absolue.

Une question déroutante

Je présente en premier lieu dans le devoir en classe du 16 novembre 2007 (Cf. annexe 11.12) la question suivante :

Exercice 3 :

1°) c) Résoudre l‟inéquation dans ℝ∶ −𝑥 − 𝜋 ≤-3

Cette question est relative au type de tâches Ta2 (résoudre 𝑎𝑥 + 𝑏 ≤ 𝑐 𝑎𝑣𝑒𝑐 𝑎; 𝑏 ∈ ℝ2 et (𝑐 ∈ ℝ∗)) familier pour les élèves lorsque le réel c est un nombre positif. Le cas où c est négatif n‟a pas encore été rencontré et il est intéressant même s‟il est certainement déroutant. J‟analyserai des réponses d‟élèves à cette question en rupture avec le contrat didactique habituel concernant ce type de tâches (Cf. section 8.5.1.2 p. 239).

Un contexte favorable au travail de la valeur absolue

Clotilde se différencie clairement de Mathieu relativement aux choix des activités proposées aux élèves sur le thème de la valeur absolue. Je présente ces choix ci-dessous :

Des questions posées dans le cadre des mesures de grandeurs géométriques et portant sur des recherches d‟encadrement de périmètre, aire et volume. Ce sont les exercices numéro 35 page 45 et numéro 66 page 47 (Cf. annexe 11.22) ;

Deux exercices en lien avec la notion d‟imprécision des mesures, ce sont les numéros 63 et 64 de la page 47 du manuel (Cf. Figure 27 et Figure 28).

Figure 27 : n° 63 p. 47

Je note que l‟énoncé de l‟exercice 63 introduit une rupture dans le contrat institutionnel de calcul (au sens du filtre du numérique, Cf. paragraphe 2.1.3.1 p. 12). « Un carré a pour côté 12,4 cm » constitue une donnée du problème qui a une valeur épistémique de certitude (Duval & Egret, 1993). Cette donnée est alors incohérente avec la suite du texte qui fait comprendre

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que la valeur exacte du côté est un nombre 𝑥 différent de 12,4. Il aurait mieux valu dire : « On a mesuré le côté d‟un carré avec une règle et on a trouvé 12,4 cm ».

Figure 28 : exercice n° 64 p. 47

Dans le devoir du 16 novembre 2007, Clotilde a calqué un exercice sur le modèle du numéro 64 de la page 47. Cela montre l‟importance accordée par Clotilde à ce type de problème. Cependant Clotilde a supprimé dans le devoir la dernière question qui donne pourtant du sens à ce type de recherche et qui est importante notamment dans la discipline de la physique. Voici l‟exercice posé dans le devoir :

Exercice 4 :

On connaît l‟imprécision de la mesure en cm, des côtés 𝑥 et 𝑦 d‟un parallélogramme :

𝑥 − 3,2 ≤ 0,2 et 𝑦 − 25,3 ≤ 0,1

a) Déterminer un encadrement de x, de y et du périmètre P de ce parallélogramme b) Etablir une inégalité sous la forme 𝑃 − 𝑐 ≤ 𝑟

Une raison d’être pour la valeur absolue

Les problèmes d‟approximation des mesures et de recherche de marges d‟erreurs notamment dans des situations de mesures de grandeurs, constituent un contexte qui justifie l‟utilité de la notion de valeur absolue. Il est probable que ce soit ce contexte qui soit implicitement désigné dans le curriculum officiel quand il est dit que la valeur absolue est surtout utilisée pour parler de la distance de deux nombres. Les situations précédentes proposées par Clotilde sont donc tout à fait pertinentes pour motiver le travail de la valeur absolue. Cependant il n‟est pas de la responsabilité de l‟élève de modéliser grâce à la valeur absolue des données comme : « la largeur d‟un rectangle a pour mesure 4,1 m à 0,1 m près » ou bien « on a mesuré le côté d‟un carré et on a trouvé 12,4 cm. La règle utilisée ne permet une précision que de 0,1 cm ». Il n‟est pas non plus de sa responsabilité de dégager le sens des résultats obtenus en les exprimant en langage naturel, sauf à la fin de l‟exercice 64. Les situations travaillées dans ces exercices du manuel apparaissent alors comme des décors qui ne nécessitent pas chez les élèves une véritable prise de conscience de l‟intérêt de cet étrange nouvel objet du numérique.

8.2.5 À la recherche de situations pour servir la cause de la valeur absolue

En décrivant les activités des séquences de Mathieu et de Clotilde sur le thème de la valeur absolue je fais plusieurs constats. En premier lieu la valeur absolue est travaillée

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essentiellement en tant qu‟objet et non pas en tant qu‟outil de résolution de problème. Les raisons d‟être de l‟étude de ce thème sont le plus souvent réduites au fait de suivre les contenus du programme officiel, avec une dérive vers des types de tâches algébriques en faisant de la valeur absolue un prétexte pour travailler les techniques du calcul algébrique. Pourtant une des raisons d‟être conforme au curriculum officiel serait le travail sur les valeurs approchées des nombres et la détermination de leur précision notamment dans le cadre des grandeurs. Les activités originales par rapport à Mathieu qui ont été données par Clotilde sont des exemples de contextes pertinents pour faire travailler la valeur absolue. Il faudrait cependant construire à partir de ces idées de véritables situations didactiques au sens fort du terme.

En résumé, dans cette partie consacrée au thème de la valeur absolue, je vais m‟intéresser à des types de tâches algébriques qui ne font pas partie du domaine numérique, pour décrire et analyser comment ces professeurs se servent d‟un objet nouveau du numérique pour investir le champ de l‟algèbre. Je cherche à analyser ce geste de détournement du numérique vers l‟algébrique.