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Résultats et discussion du modèle

3.1 Modélisation du pont par un système de dièdres Description cinématique

3.2.3 Résultats et discussion du modèle

La modélisation décrite ci-dessus est utilisée dans le cas de deux gouttes de solution aqueuse de MgSO4 identiques, de rayons R = 250 µm, correspondant à la séquence d’images

de la Fig.3du chapitre 2.

La Fig.9 compare les valeurs expérimentales de Rm(t)à celles calculées numériquement par

le modèle. L’instant t = 0 correspond à la rupture des interfaces. Dans les premiers instants de la phase d’expansion, la géométrie auto-similaire et l’absence de courbure méridienne de la partie centrale du pont n’apparaissent pas. Ainsi, le modèle ne peut pas être utilisé entre t = 0et t = 30 µs. L’instant d’initialisation est ici pris à t0 = 30 µs.

t (ms) 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 R m ( µ m) 60 80 100 120 140 160 180 200 220 Rm calcul´e Rm exp´erimental t0

Figure 9: Évolution temporelle du rayon du pont Rm(t), comparaison entre les

valeurs mesurées par détection du contour et celle calculées numériquement par le modèle.

Sur toute la phase d’expansion où t t0, on constate une assez bonne adéquation entre

les valeurs calculées et les valeurs expérimentales. Les deux séries de valeurs s’éloignent vers la fin du processus, essentiellement parce que la valeur de l’angle des dièdres devient sensi- blement différente de celle adoptée pour le calcul. Malgré son caractère bidimensionnel, ce modèle semble donc convenir pour décrire les processus essentiels qui interviennent dans la phase d’expansion du pont.

La Fig. 10donne l’évolution du profil de pression à l’interface r = Rm, durant la phase

d’expansion. Le modèle est donc convenable également pour décrire ce champ de pression : ce dernier est pratiquement indépendant de z et vérifie la condition aux limites p = /Rm

sur la partie de l’interface de courbure méridienne nulle (Fig. 10 (b)). La pression devient fortement négative lorsqu’on approche les zones de singularité A1 et A2, conformément aux

observations expérimentales sur la courbure de l’interface dans ces zones. Nous retrouvons le point important évoqué précédemment : les régions de forte dépression et de forte vitesse

restent très localisées au niveau des singularités et n’ont aucune tendance à l’étalement, comme nous l’avons observé avec la forme de l’interface.

z/(l/2) -1 -0.5 0 0.5 1 p/ (2 γ /R ) -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 t croissant (a) z/(l/2) -1 -0.5 0 0.5 1 p/ ( γ /R m ) -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 (b)

Figure 10: Évolution temporelle du profil des pressions à l’interface r = Rm, aux

instants t = t0 + n⇥ tcam, pour n = 0 à 5. (a) Pression normalisée par la pres-

sion d’équilibre des gouttes initiales 2 /R. (b) Pression normalisée par la valeur à l’interface, imposée par la condition aux limites /Rm.

La Fig. 11 compare les ordres de grandeur des différents termes de l’équation de Ber- noulli3.5. Ce graphe montre clairement que le caractère non stationnaire de l’écoulement a un rôle très faible, le terme en @

@t étant négligeable devant le terme en v2. Ce modèle permet

donc de comprendre quels sont les effets dominants dans la dynamique d’expansion radiale du pont. z/(l/2) -1 -0.5 0 0.5 1 p ∗ -5 0 5 10 (v∗)2/4 1 2∂Φ ∗ ∂t∗ p∗

Figure 11: Comparaison des ordres de grandeur des termes de l’équation de Ber- noulli 3.5, à t = t0+ tcam= 40µs.

3.3 Conclusion

Dans cette première partie, les échelles de longueur et de temps auxquelles nous avons accès, par mesures optiques avec une caméra rapide, ont une limite inférieure de l’ordre de 5µm et 10µs. Nous avons étudié, à ces échelles, la phase d’approche des gouttes dans l’air et la phase d’expansion du pont liquide formé à la coalescence. Nous avons montré que les vitesses d’approche et la viscosité du fluide externe sont telles qu’aucune déformation détectable des gouttes ne se produit avant la formation du pont.

Nous avons mesuré l’évolution temporelle de la longueur et du rayon du pont lors de la phase d’expansion, et montré que les vitesses caractéristiques de ces évolutions ne dépendent pas des conditions de rupture des interfaces, qui font intervenir des interactions à l’échelle du nanomètre. Nous avons, en outre, mis en évidence plusieurs régimes d’écoulement lors de la phase d’expansion, qui dépendent exclusivement de la nature du fluide (sa viscosité et sa tension superficielle essentiellement) et non des conditions d’approche ou de déclenchement de la coalescence. Nous avons ici deux indices de l’absence de couplage entre les échelles du nanomètre et celle du micromètre dans le processus de coalescence.

Nous avons étudié en détail le régime inertiel, pour lequel aucun modèle complet n’a pour l’instant été élaboré. Nous avons mis en évidence une géométrie d’interface très spé- cifique, que nous avons interprétée par un système d’ondes capillaires formant une onde solitaire, dont les deux fronts d’onde se propagent sans déformation de la zone de rupture initiale des interfaces vers les extrémités du pont. Ces fronts, générés par un couplage non linéaire entre les forces de tension superficielle de grande amplitude et la dynamique du fluide interne, dominée par l’inertie (non linéaire également), façonnent la forme de l’interface et laissent derrière eux une zone sans courbure méridienne, quasi-cylindrique.

Nous avons mis en évidence 4 lignes de singularité sur l’interface, lieux de courbure infinie à l’échelle du micromètre, qui sont la trace des phénomènes qui se sont produits à l’échelle du nanomètre au moment du perçage des interfaces. L’existence de ces lignes, qui conservent au cours de leur propagation un rayon de courbure inférieur au micromètre, révèle un lien entre les deux échelles.

Nous avons, en outre, construit un modèle assez simple à 2 dimensions, pour décrire l’écoulement dans le pont, en nous appuyant sur la forme spécifique de l’interface mise en évidence expérimentalement. Ce modèle d’écoulement potentiel dans un système de parois constitué de 4 dièdres, compatible avec les symétries et les conditions aux limites imposées aux interfaces, permet de prévoir l’évolution temporelle du rayon du pont, et donne des résultats assez proches des observations expérimentales. Il permet en outre, grâce à sa simplicité, de comprendre quels sont les effets dominants dans le processus d’expansion radiale du pont : la forte dépression aux zones de singularité et l’accélération convective du fluide dans ces zones. Nous avons montré que ces singularités restent localisées sur des domaines dont la dimension

est de l’ordre des rayons de courbure en ces points, négligeables à l’échelle du micromètre car liées aux phénomènes responsables du perçage des interfaces à une échelle bien inférieure. Cette étude expérimentale, complétée par modèle, permettant de décrire le comportement du fluide et des interfaces à l’échelle du micromètre, est insuffisante pour comprendre les mécanismes qui sont à l’origine du perçage des interfaces et du déclenchement de la coales- cence. Pour explorer ce domaine, il nous faut changer d’échelle de longueur et d’instrument d’observation.

Étude de la coalescence à l’échelle du

nanomètre

Le microscope à force atomique

Dans ce chapitre, l’objectif est de décrire le principe de fonctionnement du microscope à force atomique (Atomic Force Microscope AFM), ses différents modes et en particulier le mode FM-AFM que nous serons amenés à exploiter pour étudier la coalescence à l’échelle du nanomètre.

Après une rapide présentation des utilisations de l’AFM, nous décrirons ses principaux éléments constitutifs puis étudierons en détail le comportement mécanique d’une sonde AFM, libre puis en présence d’un échantillon avec lequel elle interagit. Nous en déduirons une mo- délisation mécanique simple de cette sonde par un système masse ponctuelle + ressort de raideur k. Le modèle permet d’expliciter les caractéristiques mécaniques du système (raideur, facteur de qualité) et la calibration permet de déterminer expérimentalement ces caractéris- tiques. Nous expliquerons en quoi consiste ce procédé, qui est la première étape, essentielle, dans toute utilisation d’une sonde AFM.

Nous nous focaliserons, en dernière partie du chapitre, sur le fonctionnement du mode dyna- mique FM de l’AFM, nous décrirons les asservissements qu’il nécessite et les mesures qu’il permet de réaliser.

4.1 Vue d’ensemble de l’AFM et ses utilisations

L’invention en 1982 du Microscope à Effet Tunnel (STM pour Scanning Tunneling Mi- croscope), par Binnig, Rohrer et Gerber Binnig et al. [1982], Binnig et al. [1983] a permis d’atteindre, en imagerie de surface, une précision atomique. La résolution spatiale spectacu- laire du STM, dont les inventeurs ont été récompensés par le Prix Nobel de Physique en 1986, a permis une étude des propriétés de surface à une échelle encore jamais atteinte, l’échelle atomique, pour de très nombreux métaux et semi-conducteurs. Mais ce dispositif, malgré son importance révolutionnaire, a une limitation substantielle : on ne peut étudier que des maté- riaux conducteurs. D’autre part, il ne peut être utilisé que dans des conditions d’ultra-vide.

L’AFM, inventé par Binnig, Quate et Gerber [Binnig et al., 1986] en 1986, permet de fran- chir ces limitations liées aux conditions d’utilisation. Pour cette raison, l’AFM a acquis ces dernières années une importance considérable dans le domaine des nanomatériaux et de la biologie cellulaire et moléculaire [Giessibl,2003].

Figure 1: Extrait de l’article fondateur de l’invention de l’AFM - Physical Review Letter - Mars 1986 [Binnig et al.,1986]

Le succès de l’AFM est essentiellement dû à sa capacité à étudier de manière quan- titative les propriétés des matériaux ou micro-organismes biologiques à l’échelle atomique ou moléculaire. Les AFM se déclinent selon de multiples versions et peuvent être utilisés en imagerie, pour l’étude des propriétés des matériaux (adhésion, élasticité, ...), manipulation de molécules comme des protéines, études des réponses mécaniques de cellules vivantes...[Garcıa and Perez,2002].

En outre, une large part des développements de l’AFM concerne les mesures directes de forces d’interaction de l’ordre du nN, par détection de la déflexion d’un micro-levier por- tant à son extrémité une pointe qui interagit avec un échantillon. La mesure de la déflexion conduit à une détermination quantitative de la force exercée par l’échantillon sur la pointe si on connait précisément les propriétés mécaniques du levier.

Parmi ces travaux , on peut citer les mesures de forces en solution aqueuse, entre une pointe AFM colloïde de silice hydrophile ou hydrophobe et une bulle d’air fixée sur un support [Ducker et al., 1994], [H.J.Butt, 1994],ou entre une pointe et une gouttelette d’hexadécane posée [Aston and Berg,2001], [Dagastine et al.,2005a]. Ces études introduisent et utilisent la

notion de raideur de l’interface bulle/milieu ambiant ou goutte/milieu ambiant et proposent une méthode expérimentale pour sa détermination. Nous serons amenés dans cette thèse à réutiliser cette notion de rigidité de l’interface, que nous relierons à la tension superficielle.

Les études, en microscopie atomique, des interactions entre bulles en milieu aqueux [Vakarelski et al., 2010], ou entre gouttelettes en milieu aqueux [Dagastine et al., 2005b], [Lockie et al.,2011], mesurent aussi les forces exercées entre une bulle (ou goutte) ancrée à l’extrémité du levier et une bulle (ou goutte) posée sur un support, le milieu ambiant étant toujours une solution aqueuse. Elles visent à explorer les mécanismes qui conduisent à la coalescence et les déformations subies par les bulles ou les gouttelettes, lors du drainage du fluide externe.