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REGULATION DES DEBITS DE CRUES Présentation du service

Le service de régulation des débits de crues correspond à la rétention de l’eau dans les dépressions couplée à l’épandage du débit de crue dans les plaines alluviales et marais annexes, qui permet une atténuation des crues par une diminution des débits et un étalement dans le temps et donc une limitation des impacts potentiels sur les installations humaines.

Caractérisation du service

Figure 79 – Schéma des éléments constitutifs du service « régulation des débits de crues »

Les intérêts sociétaux et économiques du service de régulation des débits de crues peuvent être étayés par plusieurs données relatives au nombre d’inondations survenant chaque année sur le territoire et aux coûts financiers importants qui en découlent. À titre d’exemple, l’association française des assurances a évalué dans une fourchette allant de 900 millions à 1,4 milliard d'euros les coûts associés à l’épisode de crue survenue en région parisienne en mai 2016.

Une préservation et une bonne gestion des écosystèmes jouant le rôle d’écrêteur de crues peuvent être génératrices d’une diminution de ces coûts.

Ce service de régulation des débits de crues est d’autant plus prépondérant au niveau national qu’une grande partie de la population française réside en zone inondable. En 2009, la part de la population exposée au risque d’inondation par cours d’eau était en effet estimée à 11 % en France métropolitaine, à 17 % à La Réunion et à 10 % en Martinique (cf. Figure 80).

Dans la totalité des départements, une part de la population réside en zone inondable, même si des disparités locales existent. 12 départements ont plus de 20 % de leur population en zone inondable. Le nombre de logements situés en zone inondable est estimé à 3,7 millions en 2009.

Ecosystèmes et biodiversité Bénéficiaires humains

Fonctions écologiques • Stockage de l’eau • Ralentissement de l’écoulement Avantage • Limitation de l'importance des inondations et de leurs dommages Service Régulation des débits de crues

Apports (capital, travail)

L’Aude en crue (Occitanie, 2005) © Laurent Mignaux - Terra

Cultures inondées (Occitanie, 2005) © Laurent Mignaux - Terra

Figure 80 – Part de la population estimée en zone inondable par cours d’eau en 2009, et taux de couverture des zones inondables par des atlas numérisés (SOeS, 2013)

Principaux déterminants du niveau de service

Liens avec l’état et le fonctionnement des écosystèmes

Figure 81 – Déterminants du niveau de service en lien avec la biodiversité

Aspects de la biodiversité qui renforcent le service Aspects de la biodiversité qui réduisent le service

o Abondance de végétation favorisant le laminage des crues en ralentissant le courant

Le service de régulation des débits de crues dépend de la capacité des milieux humides à stocker une partie des précipitations et à compenser les variations du niveau des eaux.

Plusieurs paramètres du milieu contribuent à cette capacité : sa rugosité (elle-même dépendante du relief de la végétation), sa position dans le bassin versant, sa superficie relative au bassin de drainage et ses caractéristiques morphologiques.

La présence de végétation dans le milieu favorise le laminage des crues en ralentissant le courant. Le couvert arboricole peut se révéler particulièrement efficace lorsque les débits sont élevés et la lame d’eau importante. Les forêts alluviales, par exemple, jouent un double rôle dans la régulation des crues. Outre celui de zones permettant l’expansion des crues, elles peuvent être un frein important à l’écoulement latéral des crues. Ainsi, le niveau d’eau diminue à mesure que l’on s’éloigne du chenal et que l’on s’approche de l’arrière de la forêt. Les strates arbustives et herbacées, quant à elles, offrent généralement une plus grande résistance aux écoulements.

Le niveau de saturation en eau du milieu humide, qui peut s’apprécier par le niveau d’engorgement des sols, est un paramètre essentiel dans la réalisation du service. À la sortie de l’hiver, l’engorgement des sols des zones humides ne permet généralement plus d’assurer cette bonne réalisation.

Le volume d’eau stocké lors d’une crue diminue par évapotranspiration, par infiltration vers les nappes ou par évacuation progressive via un exutoire. En bordure de cours d’eau, le stockage de l’eau peut persister dans le sol et dans les différentes annexes hydrauliques non connectées au chenal. De

Liens avec les pratiques de gestion

Figure 82 – Déterminants du niveau de service en lien avec les pratiques de gestion

Pratiques de gestion qui renforcent le service Pratiques de gestion qui réduisent le service

o Création de milieux artificiels écrêteurs de crues o Renaturation de cours d’eau (reconnexion de bras

morts, reconnexion lit mineur – lit majeur, etc.)

o Artificialisation des milieux humides et imperméabilisation des sols

o Recalibrage des rivières

o Remplacement des milieux humides par des cultures

De nombreuses pratiques de gestion peuvent altérer les fonctions de régulation des milieux humides : artificialisation des milieux, empiètement progressif des cultures sur les milieux humides, disparition de celles-ci, recalibrage des rivières, etc.

À l’inverse, des pratiques de type « renaturation des cours d’eau » peuvent renforcer le niveau de service. De nombreux projets, établis dans cette optique, existent au niveau national. Ceci est notamment le cas du projet Isère amont qui, à l’échelle de 29 communes de la vallée du Grésivaudan vise à protéger contre les inondations des zones urbanisées et urbanisables au schéma directeur de l'agglomération grenobloise en redonnant à l'Isère plus d'espace en crue grâce au principe des champs d'inondation contrôlée.

La mise en place de milieux artificiels peut également permettre la création ou le renforcement du service de régulation des débits de crues. Au niveau national, la construction de quatre lacs-réservoirs à l’amont du bassin parisien en constitue un des exemples les plus emblématiques (cf. Figure 83).

Figure 83 – Carte des quatre lacs-réservoirs du bassin parisien (Seine Grands Lacs, 2016)

Avec une capacité de stockage de 800 millions de m3, ces grands barrages, gérés par l’établissement public territorial de bassin Seine Grands Lacs, peuvent ensemble faire baisser la ligne d’eau de 70 cm à Paris. Comme en atteste une étude menée par l’OCDE, ce potentiel peut réduire de manière significative l’ampleur des dommages en cas de crue centennale sur la ville de Paris (cf. Encadré 11).

Encadré 11 – Gestion des risques d’inondation – La Seine en Ile-de-France (OCDE, 2014)

Sur commande de Seine Grands Lacs, en partenariat avec le Ministère de l’environnement et le Conseil régional d'Île-de-France, l’OCDE a conduit une étude pour évaluer les conséquences d'une inondation par débordement de la Seine et de ses affluents en Ile-de-France.

Figure 84 - Carte de la zone inondable en cas de crue centennale (OCDE, 2014)

Sur la base d’une cartographie des zones inondables (cf. Figure 84), l’étude identifie plus particulièrement les impacts d’une crue de type 1910. Compte-tenu du fait que l’Ile-de-France représente environ le tiers de l’activité économique de la France, qu’elle abrite le siège du gouvernement, des grandes entreprises, des principaux centres de décisions et de recherche, il apparait que, dans le cas le plus extrême, une inondation de la Seine impacterait directement et indirectement près de 5 millions de citoyens. Elle pourrait perturber le fonctionnement de l’État et des institutions ainsi que l’ensemble des infrastructures et réseaux critiques qui irriguent quotidiennement la métropole francilienne. 1,5 million d’individus seraient privés d’électricité. Le réseau routier pourrait être bloqué en de nombreux points, notamment au niveau des ponts traversant la Seine. Plus de 5 millions d’abonnés pourraient subir des coupures d’eau prolongées et 1,3 million une dégradation de sa qualité. Les évaluations des impacts économiques montrent également un impact macroéconomique significatif en termes de PIB, avec des répercussions tant en termes d’emploi, que sur les finances publiques. Celles-ci seraient alors fortement sollicitées, et pourraient connaître une dégradation correspondante sur une période durable. Les dommages d’une telle catastrophe ont été estimés de 3 à 30 milliards d’euros pour les dommages directs selon les scénarios d’inondation, assortis d’une réduction significative du PIB qui atteindrait sur cinq ans de 1,5 à 58,5 milliards d’euros soit de 0,1 à 3 % en cumulé. Dans le cas où l’impact dépasserait les réserves disponibles pour y faire face par le régime d’indemnisation CatNat et la Caisse centrale de réassurance, l’État serait conduit à jouer pleinement son rôle de garant de dernier ressort.

Enfin, l’étude précise que l’action des quatre lacs-réservoirs en amont de Paris pourrait réduire de moitié des dommages directs.

Cette même étude établit une batterie de recommandations relatives à la gouvernance, aux mesures de résilience et au financement pour améliorer la situation de l'agglomération parisienne face au risque d'inondation. Est notamment mis en avant le projet de site pilote de la Bassée. À l’étude depuis les années 1990, ce projet poursuit un double objectif de diminution des niveaux de la Seine en crue et de valorisation écologique du territoire de la Bassée aval (cf. Figure 85).

Le projet permettrait de retenir les eaux de la Seine au moment du passage de la crue de l’Yonne en pompant et stockant dans des casiers l’eau de la Seine au moment du pic de crue. Cet aménagement serait constitué d’unités de stockages remplies par pompage lors de fortes crues. Son volume stockable serait de 55 millions de m3. Le casier pilote pourrait présenter une capacité de stockage

Figure 85 - Carte du projet de site pilote de la Bassée (Seine Grands Lacs, 2016)