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LA VALORISATION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DES SDIS

Paragraphe 1 Le rôle des communes et des EPC

De prime abord, il pourrait sembler que les communes et EPCI n’ont plus grand rôle à jouer dans la nouvelle politique patrimoniale des SDIS (A) mais en pratique, nous verrons que ceux-ci sont encore bien présents et ont encore parfois une réalité forte (B).

A. Un rôle restreint en apparence

Il serait loisible de penser que depuis la loi du 3 mai 1996 relative aux services d’incendies et de secours, les communes et EPCI n’ont plus qu’un rôle restreint en matière immobilière dans la gestion des SDIS. En effet, le principe retenu du transfert de compétences à un établissement public départemental unique, a eu pour effet de distendre le « cordon ombilical » entre les communes et les sapeurs-pompiers, à tout le moins en ce qui concerne les biens mobiliers et immobiliers nécessaires au fonctionnement du service public.

Toutefois, l’article L. 1424-17 du CGCT issu de la loi de 1996, a prévu une mise à disposition de principe des biens nécessaires au fonctionnement des SDIS nouvellement créés, nous l’avons vu dans de précédents développements. Et même si un autre article du même code permet un transfert en pleine propriété, les faveurs des communes se sont principalement tournées vers la technique de la mise à disposition. Ainsi, la majorité des CIS des SDIS de France appartient encore en propriété aux communes et/ou EPCI qui disposaient avant 1996 d’un corps de sapeurs-pompiers.

Et même si la compétence en matière de construction ou de réhabilitation de casernes de sapeurs-pompiers découle depuis lors au SDIS en application de l’article L. 1424-12 du CGCT qui dispose que « le SDIS construit, acquiert ou loue les biens nécessaires à son

fonctionnement », il s’avère que les communes et EPCI ont encore un rôle dans la gestion patrimoniale des SDIS.

B. Un rôle qui subsiste en matière de financement et pour certaines opérations immobilières

Le rôle des communes et EPCI peut subsister dans certains cas, notamment lorsque ceux-ci souhaitent s’associer au financement d’un investissement immobilier ou en application de l’article L. 1424-18 du CGCT.

o Le cofinancement des opérations immobilières

S’agissant des constructions nouvelles, aucun texte réglementaire ou législatif ne permet d’imposer aux collectivités une participation financière directe quelconque. Toutefois, ces collectivités peuvent vouloir s’associer au projet porté par le SDIS pour diverses raisons. En ce cas, rien n’interdit aux communes d’apporter un financement supplémentaire au SDIS sous la forme de subventions ou de concours en vue de la réalisation d’une opération d’investissement323.

323 Question au gouvernement n° 57824 de Mme Zimmermann Marie-Jo (UMP – Moselle) relative au finance-

o Les opérations de grosses réparations, d'extension, de reconstruction ou d'équipement d'un centre d'incendie et de secours existant à la date de la mise à disposition (article L. 1424-18 du CGCT)

L’article L. 1424-18 du CGCT prévoit que « sur sa demande, la commune ou

l'établissement public de coopération intercommunale ou le département peut se voir confier, par le service départemental d'incendie et de secours, la responsabilité d'une opération de grosses réparations, d'extension, de reconstruction ou d'équipement d'un centre d'incendie et de secours existant à la date de la mise à disposition. Cette opération doit avoir fait l'objet d'une décision préalable de financement de la commune, de l'établissement public de coopération intercommunale ou du département ».

Cet article pose deux conditions : le bien doit avoir été mis à disposition par convention, et l’opération doit avoir fait l’objet d’une décision préalable de financement de la part de la collectivité.

Ainsi, avant toute mise à disposition, l’article L. 1424-12 s’applique : le SDIS, seul compétent pour les opérations nouvelles de construction, d'extension, de rénovation, ou de grosses réparations qui n'ont pas reçu un début d'exécution, peut soit réaliser directement l'opération en qualité de maître d'ouvrage, soit en confier la réalisation à un mandataire de son choix sur le fondement de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d' œuvre privée (loi MOP).

Le dispositif prévu par l'article L. 1424-18 s'analyse comme un appel à responsabilité dans lequel la collectivité bénéficiaire assure la maîtrise d'ouvrage des opérations, sous réserve d'avoir au préalable pris une décision de financement de cette opération. Il se distingue en conséquence du mandat de maîtrise d'ouvrage délégué que peut accorder le SDIS à une collectivité pour la réalisation d'une opération d'investissement sur le fondement de la loi MOP, qui fait du financement une prérogative du maître de l'ouvrage, en laissant au maître d'ouvrage délégué la possibilité de faire l'avance des fonds nécessaires à la réalisation des travaux, à charge pour le maître de l'ouvrage de les lui rembourser.

o L’apport de la jurisprudence « Val de Garonne »324 à la matière.

A la faveur d’un contentieux qui opposa l’Etat et la Communauté de communes Val de Garonne, le Conseil d’Etat a apporté des précisions quant à la participation des EPCI aux investissements immobiliers des SDIS.

Lors d’un audit, le SDIS du Lot-et-Garonne avait estimé que les trois quarts de ses CIS nécessitaient soit une reconstruction, soit un agrandissement ou une réhabilitation. Afin de mettre en œuvre ce plan, un partenariat financier avait été mis en place entre le SDIS, le département et les communes défendues en premier appel par le CIS concerné. Les collectivités devaient participer sous forme d’une subvention d’équipement après la conclusion de conventions tripartites.

Le SDIS n’avait pas opté pour l’utilisation de l’article L. 1424-18 du CGCT mais avait souhaité garder la gestion directe de l’article L. 1424-12 précité.

Or, certaines communes ont projeté de transférer à la fois le « contingent service d’incendie et de secours » et cette charge à l’EPCI dont elles étaient membres sur la base de l’article L. 5211-17 alinéa 1 du même code qui prévoit que « les communes

membres d'un établissement public de coopération intercommunale peuvent à tout moment transférer, en tout ou partie, à ce dernier, certaines de leurs compétences dont le transfert n'est pas prévu par la loi ou par la décision institutive ainsi que les biens, équipements ou services publics nécessaires à leur exercice » et selon les formes prescrites aux alinéas suivants.

Le représentant de l’Etat dans le département a refusé de prononcer le transfert au profit de l’EPCI de la compétence portant sur le contingent mais aussi de la participation aux investissements des CIS. Le Tribunal administratif de Bordeaux a dans un premier temps annulé la décision du Préfet avant que la Cour administrative d’appel ne prenne le contrepied en réformant le jugement dans le sens de l’Etat. Le Conseil d’Etat, saisi par la communauté de commune, va dissocier la problématique du transfert de compétence à un EPCI n’ayant pas détenu la compétence lors de la

324 CE, 22 mai 2013, « Val de Garonne », n° 354992 ; AJCT nov. 2013, « Participation des EPCI au

financement des SDIS : le Conseil d’Etat distingue entre le financement de l’immobilier et la contribution au budget », E. Péchillon.

promulgation de la loi du 3 mai 1996, de celle de la participation des communes aux investissements immobiliers des CIS transférés au SDIS.

Ainsi, en application de l’article L. 1424-35 du CGCT, le Conseil d’État (ré) affirme que la contribution d’une commune au budget du SDIS ne peut pas faire l’objet d’un transfert à un EPCI dont elle est membre, puisque cette contribution constitue une dépense obligatoire pour la commune.

Par contre, au visa des articles L. 1424-17 et L. 1424-18 du CGCT, la haute juridiction valide la possibilité pour une commune de prendre en charge la responsabilité d’une opération de grosses réparations, d’extension, de reconstruction ou d’équipement d’un CIS mis à la disposition du SDIS en application de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 et de transférer cette mission à un EPCI.