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Le réseau RINBIO et le suivi des lagunes Méditerranéennes

B R U N O A N D R A L

IFREMER - LABORATOIRE ENVIRONNEMENT RESSOURCE PROVENCE AZUR CORSE ZONE PORTUAIRE DE BRÉGAILLON - BP 330, 83 507 LA SEYNE-SUR-MER CEDEX

BRUNO.ANDRAL@IFREMER.FR

Comme les « Mussel watch », le réseau RINBIO se base sur les capacités bioaccumulatrices de la moule, mais utilise la technique des transplants pour s'affranchir de la faible disponibilité des stocks naturels de coquillages et de la bathymétrie des sites échantillonnés. Les moules (Mytilus Galloprovincialis), issues d’un lot unique et conditionnées en poches d’environ 3 kg sont fixées à des mouillages de subsurface placées sur des stations prédéfinies (position, bathymétrie). Le mouillage est léger, discret, adapté à toutes les conditions hydrodynamiques (Figure 1).

Il procure beaucoup de souplesse au plan d’échantillonnage (nombre de stations, distance à la côte, hauteur de l’échantillon dans la colonne d’eau). Les contaminants analysés sont ceux des conventions internationales.

Le RINBIO, dans sa configuration opérationnelle, comporte environ 75 stations de mesure en mer et 30 en lagune (Figure 2) et permet de couvrir les 50 zones homogènes du SDAGE RM&C, sur les bases d’un protocole expérimental standardisé et reproductible, avec des coûts optimisés et des taux de récupération supérieurs à 95 %. Chaque campagne opérée tous les trois ans entre le mois de mars (pose) et le mois de juin (relève) permet ainsi d’obtenir une photographie de la contamination chimique le long des 1800 kilomètres de côtes méditerranéennes françaises, y compris dans des zones qui n’ont jamais été prospectées en l’absence de populations naturelles de moules.

Figure 1 : Schéma et photo de la structure du mouillage RINBIO

Depuis 2006, le réseau RINBIO contribue également à évaluer les niveaux de contamination chimique des masses d’eau pré-identifiées au titre de la Directive cadre sur l’eau. En 2006, il a constitué le réseau pivot autour duquel s’est structuré le programme du contrôle de surveillance sur les Districts Rhône et Côtiers Méditerranéens et Corse, en 2009 la campagne RINBIO a permis de renseigner toutes les masses d’eau retenues au titre du contrôle de surveillance et du contrôle opérationnel.

Ces campagnes ont ainsi permis d’évaluer les niveaux de contamination pour 29 des 41 substances que comptent les annexes IX et X de la DCE et, pour la première fois en 2009, d’évaluer les niveaux de contamination des pesticides et substances pertinentes retenues à l’annexe IV de la Directive.

Malgré un protocole standardisé, la variabilité trophique des eaux de la Méditerranée peut brouiller le signal obtenu par la mesure directe des contaminants dans la chair des moules. La croissance peut agir comme un facteur de dilution de la quantité de contaminant incorporée, l’amaigrissement comme un facteur de concentration (Fischer., 1984). L’utilisation d’un indice de condition (rapport du poids sec de chair sur le poids sec de coquille), représentatif de l'état physiologique et de la croissance des échantillons, permet de corriger ce biais. Quels que soient le

Figure 2 : stations RINBIO récupérées et analysées lors de la campagne 2009

secteur trophique et les contaminants, il existe une liaison effective entre indice de condition / concentration en contaminant qui discrimine les sites contaminés.

On détermine alors pour chaque contaminant un modèle de correction des effets biologiques pour obtenir un résultat représentatif de la concentration en contaminant biodisponible du milieu. Ce modèle permet, à l’échelle du réseau, d’ajuster les résultats à un individu standard et de les comparer indépendamment de l’hétérogénéité physico-chimique et trophique des sites expérimentés (Andral et al., 2004).

A l’échelle du réseau, les taux de mortalité sont de l’ordre de 15 % en grande partie imputables aux stress des opérations de calibrage et non aux conditions de stabulation à l’exception de certaines lagunes où des conditions de stabulation plus extrêmes peuvent être rencontrées (salinité faible, température élevée de l’eau au printemps, anoxies…).

L’analyse de la distribution de l’indice de condition montre globalement les mêmes tendances depuis la mise en œuvre du réseau (1996). Toutes les stations mer situées à l’Ouest de Marseille présentent un caractère mésotrophe, très favorable à la croissance des moules, en relation avec l’influence du panache du Rhône. A l’Est et en Corse, les eaux prennent un caractère oligotrophe. Les stations lagunaires se situent en position intermédiaire et présentent à leur échelle une hétérogénéité plus importante en relation avec leur configuration bathymétrique et les apports des bassins versants qui les alimentent (Figure 3).

Figure 3 : distribution de l’indice de condition de la campagne RINBIO 2009. Les stations en lagune sont représentées en vert, les stations en mer ouverte en bleu

En ce qui concerne les niveaux de contamination pour les métaux lourds, les secteurs présentant les niveaux les plus élevés sont l’étang de La Peyrade (plomb, cadmium), la petite rade de Toulon (plomb, mercure), la lagune de Bages (cadmium, cuivre), la lagune du Prévost (argent), la côte Nord - Ouest de la Corse (nickel, chrome). Pour les 4 stations opérées dans l’étang de Berre (Arc, Ranquet, Mède et Centre) il n’existe pas de différence importante entre chacune d’entre elles à l’exception du Nickel qui présente des niveaux plus élevés à la station Berre Centre.

Pour les molécules organiques, la contamination est plus diffuse avec plusieurs secteurs impactés notamment les étangs de La Peyrade, du complexe palavasien, de la petite rade de Toulon pour les PCBs. Pour les composés du DDT se sont essentiellement les étangs languedociens qui sont impactés (La Peyrade, le complexe palavasien). Pour les HAPs ce sont les étangs de La Peyrade, du Grec, de Berre et la petite rade de Toulon qui présentent les niveaux les plus élevés. Dans l’étang de Berre les niveaux les plus élevés ont été mesurés sur la station Berre Ranquet (Figure 4).

Figure 4 : concentrations en Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques de la campagne RINBIO 2009.

Les stations en lagune sont représentées en vert, les stations en mer ouverte en bleu

Concernant les molécules complémentaires des annexes IX et X de la DCE, les résultats montrent que seuls l’endosulfan, le tributylétain et le 4 para-nonylphénol dépassent les limites analytiques de la méthode utilisée sur un nombre réduit de stations, tout comme les phtalates, le pentachlorophénol, l’heptachlore et la procymidone en ce qui concerne les molécules de l’annexe IV.

Au niveau de l’étang de Berre, seule la station Berre Centre a été échantillonnée et n’a montré, sur l’ensemble des contaminants recherchés, qu’un pic relatif pour l’endosulfan.

SYNTHÈSE

A l’échelle spatiale du réseau RINBIO les informations recueillies montrent qu’il existe des apports significatifs de métaux lourds (plomb, mercure, cadmium, nickel, chrome), de PCBs et d’Hydrocarbures plus particulièrement dans les zones industrielles (golfe de Fos, Sète, Port la Nouvelle), d’anciens centres miniers ou industriels (Marseille, Canari), les grands centres urbains (Marseille, Toulon, Nice) et les embouchures de fleuves (Rhône et Hérault). Les niveaux les plus élevés se retrouvent dans le milieu littoral au sens strict (lagunes et infralittoral), à proximité des sources potentielles d’apports, puis subissent une dispersion – dilution vers le large ; de ce fait quelques métaux ou molécules sont caractéristiques de certaines zones et tracent leur origine.

Les lagunes sont cependant plus impactées, en relation notamment avec la proximité des bassins versants, la capacité de renouvellement des eaux, leur degré de confinement et des stocks sédimentaires historiquement contaminés. A la différence de ces apports localisés, il est important de souligner une contamination historique diffuse par les métabolites du DDT sur l’ensemble des espaces lagunaires.

Références bibliographiques

Andral B., Stanisiere J. Y., Sauzade D., Damier E., Thebault H., Galgani F., Boissery P.2004. Monitoring chemical contamination levels in the Mediterranean based on the use of mussel caging. Marine Pollution Bulletin. 49 . 704 – 712.

Claisse D., Joanny M., Quintin J Y., 1992. Le réseau national d’observation de la qualité du milieu marin (RNO) . Analusis . 6 : 19 - 23.

Fischer H ., 1984. Cadmium body burden/Shell weight of mussel : a precise index for environmental monitoring. Comm Meet in Count Explor See CM - ICES/E 41 : 1 - 19.

O’Connors T. P., 1992. Mussel Watch: recent trends in coastal environmental quality.

U. S. Department of Commerce. National Oceanic and Atmospheric Administration.

Soto M., Kortabitarte M., Marigomez I., 1995. Bioavailable heavy metals in estuarine waters as assessed by metal/shell weight indices in sentinel mussels Mytilus galloprovincialis. Mar. Ecol. Pro. Ser. 125 : 127 - 136.

Wang W.X., Fisher N.S., Luoma, S. N., 1996. Kinetic determination of trace element bioaccumulation in the Mytilus edulis.Mar. Ecol. Prog. 140 : 91 - 113.

www.ifremer.fr/envlit/region/reg10paca/rlm.htm#RINBIO

www.ifremer.fr/envlit/index.htm, rubrique “Surveillance / Données”

INTRODUCTION

De par leur nature, les lagunes sont des milieux naturels plus ou moins confinés, qui présentent un taux variable de renouvellement de leurs eaux et qui ont tendance à piéger les différents apports du bassin versant et des entrées marines. Ce sont donc des écosystèmes fortement sensibles à l’eutrophisation, c'est-à-dire à un enrichissement excessif en matière organique et en nutriments, notamment en composés azotés et phosphorés. L’eutrophisation favorise la prolifération de producteurs primaires planctoniques et benthiques (ex.: ulves) au point de générer des impacts sur l’écosystème (baisse de biodiversité, appauvrissement en oxygène, réduction de la lumière disponible pour les herbiers, etc.) et sur les activités humaines (pêche, loisirs nautiques, etc.). Ainsi, la problématique de l’eutrophisation s’inscrit de manière prioritaire dans le Schéma directeur d’assainissement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée-Corse.

La question de l’eutrophisation intervient de façon évidente dans la démarche de réhabilitation de l’étang de Berre. Les trois masses d’eau de l’étang de Berre (Grand Etang, Vaïne et Bolmon) sont concernées par l’orientation 5-B du SDAGE : « lutter contre l’eutrophisation des milieux aquatiques ». De plus, les objectifs de la Directive cadre sur l’eau que sont l’atteinte du bon état écologique pour le Grand Etang et le Bolmon et l’atteinte du bon potentiel pour Vaïne en 2021, impliquent de diminuer

Bilan des apports à l’étang