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MATÉRIEL ET MÉTHODES 1 Suivi des transects permanents

La végétation aquatique submergée dans l’étang

2. MATÉRIEL ET MÉTHODES 1 Suivi des transects permanents

Jusqu'en 1995, seules des données qualitatives de présence/absence étaient relevées. A partir de 1996, une nouvelle méthodologie d’échantillonnage a été appliquée ; elle repose sur l’acquisition de données quantitatives le long de 31 transects distribués de façon homogène sur le littoral et repérés par des marques permanentes (Soltan & Francour, 2000). Chaque transect mesure 100 m de long et les dénombrements quantitatifs de trois espèces de Magnoliophytes et cinq genres de Chlorobiontes et de Rhodobiontes (Tableau 1) sont réalisés sur 50 cm de part et d'autre de l'axe du transect. Une estimation du recouvrement moyen de chaque espèce est effectuée tous les cinq mètres (surface échantillonnée : 5 m²), à l'aide d'une cotation allant de 0 à 5 (Tableau 2).

L’abondance des différents genres est donnée selon un indice semi-quantitatif (IAM, indice d’abondance moyen) qui conjugue les informations de fréquence et de recouvrement. L’IAM varie de 0 (espèce absente sur la totalité du transect) à 500 (espèce à fort recouvrement : 5, tout le long du transect).

2.2 Suivi des surfaces couvertes par les herbiers de zostères

Les sites d’étude ont été sélectionnés en fonction de la présence actuelle d’herbier de Z. noltii en s’appuyant sur un état de référence réalisé en juin 2004 pour l’ensemble de l’étang (Bernard et al., 2005 ; 2007). Sur les deux sites témoins de l’Arc et de la Pointe de Berre (qui totalisaient, en 2004, 90% des surfaces d’herbier résiduelles de l’étang), les surfaces couvertes ont été relevées annuellement, depuis 2006, à l'aide de photographies aériennes (fig. 1), couplées à des vérités terrain. Les clichés sont réalisés selon un protocole standardisé de prise de vue (altitude, angle, heure de prise de vue, résolution, contraste in Lefèvre et al., 1984).

L’analyse et l’interprétation des photographies ont été réalisées manuellement, en jouant sur les contrastes des clichés lorsque nécessaire. Ont été considérés comme de l’herbier les pixels au dessus d’une certaine valeur seuil. La précision obtenue dans l’interprétation des clichés est directement liée à la qualité et à la résolution des photographies (Leriche et al., 2004). Elle a été estimée en évaluant une couverture minimale et une couverture maximale des herbiers, en plus de la procédure normale de cartographie, en augmentant ou en diminuant la valeur seuil des pixels pris en compte. La marge d’erreur dans la digitalisation des contours GROUPES

Tableau 1. Espèces et groupes d'espèces retenus pour le suivi de la végétation aquatique submergée

Tableau 2. Codification utilisée pour estimer le recouvrement (exprimé en pourcentage) des macrophytes, sur 5 m², le long des transects de 100 m.

Chlorobiontes

d’herbier, est ainsi donnée en pourcentage par rapport à une surface couverte probable, cette incertitude est estimée à environ ± 5 %.

2.3 Vitalité et dynamique des herbiers de magnoliophytes

Le choix du protocole d'étude a porté préférentiellement sur des méthodes éprouvées et standardisées, notamment dans le cadre de suivis des herbiers de Posidonia oceanica en Méditerranée (Marcos-Diego et al., 2000 ; Boudouresque et al, 2000, 2006a,b) ou dans le cadre de suivis des herbiers de Zostera sur la cote atlantique (notamment dans le cadre des "recommandations pour un programme de surveillance adapté aux objectifs de la Directive Cadre Eau, 2005"). Les relevés pouvant être réalisésin situ ont été favorisés, dans le but de limiter les prélèvements et le traitement de matériel (préparation et tri des échantillons).

Figure 1. Emprises des photographies aériennes utilisées pour la détermination des surfaces d’herbier de Zostera noltii sur les sites témoin de l’Arc (en haut) et de la Pointe de Berre (en bas).

La densité des faisceaux de feuilles a été mesurée in situ, en plongée sous-marine.

Les faisceaux ont été dénombrés dans un quadrat de 20 cm sur 20 cm. 20 répliquats ont été réalisés, positionnés de façon aléatoire au sein des taches de Z. noltii.

Les prélèvements (3 répliquats) ont été effectués, au centre et en périphérie des taches deZ. noltii (à moins de 20 cm de la limite sable/herbier) à l'aide d'un carottier cylindrique en métal de 15 cm de diamètre, sur une profondeur de 20 cm (profondeur maximum des racines). Les faisceaux ont été dénombrés en distinguant les faisceaux apicaux des faisceaux latéraux et des faisceaux isolés orthotropes ("single small" sensu Brun et al., 2005). La densité de faisceaux florifères est également notée. Les feuilles, séparées dans leur ordre d’insertion, leur longueur et leur largeur ont été mesurées respectivement au millimètre et au centième de millimètre près. Le pourcentage de feuilles ayant perdu leur apex par l'action de l'hydrodynamisme ou du broutage est noté (Coefficient A ; Giraud, 1977). Les feuilles libres vivantes (vertes) présentes dans l’échantillon sont distinguées des feuilles insérées dans des faisceaux. Les épibiontes des feuilles ont été séparés par grattage au moyen d'une lame de rasoir. La longueur totale des rhizomes a été mesurée au millimètre près.

L'Indice de surface foliaire (LAI) est calculé comme suit (Brun et al., 2003) : [(surface foliaire totale / nombre de faisceaux) * densité de faisceaux.m-²]

L'intégrité des échantillons, définie comme le rapport entre les feuilles assemblées en faisceaux et les feuilles libres, renseigne sur la quantité de feuilles en épaves et sur le degré de conservation de la structure de l'échantillon après prélèvement : [Coeff. d'Intégrité = Σ(longueurs des feuilles en faisceaux) * 100 / Σ(longueur foliaire totale)]

Pour la mesure de la biomasse, les rhizomes et racines sont de nouveau soigneusement lavés à l’eau douce. L'ensemble du matériel est séché à 60°C pendant 48 heures ; la masse sèche de chaque fraction (endogée, épigée et épibiontes) est mesurée. Les ratios biomasse épigée / biomasse endogée et biomasse épibiontes / biomasse épigée ont été calculés.

2.4 Mesure de la lumière disponible

Deux méthodes de mesure ont été mises en œuvre :

- à l’échelle de l’étang : la transparence de l’eau a été relevée mensuellement au disque de Secchi sur 10 stations du suivi hydrologique. La profondeur de disparition du disque de Secchi permet de calculer un coefficient d’atténuation de l’énergie lumineuse dans l’eau (Kd) en relation avec la turbidité.

- un suivi plus précis des deux sites témoins de l’Arc et de la Pointe de Berre : des capteurs d’irradiance (HOBO®) ont été installés in situ, en continu de mai à octobre 2007, 2008, 2009 et 2010 à 1 ± 0,3 m de profondeur en limite inférieure des herbiers de Zostera noltii. Un capteur supplémentaire a été installé, en surface, de manière à pouvoir calculer l’atténuation lumineuse entre le rayonnement de surface et le rayonnement parvenant à 1 m de profondeur.

3. RÉSULTATS ET DISCUSSION

3.1 Répartition spatio-temporelle des principales espèces

Une forte régression générale et progressive des magnoliophytes est observée, tant en terme du nombre de signalisation depuis 1990 (date de début du suivi des macrophytes en terme de présence/absence) qu’en terme d’IAM depuis 1996 (date de début du suivi en terme de recouvrement et d’indice d’abondance, fig.2).

La disparition complète des espèces Ruppia cirrhosa et Potamogeton pectinatus, sur les 31 transects suivis, observée en 2005, s’est confirmée depuis.

L’augmentation moyenne de la salinité peut être à l’origine de la régression de ces espèces plus particulièrement adaptées aux eaux douces. Le nombre de signalisations et l’abondance de Zostera noltii ont également chuté régulièrement depuis le début du suivi, l’espèce n’est plus signalée que sur 2 à 3 transects, limitée aux 50 premiers mètres en partant du rivage, avec des abondances très faibles à anecdotiques.

La répartition spatiale des chlorobiontes le long des transects, du rivage vers le large, est dépendante pour les espèces du groupe Cladophora spp. et Enteromoropha spp. de la nature rocheuse du substrat. Ces deux groupes d'espèces sont majoritairement concentrés sur les roches de la bordure littorale jusqu'à 15-20 m du rivage. Depuis 15-2007, on constate cependant leur progression vers le large, celle-ci pouvant résulter de la modification plus ou moins marquée de la nature des fonds, suite notamment à l’apport de coquilles mortes après un épisode de mortalité (dû à l’anoxie des fonds) mais également au développement de Arcuatula senhousia (= Musculista senhousia). Quant au groupe des Ulva spp., qui présente majoritairement des tapis libres sur le fond, sa répartition dépend de la topographie et de la courantologie locale. Les proliférations d’ulves semblent avoir atteint leur maximum en 2002-2004.

Enfin, les peuplements de Rhodobiontes qui régressaient jusqu’en 1994 montrent une tendance à la progression. L’espèce marine Callithamnion corymbosum qui avait presque totalement disparu de l’étang entre 1973 et 1975 (Rioual, 1977), et qui

n’avait été observée que sporadiquement depuis 2001 a littéralement envahi l’ensemble du pourtour de l’étang en 2005. Depuis 2006, cette espèce a été regroupée avec lesPolysiphonia spp. au sein du groupe des Callithamniae, elle constitue la fraction dominante de ce peuplement. Ce groupe reste le plus abondant après les ulves à l’échelle des 31 transects suivis dans l‘étang de Berre.

Figure 2. Evolution des peuplements de macrophytes de 1990 à 2010 (à gauche) et des IAM cumulés de 1996 à 2010 (à droite) des Magnoliophytes, Chlorobiontes et Rhodobiontes. Pg = P. pectinatus ; Ru = R.

cirrhosa ; Zo = Z. noltii ; En = Enteromorpha spp. ; Ul = Ulva spp. ; Cl = Cladophora spp. ; Gr = Gracilaria spp. ; Po = Polysiphonia spp. Pour les rhodobionthes, les années 2006 à 2009 regroupent dans Po les Polysiphonia spp. et Callithamnion corymbosum.

3.2 Evolution des surfaces couvertes par les herbiers de Z. noltii

Depuis 2006, les surfaces couvertes fluctuent entre 32 et 295 m² pour le site de l’Arc (soit 0.02 et 0.2 % de la surface potentiellement couverte *) et 841 et 4 985 m² pour le site de Berre (soit 1 à 6 % de la surface potentiellement couverte *, Fig. 3).

L’évolution du nombre de taches d’herbier et de leur taille moyenne accompagne généralement les variations de surface totale : la réduction de la surface d’herbier se traduit ainsi par une augmentation du nombre de taches, qui sont de plus petite taille (fractionnement), tandis que l’augmentation de surface d’herbier se produit essentiellement par coalescence des taches existantes (diminution du nombre global de taches et augmentation de leur taille moyenne). La profondeur maximale atteinte par les herbiers sur les sites témoins est comprise entre 0.8 et 1.3 m. Cette profondeur n’a pas varié depuis 2006.

Sur le site de l’Arc, la représentation des herbiers reste anecdotique et ne montre aucune trace de progression depuis 2006. Sur le site de Berre, les surfaces couvertes progressent, la plupart des taches qui subsistaient en 2007 (avec des

Figure 3. Evolution des surfaces couvertes par les herbiers à Z.noltii sur les sites de l’Arc et de Berre de 2006 à 2010.

* emprise des sites couverts par les photographies aériennes : ARC 17 ha ; BERRE 8.5 ha