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4.1 Réflexivité visée par le MELS selon le référentiel de compétences

4.1.3 Analyse de la réflexivité visée à travers les deux axes du référentiel de

4.1.3.4 La réflexivité dans la coopération : modes de pensée et épistémologie

Afin de faire ressortir le degré de réflexivité inhérent à la coopération, nous avons mis en lumière les références aux différents modes de pensée et à leur développement épistémologique au sein de la description des compétences professionnelles (Ministère de l'Éducation du Québec, 2001). Par exemple :

Compétence 10 : « amener les personnes qui s’affrontent à indiquer clairement les limites qu’elles n’acceptent pas de franchir ou les types de contributions qu’elles sont prêtes à apporter » (p. 122)

Compétence 11 : « échanger des idées avec ses collègues quant à la pertinence de ses choix pédagogiques et didactiques » (p. 126)

Une analyse de ces deux citations montre la mobilisation d’une pensée logique à l’intérieur du dialogue entre les différents individus. En effet, il s’agit d’énoncer des points de vue, des idées, des limites, des contributions et de justifier ses choix en vue d’élaborer une action pédagogique et didactique pour répondre aux besoins des élèves. Autant d’habiletés de pensée en lien avec une pensée logique. Par ailleurs, compte tenu que la mobilisation de cette pensée logique se fait dans l’interaction avec les autres et ne vise pas explicitement l’évaluation, le questionnement, la remise en question des propos d’autrui en vue de les modifier, la concertation se situe dans la recherche de la convergence plutôt que la divergence et de la transformation. En conséquence, nous sommes en mesure de dire que la mobilisation de cette pensée logique se fait selon une perspective relativiste.

L’analyse reliée à la coopération entre les différents intervenants indique également que la pensée créative est sollicitée à travers l’adaptation de l’enseignement aux caractéristiques des élèves :

Compétence 7 : « l’équipe pédagogique (de programme ou de cycle) prend connaissance des besoins et des capacités des élèves en difficulté qui lui sont confiés et organise collectivement les modalités de leur prise en charge et de leur suivi. Elle convient des adaptations au programme et des stratégies d’évaluation à prévoir pour ces élèves et maintient des liens réguliers avec les parents pour obtenir leur appui et agencer leurs séquences. » (Ministère de l'Éducation du Québec, 2001, p. 104)

La pensée créative se manifeste également dans la coopération avec entre l’enseignante ou l’enseignant et ses élèves dans la mesure où :

Compétence 6 : « elle [la coopération] désigne aussi la capacité de construire des consensus ou des ententes avec les élèves au sujet de situations et de conditions de travail acceptables, de faire avec eux des adaptations, de régler ensemble des conflits, de partager des tâches et des responsabilités, de décider de sanctions à la suite des manquements de certains membres du groupe- classe. » (Ministère de l'Éducation du Québec, 2001, p. 99)

Cette construction de consensus et d’ententes, qui conduit à des adaptations sur les plans pédagogiques et didactiques, suppose l’élaboration de nouveaux outils de travail adaptés aux caractéristiques des élèves ciblés et des intervenants concernés. En conséquence, nous estimons que cette construction de consensus entre les différentes parties relève d’une

épistémologie relativiste. En effet, tous les moyens mis en place par les enseignantes ou les enseignants et les adaptations sont faits en vue d’harmoniser les séquences éducatives afin de permettre à chaque élève d’atteindre un niveau d’apprentissage déterminé. De la même manière, dans la description de la compétence 9, lorsqu’il est demandé à l’enseignante ou à l’enseignant « d’apporter sa contribution en suggérant quelques pistes d’amélioration et en s’engageant personnellement dans la réalisation de projets d’école » (Ministère de l'Éducation du Québec, 2001, p. 118), il nous apparait que ces propositions s’inscrivent davantage dans la notion de continuité que dans celle de l’évaluation critique qui caractérise l’intersubjectivité puisqu’il est simplement demandé d’améliorer et non de transformer32. En revanche, la compétence 10 demande clairement à l’enseignante ou à l’enseignant de « critiquer de façon constructive les réalisations de l’équipe et d’apporter des suggestions novatrices en matière pédagogique » (Ministère de l'Éducation du Québec, 2001, p. 122). Dans ce cas, la recherche d’outils pédagogiques différents de ce qui est déjà à l’usage par l’équipe pédagogique relève d’une pensée créative intersubjective puisque l’on s’inscrit alors dans un paradigme d’évaluation constructive visant à innover, à proposer des solutions inédites.

En outre, l’analyse a fait ressortir que la coopération pédagogique présupposait un consensus, lequel est relié à une pensée responsable dans la mesure où l’élaboration d’un consensus repose sur la conscience et la visée des valeurs inhérentes au respect, à l’écoute, à l’empathie, à l’inclusion, à la compréhension, etc. Au regard de tout ce qui a précédemment été écrit sur la construction de consensus, nous pouvons dire que la pensée responsable sollicitée chez les enseignantes et les enseignants est empreinte de sollicitude et qu’elle vise à l’adaptation des stratégies pédagogiques pour correspondre davantage aux caractéristiques spécifiques des élèves. Par conséquent, l’analyse indique que la pensée responsable s’exprime dans une perspective relativiste car, encore une fois, tournée vers autrui et la compréhension des valeurs de chacun (intrasubjectivité) et non vers le doute, le questionnement et la remise en cause constructive de ces valeurs (intersubjectivité).

En bref, l’analyse des compétences professionnelles à partir d’une analyse de contenu et du modèle de Daniel et al. (2005) sur le processus développemental d’une pensée critique, montre que la coopération pédagogique suscitée par les compétences professionnelles est certes de type réflexif mais pas nécessairement évaluative puisque les différents modes de pensée en lien avec le développement réflexif, bien que pouvant être parfois sollicités au niveau de l’intersubjectivité, s’expriment principalement au niveau du relativisme.