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SOULEVÉES PAR L'ENTREPRENEUR

B. Le rapport existant entre la prestation de l'entrepreneur et la contre-prestation du maître

2. Un refus de l'entrepreneur de s'exécuter

641 Cette condition résulte directement del' article 83 CO: le débiteur refuse de s'exécuter. Elle est sous-entendue à l'article 82 C0420: le débiteur doit refuser de s'exécuter sur l'interpellation du créancier.

642 Sous!' angle du CO, l'entrepreneur peut refuser d'exécuter la construc-tion; en revanche, il ne peut pas refuser de livrer la construction (cf.

supra No 36).

643 Sous l'angle de la norme SIA 118, l'entrepreneurpeut refuser aussi bien l'exécution que la livraison de la construction (supra No 37).

644 Le refus du débiteur d'exécuter sa prestation constitue à la fois une condition matérielle (infra: A) et une condition formelle (infra: B) d'application des articles 82 et 83 CO.

A. Une condition matérielle

645 Le refus du débiteur d'exécuter sa prestation doit être objectivement justifié: l'exécution de la prestation est suspendue par souci de voir 417) ATF 105/1971 JI 28, JT 19791314, 317;JEANPRETRE p. 275, KELLERISCHÔBI p. 220, VONTUHR/EsCHER

p. 59, 60.

418) D'une manière générale: SCHENKER Nos 241-243.

A propos de l'art. 83 CO: contra: GIMIK p.23, WEBER No 5, 61 Ad art. 83 CO.

419) Par conséquent: la prescription continue à courir.

Cf. SCHENKER Nos 241-243 (minoritaire); contra (doctrine majoritaire): not. WEBER No 209 Ad art. 82 CO.

420) SIM MEN p. 49: l 'exceptio non adimpleti con tractus n'a pas de sens lorsque le débiteurs' est déjà exécuté.

garanti le droit du débiteur à l'exécution de la contre-prestation (infra:

a), et dans ce but exclusivement (infra: b).

a. Un refus fondé sur l'absence de garantie du paiement du prix aa. Dans le cadre de l'article 82 CO

Le débiteur d'un contrat synallagmatique peut suspendre l'exécution de 646 sa prestation lorsqu'il a droit à l'exécution de la contre-prestation (première condition), et que celle-ci n'est ni exécutée, ni offerte par le créancier (deuxième condition).

Le débiteur doit apporter la preuve que la contre-prestation est exigible 647 (première condition). La deuxième condition, en revanche, est présu-mée: il appartient au créancier d'apporter la preuve qu'il a exécuté ou offert d'exécuter sa contre-prestation 421

i) L'exigibilité du prix422

Une condition réalisée lorsque les prestations de l'entrepreneur et du maître sont dans un rapport d'échange

1. Selon le CO: La livraison de l'ouvrage et le paiement du prix sont 648 dans un rapport d'échange (No 626). L'article 372 I CO entend garantir en principe l'exécution simultanée de la livraison de l'ouvrage et du paiement du prix.

Dans un contrat de construction, il ne s'agit que d'un voeu pie, puisque 649 l'entrepreneur n'est pas en mesure de refuser la livraison de la construc-tion (No 36).

Le moyen tiré de l'exceptio non adimpleti contractus n'est donc d'au- 650

·1· , 1' 423

cune utt tte pour entrepreneur .

2. Selon la norme SIA 118: L'exécution de l'ouvrage et le paiement du 651 prix sont dans un rapport analogue à un rapport d'échange (No 627).

L'article 82 CO doit s'appliquer par analogie: l'entrepreneur a le droit d'interrompre l'exécution des travaux de construction lorsqu'il peut 421) Cf. la doctrine unanime; p. ex: S!MMEN p. 101, VON TUHR/EsCHER p. 64.

422) Sur cette condition: A TF7811952 II 32, JT 19521492, 497 (le prix correspondant aux livraisons antérieures), BECKER No 2 Ad art. 82 CO, JEANPRETRE p. 275, S!MMEN p. 51, WEBER No 132 Ad art. 82 CO.

423) Peu importe: mieux qu'une garantie personnelle, l'entrepreneur bénéficie en principe d'une garantie réelle s'il exerce son droit à l'inscription d'une hypothèque légale d'entrepreneur (art. 837 l ch. 3, 839 ss, 961 CC). Son droit existe dès la conclusion du contrat (art. 8391 CC), s'éteint trois mois après 1' achèvement des travaux (art. 839 II CC).

Une exception au principe? La question est controversée de savoir si ce droit existe lorsque l'immeuble a été acquis par un tiers de bonne foi. Sur cette question: GAUCH Nos 882-884.

apporter la preuve que des acomptes (ou des prix de régie partiels) sont

. 'bl "! JI' 1 . d .424

ex1g1 es et qu 1 a egue e non-paiement e ceux-ci .

652 Ce droit ne peut être exercé qu'à deux conditions. D'une part, pour les paiements échus, le délai de trente jours correspondant au sursis de paiement dont bénéficie le maître doit être expiré (article 190 norme SIA 118).

653 D'autre part, l'exercice du droit ne doit pas être abusif (article 2 II CC42\

Le refus de prester ne doit pas apparaître comme une mesure tout à fait disproportionnée compte tenu des intérêts des deux parties426. Cette question doit être résolue sur la base des circonstances du cas particulier.

Par exemple: l'entrepreneur ne pourra pas interrompre l'exécution de travaux portant sur une longue période (importance de la prestation) pour le motif que le maître, jusqu'ici régulier dans ses paiements, n'a pas payé un acompte.

654 Le non-exercice du droit à l'interruption des travaux (l'entrepreneur continue l'exécution de l'ouvrage alors que Je maître ne paye pas des acomptes dus) peut impliquer renonciation au moyen tiré de l'article 82 CO. Il s'agit là d'une question d'interprétation de la volonté de l'entre-preneur.

- Une condition qui serait réalisée slle maître avait une "Vorlei-stungspflicht"

655 L'article 82 CO s'applique non seulement lorsque les prestations sont dans un rapport d'échange, mais également, afortiori, lorsque le créan-cier al' obligation de fournir sa contre-prestation avant celle du débiteur.

Dans l'exécution, respectivement la livraison d'une contre-prestation, cette hypothèse n'est jamais réalisée.

656 Il convient d'en déduire une conséquence négative lorsque les parties ont intégré la norme SIA 118 à leur contrat de construction.

657 L'entrepreneur n'a pas Je droit de retarder le moment de la livraison de la construction (en refusant de prendre part à la vérification commune de J'ouvrage, cf. Nos 44 ss), au motif que des acomptes ou des prix partiels de régie n'ont pas été payés. L'obligation du maître de payer des acomptes ou des prix partiels de régie n'est pas une

"Vorleistungs-424) Sur le principe de l'interruption: GAUCH No 869, GAUTSCHI No 25 Ad art. 372 CO, WEBER No 89 Ad art. 82 CO; sur les contrats de durée en général (bail, travail): SIMMEN p. 63.

425) Sur le principe: BECKER No 6 Ad art. 82 CO, VON BüREN p. 465, SIMMEN p. 88 SS, VON TUHRIEsCHER p. 64, WEBER no 192 ss Ad art. 82 CO.

426) GAUCH No 869, SIMMEN p. 89, 90, WEBER No 194 Ad art. 82 CO.

pjUcht" par rapport à la livraison de la construction, mais une obligation de fournir sa contre-prestation au fur et à mesure que la prestation est exécutée. L'entrepreneur doit assumer le risque qu'il a pris en renonçant au moyen tiré de I' exceptio non adimpleti contractus lors del' exécution de l'ouvrage.

Une condition non réalisée lorsque l'entrepreneur a une "Vorlei-stungspflicht"

Dans ce cas, en effet, la contre-prestation du créancier n'est pas exigible. 658 L' exceptio non adimpleti con tractus est mal-fondée, faute de preuve.

Lors de la conclusion du contrat, le débiteur a renoncé à la garantie offerte par l'article 82 CO: il a accepté le risque de fournir sa prestation

. d . 427

sans recev01r e contre-prestation .

l. Selon le CO: L'entrepreneur ne peut pas refuser d'exécuter l'ou- 659 vrage au motif que le prix n'est pas payé: celui-ci n'est pas exigible.

2. Selon la norme SIA 118: Cela va de soi: l'entrepreneur ne peut pas 660 refuser de livrer l'ouvrage au motif que le solde du prix ferme n'est pas payé.

ii) L'absence de garantie du paiement du prix (condition présumée)428

Le débiteur bénéficie d'une présomption de fait selon laquelle le paie- 661 ment du prix n'est pas garanti par le créancier. Ainsi il appartient au créancier d'apporter la preuve que le paiement du prix est garanti par lui de manière suffisante.

En principe, le créancier dispose des trois moyens de preuve suivants: 662 la preuve d'une "offre"429

faite au débiteur de payer le prix;

la preuve du paiement du prix (le cas échéant avec intérêts mora-toires)430;

la preuve que le débiteur est en demeure de créancier eu égard au paiement du prix (article 91 C0)431

427) En raison de la renonciation par le débiteur au moyen tiré de l'article 82 CO, cette disposition ne s'applique pas par analogie, mêmes' il est établi que le créancier ne va pas fournir sa contre-prestation;

en ce sens: BECKER No 19 Ad art. 82 CO; contra: BUCHER, p. 310.

428) ATF79/1953 II 277.

429) Sur la condition d'offre: la doctrine unanime renvoie à l'art. 91 CO. Notamment: JEANPRETRE p. 280, SIMMEN p. 69, VON TUHRIESCHER p. 61, WEBER No 185 Ad art. 82 CO.

430) WEBER No 156 Ad art. 82 CO.

431) Pour la doctrine unanime, la demeure de créancier du débiteur exclut sa demeure de débiteur; contra:

WEBER No 151 Ad art. 82 CO (mais Weber an-ive au même résultat par un autre raisonnement). Le

Tribunal Fédéral a laissé la question ouverte: ATF 111/1985 Il 463, JT 1986 1 233, 240.

663 En l'espèce, le maître de 1' ouvrage ne dispose que des deux moyens de preuve cités en dernier lieu.

664 En effet, le "prix" consiste en des acomptes, respectivement prix de régie partiels, exigibles (article 190 norme SIA 118) (supra Nos 627 ss, 651 ss). L'idée qui sous-tend l'article 82 CO, à savoir celle d'un échange

"trait pour trait" de deux prestations instantanées, s'exprime ici par 1' exécution de prestations instantanées (paiements) "au fur et à mesure"

de l'exécution d'une prestation de durée (travail). Or, comme dans le contrat de travail, les paiements sont effectués "post numerando". En conséquence, seul le paiement effectif des acomptes (ou prix de régie) en souffrance garantit le principe d'une exécution ~arallèle des presta-tions, !'"offre" de payer ceux-ci étant insuffisante4 2.

bb. Dans le cadre de l'article 83 CO

665 Le débiteur d'un contrat synallagmatique peut suspendre l'exécution de sa prestation, lorsque l'insolvabilité du créancier met en péril son droit à l'exécution de sa contre-prestation (première condition) et quel' exé-cution de cette contre-prestation n'est pas garantie (deuxième condi-tion).

666 Peu importe que la contre-prestation du créancier soit ou non exigible:

l'article 83 s'applique en toute hypothèse433. Peu importe, par consé-quent, le rapport qu'entretiennent prestation et contre-prestation.

667 En pratique, toutefois, l'application de l'article 83 CO est subsidiaire par rapport à 1' article 82 CO, dont 1' application est plus aisée.L'article 83 CO s'appliquera donc lorsque le débiteur a une "Vorleistungs-pflichf.434. Tel est le cas, en l'espèce, de l'obligation de l'entrepreneur d'exécuter la construction lorsque les dispositions du CO s'appliquent au contrat (cf. No 625).

i) L'insolvabilité du maître de l'ouvrage

668 Le maître est insolvable lorsqu'il ne dispose plus de moyens suffisants

f . f ' 435 L f 'JI' 1 . . . f

pour aire ace a ses engagements . a ai 1te, a saisie m ructueuse, mentionnées à l'article 83 CO, en sont des exemples.

432) Implicitement: GAuCH No 869: "biser eine ve17.ogerte Znhlung (z.B. eli1e ve17.ogerte Abschlagszah/1111g) des Bestellers erhiilt"; GAUTSCHI No 25 Ad art. 372 CO: "bis zur Znhlung".

433) KELLERIScttôBI p. 222, 223, OsERISCHôNENBERGER no 2 Ad art. 83 CO, WEBER No 18 Ad art. 83 CO.

434) Cf. la doctrine unanime, not. VON TUHR/ESCHER p. 65, WEBER No 5 Ad art 83 CO.

435) ATF 68/1942 II 177, JT 1942 1565, 568.

Son insolvabilité doit être ultérieure à la conclusion du contrat436. 669 Le droit de l'entrepreneur au paiement du prix est mis en péril lors~ue, 670 du fait de l'insolvabilité du maître, le paiement paraît improbable 4 .

ii) L'absence de garantie du paiement du prix

Lorsque le maître est insolvable, l'entrepreneur peut valablement inter- 671 rompre l'exécution de travaux jusqu'à remise de sûretés suffisantes par le maître.

Faute pour le maître de donner suite à cette requête, l'entrepreneur 672 optera entre deux voies: la résolution du contrat par l'application de l'article 83 II CO, ou le maintien du contrat, moyennant l'inscription d'une hypothèque légale (article 8391, II CO).

L'entrepreneur, en effet, n'a pas encore livré la construction; sous 673 l'angle du CO, cela signifie que celle-ci n'est pas achevée. L'entrepre-neur a donc droit à la fourniture de sûretés suffisantes (article 839 III CC) et, à défaut, à l'inscription d'une hypothèque légale d'entrepreneur (article 839 1, II CC).

b. L'exclusion d'autres motifs à la base du refus de l'entrepreneur de s'exécuter

Le retard n'est pas imputable au débiteur: il s'agit là d'une condition 674 implicite des articles 82 et 83 CO, en liaison avec l'article 2 II CC. Le fait que sa contre-prestation ne soit pas garantie constitue la seule raison du refus du débiteur de prester. Cette condition non réalisée, l'exercice du droit de refuser sa prestation serait abusit438.

Cette condition s'exprime de la même manière qu'à l'article 91 CO: le 675 débiteur veut et peut s'exécuter. Ce qui a été dit à propos de cette disposition (Nos 487 ss) s'applique mutatis mutandis dans le cadre des articles 82 et 83 CO.

Par conséquent: pour avoir le droit d'interrompre l'exécution des tra- 676 vaux, l'entrepreneur doit être prêt à s'exécuter. Pour conserver le droit de ne pas s'exécuter, l'entrepreneur doit rester prêt à fournir sa presta-tion.

436) ATF 105/1979 Il 28, JT 1979 1 314, 317 cf. la doctrine majoritaire: BECKER No 4 Ad art. 83 CO, VON BüREN p. 470, ENGEL p. 444, OSER/SCHôNENBERGER No 10 Ad art. 83 CO, contra une doctrine mino-ritaire: BUCHER p. 311 (réservé), WEBER No 42 Ad art. 83 CO.

437) WEBER No 44 Ad art. 83 CO.

438) En ce sens: SIMMEN p. 88 (l'inexécution ne doit pas résulter d'un comportement contraire au droit par le débiteur), WEBER No 213 Ad art. 82 CO (le débiteur doit être prêt à fournir sa prestation).

677 Lorsque cette condition n'est pas réalisée, l'entrepreneur sera en de-meure de débiteur, puisqu'il a l'obligation actuelle de s'exécuter. Il faut toutefois excepter le cas où aucune des parties ne veut s'exécuter: le

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