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La réhabilitation des sites et sols pollués dans la législation française

§I- La dépollution des sites et sols pollués

A. Le responsable de la remise en état du sol et site pollué

2. La réhabilitation des sites et sols pollués dans la législation française

Le droit des sites et sols pollués a fait son entrée dans le dispositif juridique français par

le droit des déchets194 et des installations classées195 (a). Cependant, par le biais de la loi pour

l’accès au logement et un urbanisme rénové196

(ALUR), le législateur lui a clarifié le cadre juridique relatif à la gestion et la réhabilitation des sols pollués dans un chapitre autonome

dans le code de l’environnement (b). Après avoir déterminé le responsable de la réhabilitation,

il sera nécessaire de préciser l’étendue de cette réhabilitation (c).

a.Le débiteur de la remise en état dans l’ancien dispositif français

Le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977197, sous l'égide du préfet de département,

avait mis à la charge du dernier exploitant de l'installation classée une obligation de remise en

état du site pollué198. Or, la jurisprudence a été confrontée à statuer sur des solutions dégagées

par l’autorité publique. Il est à souligner le cas de succession d’exploitants ayant exercé une même activité. Il a été jugé que c’est le dernier exploitant en date qui doit remettre le site en état. La jurisprudence du Conseil d’État retient que la société exploitante reste tenue de la

191

Art. 71, § 2 de la loi n° 11-03 du 12 mai 2003 relative à la protection et à la mise en valeur de l’environnement.

192

Art. 7, 1, du décr. n° 2-09-284 du 20 hija (8 déc. 2009) fixant les procédures administratives et les prescriptions techniques relatives aux décharges contrôlées, BO n° 5802 du 07 janv. 2010.

193

Art. 72 de la loi n° 11-03 du 12 mai 2003 relative à la protection et à la mise en valeur de l’environnement.

194

Loi n° 75-633 du 15 juill. 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux, JORF du 16 juill. 1975, p. 7279.

195

Loi n° 76-663 du 19 juill. 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement, JORF du 20 juill. 1976.

196

Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové

(ALUR), JORF n° 0072 du 26 mars 2014, p. 5809.

197

Décr. pris pour l’application de la loi n° 76-633 relative aux ICPE, JO du 08 oct. 1977.

198

Art. 34-1 du décr. n° 77-1133 du 21 sept. 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juill. 1976

relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. Il a été abrogé par l’art. 4 du décr. n° 2007-1467 du 12 déc. 2007.

39

remise en état du site dès lors qu’aucun cessionnaire ne s’est régulièrement substitué à elle en

qualité d’exploitant199. Ainsi, l’absence de déclaration de changement d’exploitant200

auprès de l’administration semble laisser perdurer sur le vendeur la qualité de dernier exploitant et

donc la charge de la remise en état201. En revanche, cette solution ne doit pas constituer une

échappatoire pour un exploitant de mauvaise foi. En l’occurrence, il est jugé que c’est l’exploitant de fait d’une installation classée qui n’a pas entrepris les dispositions nécessaires

au transfert de l’autorisation de supporter l’obligation de cette remise202

.

Dans le cas de la succession sur une longue période des activités différentes sur un même site ; il fallait savoir si le dernier exploitant est tenu de supporter intégralement la charge de l’assainissement du sol et site pollué ou seulement la pollution dégagée de son

activité. A priori, chaque exploitant est tenu de procéder à la dépollution qui se rattache

directement à son activité203.

Dans le cas de l’insolvabilité de l’exploitant à l’ouverture d’une procédure de

liquidation judiciaire204, il appartient au liquidateur judiciaire d’exécuter la remise en état en

l’absence d’exploitant solvable ou de son représentant légal. Les juges du second degré ont

décidé que « l’obligation de dépolluer était inopposable au liquidateur ». Cette décision a été

approuvée par la Cour de cassation205. Désormais, la société mère peut se voir imposer le

financement d’une partie des obligations environnementales de sa filiale206. Il s’agit d’une

action en responsabilité pour insuffisance d’actif contre la société mère dont la filiale est en

199

CE, 11 avr. 1986, Ugine-kuhlmannn, n° 62234, Lebon 1986, p. 89 ; CE, 20 mars 1991, Rodanet, n° 83776.

200

Art. 23-2 du décr. du 21 sept. 1977 impose que soit respectée une procédure de demande d’autorisation de changement d’exploitant de même que l’art. 34 du même décr. qui impose au nouvel exploitant de se faire connaître du préfet par une déclaration.

201

C.A.A. Marseille, 5 mars 2002, Sté Alusuisse Lonza France, n° 98MA00656, D. Deharbe, « Obligation de remise en état : nouveaux développements jurisprudentiels », Dr. Env., juill. 2002, n° 100, p.176 ; BDEI 1/2003, p. 25, concl. L. Benoît ; CE, 11 avr. 1986, Ugine-kuhlmann, n° 62234, Lebon 1986, p.89 ; CE, 20 mars 1991, n° 83776 Rodanet.

202

C.A.A Paris, 23 mai 2001, Sté Podelval, LPA, 13 déc. 2001, p. 14.

203

C.A.A Nantes, 9 avr. 1997, Société automobile rezéenne de l'Ouest, req. n° 97NT00009, BDEI 1997, n° 4, p. 17, concl. D. Devillers ; C.A.A Nancy, 16 nov. 2000, SA Lips, req. n° 00NC00774, Lebon tables p. 1163.

204

Affaire Metaleurop sud qui a permis de s’interroger sur la mise en jeu de la société mère lorsque sa filiale en liquidation judiciaire avait exploité un site industriel et occasionné de graves pollutions. La Haute juridiction, par un arrêt du 19 avr. 2005, a rejeté les actions intentées contre la société mère par les liquidateurs.

205

Cass. com., 19 nov. 2003, n° pourvoi 00-16.802, D. 2004, p. 629, obs. D. Voinot.

206

40

liquidation judiciaire207. De surcroît, la juridiction a été confrontée à une situation

extrêmement épineuse. En l’espèce, il se trouve que lors de la défaillance du dernier exploitant, le préfet avait retenu la responsabilité du propriétaire. Mais, le Conseil d’État avait

refusé cette imputation en se fondant sur cette seule qualité208. Dans ce cadre, il a développé

la théorie du « propriétaire innocent ». Pourtant les cours administratives d’appel209 ont résisté

à cette décision, notamment la cour d’appel de Lyon qui a développé la notion de détenteur210

.

Par cette notion, le droit des déchets a fait son entrée dans la scène juridique211. Néanmoins,

plusieurs jurisprudences ont refusé explicitement cette voie212. Dans ces conditions, la loi

207

M. Bayle, « La responsabilité du bailleur de fonds pour préjudice environnemental : proposition de réforme »,

D. 2007 p. 2398 ; Th. Montéran, « liquidation judiciaire et sites pollués : une action en recherche de maternité »,

D. 2010 p. 2859.

208

CE, 21 févr. 1997, n° pourvoi 160250, SCI Les Peupliers, RJE. 1997, p. 581 ; CE, 21 fév. 1997, ministre de l’Environnement c/ société anonyme Wattelez, req. n° 160-787 ; CE, 8 juill. 2005, Alusuisse Lonza, JCP 2006, II, 10001 ; C.A.A Marseille, 13 avr. 2006, SCI Joelle, n° pourvoi 02MA00689, RDI 2006, p. 360, obs. F.-G. Trébulle.

208

JOUE du 22 nov. 2008, n° L. 312, p. 3.

209

C.A.A Lyon, 10 juin 1997, M. A. Zoegger, n° pourvois 95LY01435 et 96LY02017, Rec. T. p. 951, RJE 3/1997 ; Dr. Env. 1997, n° 51, p. 9, note G. Fontbonne, avait jugé que « si le propriétaire ne peut être tenu des obligations de remise en état en sa seule qualité de propriétaire du site, il peut toutefois l’être en sa qualité de détenteur.» ; C.A.A Douai, 8 mars 2000, n° pourvoi 96DA00721 et le 4 mai 2000, SCI Courtois, n° 96 DA 01056.

210

Le vocabulaire juridique de l’association Capitant retient deux définitions : la 1ère définition se fonde sur l’art. 2283 du C. civ., : « celui qui détient la chose à titre précaire » ; la 2ème définition se réfère à celui qui a effectivement une chose entre les mains. Celui qui exerce le corpus, indépendamment de son titre.

Art. 1er, c, de la directive n° 75/442/CE défini le détenteur comme étant : « le producteur des déchets ou la personne physique ou morale qui a des déchets en sa possession ». Cette définition a été reprise par l’art. 1er, c, de la directive n° 2006/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 avr. 2006 relative aux déchets, et l’art. 2, 6, de la directive n° 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil. Cette définition a été transposée dans le

droit français par l’ord. du 17 déc. 2010 codifiée dans l’art. L. 541-2 du C. envir.

211

L’art. L. 541-2 du C. envir., prévoit l’obligation pour celui qui produit ou détient des déchets d’en assurer ou d’en faire assurer l’élimination.

212

C.A.A Lyon, 6 juill. 1999 n° 98LY01609 ; C.A.A Paris, 25 oct. 2001, n° 98PA01021 ; C.A.A Paris, 22 nov. 2001, Environnement, mai 2002, chron. p. 12, obs. D. Deharbe ; C.A.A de Nancy, 6 mars 2003, n° pourvoi 98NC01461, Environnement, févr. 2004, p. 14, obs. D. Deharbe ; RDI 2004, p. 172, obs. F.-G. Trébulle ; CE, 17 nov. 2004, Société générale d’archives, n° pourvoi 252514, RDI 2005, p. 36, obs. F.-G. Trébulle ; CE, 8 juill. 2005, Alusuisse Lonza, JCP 2006, II, 10001 ; C.A.A Marseille, 13 avr. 2006, n° pourvoi 02MA00689, SCI Joelle, RDI 2006, p. 360, obs. F.-G. Trébulle ; C.A.A Marseille, 8 janv. 2008, n° 05MA02598 ; Cass. 3ème civ., 2 avr. 2008, n° pourvoi 07-12.155, D. 2008, p. 2472, obs. F.-G. Trébulle ; Cass. 3ème civ., 2 déc. 2009, n° pourvoi 08-16.563, Rhodia Chimie, BDEI, n° 26 mars 2010, note A. Sandrin-Deforge ; C.A.A Bordeaux, 6 avr. 2009, n° pourvoi 08BX00315, AJDA 2009. p. 1332 ; Cass. 3ème civ., 22 sept. 2010, n° pourvoi 09-69.050, D. 2010. p. 2295 ; AJDA 2010. p. 2276; AJDI 2011. 384, obs. A. Lévy, et 111, chron. S. Gilbert ; RDI 2011. p. 98, obs. R. Hostiou ; AJCT 2010. 171, obs. S. Defix ; Envir. 2011. Comm. 84, note M. Boutonnet ; CA. Toulouse, 18 oct. 2010, n° 09.03810, ADEME c/ Estève.

41

n° 2003-699 du 30 juillet 2003213 dite loi Bachelot relative à la prévention des risques

technologiques et naturels et à la réparation des dommages est intervenue pour mettre un terme à ces tergiversations. En effet, cette loi a explicitement chargé le propriétaire du terrain

sur lequel est sise l’installation de l’obligation de remettre le site en état214

. La jurisprudence

s’est conformée à cette loi215

.

À ce stade d’analyse, il importe de souligner la position de la Cour de justice des

Communautés européennes216 telle qu’elle a été exprimée dans l’affaire « Van de Walle »217.

En l’espèce, cette jurisprudence avait décidé que les terres polluées non-excavées en dépit de leur qualification naturelle d’immeuble, devaient être qualifiées de déchets et traitées en tant que déchets218.

Le gouvernement français avait formulé des réserves à propos de l’interprétation des sols pollués non excavés produite par la Cour de justice des Communautés européennes par

l’adoption de la circulaire du 1er

mars 2005219. La directive n° 2008/98/CE du 19 novembre

2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives220 a explicitement infirmé l’arrêt

de la Cour de justice des Communautés européenne221. Cette interprétation a été transposée

213

Cette loi avait modifié l’art. L. 541-3 du C. envir. Elle avait introduit une référence aux sols pollués parmi les dispositions relatives aux déchets. Elle avait affirmé que le maire est l’autorité de police compétente pour remettre le site en état.

214

Art. 27, § 1er de la loi n° 2003-699 du 30 juill. 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, JORF n° 175 du 31 juill. 2003, p. 13021, il a été codifié à l’art. L. 512-17 du C. envir.

215

TA Strasbourg, 21 oct. 2005, n° pourvoi 0101129, Société émaillerie alsacienne commerciale et industrielle, Bordeaux ; TA Strasbourg, 9 févr. 2006, n° pourvoi 05 DA01185, SCP Pierre Bruart, en qualité de liquidateur de la société Pasek France.

216

CJCE.

217

CJCE, 7 sept., 2004, aff. C-1/03, Van de Walle, AJDA 2004, p. 2454, note A. Gossement, RD imm. 2005, p. 31, obs. F.-G. Trébulle, RJE 2005, p. 309, obs. Ph. Billet, RSC 2005, p. 148, obs. L. Idot.

Selon cette jurisprudence : « les hydrocarbures déversés de façon non intentionnelle et à l’origine d’une pollution des terres et des eaux souterraines sont des déchets. »

218

Cette solution a été retenue par le CE, 18 juill. 2011, n° 339452, Lebon 2011.

219

Circulaire relative à l’inspection des IC- sites et sols pollués. Conséquences de l’arrêt de la Cour de justice des Communautés Européennes dit « Van de Walle » ; « L’assimilation pure et simple, dans l’état actuel de nos réglementations, des terres polluées en place à des déchets peut poser problème au regard des principes de réhabilitation en fonction de l’usage et avec des mesures de gestion fondées sur des critères de risque. »

220

JOUE du 22 nov. 2008, n° L. 312, p. 3.

221

Art. 2, 1 de la directive précise que : « sont exclus du champ d’application de la présente directive : b) « les sols (in situ), y compris les sols pollués et les bâtiments reliés au sol de manière permanente. »

42

dans le droit français par l’article 4 de l’ordonnance n° 2010-1579 du 17 décembre 2010222

. Cette ordonnance a remplacé les dispositions de l’article L. 541-4-1 du Code de

l’environnement. Elle a confirmé que « les sols non excavés, y compris les sols pollués non

excavés et les bâtiments reliés aux sols de manières permanentes » ne sont pas soumis aux dispositions du chapitre relatif à la prévention et gestion des déchets. Aussi, l’article 2 de cette ordonnance a retiré la notion de sols pollués des dispositions de l’article L. 541-3 du Code de l’environnement. Devant cette délicate situation, le législateur a pris la décision d’instaurer un droit approprié au sol et site pollué.

b.L’instauration d’un droit des sites et sols pollués autonome

L'ordonnance du 17 décembre 2010223 a créé l’article L. 555-1 qui relève d’un

chapitre224 unique intitulé sites et sols pollués. Il est devenu l’article L. 556-1 du Code de

l’environnement. Il a été créé par l’article 1er

de l’ordonnance n° 2011-539 du 10 mars

2011225. Avec cette nouvelle disposition, l’autorité de police compétente doit assurer d’office

l’exécution des travaux nécessaires aux frais du responsable. Cette autorité détient le pouvoir d’obliger le responsable a consigné entre les mains d’un comptable public la somme nécessaire à la réalisation des travaux. En cas d’absence d’un responsable, il incombe à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) de remettre le site

pollué en état. Ces deux articles226 n’ont pas eu l’audace de désigner l’autorité compétente

pour agir contre le sol pollué. Pour remédier à cette situation, cette loi a été complétée par le

décret n° 2013-5 du 2 janvier 2013 relatif à la prévention et au traitement de la pollution des

sols227. Elle avait consacré l’autorité du préfet pour assurer la mise en sécurité et la remise en

état du site et sol pollué228.

222 Portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des déchets, JORF n°0293 du 18 déc. 2010 p. 22301.

223

Art. 21 de l’ord.

224

Chapitre V qui deviendra chapitre VI.

225

Art. 1er de l’ord. n° 2011-539 du 10 mars 2011 portant modification du titre V du livre V du C. envir., JORF n° 0059 du 11 mars 2011. Il a été modifié par l’art. 173 de la loi relative à la loi ALUR et l’art. 128 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

226

Art. L. 555-1 et L. 556-1 du C. envir.

227

Publié au JORF n° 0003 du 4 janv. 2013.

228

Art. 4 du décr. relatifà la prévention et au traitement de la pollution des sols qui a créé l’art. R. 556-1 du C. envir. souligne que : « lorsque la pollution ou le risque de pollution mentionnée à l’art. L. 556-1 du Code de l’environnement, est causé par une installation soumise aux dispositions du titre 1er

43

Conscient des limites de ces lois, le législateur était interpellé à apporter une solution lisible et minutieuse à la problématique de la défaillance du responsable de la dépollution des friches industrielles. En l’occurrence, l’article 173 relatif aux sites et sols pollués de la loi

pour l’accès au logement et un urbanisme rénové229

a été créé230. Cet article a été qualifié, par

certains auteurs, la police des sites et sols pollués231. Il a eu le mérite de résoudre plusieurs problématiques, notamment, la clarification du débiteur de la réhabilitation des sites et sols pollués.

L’article L. 556-3 du Code de l’environnement a élargi le cercle des responsables de la réhabilitation des sites et sols pollués en hiérarchisant cette responsabilité. Il a désigné des responsables en priorité et d’autres à titre subsidiaire. L’ordre des priorités a été établi selon l’origine de la pollution. S’agissant d’une pollution provenant des installations classées, le dernier exploitant reste le premier responsable de cette dépollution. En deuxième rang, le législateur a désigné, contre toute attente, le tiers intéressé232 et le maître d’ouvrage233 pour s’acquitter de cette obligation. En effet, la remise en état d’un site pollué pèse sur le dernier

exploitant234. C’est une obligation d’ordre public qui incombe à celui qui est supposé avoir

pollué le terrain. Ainsi, la jurisprudence a toujours refusé le transfert de la responsabilité de la

dépollution du site pollué sur un tiers malgré l’existence d’une clause contractuelle235 ;

considérée une obligation personnelle et non-réelle. Elle est attachée à la personnalité

police compétente pour mettre en œuvre les mesures prévues à cet article est l’autorité administrative chargée du contrôle de cette installation. »

229

Loi ALUR.

230

Pour lutter contre l’étalement urbain et préserver les espaces agricoles, les sénateurs MM. Dantes, Labbé et Mme Blandin ont introduit devant la commission des affaires économiques un amendement invitant le droit de l’environnement dans les débats du projet de la loi ALUR. Il a été adopté par le sénat en 1ère

lecture, néanmoins, cet amendement a été rejeté par l’Assemblée nationale qui avait estimé que ce sujet était très important pour être introduit dans les discussions sans une étude d’impact, préalable, sur les conséquences qu’il pourrait avoir sur l’emploi et l’urbanisme.

231

O. Salvador, « La loi ALUR : des avancées significatives en matière de sites et sols pollués », JCP N 2014, 1158 ; J.-P. Boivin, A. Souchon, « Les sols pollués dans la loi ALUR : vers le printemps d’une nouvelle police ? », JCP N 2014, n° 19, n° 575.

232

Art. L. 521-21 du C. envir., créé par la loi ALUR ; Ce tiers peut être un acquéreur, un aménageur ou une collectivité locale.

233

Art. L. 556-1 du C. envir.

234

Art. 34-1 du décr. du 21 sept. 1977 ; Art. L. 7-6 du C. envir. ; Art. L. 6-1 du C. envir. ; Art. L. 512-12-1 du C. envir.

235

Les termes de contrat ne sont pas opposables à l’administration (CE, 24 mars 1978, n° 01291, Société La Quinoléïne et ses dérivés).

44

juridique de l’exploitant et non au terrain dont la propriété peut changer de main,

indépendamment de ce qu’il advient du dernier exploitant236. Le législateur s’est, longtemps,

noyé dans le formalisme avant de décider d’accepter le transfert de cette responsabilité à des tiers, après accord des pouvoirs publics, néanmoins, à des conditions bien précises. En effet, le tiers intéressé devra attester des capacités techniques suffisantes pour réaliser tel projet et

fournir des garanties financières237. Cette substitution peut être totale ou partielle238, tant par

rapport au contenu de la remise en état- l’exploitant et le tiers demandeur pouvant se répartir les mesures de surveillances et de gestion de la pollution, que par rapport à la géographie du site à dépolluer. Il est fondamental de noter que le dernier exploitant reste tenu, en cas de substitution partielle, de la remise en état du site. Un tel transfert sera très utile. Il permettra la reconversion des friches industrielles sans attendre la fin d’une longue période d’identification du débiteur de la remise en état, et l’atténuation de l’insécurité juridique qui pesait sur le dernier exploitant.

Dans le cas où la pollution est afférente aux déchets, c’est le producteur ou le détenteur de ces déchets qui sont tenus de procéder à cette réhabilitation. En cas d’absence des responsables prioritaires, le propriétaire de l’assise foncière sera poursuivi par l’administration en tant que responsable subsidiaire ; à condition qu’il ait fait preuve de

négligence ou qu’il ne soit pas étranger à cette pollution239

. Cette solution a été prise en dépit

du principe pollueur payeur240. Il appartient au pollueur de réparer le dommage causé à

l’environnement241. Cela dit, ce principe n’interdit pas de désigner une personne responsable à

titre complémentaire. Cette disposition a entériné la jurisprudence ayant consacré la

responsabilité du propriétaire subsidiaire242. À ce titre, cette loi a gravé cette jurisprudence

236

Cass. 3ème civ., 16 mars 2005, n° pourvoi 03-17.875, Sté Hydro Agri France, JCP G 2005, II, 10 118, note F.-G. Trébulle ; D. 2006, p. 50, note M. Boutonnet ; Cass. 3ème civ., 2 déc. 2009 , n° pourvoi 08-16.563, préc.

237

Art. L. 512-21 du C. envir.

238

Art. 1er du décr. n° 2015-1004 du 18 août 2015 portant application de l’art. L. 512-21 du C. envir., JORF n° 0191 du 20 août 2015, p. 14539; M. Mekki, « Le volet « sites pollués » de la loi « ALUR » n° 2014-366 du 24 mars 2014 et ses décrets d’application : la « substitution d’un tiers intéressé » (Décr. n° 2015-1004, 18 août 2015, et Arr. 29 août 2015) et la mise en place du secteur d’information sur … », RDI 2016, p. 68.

239

CE, 24 oct. 2014, n° 361231, AJDA 2014, 2093 ; AJCT 2015. 44, obs. M. Moliner-Dubost ; RLDC mars 2015 ; p. 69, note B. Parrance.

240

PPP.

241

CJUE, 10 mars 2010, aff. C-378/08, Juris Data, n° 2010. 003121 ; aff. C-379.08, Juris Data n° 2010.003124, les conclus. de l’avocat général, Madame Kohott.

242

CE, 26 juill. 2011, n° pourvoi 328651, Lebon 2011 ; AJDA 2011 p. 1528 ; D. 2011 p. 2694, obs. F.-G. Trébulle ; AJDI 2012, 361, obs. B. Wertenschlag et T. Geib ; AJDA 2012 p. 2075, obs. H. Chatagner ; Cass. 3ème

45

dans le marbre243. Cependant, la non-exécution de l’obligation par le débiteur contractuel ne

désengage pas pour autant le débiteur légal de sa responsabilité244.

Il s’avère que la problématique de la détermination du responsable de la dépollution a été résolue. Une autre question mérite d’être réglée, à savoir, l’étendue de la réhabilitation du site et sol pollué.

c.L’étendue de la réhabilitation des sites et sols pollués

L’étendue de la décontamination d’un site et sol pollué devra être décidée selon l’usage

futur du site. Il est clair que la dépollution sera plus contraignante pour un usage sensible245

que pour un usage non-sensible246. Pour apporter une solution à cette question, le pouvoir

public français s’est orienté, dans un premier temps, vers le recensement et la hiérarchisation

des sols et sites pollués, d’où l’adoption de l’arrêté du 10 décembre 1998 relatif à la création

des bases de données247, à savoir, la base des anciens sites industriels et activités de services