• Aucun résultat trouvé

La maîtrise de la pollution des eaux et des sols dans un chantier de construction

§I- Les instruments juridiques organisant la gestion des déchets de chantier

B. La maîtrise de la pollution des eaux et des sols dans un chantier de construction

Les activités menées dans un chantier de construction ont des impacts considérables sur l’eau et le sol. Désormais, ces deux éléments de l’environnement sont considérés des biens

communs de la nation520. Contrairement à la protection quantitative de l’eau, le législateur

marocain a accusé un important retard dans la conservation et la protection de la qualité de l’eau. En effet, face à des risques de plus en plus évidents de la dégradation de la qualité de

l’eau521, le législateur s’est rendu compte de la fragilité du contexte national.

De ce fait, il a pris plusieurs mesures visant à éviter la dégradation de cette

ressource522 (1). De surcroît, le législateur s’est intéressé à la protection du sol (2).

1.La protection de la qualité de l’eau dans un chantier de construction

Les anciens textes marocains relatifs à la prévention et au contrôle de la qualité des eaux n’avaient pas pour objet la protection de l’environnement. Ils avançaient comme souci

516

Cass. 1ère civ., 21 févr. 1956, D. 1956. 285; Cass. 2ème civ., 26 oct. 1967, Bull. civ., II, n° 302 – adde; Cass. 3ème civ., 9 sept. 2009, Bull. civ. III, n° pourvoi 183; RDC 2010. 70, obs. S. Carval ; Cass. 3ème civ., 15 déc. 2010, n° 09-68.894.

517

Cass. 3ème civ., 21 mai 2008, préc.

518

Cass. 3ème civ., 9 fév. 2011, 28 avr. 2011, 19 oct. 2011, préc.

519

Cass. 2ème civ., 6 mars 1968, Bull. civ. II, n° 76 ; Cass. 2ème civ., 15 nov. 1972, JCP 1972. IV. 301 ; Cass. 3ème civ.,13 juin 1990, JCP 1990. IV. 303; Cass. 2ème civ., 5 oct. 2006, Bull. civ. II, n° 256 ; RCA 2006. comm. 371 ; Cass. 2ème civ., 19 nov. 2009, Bull. civ. II, n° 279 ; RCA 2010. comm. 15, 2ème esp., note H. Groutel.

520

Art. 6 de la loi n° 99-12 du 6 mars 2014 portant promulgation de la CNEDD énonce que « les ressources naturelles, les écosystèmes […] sont un bien commun de la nation […] ».

521

En 2003, le rapport de la BM a estimé à 1,23 % du PIB le coût de la pollution des ressources en eau et ses effets sur la santé.

522

94

majeur la protection de la santé publique523. En revanche, la loi sur l’eau n° 10-95 du 16 août

1995 réserve tout un chapitre à la protection de l’eau contre la pollution524. Cette loi interdit

tout déversement illégal de substances dangereuses dans l’eau. Elle constitue un véritable bouclier contre la pollution. Elle a défini la notion de la pollution, comblant ainsi un vide

juridique qui « laissait les juristes démunis face à la détérioration de la qualité de l’eau ainsi

qu’à ses effets »525

. Elle considère que la pollution est « une eau qui a subi, du fait de

l’activité humaine, directement ou indirectement ou sous l’action d’un effet biologique ou géologique, une modification de sa composition ou de son état qui a pour conséquence de la rendre impropre à l’utilisation à laquelle elle est destinée »526. Cette loi interdit « tout rejet, déversement, dépôt direct ou indirect dans une eau superficielle ou une nappe souterraine susceptible d’en modifier les caractéristiques thermiques et radioactives, chimiques, biologiques ou bactériologiques […] »527. Elle interdit, aussi, de « rejeter des eaux usées528 ou de déchets solides dans les oueds à sec, dans les puits, abreuvoirs et lavoirs publics, forages, canaux ou galeries de captage des eaux ; […] »529. De même que l’article 12 de cette loi a

prohibé l’anticipation « de quelque manière que ce soit, notamment par des constructions, sur

les limites des francs-bords, des cours d’eau temporaires ou permanents, des séguias, des lacs, des sources, […] ». D’ailleurs, le maître de l’ouvrage est tenu de prendre toutes les

mesures favorisant la protection de la qualité de l’eau sur le chantier de construction530.

Pour garantir le respect de cette réglementation, le législateur a mis en place, en

523

L’homme peut être exposée à de multiples maladies infectieuses telles que la fièvre typhoïde, la polio, l’hépatite A et E, le choléra par la baignade dans un milieu aquatique pollué ou par l’absorption d’une eau contaminée. Dans les années soixante-dix, les maladies d’origine hydrique étaient à l’origine dans plusieurs provinces à l’origine de l’occupation de la majorité des lits d’hôpitaux.

Maladie Fièvre Typhoïde Dysenterie

Année 1978 1979 1978 1979

Cas enregistrés 4352 6585 2220 2256

524

Chapitre VI de la loi n° 10-95 intitulé « de la lutte contre la pollution ».

525

H. Tazi Sadeq, Du droit de l’eau au droit à l’eau au Maroc et ailleurs, éd. La croisée des Chemins 2006, p. 101.

526

Art. 51, § 2 de la loi n° 10-95 du 16 août 1995 sur l’eau.

527

Art. 52 de la loi n° 10-95 du 16 août 1995 sur l’eau.

528

Art. 51, § 1 de la loi n° 10-95 du 16 août 1995 sur l’eau : « une eau qui a subi une modification de sa composition ou de son état du fait de son utilisation ».

529

Art. 54 de la loi n° 10-95 du 16 août 1995 sur l’eau.

530

Ex. identifier les substances dangereuses qui seront utilisées dans la construction, prévoir des matériels de traitement des eaux usées avant rejet dans les égouts (ciment, eaux usées issues des travaux de peinture, nettoyage de surface souillées, etc.), garder le chantier propre, éliminer les déchets.

95

parallèle des officiers de police judiciaire et des agents assermentés commissionnés par l’administration et l’Agence de bassin hydraulique (ABH), conformément à la législation relative au serment des agents verbalisateurs, la police des eaux531. En outre, il a défini les

sanctions qui seront appliquées à l’encontre du récalcitrant532

.

2.La protection du sol contre toute pollution dans le cadre d’un chantier de construction

Le pouvoir public a pour obligation de protéger l’environnement contre toutes formes

de dégradation et de pollution quelle qu’en soit l’origine533. Conscient de l’importance du sol,

considéré par la loi n° 99-12 un patrimoine commun de la nation, l’article 17 de loi n° 11-03

du 12 mai 2003 relative à la protection et à la mise en valeur de l’environnement énonce que

« le sol et le sous-sol et les richesses qu’ils contiennent en ressources limitées ou non renouvelables sont protégés contre toute forme de dégradation […] ». Par conséquent, le législateur a affirmé sa volonté d’édicter des mesures particulières en vue de lutter contre la

pollution du sol et ces ressources534. Ces mesures vont être considérées d’utilité publique et

s’imposer à tout exploitant ou bénéficiaire. Ainsi, il a « interdit tout rejet liquide ou gazeux

d’origine quelconque dans le milieu naturel, susceptible de nuire à la santé de l’homme ou à la qualité de l’environnement en général et qui dépasse les normes et standards en vigueur »535. Il appartient aux dispositions législatives et réglementaires de fixer les substances liquides ou gazeux dont le rejet est interdit.

Dans un chantier de construction, des substances de nature dangereuses solide,

liquide536 ou gazeuse537 peuvent être déversées sur le sol, engendrant des pollutions parfois

difficiles à résorber. Ainsi, le maître de l’ouvrage doit prendre toutes les mesures nécessaires

pour éviter ces dommages538. Il convient de rappeler qu’au Maroc, le sol ne dispose pas d’un

531

Art. 104 de la loi n° 10-95 du 16 août 1995 sur l’eau.

532

Chapitre XIII, section II dénommé « les sanctions » de loi sur l’eau.

533

Art. 1er de la loi n° 11-03 du 12 mai 2003 relative à la mise en valeur de l’environnement.

534

Art. 18 de la loi n° 11-03 du 12 mai 2003 relative à la protection et à la mise en valeur de l’environnement.

535

Art. 43 de la loi n° 11-03 du 12 mai 2003 relative à la préservation et à la mise en valeur de l’environnement.

536

Boues, laitance de béton, huiles de coffrage, etc.

537

Poussières de ciment, émanations de peintures, de solvants, etc.

538

Art. 18 de la loi n° 11-03 du 12 mai 2003 relative à la préservation et à la mise en valeur de l’environnement ; Ex. limiter le stockage des produits dangereux ou polluants au strict besoin, collecter les

96

régime particulier. Mais, il prévoit l’instauration de ce régime afin de protéger le sol contre toutes les formes de la pollution et de la dégradation.

produits dangereux ou polluants au strict besoin, mettre en place des systèmes de récupération, rétention et de décantation des eaux en vue d’être recyclées.

97