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Relation entre les modes et le facteur de qualité de faisceau

faisceau

Pour compléter ce chapitre, il est primordial de discuter de la relation entre le contenu modal se propageant à l’intérieur d’une fibre optique et le facteur de qualité de faisceau correspon- dant. Dans un premier temps, la relation entre le facteur de qualité de faisceau et les modes individuels guidés par une fibre optique sera présentée. Par la suite, on démontrera comment calculer le facteur de qualité de faisceau lorsqu’il y a superposition du champ électrique des différents modes se propageant à l’intérieur d’un guide d’onde.

2.7.1 Facteur de qualité de faisceau des modes individuels

Tout d’abord, on peut se rappeler les notions présentées au chapitre1concernant le lien entre les fréquences spatiales constituant un faisceau et la divergence de celui-ci. En effet, il a été démontré que plus un faisceau est constitué de hautes fréquences spatiales, plus les moments angulaires de second ordre hν2

xi et hνy2i prennent une valeur élevé. À l’aide de ces moments

de second ordre, on peut déterminer les demi-angles de divergence Θx,y d’un faisceau dans les

directions x et y en utilisant les équations suivantes :

Θx = 2λphνx2i Θy = 2λ

q hν2

yi . (2.39)

En observant les relations données ci-dessus, on comprend que plus les fréquences spatiales nécessaires pour décrire un mode d’une fibre optique sont élevées, plus la divergence de ce mode est prononcée. On se rappelle que les fréquences spatiales sont reliées, par une transformée de Fourier, au profil du champ électrique dans le plan transverse. De ce fait, on peut déduire que plus le profil du champ électrique d’un mode est complexe (changements fréquents du module et de la phase), plus les fréquences spatiales nécessaires pour décrire ce mode sont élevées. La divergence d’un mode augmente donc en fonction de sa complexité, ce qui influence directement le facteur de qualité de faisceau associé à celui-ci.

Tel que démontré à la section 2.3, la complexité du profil du champ électrique d’un mode augmente en fonction des indices ν et m pour les modes TE0m/TM0met HEνm/EHνm, ou bien

des indices l et m dans le cas des modes LPlm. Le profil le moins complexe est d’ailleurs obtenu

pour le mode fondamental HE11 (ou LP01). Ce mode est donc constitué d’une distribution de

fréquences spatiales plus étroite que les modes d’ordre supérieur, ce qui fait que sa divergence est moins prononcée et que son facteur de qualité de faisceau est meilleur que celui des autres modes. La figure 2.7 permet d’illustrer l’augmentation du facteur de qualité de faisceau en fonction des indices modaux pour les 15 premiers modes supportés par une fibre optique multimode. HE11 TE01HE21 EH11HE31 HE12 EH21HE41 TE02HE22 EH31HE51 EH12HE32 HE31

Figure 2.7 – Évolution du facteur de qualité de faisceau M2ef f pour les 15 premiers modes

calculés dans une fibre optique multimode. Les modes sont classés par ordre décroissant de leurs indices effectifs. La fibre multimode utilisée pour les calculs est une fibre (95-200-0.22).

Pour obtenir les valeurs présentées à la figure2.7, l’équation1.38a été utilisée. Il est intéressant de remarquer que le facteur de qualité de faisceau du mode fondamental est situé très près de l’unité. Cela est dû au fait que le profil du champ électrique de ce mode s’apparente fortement au profil d’un faisceau gaussien. En effet, on se rappelle que le cas où M2

ef f = 1 constitue la

limite inférieure que peut prendre le facteur de qualité de faisceau, et est associée à un profil de champ électrique gaussien. Pour continuer, la figure2.8illustre le même phénomène que la figure précédente, mais cette fois-ci à plus grande échelle en considérant les 600 premiers modes supportés par une fibre multimode. Il est intéressant de noter que la pente correspondant à l’augmentation initiale du facteur de qualité de faisceau des modes tend à diminuer à mesure que les indices modaux augmentent.

Figure 2.8 – Évolution du facteur de qualité de faisceau M2ef f pour les 600 premiers modes

calculés dans une fibre optique multimode. Les modes sont classés par ordre décroissant de leurs indices effectifs. La fibre multimode utilisée pour les calculs est une fibre (95-200-0.22).

2.7.2 Facteur de qualité de faisceau associé à la superposition de plusieurs modes

Jusqu’à maintenant, il a été question du facteur de qualité de faisceau associé à un seul mode supporté par une fibre optique. Cependant, il est peu fréquent que la puissance se propageant à l’intérieur d’une fibre optique soit concentrée dans un seul mode. Celle-ci est plutôt distribuée dans une combinaison de différents modes selon des proportions quelconques. On peut alors se demander comment calculer le facteur de qualité de faisceau associé à la superposition des champs électriques de plusieurs modes. Cela peut être réalisé de deux manières différentes, selon les conditions de cohérence entre les modes qui se propagent à l’intérieur de la fibre optique.

Pour expliquer cela, il est nécessaire de considérer que le signal injecté dans une fibre optique est caractérisé par une durée de cohérence ∆tcoh approximée par l’expression 2.40, où ∆λ

représente la largeur spectrale de la source centrée à la longueur d’onde λ et c représente la vitesse de la lumière (3 × 108 m/s).

∆tcoh≈

λ2

c∆λ (2.40)

Étant donné que les modes excités à l’entrée d’une fibre optique ont des constantes de propa- gation différentes, ceux-ci ne voyagent pas à la même vitesse à l’intérieur du guide d’onde. Le 44

temps nécessaire à chaque mode pour parcourir une distance z le long de la fibre est nommé délai de groupe. Il est possible de démontrer que lorsque la différence maximale du délai de groupe entre les différents modes d’une fibre optique est beaucoup plus faible que la durée de cohérence de la source, tous les modes sont corrélés entre eux et il existe une relation unique et bien définie entre leurs phases [65]. On dira alors que les modes sont cohérents entre eux. Dans un tel cas, on observe de l’interférence entre les champs électriques associés aux différents modes. De ce fait, le profil d’intensité du signal et le facteur de qualité de faisceau varient en fonction de la position dans la fibre et des perturbations subies par celle-ci. Cela est d’ailleurs démontré dans l’article de Yoda et al.[66], où on peut observer le facteur de qualité de faisceau résultant lorsque les modes LP01 et LP11interfèrent à l’intérieur d’une fibre optique.

Au contraire, lorsque la différence de délai de groupe minimale entre les modes d’une fibre op- tique est beaucoup plus élevée que la durée de cohérence de la source, les modes se propageant à l’intérieur de la fibre optique ne sont plus corrélés entre eux et il n’y a plus de relation de phase bien définie entre ceux-ci [67]. On dit alors que les modes sont incohérents entre eux. Cela implique que le profil d’intensité du signal ne varie plus en fonction de la position dans la fibre et des perturbations subies par celle-ci. Ce profil d’intensité est alors obtenu en addi- tionnant le profil des différents modes, pondéré par la puissance contenue dans chacun de ces modes [68]. Dans un tel cas, on mesure un facteur de qualité de faisceau fixe à la sortie de la fibre optique. Ce paramètre, qui sera nommé le facteur de qualité de faisceau effectif pondéré M2

ef f, peut être obtenu en calculant la moyenne pondérée du facteur de qualité de faisceau des

différents modes se propageant à l’intérieur de la fibre, comme le montre l’équation suivante [69,70] : M2 ef f = P mηm Mef f2  m ηtotale (2.41)

Dans l’équation 2.41, le coefficient ηm représente la fraction de la puissance contenue dans le

mième mode de la fibre optique, M2 ef f



m représente le facteur de qualité de faisceau associé

à ce mode et ηtotale dénote la fraction de la puissance transportée par l’ensemble des modes

guidés, tel que défini dans la section 2.5.

Dans les simulations numériques qui seront réalisées dans le chapitre 4, il sera nécessaire de déterminer le facteur de qualité de faisceau à la sortie de différentes fibres multimodes ayant des fréquences normalisées V qui varient entre 15 et 60. Le nombre de modes supportés par ces fibres sera donc très élevé (voir équation 2.23), ce qui fait que la différence de délai de groupe entre les différents modes pourra varier de plusieurs ordres de grandeur en fonction de la paire de modes sélectionnée et des propriétés de la fibre, comme l’illustre la figure 2.9. En prenant en compte que la largeur spectrale des lasers monomodes transverses est de 6 nm lorsqu’ils opèrent à pleine puissance (durée de cohérence de ∼ 1.3 ps) et que la longueur de la fibre multimode est généralement plus élevée que 10 mètres, on peut affirmer que la condition

de cohérence entre les modes est respectée pour certaines paires de modes et ne l’est pas pour d’autres. Afin de calculer le facteur de qualité de faisceau à la sortie des fibres multimodes utilisées, la formule2.41sera tout de même utilisée, mais en gardant à l’esprit que le résultat obtenu peut être sujet à de légères variations étant donné la présence d’interférence entre le champ électrique des modes qui demeurent cohérents entre eux.

Figure 2.9 – Délai de groupe des 30 premiers modes d’une fibre multimode en fonction du diamètre du cœur de celle-ci pour une distance de propagation de 10 mètres. L’ouverture

numérique de la fibre est maintenue constante à 0.22.

2.8

Conclusion

Ce chapitre a eu comme objectif d’introduire les différents concepts qu’il est nécessaire de maîtriser par rapport aux fibres optiques afin de bien comprendre le contenu qui sera exposé dans la suite de ce mémoire.

Tout d’abord, après avoir présenté les principales caractéristiques des fibres optiques à saut d’indice, nous avons abordé l’équation caractéristique des modes. Cela a permis de définir les paramètres modaux du cœur et de la gaine ainsi que la constante de propagation β. On a ensuite vu que les solutions de l’équation caractéristique mènent à différentes catégories de modes. On peut ainsi distinguer les modes transverses électriques et magnétiques TE0m et

TM0m, les modes hybrides HEνm et EHνm ainsi que les modes polarisés linéairement LPlm .

La coupure et le confinement des modes ont ensuite été abordés. On a d’abord vu que plus la fréquence normalisée V d’une fibre optique est élevée, plus cette fibre peut supporter de modes. Au contraire, lorsque la fréquence normalisée prend une valeur plus faible que 2.405, la fibre optique devient monomode et ne peut supporter que le mode fondamental HE11. On a aussi vu

que plus un mode est situé près de sa fréquence de coupure, plus le facteur de confinement de ce mode est faible, ce qui le rend sensible aux perturbations. La notion d’indice effectif nef f

d’un mode a ensuite été introduite. Ce paramètre sera beaucoup utilisé dans les prochains chapitres afin d’illustrer comment les différents modes sont éjectés du cœur d’un composant effilé.

On a ensuite abordé la notion de l’excitation des modes d’un guide d’onde. On a vu que, par l’utilisation de l’intégrale de recouvrement, il est possible de calculer le contenu modal excité dans une fibre optique en fonction d’un champ électromagnétique arbitraire incident sur cette fibre. On a alors pu comprendre que pour exciter un mode quelconque dans un guide d’onde, il est nécessaire de faire coïncider le champ injecté avec le champ associé au mode en question. Le concept de l’excitation des modes sera beaucoup utilisé dans les prochains chapitres. En effet, afin d’analyser une jonction entre un composant effilé et une fibre multimode, on utilisera l’intégrale de recouvrement afin de déterminer la puissance injectée dans les différents modes de la fibre multimode.

La fibre optique effilée a ensuite été introduite. Tel que présenté, lors de la conception d’un tel composant, il est nécessaire de considérer la notion d’adiabaticité. Cela implique que l’angle de rétrécissement de la fibre effilée, qui est directement relié à sa longueur, doit être assez faible afin que l’échange de puissance entre les modes soit négligeable lors de la propagation. Lorsqu’il sera question de l’optimisation d’un composant effilé dans les prochains chapitres, la notion d’adiabaticité sera largement utilisée.

Enfin, la relation entre les modes et la qualité de faisceau a été abordée. On a vu que plus le profil du champ électrique d’un mode est complexe, plus le facteur de qualité de faisceau

qui lui est associé est élevé. Afin d’optimiser la qualité de faisceau, il est donc nécessaire que la puissance demeure contenue dans les modes inférieurs d’une fibre optique. On a ensuite vu comment il est possible de calculer le facteur de qualité de faisceau associé à la superposition de plusieurs modes dans une fibre multimode. Plus particulièrement, deux cas peuvent être distingués. Le premier est lorsque les modes à la sortie de la fibre multimode sont cohérents entre eux. Dans ce cas, il est nécessaire de considérer le phénomène d’interférence entre les modes, ce qui implique que le facteur de qualité de faisceau oscille en fonction des perturbations subies par la fibre. Le second cas est lorsque les modes sont incohérents entre eux à la sortie de la fibre multimode. Dans cette situation, la qualité de faisceau est calculée en additionnant le facteur de qualité de faisceau associé aux différents modes, que l’on pondère par la fraction de la puissance transportée par chacun de ces modes. Étant donné que ce mémoire traite de la conception de combinateurs de signal pour des applications de haute puissance, la largeur spectrale élevée des lasers à fibre permet de considérer que les modes se superposent de manière incohérente en sortie d’une fibre multimode de plusieurs mètres. De ce fait, afin de calculer le facteur de qualité de faisceau en sortie d’une telle fibre, l’équation 2.41 sera utilisée tout au long de ces travaux.

Chapitre 3

La fibre optique effilée en tant

qu’adaptateur modal

Dans le domaine des fibres optiques, il arrive fréquemment qu’il soit nécessaire d’effectuer un transfert de signal entre deux fibres similaires ou distinctes. Pour ce faire, il est possible d’employer plusieurs techniques, telles que l’utilisation de connecteurs, le couplage dans l’es- pace libre ou encore la soudure des fibres optiques. Plus particulièrement, la soudure est une méthode permettant de joindre deux fibres en les chauffant près de leur point de fusion, ce qui permet de créer un lien durable et robuste entre les deux guides d’onde. Du point de vue de l’optique, la soudure constitue une méthode à privilégier lorsqu’il est nécessaire de mini- miser les pertes de signal. Lorsque le signal qui se propage initialement dans une première fibre optique atteint la soudure, celui-ci peut être radié, réfléchi ou bien transmis dans une combinaison de modes guidés par la fibre qui reçoit le signal. La perte de signal à la soudure est généralement définie comme étant la fraction du signal qui est radiée et réfléchie [71]. Lorsqu’une soudure entre deux fibres optiques différentes est réalisée, il est parfois souhaitable que la distribution de puissance dans chacun des modes demeure identique de part et d’autre de la soudure. Par exemple, le fait de souder une fibre monomode standard (8-125-0.10) à une fibre légèrement multimode (15-125-0.10) fait que le mode fondamental, initialement guidé par la fibre monomode, excite une combinaison de différents modes à l’intérieur de la fibre légèrement multimode. L’excitation de ces modes est due à un faible facteur de recouvrement entre le mode fondamental des fibres de part et d’autre de la soudure, comme il a été expliqué à la section

2.5. La fraction de la puissance distribuée dans les modes supérieurs de la fibre légèrement multimode est alors responsable d’une dégradation du facteur de qualité de faisceau, comme il a été présenté à la section 2.7. Si l’application visée nécessite un faisceau limité par la diffraction, il est alors souhaitable que la distribution de puissance dans chacun des modes demeure identique de part et d’autre de la soudure, ce qui permettrait d’exciter le mode fondamental de la fibre légèrement multimode.

Les fibres optiques effilées sont des composants régulièrement utilisés afin de modifier le profil des modes lors de la soudure de deux fibres dissimilaires. En effet, en réduisant judicieusement les dimensions des fibres avant d’effectuer une soudure, il est généralement possible de trouver des conditions pour lesquelles le facteur de recouvrement entre les différents modes est élevé, ce qui permet de conserver la puissance contenue dans chacun de ces modes suite à la soudure [72, 63]. Le composant basé sur l’utilisation de fibres effilées afin de maximiser le facteur de recouvrement entre les modes de deux fibres optiques est nommé adaptateur modal.

Ce chapitre porte sur l’étude de l’adaptation modale à l’aide de fibres optiques effilées. En premier lieu, la section3.1présentera les principales particularités concernant l’évolution des modes dans de tels composants. Par la suite, la section 3.2 sera consacrée à la conception d’adaptateurs modaux. Dans cette section, les éléments clés devant être considérés lors de la conception de ce type de composant seront exposés à travers un exemple où un adaptateur modal doit être utilisé afin de répondre aux besoins d’une application spécifique. Il sera dé- montré que pour concevoir cet adaptateur modal, il est essentiel de passer par deux principales étapes. Ces étapes consistent à déterminer le facteur de rétrécissement et la longueur des fibres optiques effilées qui seront utilisées. Les sous-sections3.2.1 et 3.2.2 seront dédiées à chacune de ces étapes. Il est important de noter que dans ce texte, le facteur de rétrécissement est défini comme étant le rapport entre le diamètre initial et le diamètre final du cœur d’une fibre optique effilée.

Bien que le sujet principal de ce mémoire porte sur la conception d’un combinateur de si- gnal induisant une dégradation minimale de qualité de faisceau, il est grandement pertinent d’analyser préalablement le concept d’adaptation modale à l’aide de fibres optiques effilées. Les conclusions qui seront tirées de cette analyse permettront de bien cerner les paramètres à considérer lors de la conception d’un combinateur de signal.

Avant de débuter, précisons que les figures qui sont utilisées pour supporter les propos présentés dans ce chapitre ont été produites à l’aide du logiciel de simulation Fimmwave-Fimmprop [73]. Ce logiciel permet la résolution rigoureuse des équations de Maxwell et n’est pas basé sur l’approximation paraxiale, contrairement à la méthode BPM. Il est ainsi possible de simuler des structures caractérisées par un grand contraste d’indice de réfraction, telle qu’une fibre optique formée d’un cœur, d’une gaine et étant entourée par de l’air. Comme nous le verrons, il sera nécessaire d’analyser ce type de structure dans les prochaines sections. Notons aussi que les méthodes de simulation utilisées sont les mêmes que celles qui seront utilisées au chapitre

4. Le lecteur peut donc se référer à la section4.2.2 et à l’annexeC.2 pour plus de détails.

3.1

Évolution des modes à l’intérieur d’une fibre optique effilée

En premier lieu, il convient d’étudier l’évolution du profil des modes lorsqu’ils se propagent à l’intérieur d’une fibre optique effilée. Dans le texte qui suit, une attention particulière sera accordée au mode fondamental puisqu’il est fréquent de devoir concevoir un adaptateur modal