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Modélisation et simulation d’un combinateur de signal

Maintenant que la théorie des supermodes a été présentée, il est temps de débuter l’analyse poussée de chacun des paramètres de conception d’un combinateur. Cependant, afin de réaliser cette analyse, il est nécessaire d’utiliser un outil de simulation numérique performant. Celui- ci doit être en mesure de résoudre les supermodes et les modes de gaine pour les différentes sections du combinateur afin d’obtenir les profils et les indices effectifs correspondant. De plus, l’outil de simulation utilisé doit être en mesure d’effectuer la propagation du champ électrique à l’intérieur du combinateur. Les résultats obtenus permettront ainsi de bien caractériser le

phénomène où les supermodes, initialement confinés dans les cœurs, sont éjectés graduellement pour devenir éventuellement guidés par l’interface entre la gaine et l’air. De plus, cela permettra d’analyser les conditions d’adiabaticité et de connaître la puissance contenue dans les différents modes en sortie de la fibre multimode, ce qui permet le calcul du facteur de qualité de faisceau. La section4.2.1présentera d’abord les différentes approximations réalisées afin de permettre la simulation d’un combinateur de signal de manière efficace. Ensuite, la section4.2.2 présentera les outils de simulation numériques utilisés afin de réaliser les simulations.

4.2.1 Approximations réalisées

La mise en place d’un outil de simulation pour les combinateurs de signal nécessite tout d’abord de faire certaines approximations. La première concerne la fenêtre de calcul devant être définie afin de calculer les modes dans le combinateur. Comme il a été mentionné plus tôt, le modèle de combinateur qui est considéré tout au long de ce chapitre est formé à partir de sept fibres légèrement multimodes 15-125-0.10. Afin de bien considérer toute la structure dans le calcul des modes, il est donc nécessaire de définir une fenêtre de calcul permettant d’englober l’ensemble de ces sept fibres. Puisque ces fibres sont arrangées de façon à former un hexagone, la fenêtre de calcul doit donc être plus large que trois fois le diamètre d’une fibre, comme le montre la figure4.6a. De plus, puisque le diamètre des cœurs est très petit par rapport aux dimensions de cette fenêtre de calcul, un échantillonnage très fin doit être utilisé afin de bien résoudre les supermodes initialement confinés dans les cœurs. L’usage simultané d’une fenêtre très large et d’une résolution très fine rend évidemment les calculs numériques très lourds à réaliser. Il est donc avantageux de réaliser une approximation permettant de réduire la largeur de la fenêtre de calcul.

Cette première approximation est basée sur les résultats présentés à la figure 4.5, qui dé- montrent l’évolution des indices effectifs des supermodes supportés par une fibre multi-cœur lorsque ses dimensions sont réduites. Tel qu’on l’observe, la levée de la dégénérescence des indices effectifs des supermodes devient apparente lorsque le diamètre de la fibre multi-cœur prend une valeur plus faible que 100 µm. À cet endroit, le diamètre des cœurs est de 4.5 µm, ce qui correspond à un facteur de rétrécissement de 3.3. Pour tout diamètre de cœur plus élevé que 4.5 µm, il est possible de considérer que le mode fondamental se propage à l’intérieur de chacun des cœurs de la fibre multi-cœur sans être affecté par les cœurs voisins ou par l’interface entre la gaine et l’air. On se rappelle que la fibre multi-cœur étudiée à la section précédente a été définie afin que la disposition et les propriétés des cœurs soient analogues à celles du combinateur de signal présenté en introduction de ce chapitre. Dû à cette analogie, on peut donc considérer que dans le cas d’un combinateur de signal, le mode fondamental peut aussi se propager à l’intérieur des différentes fibres de façon isolée lorsque le diamètre des cœurs est plus élevé que 4.5 µm. Étant donné que le but principal des simulations est de caractériser les effets de couplage entre les différents cœurs ainsi que la transition des supermodes de cœur 72

vers les modes de gaine dans l’ensemble de fibres effilées formant le combinateur, il est possible de se servir des résultats présentés à la figure 4.5pour affirmer qu’il n’est pas intéressant de simuler la propagation des supermodes avant que le diamètre des cœurs des fibres optiques n’atteigne la valeur de 4.5 µm. L’entrée de la zone de simulation est donc définie comme étant l’endroit où le diamètre des cœurs atteint cette valeur, comme l’illustre la figure 4.6b. Cette approximation est aussi valide pour l’étude du critère d’adiabaticité du composant. En effet, comme il a été présenté à la section 2.6, il est plus probable qu’il y ait du couplage entre les modes de même symétrie azimutale lorsque les indices effectifs de ces modes sont rappro- chés. Comme on observe à la figure 4.4, les indices effectifs des supermodes de l’ensemble 1 demeurent toujours très éloignés de ceux des supermodes des autres ensembles et des modes de gaine lorsque le facteur de rétrécissement est plus faible que 3.3. L’approximation réalisée ne provoquera donc pas de perte d’information quant à l’adiabaticité du composant.

(a) 125 µm Fenˆetre > 375µm (b) Zone d’int´erˆet dcoeur=4.5 µm

Figure 4.6 –(a)Fenêtre de calcul devant être utilisée afin de modéliser l’entrée du combinateur sans approximation.(b)Approximation de la zone d’intérêt de l’ensemble de

fibres effilées. La fenêtre de calcul utilisée peut être réduite pour maintenant prendre une valeur >100 µm.

La seconde approximation réalisée concerne la forme de la structure utilisée pour les simula- tions. Lors de la fabrication d’un combinateur, le fait de réduire le diamètre des fibres optiques sous l’effet d’une source de chaleur provoque un arrondissement graduel de la structure, qui prend initialement une forme hexagonale. Cela peut être expliqué par le phénomène de tension superficielle qui se manifeste étant donné que la viscosité du verre diminue fortement pendant le processus d’étirement. À mesure que le diamètre de l’ensemble de fibres effilées diminue, il est donc possible d’observer un arrondissement progressif de la structure. Celle-ci devient d’ailleurs circulaire à partir d’un certain niveau de rétrécissement. La figure4.7schématise cet arrondissement.

Étant donné que l’entrée de la zone de simulation est définie comme étant le point où le facteur de rétrécissement est de 3.3, le taux de fusion entre les fibres à ce point a déjà atteint une valeur assez élevée pour que l’arrondissement de la structure soit significatif (voir section

R

D

r

Figure 4.7 – Arrondissement progressif de l’ensemble de fibres optiques formant le combinateur lorsque le niveau de rétrécissement augmente. Le cas de droite illustre

l’approximation d’une fibre multi-cœur utilisée.

5.2). La seconde approximation consiste à considérer l’ensemble de fibres effilées comme étant une fibre optique multi-cœur circulaire. Les dimensions externes D de cette fibre sont définies afin que son aire soit équivalente à l’aire de sept fibres non-fusionnées pour un facteur de rétrécissement F donné. La distance r entre les cœurs est quant à elle définie comme étant la distance entre les cœurs des fibres non-fusionnées pour un facteur de rétrécissement F donné. Les équations4.1et4.2permettent de bien visualiser les paramètres définis dans le logiciel de simulation en fonction du rayon initial R d’une des fibres en entrée du combinateur.

D = 2 √ 7R2 F (4.1) r = 2R F (4.2)

Rappelons que R = 125 µm dans le cas du combinateur étudié. À l’entrée de la zone de simulation présentée à la figure4.6b, le facteur de rétrécissement de 3.3 fait donc en sorte que le diamètre D initial de la fibre multi-cœur est de 100 µm et que la distance r initiale entre les cœurs est de 37.9 µm.

4.2.2 Outil de simulation numérique utilisé

Comme il a été mentionné plus tôt, un outil de simulation numérique performant doit être sélectionné afin de résoudre les supermodes et les modes dans les différentes sections du com- binateur et de propager le champ électrique à l’intérieur de celui-ci.

Dans les précédents travaux portant sur la combinaison de signal, la méthode de simulation la plus couramment utilisée est la méthode de propagation de faisceau (BPM) [22, 87, 32]. Cette méthode a été développée afin de modéliser la propagation du champ électrique dans des guides d’onde dont la géométrie varie de façon graduelle dans la direction de propagation. Cette variation graduelle permet de résoudre l’équation d’Helmholtz en appliquant l’approximation 74

paraxiale, qui suppose une faible divergence du faisceau par rapport à son axe de propagation. Il est ainsi possible d’obtenir l’évolution de l’enveloppe du champ électrique dans le guide d’onde. La méthode BPM présente cependant certains inconvénients. Le premier est que celle- ci est mal adaptée pour les guides d’onde présentant un contraste élevé d’indice de réfraction. Cependant, dans le cas d’un combinateur de signal, le profil d’indice de l’ensemble de fibres effilées est caractérisé par un contraste important entre la silice et l’air. La méthode BPM n’est donc pas optimale pour ce type de composant optique. Ensuite, lorsque des simulations BPM sont réalisées, le champ électrique est propagé de section en section à travers le guide d’onde. Il est donc possible d’obtenir le module et la phase du champ électrique pour une position quelconque dans la structure. Cependant, il n’est pas possible d’obtenir les propriétés modales pour cette même position, tel que l’indice effectif ou la puissance contenue dans chacun des modes. Afin d’obtenir ces valeurs, il serait nécessaire de résoudre les modes pour chaque section du guide d’onde, pour ensuite effectuer une décomposition modale du champ électrique obtenu pour ces sections. Cela peut s’avérer laborieux à réaliser.

La méthode de propagation basée sur la décomposition en modes propres (EME) offre une al- ternative intéressante à la méthode BPM. Cette méthode est basée sur la résolution rigoureuse des équations de Maxwell et permet de représenter le champ électrique dans les différentes sec- tions d’un guide d’onde par un ensemble de modes propres locaux. En résolvant les modes locaux supportés par le guide d’onde pour différentes sections successives, il est ainsi pos- sible de propager le champ électrique à travers la structure. Puisque la méthode EME n’est pas basée sur l’approximation paraxiale, il est possible de simuler des structures caractérisées par un grand contraste d’indice de réfraction. L’exactitude des calculs est gouvernée par le nombre fini de modes qui sont inclus dans les simulations et par la précision des modes qui sont calculés. Le principal avantage de cette méthode provient du fait qu’elle repose sur la décomposition modale pour chaque section du guide d’onde. Il est donc possible de suivre la puissance contenue dans chacun des modes pendant leur propagation et d’obtenir leurs indices effectifs dans les différentes sections. Un autre avantage important de la méthode EME est que les calculs sont basés sur l’utilisation d’une matrice de transfert permettant de relier les diffé- rents modes supportés à l’entrée et à la sortie du composant. Cette matrice de transfert étant calculée pour chacun des guides d’onde formant la structure modélisée, il est donc possible de modifier un paramètre sans nécessairement recalculer les modes pour toute la structure. Cela permet parfois de réduire significativement le temps de calcul.

Parmi les logiciels commerciaux disponibles reposant sur la méthode EME, Fimmwave - Fimmprop est sans doute un des plus robustes [73]. Ce logiciel est muni de solveurs de modes reposant sur différentes techniques, tout dépendant de l’application en jeu. Ces solveurs per- mettent d’abord de résoudre les modes supportés pour différentes sections dans un guide d’onde quelconque. Ensuite, l’algorithme de propagation EME permet de propager le champ initia- lement injecté dans le guide d’onde à travers les différentes sections, ce qui permet d’obtenir

la matrice de transfert résultante. Mise à part la matrice de transfert, il est possible d’obtenir d’autres résultats très intéressants suite à une simulation, comme par exemple l’évolution de la puissance contenue dans chacun des modes lors de la propagation ainsi que l’indice effectif et le champ électrique des modes pour différentes sections. Ces informations sont grandement pertinentes lors de la simulation d’un combinateur de signal.

Il est évident que plusieurs paramètres de simulation doivent être sélectionnés afin de mettre en place la simulation d’un combinateur de signal. Pour en nommer que quelques-uns, il est nécessaire de déterminer la résolution transverse, les plans de symétrie, le nombre de pas longitudinaux ou encore les conditions d’excitation du guide d’onde. Afin d’alléger le texte, la discussion concernant tous ces paramètres de simulation est reportée à l’annexeC. Dans la section C.1, une discussion au sujet des conditions d’excitation de la structure est d’abord présentée. L’objectif de cette discussion est de déterminer les conditions d’excitation permettant de représenter la combinaison de faisceau incohérente de manière optimale. La sectionC.2 présente quant à elle les paramètres qui ont été fixés dans le logiciel de simulation et qui ont permis d’obtenir les résultats présentés aux sections suivantes.