• Aucun résultat trouvé

A – LES RAPPORTS DE FORCE ENTRE ACTEURS URBAINS DANS LE CONTROLE ET LA GESTION DES SERVICES DE L’AMENAGEMENT DES

PARAGRAPHE II : L’EXPRESSION DES RAPPORTS DE FORCE ENTRE ACTEURS DANS LE CONTROLE ET LA GESTION DES AMENAGEMENTS

A – LES RAPPORTS DE FORCE ENTRE ACTEURS URBAINS DANS LE CONTROLE ET LA GESTION DES SERVICES DE L’AMENAGEMENT DES

VILLES

Les services urbains au Cameroun s’offrent comme des espaces de compétitions entre des acteurs venus des de toutes les strates de la société, tant au niveau local, national qu’international. Les plus alléchants parmi ces services sont entretenus et discutés dans plusieurs secteurs et milieux entre la haute hiérarchie de la fonction de l’Etat, les CTD et l’ensemble des partenaires financiers internationaux et les acteurs privés locaux. Parmi ces services qui concourent à l’aménagement urbain et à la sa transformation, la question des déchets urbains a éveillé l’attention de nombreux observateurs au point où il s’est avéré cruciale de pouvoir en découdre avec les assertions des uns qui jettent le tort du désordre urbain constaté dans nos villes à l’incapacité des pouvoirs publics à maitriser son territoire. Plusieurs actions sont menées ici qui incluent un ensemble d’acteurs, parfois de manière anarchique. Douala est l’une des villes du Cameroun ou est enregistrer le plus grand désordre urbain et la plus productrice des déchets. Les dernières statistiques présentées à cet effet montrent que cette ville produit plus d’un million de tonne de déchets par an.

Plusieurs acteurs interviennent donc de façon parfois non coordonnée dans tout le processus allant de la collecte à la transformation des déchets ménagers. Sont principalement concernés dans la gestion des déchets, les CTD, les entreprises publiques et privées, à l’instar de la société camerounaise d’hygiène et salubrité (HYSACAM), mais aussi certaines organisations associatives et des populations. Yaoundé se donne par exemple ici comme un cadre d’analyse et de constatation des rapports de force entre la communauté urbaine et les mairies, entre ces collectivités locales et la société HYSACAM, mais aussi entre ceux-ci et les populations organisées dans la collecte et la gestion des déchets dans les marchés de MOKOLO et celui central. Par ailleurs, d’autres services urbains font l’objet des vives tensions entre toutes les parties pour leur contrôle, tels que la gestion de l’eau potable, la production des logements sociaux, la gestion de l’électricité publique et l’épineuse question du foncier dans nos villes.

Page 106

Par rapport à la question de la gestion de l’eau potable dans les villes camerounaises, un rapport de l’AFD explique que le Cameroun dispose dans l'ensemble de conditions naturelles favorables car ses ressources en eau sont partout abondantes sauf dans les régions du nord du pays184. Toutefois, en l’absence d’investissements durant les 20 dernières années et en raison des faiblesses de la gestion par le concessionnaire public (SNEC), la situation de l’approvisionnement en eau potable au Cameroun s’est considérablement dégradée. Si le taux d’accès « amélioré » à l’eau potable est globalement de 70 % en 2006, ce chiffre traduit néanmoins des disparités et des forts retards en milieu urbain par rapport aux pays africains comparables. Disparités rural/urbain d’abord, car le taux d’accès n’est que de 47 % en milieu rural, contre 88 % en milieu urbain ; forts retards de plus en milieu urbain, avec une stagnation de l’accès par branchement particulier (ou branchement dans la cour) depuis 1990 à 26 % de la population urbaine, ce qui est très faible au regard de pays africains comparables (Sénégal : 78 % ; Côte d’Ivoire : 62 % et moyenne Afrique Sub-saharienne : 35 %)185

. Cette situation montre à suffisance le caractère indispensable que regorge la ressource en eau dans les zones urbaines. Ainsi toujours selon le rapport de l’AFD sur cette question de l’eau dans les villes camerounaises, la production et la distribution d’eau potable en milieu urbain repose sur des relations triangulaires Etat / société de patrimoine / exploitant définies dans deux contrats : un contrat de concession et de gestion des infrastructures entre l’Etat et la société publique de patrimoine, CAMWATER, créée par décret le 31 décembre 2005. La durée de cette concession est 30 ans, renouvelable par 10 ans. Un contrat d’affermage du service d’alimentation en eau potable conclu entre l’Etat, cette société de patrimoine (CAMWATER) et un exploitant privé (CDE). La durée de cet affermage est 10 ans avec possibilité de la prolonger de 5 ans par avenant186.

De plus, hors mis cette relation triangulaire, le processus de décentralisation est venu accroitre les pouvoirs des CTD qui, dorénavant au même titre que les autres partenariats avec l’Etat sont chargées d’approvisionner les populations urbaines en eau potable. Mais également, entrent aussi en jeu des élites, qui de par leurs pouvoirs et leurs capacités, sont capables de satisfaire les populations urbaines en eau potable. Dans les villes de Yaoundé, de

184 Lire un rapport de l’AFD publié en 2009 dont l’intitulé est : le secteur de l’eau au Cameroun : enjeux et enseignements

185 L’AFD, Op.cit.

Page 107

Douala et de Kribi ce type d’actions sont régulièrement observées et participent de la bonne gestion de nos villes.

La gouvernance urbaine au Cameroun est le levier des différentes interactions entre les acteurs pour le contrôle des services que les villes offrent au bon vouloir de l’épanouissement des populations urbaines, et il est à noter que parmi ces services, la gestion foncière peut sembler être le foyer des tensions et des conflits beaucoup plus constaté dans les zones urbaines à plein essor. Une question pertinente a ainsi lieu d’être posée dans ce cadre, c’est celle de savoir à qui appartiennent véritablement les terres dans les villes au Cameroun ? Les travaux antérieurs sur les villes de Douala, Yaoundé et Kribi ont montré qu’un des problèmes essentiels de la gestion foncière relevait de la pluralité des normes et de la pluralité des instances intervenant sur le champ du foncier. La cohabitation non régulée d’instances d’arbitrage ou de décisions aboutit à une incertitude sur les droits et à de l’insécurité ou du conflit. En effet, au-delà de dispositifs formels édictés par l’Etat, ou se greffant sur eux, les analyses foncières révèlent un jeu complexe d'acteurs, de règles, d'instances et de procédures, une « prolifération de normes et d’institutions »187 qui laisse une certaine incertitude sur les règles censées s’appliquer dans tel contexte, favorise les revendications multiples et contradictoires, les manœuvres opportunistes et les coups de force.

L’on a vu dans la ville de Douala les conflits qui ont eu lieux entre les autorités traditionnelles, la Communauté Urbaine de Douala, l’Etat et la partenaire privé DANGOTE sur la place officielle de célébration des festivités traditionnelles du peuple SAWA. A Yaoundé, on peut également évoquer ici le conflit qui oppose les pouvoirs publics aux populations du quartier ANOMAYOS par au déguerpissement des populations pour la construction d’une usine de cimenterie.

L’étude de Rochegude « Décentralisation, acteurs locaux et foncier »188 décrit précisément le cadre juridique et institutionnel dans les différents pays. Au Cameroun, elle montre qu’il existe des différences significatives dans le dispositif public local. En tout état de cause, à l’échelle locale, les acteurs intervenant dans le jeu foncier ne sont pas que les acteurs étatiques ou ceux qui disposent de pouvoirs officiellement reconnus. De nombreuses autorités

187 Gret – IRD – LAJP, 2009« Dispositifs locaux de régulation foncière », p.2.

188

Rochegude (A.), 2000, Décentralisation, acteurs locaux et foncier ; mise en perspective juridique des textes

sur la décentralisation et le foncier en Afrique de l’ouest et de Centre, PDM/Coopération française, Tome 1,

Page 108

coutumières, de nouvelles élites associatives, des hommes politiques, les agents des services techniques, les services de la conservation foncière, jouent un rôle, plus ou moins reconnu, plus ou moins influent. Des comités plus ou moins formels sont souvent mis en place dans le cadre de projets ou par des ONG.

Somme de tout ce qui précède, la conflictualité qui existe dans les interactions entre acteurs pour le contrôle des services urbains soulève un problème crucial dont la gestion foncière est l’un de ces services qui animent le plus ces conflits. Mais au-delà de cette problématique, la gouvernance urbaine qui a entrainé le libre marché a favorisé dans la mesure du possible les relations tumultueuses dans le contrôle et la gestion urbaine au Cameroun.

B- LA QUESTION DE LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT, LA GESTION FONCIERE ET DE LA GESTION DES RESSOURCES NATURELLES LOCALES

Plusieurs pays dans le monde sont dotés de pétrole, de gaz et de ressources minières qui si adéquatement exploités et utilisés peuvent améliorer les vies des citoyens de ces pays. Mais l’expérience au Cameroun a montré que la mauvaise utilisation des ressources extractives a plutôt exacerbé la pauvreté et la faim dans ce pays riche en ressources naturelles ayant pour résultat des conflits, l’instabilité sociale, la corruption, la dictature, etc.189

L’expérience des villes qui font l’objet de nos analyses nous informent assez sur les conflits que provoquent le contrôle des ressources naturelles et la gestion locale de l’environnement. Il faut par ailleurs noter que les acteurs concernés dans la gestion et la protection de l’environnement, depuis les libéralisations économiques des années 90, ainsi que la nécessité de décentraliser le territoire sont entre autre les ONG nationales et internationales, les collectivités locales décentralisées (se sont selon la loi relative au transfert des compétences, les CTD qui sont les acteurs de premier plan dans la gestion locale et la protection de l’environnement), mais aussi l’Etat à travers le MINFOF et les communautés locales organisées, ainsi que certains individus influent qui pèsent de leur poids économique ou traditionnel.

189Programme de Suivi des Industries Extractives, Mai 2013, « Transparence, Gouvernements et Industries Extractives », Édition 2, Numéro 1, RELUFA, p.1.

Page 109

Ainsi par exemple selon le Guide Juridique Communal de gestion des forêts , comme va l’expliquer de manière schématique et pratique la figure ci-dessous, les circonscriptions dans les quelles l’on pourrait encore retrouver les ères forestières peuvent aussi appartenir aux communes au même titre qu’à l’Etat et les autres opérateurs ainsi qu’aux communautés locales organisées en association ou en collectif.

FIGURE 2 : Répartition des ressources forestières du Cameroun.

Sources : Schématisé par nous, inspiré du GJGCRN, Op.cit., p.13.

Les villes de Yaoundé et de Douala du fait de la forte urbanisation qu’elles connaissent n’en disposent plus assez de ressources naturelles et environnementales, et sont par ailleurs obligées de collaborer avec les villes périphériques à elles pour converger et transformer ces ressources, ainsi que les partager.

190 PADDL/GTZ, Décembre 2006, « Marges de manœuvre des communes dans la gestion de leurs ressources naturelles : GUIDE », Tome 1, Intégration, p.13.

Domaine Forestier National Domaine Forestier Non permanent Domaine Forestier Permanent Forêts Domaniales Forêts Communales Aires Protégées pour la faune Réserves Forestières Forêts du Domaine National Forêts Communautaire s Forêts des Particuliers

Page 110

Quant à la ville de Kribi, elle fait partie des réserves sous terraines et environnementales naturelles qui suscitent des convoitises des acteurs tant au niveau national qu’international. Ces convoitises par le manque des textes juridiques adéquats à la gestion de l’environnement et des ressources naturelles, aboutissent le plus souvent aux confrontations entre les divers exploitants.

Etant donné que les conflits observés dans les villes camerounaises pour contrôle et la gestion des services urbains sont inhérents à la gouvernance de ces villes, il n’en demeure pas moins que ces confrontations aboutissent le plus souvent à des compromis et à des coopérations pour la bonne gestion harmonieuse de nos villes.

SECTION II : LA VILLE COMME ESPACE DE COOPERATION ENTRE ACTEURS

Documents relatifs