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Chapitre 2 : Cadre conceptuel

2.1 L’expérience socioscolaire d’élèves récemment immigrés

2.1.1 Quelques définitions sur des thèmes inhérents à l’expérience socioscolaire

2.1.1.3 De la réussite scolaire à des concepts plus «englobants»

Différents angles sont choisis dans les écrits pour traiter de l’expérience et du parcours des enfants dans le milieu scolaire. Dans les écrits francophones, les termes suivants reviennent souvent : «cheminement scolaire» (Lafortune et Balde, 2012; Mc Andrew, Ledent, Murdoch, Ait-Said et Balde, 2013), «réussite scolaire» (Deslandes et Royer, 1994; Bouchard, Deslandes et St-Amant, 1998; Kanouté et al., 2008), «réussite éducative» (Mc Andrew, Tardif-Grenier et Audet, 2012; Tardif-Grenier, 2015), «expérience (socio)scolaire» (Bakhshaei, 2015; Charlot et Rochex, 1996; Potvin, Carignan, Audet, Bilodeau et Deshaies, 2010; Potvin at al., 2013). Dans un article qui traite spécifiquement d’élèves immigrants, Jacquet et Masinda (2014) proposent de recourir au concept d’«intégration scolaire». Dans les écrits en anglais, parmi d’autres, les thèmes suivants sont souvent sollicités : «academic achievement» (Fan et Chen, 2001; Portes et McLeod, 1999; Sirin, 2005), «educational experience» (Nishida et Nakanishi, 1995; Zhou et Bankston, 2001). La variété des termes employés dans les écrits montre la tentative de la recherche à cerner une expérience qui ne concerne pas seulement le rendement scolaire des élèves, mais aussi d’autres facettes de leur expérience sociale et scolaire. De façon générale, peu importe l’angle ou les concepts choisis par les chercheurs ou par les chercheuses, les travaux qui s’attardent à l’expérience des enfants et des jeunes à l’école convergent vers des préoccupations semblables : favoriser la réussite scolaire des élèves ou soutenir l’intégration sociale de ces derniers dans le milieu scolaire et dans la société plus largement.

Au sens strict, la réussite scolaire concerne le rendement, le taux de diplomation d’une population d’élèves en particulier (Baby, 2010); elle se définit par «les résultats qui sanctionnent l’acquisition des connaissances et de compétences dans le cadre d’un programme de formation donné» (Kanouté et Lafortune, 2011b, p.82). En ce sens, le concept de réussite scolaire semble principalement relever de la mission de l’école qui vise à instruire les élèves (Baby, 2010; Bakhshaei, 2015). Jeynes (2003), dans le cadre d’une méta-analyse qui étudie l’impact de l’implication parentale sur les performances scolaires des élèves, recourt aussi à cette notion afin de traiter des notes et des résultats des élèves à différents tests, auxquels il ajoute les observations et les mesures prises par le personnel enseignant au sujet des élèves, les comportements et les attitudes des jeunes

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envers et à l’école. Ainsi, depuis quelques années, le concept de réussite scolaire tend tranquillement à s’élargir et à se transformer en celui de réussite éducative, rejoignant davantage les trois missions de l’école québécoise : instruire, socialiser et qualifier (Baby, 2010; Deslandes, 2010; Kanouté et Lafortune, 2011b). Dans cette optique, la réussite éducative concerne plutôt l’ensemble des acquisitions cognitives, affectives et sociales des élèves (Kanouté et Lafortune, 2011b).

Baby (2005) a fait une étude auprès de divers protagonistes du milieu scolaire, qui travaillaient au niveau de la recherche, de l’administration, de l’intervention ou de la prise de décision, lors du 4e colloque du Centre de transfert sur la réussite éducative : Tous ensemble pour la réussite. Un forum virtuel installé dans le hall invitait les personnes présentes au colloque à proposer une définition collective du concept de réussite éducative. Une analyse par thèmes a fait ressortir de façon quantitative les mots suivants : rendement (capacités intellectuelles, compétences interculturelles, difficultés d’apprentissage, note de passage, échec, rendement scolaire, résultats scolaires, succès), motivation (démotivation, aspirations scolaires, atteinte d’objectifs, buts personnels, désir d’apprendre, projets d’avenir, réussite, valorisation du savoir), acquisition de connaissances et diplomation. L’évocation d’autres thèmes comme le contexte familial, le contexte scolaire et l’intégration sociale a aussi montré l’ancrage du concept de réussite éducative dans des dimensions plutôt sociales. Ainsi, Baby (2010) propose d’affiner le concept de réussite scolaire à celui de réussite éducative scolaire.

Dans une recherche québécoise qui s’attarde particulièrement à l’expérience sociale et scolaire d’élèves immigrants en contexte de défavorisation, des auteures proposent de recourir au concept d’«expérience socioscolaire» (Potvin et al., 2010). Le concept d’expérience socioscolaire englobe diverses dimensions de l’expérience des jeunes et des enfants à l’école : scolaires, affectives, sociales, révélant ainsi la complexité de cette expérience. Aussi, le concept semble laisser une place importante à l’influence des environnements intégrés par l’élève et de leurs interactions entre eux (Potvin et al., 2010). Dans l’étude de Potvin et al. (2010), les auteures visaient à :

mieux comprendre les processus par lesquels les jeunes construisent leur expérience scolaire au fil de leur parcours de vie, à partir des processus

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d’adaptation socioculturelle, liés à l’expérience migratoire des jeunes ou de leur famille, des logiques proprement scolaires et des socialisations plurielles provenant de l’interaction avec la famille, les pairs et les protagonistes scolaires. (p.520)

Ainsi, nous croyons que le concept d’expérience socioscolaire rejoint bien la perspective écosystémique qui inspire notre projet de recherche, qui s’attarde principalement aux représentations de l’école de parents, ancrées dans un milieu social en particulier et au soutien scolaire apporté aux élèves par les parents en contexte migratoire, à l’intérieur et à l’extérieur des murs de l’école. Nous privilégions le concept d’expérience socioscolaire à celui de réussite éducative scolaire, surtout parce que le premier axe moins sur la réussite, mais plutôt sur une expérience généralement positive des élèves dans le milieu scolaire québécois.

En somme, selon les écrits recensés, il semble que l’expérience socioscolaire des jeunes et des enfants soit constituée de dimensions diverses et que celle-ci soit soutenue par divers protagonistes, qui sont en interaction. Le schéma 1 de la page 53 illustre diverses dimensions de l’expérience socioscolaire des élèves qui sont notamment prises en compte dans l’élaboration du schéma d’entrevue administré aux parents, lors de notre collecte de données. Sans être exhaustifs, les éléments présentés dans le schéma illustrent la complexité de l’expérience socioscolaire.

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La partie qui suit explore trois niveaux de facteurs qui sous-tendent l’expérience socioscolaire des élèves en général, soit des facteurs plutôt «individuels», «scolaires» et «familiaux».

2.1.2 Trois niveaux de facteurs qui sous-tendent l’expérience socioscolaire des