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4.5 La compréhension du langage figuré dans les troubles autistiques

4.5.3 Les questionnaires à choix multiples

Dennis, Lazenby, et Lockyer (2001), dans une étude qui s’inscrit plus largement dans la compréhension du langage inférentiel, proposent une tâche de compréhension des métaphores par un QCM à 8 enfants avec un TSA (AHN/SA) et 3 enfants avec un développement typique. Cette tâche inclut des métaphores conventionnelles et des expressions idiomatiques (ex : « j’ai des papillons dans le ventre »). Quatre types de réponses en images étaient proposés aux enfants, la bonne réponse au sens figuré, et 3 réponses incorrectes : littérales (interprétation littérale, une interprétation opposée et une interprétation reliée au sens littéral). Les auteurs ont montré que des enfants avec un TSA (avec un QI verbal > 70, âgés de 9 ans en moyenne) sont moins performants que les enfants avec un DT à cette tâche. Utilisant la même tâche, Landa et Goldberg. (2005) se sont intéressés aux liens entre la compréhension du langage figuré et le fonctionnement exécutif (planification, flexibilité mentale) chez les enfants avec un TSA (âge moyen 11ans). Les résultats ne montraient pas de corrélations significatives avec le QI, les capacités exécutives et les capacités langagières chez les TSA. Landa et Goldberg (2005), rapportent que lorsque deux groupes diffèrent au niveau des capacités verbales alors ils diffèrent aussi sur les capacités de compréhension du langage figuré.

Zheng, Jia, et Liang. (2015) étudient la compréhension des métaphores et des métonymies (conventionnelles et nouvelles) chinoises chez des enfants avec un AHN (âgés entre 6-7 ans ; QIT = 108, QIV = 105) où le vocabulaire expressif est aussi évalué. Les expressions figuratives apparaissent à la fin d’une histoire composée de 3 paragraphes qui induisent le sens figuré. Une question porte sur la compréhension de l’expression dans un contexte. La réponse donnée à partir de 3 images (figuré, littérale ou un mot de l’expression). Les enfants avec un AHN présentent des performances réduites par rapport

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aux enfants avec un DT, mais comme ces derniers, ils comprennent mieux les métaphores que les métonymies. Le caractère conventionnel améliore les performances des enfants avec un DT mais pas celui des enfants avec un AHN. Cependant, les performances de tous les enfants sont en général très faibles : 3/6 réponses correctes en moyenne pour les métaphores conventionnelles et 2/6 réponses correctes pour les métaphores nouvelles. Le score au niveau de vocabulaire expressif corrèle positivement avec la compréhension des métaphores conventionnelles chez les enfants en DT, mais pas avec les performances des métaphores nouvelles chez les enfants AHN.

Adachi et al. (2004) s’intéressent à la compréhension des sarcasmes et des métaphores chez des enfants avec un trouble autistique entre 7 et 14 ans (QIT et QIV > 70) et chez les enfants avec un déficit de l’attention/hyperactivité. Comparés à un groupe contrôle, les deux groupes cliniques (TSA et déficit de l’attention/hyperactivité), sont moins performants pour comprendre les sarcasmes. Cependant, comparés aux enfants avec un déficit de l’attention/hyperactivité et au groupe contrôle, les enfants avec un TSA sont moins performants à la tâche de compréhension des métaphores. La réussite aux tâches de TdE corrèle avec la réussite de la compréhension des sarcasmes, mais pas des métaphores.

Rundblad et Annaz. (2010) ont étudié le développement de la compréhension des métaphores et des métonymies chez 11 enfants avec un TSA et 17 enfants avec un DT (âgés entre 5 et 11ans) en évaluant le niveau de développement verbal et le niveau de développement non verbal des deux groupes. Ils ont aussi administré une tâche de TdE (fausses croyances 1er ordre) et une tâche de figures emboitées pour évaluer le degré de capacité de cohérence centrale. Les tâches de compréhension des métaphores et des métonymies se présentent sous forme de 4 images par histoire avec un petit texte sous chaque image. La tâche des métaphores comprenait 10 métaphores conventionnelles et la tâche des métonymies comprenait 10 métonymies lexicalisées. Comparés aux enfants avec

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un DT comparables sur l’âge chronologique, les enfants avec un TSA présentaient une baisse de performance sur les deux tâches. Puis les auteurs ont comparé les groupes en fonction de l’âge mental afin de déterminer si les capacités de compréhension des métaphores et des métonymies s’améliorent avec l’âge mental. Les résultats montrent que les enfants avec un TSA obtiennent les mêmes performances que le groupe contrôle pour la compréhension des métonymies mais présentent une baisse de performance pour la compréhension des métaphores. En interrogeant les mesures de TdE et de cohérence centrale, les auteurs n’ont pas pu montrer d’association avec les performances aux tâches des métaphores et des métonymies.

Le Sourn-Bissaoui, Caillies, Gierski, et Motte (2011), montrent que dans un contexte phrastique neutre, les adolescents avec un SA (âge moyen 16 ans, QIV : 101) n’avaient pas de difficulté à interpréter les idiomes (décomposables et non décomposables) dans le sens figuré comparés au groupe contrôle. Cependant, les adolescents avec un SA avaient des difficultés à détecter l’ambigüité des expressions idiomatiques, c'est-à-dire qu’ils ne percevaient pas les différents sens possibles (littéral, figuré) des expressions idiomatiques. La première interprétation donnée par les auteurs est une difficulté de prendre en compte simultanément deux perspectives en lien avec le déficit de cohérence centrale (Frith, 1989). Les adolescents focaliseraient leur attention sur le sens figuré (le sens saillant qui serait lexicalisé et accédé directement selon le modèle de Giora, 1999) en ignorant le sens littéral de l’expression idiomatique. Les résultats montrent que les difficultés rencontrées par les adolescents avec un SA dans la tâche de TdE 2nd ordre et de cohérence centrale (Figure de Rey) ne semblent pas suffisantes pour expliquer les difficultés de détection de l’ambigüité des expressions idiomatiques. Il est possible que les

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capacités de mémoire de travail ou les fonctions exécutives entrent en jeu (Le Sourn- Bissaoui et al., 2011).

Giora, Gazal, Goldstein, Fein, et Stringaris. (2012) ont comparé 28 jeunes adultes avec un SA et 28 participants contrôles (appariés sur l’âge, le genre et le niveau d’éducation). A partir de 3 expériences différentes, ils ont pu mettre en évidence que même si le groupe SA présentaient de moins bonnes performances que le groupe contrôle, le profil des réponses est identique entre les deux groupes. Les deux groupes sont moins performants pour reconnaitre les métaphores nouvelles que les métaphores conventionnelles. Les deux groupes bénéficient du contexte pour comprendre les métaphores, les temps de réponses et le taux d’erreurs sont réduits pour les métaphores nouvelles mais pas pour les métaphores conventionnelles. Les deux groupes jugent les énoncés négatifs (« je ne suis pas ta femme de ménage » vs « je suis ta femme de ménage ») comme plus métaphoriques que les énoncés positifs. Par conséquent, les personnes avec un SA sont sensibles au degré de saillance, au contexte et ne présentent pas un biais d’interprétation littéral. Ces résultats sont consistants avec de Gunter, Ghaziuddin, et Ellis, (2002) où 10 personnes avec un SA (âgés entre 10 et 41 ans et comparables en âge et au QI Verbal à un groupe contrôle) ont plus de difficultés à comprendre les métaphores nouvelles que les métaphores conventionnelles.

- L’influence du niveau linguistique des participants :

Norbury. (2004) s’intéresse à la compréhension des expressions idiomatiques chez 130 enfants avec un trouble de la communication (âgés entre 8 et 15 ans) et subdivise ce groupe entre les enfants présentant des caractéristiques autistiques et les enfants avec un trouble du langage (de type dysphasie). Norbury prend en compte certaines caractéristiques idiomatiques. Dans son étude, 10 idiomes peu familiers (5 opaques et 5 transparents) ont

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été utilisés en contexte phrastique neutre (ex. Pierre dit : « il pleut des cordes ») et en contexte phrastique figuré. Dans la condition « en contexte phrastique figuré », l’expérimentateur lisait le texte et demandait à l’enfant de définir verbalement le sens de l’idiome puis dans une autre question à choix forcé, l’enfant devait choisir entre le sens littéral ou figuré de l’idiome. Norbury montre un effet bénéfique du contexte (figuré) pour la compréhension des idiomes non familiers chez les enfants avec un TSA comparé à la condition de contexte phrastique « neutre ». Mais cette amélioration des performances grâce au contexte n’était pas différente entre le groupe contrôle et les patients avec un TSA sans trouble du langage associé. Pour les TSA avec un trouble du langage associé, l’amélioration des performances grâce au contexte était significativement plus faible comparée aux TSA sans trouble du langage associé et comparés au groupe contrôle. Pour Norbury, les enfants avec un TSA sans trouble du langage associé sont capables de prendre en considération le contexte pour comprendre une expression figurée qu’ils ne connaissent pas. Ainsi, pour Norbury, certains facteurs cognitifs comme les capacités langagières (i.e. syntaxe et vocabulaire), la mémoire de travail ainsi que les capacités de TdE pourraient médiatiser les performances lors de la compréhension du langage figuré. Selon Norbury, la capacité de compréhension verbale est en soi est « le meilleur facteur de réussite » pour la compréhension des idiomes (p. 1190). Puisque les enfants présentant des troubles de la compréhension langagière « sans prendre en compte le trouble autistique » avaient plus de difficultés à comprendre les idiomes que les enfants avec ou sans trouble autistique (p. 1190).

Norbury. (2005) réplique ses résultats de 2004 en augmentant le nombre des participants. Les enfants avec un trouble du langage (qu’ils aient un trouble autistique ou non) ont des difficultés de compréhension des métaphores. Par conséquent, un enfant autiste qui n’a pas de difficultés de compréhension verbale n’aura pas de difficultés à

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comprendre les métaphores. De plus, si un enfant sans trouble autistique a des difficultés de compréhension verbale alors il aura des difficultés à comprendre les métaphores. Cette conclusion corrobore les résultats de Norbury et Bishop (2002) qui démontrent aussi que les capacités de compréhension verbale, et non le trouble autistique, permettent d’avoir la capacité de tirer des conclusions à partir d’un texte.

Nikolaenko (2004) propose à 8 enfants avec un SA (entre 10 et 15 ans) d’appariement de 2 cartes parmi 3 sur lesquelles des phrases sont écrites (la phrase métaphorique, une phrase littérale reprenant certains termes de la phrase métaphorique et la phrase qui illustre la métaphore). Les enfants avec un SA obtiennent en moyenne 43 % de bonnes réponses à cette tâche alors que les enfants du groupe contrôle de même âge obtiennent 90 % de bonnes réponses.