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PARTIE 2 : Métabolisme tumoral et régulation du stress oxydatif

2. Stress oxydant et métabolisme cellulaire

2.4. Différentes réponses anti-oxydantes

Puisque les ROS sont liées à de nombreux processus biologiques et pathologiques, l’équilibre redox entre la production d’espèces réactives de l’oxygène et le phénomène de détoxication est crucial. Les systèmes anti-oxydants agissent selon trois axes : empêcher les ROS de réagir ensemble, transformer les oxydants en espèces moins toxiques et prévenir ou réparer les lésions oxydatives induites. Ces processus peuvent être enzymatiques et impliquer les enzymes SOD, la catalase, les peroxyrédoxines PRDX aussi connues sous le nom de thioredoxine peroxydase, et le système glutathion peroxydase GPX. Les vitamines A, C (acide ascorbique) et E (α-tocopherol), les flavonoïdes et caroténoïdes mais aussi des oligo-éléments tels que le sélénium, le cuivre et le zinc possèdent également des fonctions anti-oxydantes 339.

Les superoxydes dismutases (SOD) catalysent la dismutation de l’anion superoxyde mitochondrial O2•- en H2O2, capable de diffuser dans le cytosol pour être réduit en H2O par le système PRX, le système GPX ou la catalase (Figure 21). Nous allons décrire ci-dessous les différents processus enzymatiques anti-oxydants.

Figure 21: Principaux systèmes anti-oxydants.

La dismutation de l’anion superoxyde O2•- en H2O2 est catalysée par les enzymes dismutases (SOD). Le peroxyde d’hydrogène H2O2 peut ensuite être réduit en H2O de trois manières : 1) par l’enzyme catalase, 2) par le système PRDX ou 3) par le système GPX.

2.4.1. La catalase

La catalase est une hémoprotéine possédant quatre groupements hème qui facilite la dismutation du peroxyde d'hydrogène H2O2 en eau et inhibe la formation de radicaux libres tel que le radical hydroxyle 412. Cette enzyme ubiquitaire, retrouvée majoritairement dans le cytosol et les peroxysomes, est sur-exprimée dans divers cancers 413.

2.4.2. Les superoxyde dismutases (SOD)

Les superoxyde dismutases SOD utilisent des ions métalliques tels que le cuivre (Cu2+), le zinc (Zn2+), le manganèse (Mn2+) ou le fer (Fe2+) comme cofacteurs afin de catalyser la dismutation de l’O2•- en H2O2 412. Elles sont ainsi classées en trois groupes : Cuivre/Zinc (CuZn)-SOD cytoplasmique (SOD1), Manganèse (Mn)-SOD (SOD2) mitochondriale et CuZn-SOD (EC-SOD ou SOD3) extracellulaire 337,339.

2.4.3. Le système peroxyrédoxine (PRDX)

Les peroxyrédoxines (Prdx) sont des peroxydases de thioredoxine qui catalysent la réduction du peroxyde d'hydrogène H2O2, du peroxynitrite (ONOO-) et des hydroperoxydes organiques (composés contenant les anions HOO-) 337.

Le système des PRDX se compose de deux donneurs d'électrons et de deux types d'enzymes anti-oxydantes: les PRX I-VI, la thioredoxine réductase (TRXR), la thioredoxine (TRX) et le NADPH. Au cours de la réduction de l’H2O2, le PRX s'oxyde et est inactivé. La TRX agit comme un donneur d'électrons immédiat et réduit le PRX en sa forme active. La TRX est ensuite réduite par la TRXR ayant reçu ses électrons du NADPH 339.

2.4.4. Le système glutathion (GPX)

Le système glutathion comprend le glutathion (GSH), la glutathion réductase (GR), les glutathion péroxydases (GPX) et les glutathion S-transférases (GST) 339.

Le glutathion est synthétisé par les cellules lors de la glycolyse, de la β-oxydation et du métabolisme de la glutamine. Ce tripeptide, formé d’acide glutamique, de cystéine et de glycine, est retrouvé sous forme réduite GSH ou oxydé GSSG. Le couple GSH/GSSG est un cofacteur des GPX et est capable de fixer les métaux lourds (cadmium, mercure, plomb) toxiques et pourvoyeurs de ROS. Aussi, cet anti-oxydant majeur protège les cellules du stress oxydatif en réduisant les ponts disulfure au niveau des cystéines de protéines cytoplasmiques. Le GSH est donc essentiel au maintien de l’équilibre redox.

Au cours du processus de détoxication, le glutathion GSH est oxydé en disulfure de glutathion (GSSG) par les GPX, ce qui permet la transformation du peroxyde d'hydrogène H2O2 et des hydroperoxydes organiques en H2O 337. La glutathion réductase GR utilise ensuite le NADPH pour réduire le GSSG et rétablir les stocks de GSH 352. Ce système de détoxication est sur-activé dans de multiples types tumoraux par rapport aux tissus normaux et participe donc à la résistance des cellules malignes à un stress oxydatif accru 337. De plus, dans des conditions physiologiques, le glutathion existe presque exclusivement sous sa forme réduite GSH en raison d'une activité constitutive de la glutathion réductase GR dans les cellules 337. Les Glutathion S-transférases GST sont des enzymes de détoxication qui catalysent la transformation du GSH en une variété de composés électrophiles exogènes et endogènes 414. Elles sont sur-exprimées dans une grande variété de tumeurs pour réguler les voies MAPK et sont impliquées dans le développement de la résistance aux agents chimio-thérapeutiques 337,414.

Dans certaines cellules cancéreuses, un cycle redox futile entraîne une consommation excessive de NADPH. Celui-ci étant nécessaire pour le maintien de l’équilibre d’oxydo-réduction cellulaire, des capacités limitées à maintenir un pool suffisant de NADPH peuvent être à l’origine d’un état chronique de stress oxydatif 415. En effet, le cofacteur NADPH fournit un pouvoir réducteur dans de nombreuses réactions enzymatiques cruciales pour la biosynthèse de macromolécules. Il est également un agent anti-oxydant majeur, détoxifiant les cellules tumorales des ROS produites au cours de leur prolifération incontrôlée. Le NADPH confère ses pouvoirs réducteurs aux systèmes de glutathion GSH et de thioredoxine TRX, qui capturent les ROS et réparent les dommages induits 310.

Ce cofacteur est produit par les cellules tumorales lors de la mise en jeu de plusieurs voies métaboliques. Une des sources importantes de NADPH dans le cytosol est la voie des pentoses phosphates, qui génère le NADPH à partir de l'oxydation du G-6-P par la glucose-6-phosphate déshydrogénase. Cette voie détourne le flux glycolytique vers la synthèse des purines et la génération de NADPH 262. Il existe d’autres sources de génération de ce cofacteur, notamment la mitochondrie, lors du métabolisme de la glutamine et de l’utilisation des acides gras. Ainsi, le NAPDH est produit par l'enzyme malique lors de la β-oxydation des acides gras, par les enzymes IDH1 et IDH2 lors de la transformation de l’isocitrate en α-kétoglutarate, mais aussi au cours de la glutaminolyse lors de laquelle le malate est exporté dans le cytosol afin de fournir du pyruvate et du NADPH 262,416. Enfin, le NAPDH peut dériver du métabolisme du folate, impliqué dans la synthèse des bases nucléiques (purines et pyrimidines) 415.

La reprogrammation du métabolisme des cellules cancéreuses favorise donc un état prolifératif, la survie, mais aussi la protection de ces cellules contre un stress oxydatif pouvant s’avérer létal.

Les cellules tumorales peuvent également activer des voies de signalisation suite à un stress oxydant, comme la voie NRF2/KEAP1. Cette voie possède un rôle essentiel dans la détection de molécules électrophiles génératrices de stress oxydatif, et protège donc les cellules cancéreuses.