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S OMMAIRE DU C HAPITRE 2 :

2. L E QUESTIONNEMENT DE L ’ ENTREPRISE :

2.2 Questionnement de l’entreprise :

A l’origine de cette question de recherche, au début des années 2000, on trouve le questionnement de l’entreprise Xerox, plus précisément des dirigeants du centre de recherche XRCE situé près de Grenoble, centre spécialisé dans le traitement du langage ou language processing. Notre relation avec le XRCE (Centre de Recherche Européen de Xerox) date de 2001, année où nous avons aidé les responsables marketing de deux projets de text mining (ou text analytics, i.e. analyse automatisée de texte) développés au XRCE à analyser leur marché potentiel, et plus précisément à le segmenter. Des questionnements des managers des équipes-projet, devenues « business units », (« manager », « market manager », « sales manager », « technical manager ») ont alors clairement émergé : ils concernaient la difficulté de leur client à comprendre, adopter et à utiliser à bon escient les logiciels innovants, mais aussi la difficulté rencontrée par les business units à prendre en compte les attentes et les besoins des clients pour développer des offres personnalisées et à proposer de nouveaux logiciels. Il y avait donc au départ une insatisfaction « marketing » (« comment comprendre et convaincre le client ? »), et une insatisfaction liée à la création d’offres nouvelles (« comment orienter et optimiser le développement d’une offre innovante ?). Il y avait aussi une insatisfaction liée au fait que les business unit concernées travaillaient dans l’urgence : urgence de trouver des clients, de leur expliquer l’innovation (le terme « évangélisation » étant généralement utilisé par les professionnels de ce secteur) et les bénéfices qu’ils pourraient en retirer, mais aussi l’urgence de réaliser le développement d’une offre personnalisée adaptée à des besoins rarement explicites. Cette difficulté à s’extraire du court-terme limitait la prise de recul nécessaire à la définition de choix stratégiques relatifs à l’évolution de l’offre, mais aussi à la business unit en général. De ces insatisfactions a émergé un intérêt pour un travail d’étude visant globalement à mieux comprendre les clients. Grâce à cette première phase de contacts, avec les acteurs de différents projets de text mining développés au

Chapitre 3 : Méthodologie __________________________________________________________________________________________

XRCE, sur laquelle nous reviendrons, nous avons pu nous familiariser avec les acteurs (éditeurs de logiciels, centres de recherche publics ou privés, clients potentiels) et les technologies du text

mining. Nous avons pu constater que les acteurs de l’industrie du logiciel travaillant dans des start-

up innovantes, avaient la certitude que les premiers projets d’implémentation d’un logiciel présentant les caractéristiques d’une innovation radicale ou « innovation d’exploration », selon les auteurs (Chanal et Mothe (2005), Danneels (2002)) jouaient un rôle majeur dans le processus d’innovation. Selon eux, les premières implémentations permettaient la contextualisation d’un nouveau concept, et les utilisateurs jouaient un rôle unique quant à la transformation d’un nouveau concept d’application (le text mining) en un logiciel commercialisable (entretien avec Yves Mahé, Business Unit Manager, Xerox, janvier 2003 ; entretien avec Philippe Laval, directeur général de Sinequa, mars 2004), vision qui est aussi celle de la littérature (Cusumano, 2004). C’est donc cette question que nous avons cherché à explorer.

Le cas étudié se situe dans l’édition de logiciels professionnels destinés à la gestion électronique de document (GEIDE). Nous nous sommes intéressé au processus de conception de logiciels au sein de deux structures (« Business Units ») AskOnce et XTS/Xelda, créées pour le développement et la commercialisation de logiciels innovants conçus dans le cadre du XRCE. Ces deux structures ont essaimé en 2003 : l’une (XTS/Xelda) a été rachetée par Temis, éditeur français de logiciels de

text mining, fondé par d’anciens cadres d’IBM en 2001, l’autre (AskOnce) a été rachetée par

l’éditeur de logiciel américain Documentum, un des leaders du marché de la gestion de contenu (ou ECM, Enterprise Content Management).

Après quelques mois, les équipes essaimées au sein de nouvelles structures nous ont à nouveau accueilli, mais dans une perspective moins claire que précédemment. La demande de l’entreprise, en l’occurrence Temis, n’était alors plus aussi précise. Il s’agissait plus d’un intérêt global sur l’étude de l’implication des clients dans les projets les plus complexes. Au fur et à mesure de l’étude, un autre apport est apparu aux yeux de nos interlocuteurs, principalement chez Temis : l’intérêt de pouvoir faire le point sur les projets en cours, avec un interlocuteur « neutre », qui tente d’avoir une vision à la fois globale et structurée des projets. Un autre aspect a aussi facilité notre présence sur le terrain, que ce soit chez Temis, Mondeca ou leurs clients, le fait que nos interlocuteurs soient pour la plupart des chercheurs ou ex-chercheurs (en informatique, en sciences du langage, ou en gestion des connaissances) a créé une proximité et un intérêt a priori pour notre travail de recherche. Enfin, et à un degré moindre, le fait que notre travail conduise à des présentations publiques et à des publications, a été perçu comme un moyen de faire connaître

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au « monde extérieur », l’innovation étudiée et les projets développés. Cet intérêt de Temis, puis de Mondeca s’est particulièrement manifesté pour les projets intégrant différentes briques logicielles de différents éditeurs de logiciels innovants.

L’intérêt de l’entreprise vient enfin de ce que ce type de projet nécessite une collaboration poussée avec d’autres éditeurs de logiciel. Or, les start-up logicielles focalisées sur une technologie innovante issue de la recherche travaillent dans un premier temps directement avec leurs clients en vue de sa mise en œuvre. Elles sont ensuite rapidement amenées à collaborer avec d’autres éditeurs de logiciels (innovants ou non), pour fournir des solutions globales, susceptibles de satisfaire leurs clients. Mais ces start-up logicielles n’ont, dans un premier temps, pas l’expérience de telles collaborations, et se posent des questions légitimes sur leur conduite, et sur la façon d’y intégrer le client. Il y a donc un questionnement à ce niveau, questionnement qui est renforcé par le fait que ces entreprises connaissent les logiques de plate-forme qui prévalent dans leur industrie. Elles savent donc qu’elles doivent s’efforcer de saisir les opportunités de participer à l’établissement de nouvelles plates-formes applicatives, problématique qu’elles n’ont pas non plus l’habitude de traiter. Cela éclaire donc leur intérêt pour une recherche portant sur la conception d’innovations couplées, susceptibles de devenir ou de faire partie d’une nouveau type de plate- forme logicielle.

L’intérêt de l’entreprise Temis, puis celui de Mondeca nous ont permis d’accéder au terrain, de nous entretenir de manière régulière avec un certain nombre d’acteurs clefs des projets étudiés, d’assister à diverses réunions en interne (notamment les réunions de lancement de projet), et d’assister à des présentations commerciales, mettant en valeur auprès de prospects des solutions emblématiques réalisées par Temis et Mondeca.