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LES DIFFERENTS RAPPORTS ENTRE LES ACTEURS DE LA GOUVERNANCE URBAINE AU CAMEROUN

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La vie politique urbaine au Cameroun est caractérisée par la polarisation aux extrêmes des différents acteurs urbains, le nouveau contexte institutionnel n’ayant pas changé les comportements politiques des acteurs qui conservent chacun leurs intérêts et qui visent leurs objectifs propres. C’est de l’avis de DOBRY, la phase de rupture qui correspond au niveau III des crises politiques caractérisées par des changements dans la structure politique elle-même avec la multiplication des acteurs et des protagonistes, les alliances et les coalitions qu’ils forment et les avantages qu’ils peuvent en attendre165

. En effet, dès lors qu’il n’y a pas un véritable projet qui rend possible l’ajustement des différents acteurs dans des systèmes sociaux complexes166, il se multiplie des mobilisations sectorielles qui provoquent de grandes crises politiques et posent la problématique de gouvernabilité de ces systèmes. La question se pose de plus en plus au sujet des villes camerounaises, surtout lorsqu’elles sont grandes avec la multiplication des acteurs disposant des ressources pertinentes et soucieux de défendre leurs intérêts en nouant des rapports de circonstance avec les uns pour porter des coups sur les autres et gagner des trophées à différents niveaux de la scène politique. Dans ce nouveau contexte, la crise de gouvernabilité est l’expression de la remise en cause des formes traditionnelles d’exercice du pouvoir pratiqué dans les sociétés contemporaines. Au changement du contexte politique des villes, résistent encore les pratiques traditionnelles de gouvernement urbain, ce qui provoque des déviances multiples167.

L’observation des trois villes camerounaises sur lesquelles notre attention s’est véritablement prononcée (Yaoundé, Douala et Kribi) montrent à suffisance que les types de rapports qui sévicent entre les acteurs urbains dans la construction des politiques de développement des villes, soulèvent des caractères parfois entachés de conflits, dans la stratégie de chacun à mobiliser des atouts de son côté pour contrôler les ressources et les services que la ville offre (Section I), mais que d’autre part, des compromis se crées et les partenariats s’organisent pour le maintien et la consolidation des acquis de la villes en matière des politiques publiques et aussi pour une harmonisation des actions qui favorisent la concertation entre les parties prenantes dans la réalisation des services sociaux, pour ainsi permettre l’épanouissement des populations résidants (Section II).

165

Dobry (M.) : Sociologie des crises politiques, cité par Kayo Sikombe (A.) Op.cit., p. 355.

166 Dobry définit ainsi les systèmes sociaux complexes comme étant des “systèmes qui sont différenciés en de sphères sociales autonomes, fortement institutionnalisées et dotés de logiques sociales spécifiques” in Sociologie

des crises politiques, op.cit., p. 40.

167

Lire dans ce sens ONANA (J.), mai 2003 : « La déviance politique comme catégorie discursive de construction de la réalité politique en Afrique » in Droit à la démocratie en Afrique Centrale, Presses de

Page 97 SECTION I : LA VILLE COMME UN TERRAIN D’EXPRESSION DES RAPPORTS

DE FORCES ET DE POUVOIRS ENTRE ACTEURS DANS LA GESTION ET LE CONTROLE DES SERVICES URBAINS

Si les études de cas présentés ici se limitent à la ville, cette dernière n’est pas considérée comme un acteur collectif unitaire168,mais comme un terrain d’expression des rapports de force et de pouvoir entre les coalitions d’acteurs individuels et collectifs, publics et privés, locaux, nationaux et transnationaux dont rend bien compte la multiplicité des secteurs analysés (services urbains, gestion des marchés et des gares routières, gestion foncière, politiques de propreté, plans d’aménagement, réformes institutionnelles, sécurité etc.)169

. De même, la diversité des terrains observés au Cameroun (Yaoundé, Douala et Kribi) permet de montrer les limites relatives de certains « paradigmes globaux de gestion et de gouvernement

des villes » mis en œuvre par les grandes institutions internationales : ce qui prime ici comme

dans d’autres recherches empiriques menées ailleurs, « c’est la diversité des conceptions et

formes historiques nationales et locales de mise en œuvre de ces paradigmes »170.

Au cœur des relations entre ces jeux d’échelle se trouve la question de la décentralisation, entendue comme un transfert de responsabilités, de ressources humaines et financières et de compétences des États à des échelons inférieurs démocratiquement élus171. De nombreux acteurs influents au sein du gouvernement camerounais, dans les agences de développement international et dans le milieu universitaire. Or, la scène locale n’est pas moins soumise que la scène nationale à des enjeux de pouvoir et à des conflits politiques, économiques et socio-culturels172.C’est ce qu’indiquent les préoccupations suivantes qui analysent dans une perspective sociologique les relations ambivalentes nouées entre quelques acteurs individuels (chefs de quartier ou de village) ou des groupes d’intérêt collectif (associations, syndicats, milices) et les fonctionnaires et élus du gouvernement local ou national. Dans des domaines aussi variés que la gestion foncière, la gestion des marchés et des gares routière et la prise en charge de la sécurité par les citadins.

168

Fourchard (L.), (Dir.) ,2007 : Gouverner les villes Afrique. Etat, gouvernement local et acteurs privés, Op.cit. , Pp. 11-12.

169 Idem.

170Dorrier-Apprill, (E.)& Jaglin, (S.), 2002 : « Gestions urbaines en mutation : du modèle aux arrangements locaux », Op.cit., p.6.

171 Fourchard (L.), Op. cit., p.13.

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Il sera donc question ici d’analyser dans les confins de la gestion urbaine, les services dans lesquels sont le plus souvent observés des relations de concurrence, de conflit et de confrontation entre les acteurs de la gestion urbaine et dont les villes de Yaoundé, Douala et Kribi constituent des terrains d’expression de ces rapports et des lieux d’expérimentation du système urbain moderne de gestion locale des services qui concourent à la bonne gouvernance urbaine de notre terroir, mais aussi au développement local et à l’amélioration des conditions de vie des populations urbaines. Ainsi sont ici présentés dans un premier pan le contrôle et la gestion des services tels que les marchés et les gares routières, mais aussi la question de passation et de gestion des publics locaux (Paragraphe I). Et dans un second, le contrôle et la gestion des aménagements de l’environnement urbain, des politiques foncières, mais aussi de la sécurité urbaine (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LES RAPPORTS ENTRE ACTEURS DE LA GESTION URBAINE

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