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POLLUANTS, ÉCOTOXICITÉ ET GÉNOTOXICITÉ

Une approche écotoxicologique et génotoxicologique des

POLLUANTS, ÉCOTOXICITÉ ET GÉNOTOXICITÉ

La dégradation de tout ou partie d’écosystèmes aquatiques à la suite de pollutions accidentelles ou pérennes est un fait déjà observé dans de nombreux endroits du monde. Qu’il s’agisse d’éléments chimiques inorganiques (éléments traces métalliques ou ETM, isotopes radioactifs) ou de composés organiques (HAPs, PCBs, pesticides…), ces polluants peuvent en effet altérer les organismes aquatiques de diverses manières toujours difficiles à appréhender. On doit par exemple prendre en compte trois voies d’exposition et d’absorption à ces substances pour les animaux : la voie respiratoire, la voie transtégumentaire (traversée de la peau, de la cuticule ou de l’épiderme) et la voie alimentaire ou trophique. Les effets de ces toxiques se manifestent eux aussi sous différentes formes puisqu’ils peuvent être somatiques (affectant une ou plusieurs fonctions de l’organisme exposé) ou germinaux (affectant la fonction reproductrice et impactant la descendance). Ces effets peuvent aussi avoir pour conséquence des modifications permanentes de la séquence nucléotidique de l’ADN sous la forme de mutations géniques ou chromosomiques.

La mise en relation directe entre de tels effets et les polluants qui les produisent est loin d’être évidente, surtout en milieu naturel. Tout d’abord, des facteurs biologiques ou physico-chimiques indépendants peuvent eux aussi altérer l’écosystème ou amplifier l’effet des polluants : variation de salinité, de température des eaux, arrivée d’espèces invasives, dégradation physique des habitats… Deuxièmement, la toxicité d’un polluant n’est pas uniquement reliée à sa concentration dans le milieu. Un élément métallique existe en phase dissoute et particulaire, et dans chacun des cas il peut se trouver sous diverses formes chimiques dont le comportement est différent, c’est ce que l’on appelle la spéciation. Ainsi, l’élément plomb (Pb) par exemple, mesuré dans le sédiment, n’aura pas le même impact sur un organisme suivant les phases minérales auxquelles il est associé. S’il est simplement adsorbé en surface des minéraux (du Pb issu de rejets anthropiques et

venu se fixer sur des minéraux déjà existants) il pourra être désorbé lors de la digestion par les sucs gastriques et absorbé plus facilement par l’organisme. S’il est au contraire présent au sein des structures cristallines des minéraux, il est peu mobilisable et son risque d’accumulation dans l’organisme est plus faible. Cette différenciation importante en toxicologie traduit la biodisponibilité d’un polluant. En plus de la concentration elle-même, c’est cette biodisponibilité qui régule l’influence de polluants organiques ou inorganiques.

L’effet d’un contaminant sur un organisme dépend également de ses capacités d’assimilation, de stockage et d’élimination. Elles sont très variables selon les espèces mais aussi selon le cycle de vie, l’âge et le sexe des individus au sein d’une même espèce, ce qui augmente la difficulté de l’estimation du risque. Il est nécessaire dans ce cas d’étudier des biomarqueurs, en complément des concentrations de contaminants mesurées dans l’organisme. Un biomarqueur est une caractéristique biologique mesurable au niveau moléculaire, cellulaire ou individuel, qui est modifiée à la suite d’une exposition à un polluant ou à l’issue d’un stress environnemental. Deux grands types peuvent être distingués : les biomarqueurs de défenses (induction d’enzymes de biotransformation, de protéines de stress, des défenses antioxydantes, …) et les biomarqueurs de dommage (induction d’enzymes spécifiques, dommage à l’ADN, marqueurs immunologiques, physiologiques… ; Amiard et Amiard-Triquet, 2008). L’utilisation de ces biomarqueurs s’est affirmée au cours des dernières décennies, mais un grand nombre nécessite encore des exercices de validation. En effet, si les effets de contaminants peuvent être relativement bien caractérisés dans le milieu contrôlé d’un laboratoire, il en va autrement dans le milieu naturel à cause du mélange de composés potentiellement toxiques, de la multiplication des organismes et des maillons trophiques et des interactions entre le compartiment biologique et le compartiment physique.

Ainsi, la relation entre polluants et altération des populations reste toujours très difficile à démontrer en milieu naturel. Il faut prendre en compte la variabilité des facteurs naturels, la biodisponibilité des polluants, leur multiplicité (en laboratoire les études sont généralement faites sur une famille de polluants, mais le milieu naturel est plutôt soumis à un cocktail de polluants métalliques et organiques) et les mécanismes de défense et de régulation possibles.

Deux programmes ont été très récemment conduits sur l’étang de Berre pour aborder ce type de recherche. Le premier, dont les résultats sont présentés ci-dessous, a permis de tester pour la première fois les liens entre contaminants présents dans le sédiment et les organismes benthiques et des marqueurs de stress ou de génotoxicité. Pour le deuxième encore en cours, seuls quelques premiers résultats sont abordés dans la dernière partie de cet article.

MATÉRIELS ET MÉTHODES

15 sites ont été échantillonnés en septembre 2008 et juin 2010 (figure 1) avec l’aide du GIPREB. Les sites prélevés en 2008 (RN, VA, VC et VN) ont fait l’objet d’analyses plus complètes afin d’évaluer les relations entre ETM, polluants organiques et biomarqueurs. Trois de ces sites sont situés dans l’étang de Vaïne, zone de l’étang la plus contaminée en surface, le quatrième site RN a été prélevé au Nord pour servir de site témoin non contaminé.

Le sédiment de surface a été prélevé à la benne et des organismes benthiques ont été récoltés par tamisage. L’organisme qui a été retenu pour les études est le polychète Nereis succinea (Frey and Leuchart, 1847). Il constitue un des principaux composants de la biomasse benthique de l’étang de Berre et c’est aussi le seul organisme présent toute l’année sur l’ensemble des zones oxygénées (GIPREB, 2010). Ce choix « par défaut » est cependant approprié car c’est un annélide

Figure 1: Localisation des sites de prélèvement des sédiments de surface et de Nereis Succinea. La zone grisée représente la zone où les organismes benthiques sont absents (données 2009 ; Gipreb, com. pers.).

principalement dépositivore-limivore qui vit dans les sédiments et obtient ses besoins nutritionnels en les ingèrant (Pardo et Dauer, 2003). Par ailleurs, les polychètes sont des espèces clés des écosystèmes benthiques estuariens et côtiers et ils ont souvent été sélectionnés pour des études sur la bioaccumulation des ETM (e.g. Dean, 2008).

Pour l’étude des micropolluants organiques, les sédiments (fraction < 1mm) ont subi une extraction par fluide pressurisé avec un mélange hexane/dichlorométhane.

Les extraits ont été analysés par HPLC/Fluorimétrie pour le dosage des concentrations en HAP et par GC/MS pour la mesure des teneurs en PCB, selon les méthodes décrites dans Di Giorgio et al (2011) et Kanzari et al (2011).

Les ETM dans les sédiments (fraction <63µm) et les organismes ont été mesurés par ICP-MS après dissolution totale des échantillons. Quatre techniques d’extraction ont été mises en place en complément pour évaluer la fraction potentiellement biodisponible des ETM associés au sédiment. L’EDTA permet d’extraire les ETM adsorbés sur les phases minérales, inclus dans la phase carbonatée et la fraction la plus réactive des oxy-hydroxydes de Fe et Mn et de la matière organique.

L’ascorbate est utilisé pour attaquer les formes les plus réactives des oxy-hydroxydes de Fe et Mn. Enfin l’eau de mer ajustée aux pH physiologiques des tubes digestifs des organismes benthiques (pH4 pour les bivalves et 6 pour les polychètes, ci-dessous noté EMS-pH4 et EMS-pH6) donne les ETM potentiellement remobilisables durant les processus d’ingestion de sédiment par des organismes benthiques (Amiard et al., 2007).

Les biomarqueurs sélectionnés pour cette première étude étaient les métallothionéines (MTs), des protéines intracellulaires qui jouent le rôle de ligands privilégiés des ETM accumulés dans les cellules et qui interviennent dans la détoxication de ces xénobiotiques. Ce sont donc des biomarqueurs de stress inductibles par certains ETM présents dans l’organisme. La localisation de MTs dans les tissus des organismes (mesurés par immuno-histo-chimie à fluorescence) et leurs concentrations (quantification par ELISA, Moreau et al., 2008) renseignent sur les principales cellules exposées à l’absorption des ETM et le niveau de stress qui en résulte.

Trois tests de génotoxicité ont été réalisés pour évaluer les modifications que subit l’ADN sous l’action de facteurs environnementaux (Di Giorgio et al., 2011). Le test d’Ames est un test bactérien de mutation génique qui détecte l’induction de mutations sur l’ADN. Il est réalisé en évaluant la capacité d'une substance à induire des mutations qui réversent une première mutation sur l'opéron histidine chez une batterie de souches Salmonella typhimurium.En fonction de l'origine de la première

mutation, la réversion (seconde mutation) s'effectue sur une seule paire de bases de l'ADN ou sur un ensemble de codons. Cette technique est capable de détecter quasiment toutes les substances ou agents physiques génotoxiques. Le test des comètes permet de détecter des cassures primaires de l’ADN sous l’effet d’agents génotoxiques ou des systèmes de réparation de l'ADN. Il est basé sur la visualisation de la migration de fragments d’ADN dans les noyaux de cellules individuelles soumises à un micro-électrophorèse. L’observation des cellules au microscope à fluorescence permet de discerner les noyaux intacts sphériques, des noyaux lésés qui apparaissent sous forme de « comètes ». La longueur et la quantité d'ADN dans la queue de la comète sont proportionnelles au nombre de cassures dans la molécule. Ce test peut être réalisé sur des cellules exposées in vitro à une substance potentiellement génotoxique ou directement sur des cellules exposées in vivo aux conditions environnementales. Comme le test d'Ames, cette technique est capable de détecter un grand nombre d'agents chimiques ou physiques capables d'induire des cassures de brin d'ADN directement ou indirectement par l'induction des systèmes de réparation de l'ADN. Le test des micronoyaux est un test in vitro qui permet d’identifier les agents physiques ou chimiques clastogènes (cassures de chromosomes) ou aneugènes (pertes de chromosomes), c’est à dire capables d’induire la formation de micronoyaux dans des cellules d’organismes vivants. Les micronoyaux sont des chromosomes entiers ou des fragments de chromosomes perdus par le noyau cellulaire au cours de la mitose et formant de petites entités bien individualisées dans le cytoplasme des cellules en interphase. Ils reflètent une action génotoxique directe ou un mécanisme épigénétique qui aboutissent à l’apparition de mutations chromosomiques irréversibles et transmissibles.

Ces 3 tests ont été réalisésin vitro sur les extraits de sédiments contenant les ETM solubles potentiellement absorbés durant des processus de digestion (EMS-pH4 et EMS-pH6). Deux types d’extraits de sédiments ont également été testés pour évaluer le rôle des contaminants organiques : l’un à base d’hexane/dichlorométhane contenant essentiellement des molécules organiques hydrophobes (tels que HAPs et PCB), l’autre à base de 2-propanol, solvant capable d’extraire une plus large gamme de composés organiques, et incluant notamment en sus les composés polaires (amines aromatiques, nitroarènes). Dans ce dernier cas, ils ont été conduits avec et sans activation métabolique, une technique qui simule la transformation potentielle de ces contaminants lors des processus de métabolisation hépatique (lors des processus d’ingestion) chez les mammifères.

RÉSULTATS

Les sédiments sont majoritairement carbonatés (38-57% CaCO3) et fins (f<63 µm = 41-94%). Les résultats en PCBs totaux (les 7 indicateurs européens) et HAPs totaux (15 de la liste US EPA) mesurés sur les quatre sites de 2008 sont typiques de zones urbaines et industrielles, mais le site VC se démarque systématiquement avec des teneurs plus élevées en PCBtot (160 contre 20 à 40 ng.g-1) et HAPtot (1300 contre 400 à 600 ng.g-1; Di giorgio et al, 2011). Signalons toutefois, que les concentrations en HAP ramenées à une quantité d’équivalent toxique (TEQ), montrent des valeurs proches pour les 3 sites de Vaïne (80 à 110 ng.g-1) et bien supérieures à celle du site RN (40 ng.g-1). Le calcul de ratios moléculaires caractéristiques pour certains HAP dénote une origine pyrolitique dominante sur VA, certainement lié à l’influence de l’aéroport voisin, et des apports mixtes pyrolytique et pétrogénique en VC et VN, à relier à l’importante industrialisation et urbanisation de l’étang de Vaïne. Le site RN présente un profil en HAP résultant d’une source pyrolytique plus diffuse (apport urbain atmosphérique et ruissellement).

En accord avec les données précédentes (Rigaud et al., 2011), les sites de Vaïne présentent les plus fortes concentrations en Cd, Cr, Cu, Hg, Pb et Zn, pouvant atteindre jusqu’à 10 fois les valeurs du fond géochimique naturel (FGN) pour Cd et Pb et entre 3 et 4 pour Cu, Hg et Zn (figure 2). Pour ces ETM, les concentrations mesurées dans le Grand Etang sont significativement plus faibles et proches ou légèrement supérieures au FGN. Il y a toutefois deux particularités dans cette distribution :

- le site B8, localisé dans l’anse de Saint-Chamas, présente les plus fortes concentrations en Hg mesurées dans l’étang (5 fois le FGN).

- le site VA, dans le sud de l’étang de Vaïne, présente des concentrations proches de celles du Grand Etang pour la plupart des ETM.

Figure 2: Concentrations totales en µg/g en Cd, Hg et Pb dans les sédiments de surface dans le Grand Etang (barres blanches) et dans l’étang de Vaïne (barres grises). La barre horizontale représente le fond géochimique naturel (Rigaud et al., 2012).

Pour l’As, Co et Ni, il n’existe pas de différence significative entre l’étang de Vaïne et le Grand Etang et les concentrations sont proches des concentrations préindustrielles (<2 fois le FGN; Rigaud et al., 2011).

Les concentrations potentiellement biodisponibles de ces ETM varient fortement selon l’extractant utilisé. L’extraction à pH6 est la plus faible, libérant des teneurs équivalentes à moins de 10% de leur teneur totale dans les sédiments. Pour les autres, les concentrations varient selon l’ETM considéré mais restent relativement constantes pour chaque extractant entre les différents sites (Rigaud, 2011). Les sites de Vaïne présentent toujours les valeurs les plus élevées en Cd, Cr, Pb et dans une moindre mesure Zn. Pour As, Co, Cu et Ni aucune différence significative n’est observée.

Les concentrations en ETM dans les polychètes présentent de fortes variations entre les sites (figure 3 et Rigaud 2011). Pour As, Co, Ni et Zn cette variabilité est indépendante de leur localisation et aucune différence significative n’est observée entre l’étang de Vaïne et le Grand Etang. Pour Cd, Cr, Cu, Hg et Pb par contre, les très fortes variabilités sont dues à quelques sites présentant des concentrations au moins le double des autres sites. Excepté pour le cas de B8 avec le mercure, ces

Figure 3: Concentrations en ETM (µg/g de poids sec) dans les polychètes Nereis succinea prélevés dans le Grand Etang (barres blanches) et l’étang de Vaïne (barres grises). Les droites horizontales pointillées représentent les valeurs minimales (vert) et maximales (rouge) reportées dans la littérature pour le polychète Nereis diversicolor. Lorsque les valeurs sortent de la gamme de l’échelle des ordonnées, la valeur est reportée en rouge sur la graphique.

sites se trouvent systématiquement dans l’étang de Vaïne. Aucune valeur n’a été publiée dans la littérature pour cette espèce, mais elles peuvent être comparées avec celles reportées pour un polychète très similaire et largement étudié, Nereis diversicolor (e.g., Amiard et al., 2007, Idardare et al., 2008). Les gammes de concentrations mesurées ici sont proches des plus faibles valeurs reportées dans la littérature (cf figure 3) pour la plupart des ETM, mais les sites présentant des niveaux plus élevés en Cd, Cr, Pb et Hg correspondent aux valeurs typiquement rencontrées dans des sites côtiers modérément à fortement contaminés (e.g.

Amiard et al., 2007 ; Idardare et al., 2008). Zn et Co se distinguent en étant les seuls ETM qui présentent des concentrations réparties sur l’ensemble de la gamme trouvée dans la littérature et correspondant à des niveaux de contamination très variables, de faiblement à extrêmement contaminés.

Les métallothionéines n’ont été mises en évidence que dans les organismes prélevés sur le site VA et à des concentrations faibles (16 µg/g de protéines),qui sont cependant similaires à celles mentionnées dans la littérature. Par immuno-histo-chimie à fluorescence, les MTs sont détectées uniquement dans le cytoplasme des cellules épithéliales des tubes digestifs des polychètes, confirmant que l’absorption des ETM par ces organismes se produit lors de la digestion.

Les activités génotoxiques varient selon les extraits et les tests (Tableau 1). De manière globale, on observe une bonne correspondance entre les tests des comètes et des micronoyaux qui indiquent des activités génotoxiques et clastogènes similaires, alors que le test d’Ames présente quelques différences essentiellement dues au modèle biologique utilisé. A pH6, les extraits métalliques montrent une forte activité mutagène sur Salmonella tiphymuriumTA 102, souche capable de détecter la génotoxicité des métaux, pour le site RN. Cette activité est principalement liée à la présence de fortes concentrations en manganèse, connu pour induire des mutations sur les bactéries à pH faiblement acide. Les sites VA et VC apparaissent faiblement génotoxiques et clastogènes. A pH4, les extraits métalliques montrent un profil d’activité différent : seul le site VA apparait mutagène sur les bactéries alors que de fortes activités génotoxiques et clastogènes sont observées sur les sites RN, VA et VC.

Les résultats obtenus sur les contaminants organiques montrent une tendance un peu différente. Les extraits contenant les composés non-polaires, principalement des HAPs, révèlent une activité génotoxique, mutagène et clastogène dépendante d’une métabolisation sur tous les sites de Vaïne (VA, VC et VN). Les extraits contenant les composés organiques polaires (nitro-HAPs principalement) exercent des activités génotoxiques, mutagènes et clastogènes sur ces mêmes sites, mais dans ce cas elles sont aussi indépendantes des réactions de métabolisation.

Tableau 1: résultats des tests de génotoxicité menés sur les extraits de sédiment (cf texte pour détail).

Les signes « plus » indiquent un résultat positif, les signes « moins » un résultat négatif.

Extraits sur métaux

DISCUSSION

S’il n’y a pas de relation directe apparaissant clairement entre les concentrations de contaminants métalliques ou organiques et un impact biologique sur Nereis succinea, ces résultats font toutefois ressortir des convergences.

En première analyse, la comparaison des concentrations en ETM extraites ou totales dans les sédiments avec celles accumulées dans les organismes ne montre aucune corrélation linéaire directe, et les sites présentant les plus fortes concentrations dans les organismes ne correspondent pas forcément à ceux présentant les plus fortes concentrations en ETM labiles dans les sédiments. Cette absence de corrélation, déjà notée par ailleurs dans la littérature, peut être induite par deux points. Tout d’abord, les niveaux de contamination de l’étang varient dans une petite gamme comparée à celles d’autres études, ce qui limite l’apparition de différences marquées entre les sites (le rapport maximum/minimum des concentrations est de 10 ici contre plus de 100 pour les études où une relation a été observée).

Deuxièmement, des mécanismes biologiques régulant la bioaccumulation des ETM jouent sur les quantités finales stockées dans les tissus. Le travail de Rigaud (2011) a ainsi démontré que les teneurs en Zn et Co dans ces polychètes sont associés prioritairement à leur utilisation dans la sclérotisation (consolidation) des crochets et que ces deux métaux auront donc tendance à être bioaccumulés de la même manière, quelque soit le niveau de contamination. Pour Cd, Cr et Pb une corrélation apparaît lorsqu’on normalise avec des éléments représentatifs des tissus dans lesquels ils s’accumulent et surtout que l’on élimine les sites les plus contaminés de l’étang de Vaïne. Cette corrélation, dans ce cas, traduit bien un phénomène de régulation, mais les plus fortes valeurs dans Vaïne indiquent en plus une bioaccumulation accentuée dans ce site. Une relation avec les concentrations labiles extraites par l’EDTA est d’ailleurs visible sur cette zone pour Cd et Pb (Rigaud 2011).

Enfin, il n’apparaît pas du tout de corrélation pour Cu, Ni et Hg, mais il faut noter pour ce dernier une covariation très nette sur le site B8 indiquant une forte biodisponibilité du mercure dans cette zone. Cette contamination spécifique dans le Golfe de Saint-Chamas est attribuée à une activité industrielle passée, et ces valeurs posent la question d’une possible bioamplification vers les espèces benthiques dans ce milieu.

La faible induction de MTs chez les organismes prélevés (alors que des MTs ont été observées sur d’autres sites avec des niveaux de contamination similaires, Rhee et al., 2007), peut être liée à l’existence d’autres mécanismes de détoxication chez Nereis succinea, tels que la formation de composés insolubles ou de sphérocristaux

La faible induction de MTs chez les organismes prélevés (alors que des MTs ont été observées sur d’autres sites avec des niveaux de contamination similaires, Rhee et al., 2007), peut être liée à l’existence d’autres mécanismes de détoxication chez Nereis succinea, tels que la formation de composés insolubles ou de sphérocristaux