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Quelques orientations 1.Distribution de la série

Dans le document Asa Koma (Page 68-72)

Jessie Cauliez, Xavier Gutherz et Jean-Michel Pène

1.1  Quelques orientations 1.Distribution de la série

Les modalités d’intervention sur le site ont été largement exposées plus tôt dans ce volume, aussi n’en dresserons-nous qu’un bref résumé utile pour la compréhension des conditions de conservation de la collection et des choix qui ont alors découlé pour l’analyse. L’habitat d’Asa Koma est installé au sommet d’une butte basaltique culminant à 371 m d’altitude. Sur l’aire de forme elliptique que recouvre le site, les vestiges céramiques du Néolithique sont retrouvés en surface, mais sont présents aussi dans plusieurs structures foyères plates ou en cuvette à pierres chauffées et dans des concentrations de blocs de pierre se rattachant certainement à des abris en matériaux périssables. Le site a été prospecté de 1984 à 1986 par R. Joussaume et quelques sondages ont alors été réalisés. Puis en 1988 et 1989, des fouilles sont entreprises puis interrompues quelques années en raison de la situation politique. Elles seront relancées en 1994 et en 1996. Le premier sondage s’étendait sur 6 m2. Les différentes campagnes de

terrain ont permis ensuite d’élargir la fouille par plusieurs décapages extensifs, ainsi que la réalisation d’une coupe stratigraphique de 13 m de longueur. En définitive, à l’issue du chantier de 1996, l’exploration stricto sensu concerne 68 m2 au total, soit environ 7 % de l’aire occupée sur cette

butte principale.

Éléments

constituant le vase décoravec décorsans Total %

lèvre 421 138 559 6,15

fragment de panse 2 288 6 211 8 499 93,4

fond 0 46 46 0,5

Total 2 709 6 395 9 104

% 29,76 70,24 100

soit un total de 2 893 pièces diagnostiques réparties comme suit : — 421 lèvres décorées,

— 138 lèvres non décorées,

— 2 288 fragments de panse décorés, — 46 fonds non décorés.

Fig. 1 —

Tableau de comptage général des éléments céramiques, effectifs et pourcentages (DAO J. Cauliez). Soit un total de 2 893 pièces diagnostiques réparties comme suit :

— 421 lèvres décorées, — 138 lèvres non décorées, — 2 288 fragments de panse décorés, — 48 fonds non décorés.

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La série céramique d’Asa Koma ainsi rassemblée compte 9 104 fragments, dont 2 893 éléments typologiquement significatifs (fig. 1). C’est aujourd’hui encore une des plus importantes collections céramiques actuellement connues dans la Corne de l’Afrique (Stinflin, 1997 ; Le Bozec, 2002). Parmi ces pièces discriminantes, on décompte 2 288 frag- ments de panse décorés, 559 lèvres dont 421 décorées et enfin 46 fonds non ornés. D’après les données de terrain et l’enregistrement des pièces à la fois en plan et en stra- tigraphie, les tessons récoltés en surface ne représentent que 1/10 du cortège ; la majorité du corpus se compose donc de pièces découvertes non pas en affleurement, mais enfouies et retrouvées à la fouille lors des sondages réali- sés par décapages successifs. Ce pourcentage relativement faible suggère que les apports éventuellement liés à des occupations postérieures à l’installation néolithique ont sans doute peu interféré dans la composition définitive de l’assemblage. En plan, il existe également une distribution différentielle des pièces en fonction des secteurs, puisque des carrés sont mieux dotés que d’autres, comme c’est le cas pour les m2 Z4 et Z6 apportant respectivement plus de

12 % et 21 % de la collection. Inversement, certains carrés comme le B12 ne totalisent pas plus de 1 % des céramiques. Ceci étant, à l’échelle du site, l’aspect lenticulaire des dépôts rend malheureusement bien délicate toute tentative de cor- rélation chronostratigraphique, ni même d’analyse spatiale. Le site a connu une occupation fréquente et saisonnière, ce qui génère des remaniements réguliers et la succession de plusieurs strates, dont la lecture sur le terrain est rendue difficile tant le sédiment est pulvérulent. Plusieurs remon- tages céramiques effectués à partir de tessons provenant de décapages distincts et de secteurs parfois éloignés sur la fouille illustrent plus encore la réalité de ces mouvements.

1.1.2 Représentativité, état de conservation et aspect technique de la production

Ces spécificités ne doivent cependant pas altérer l’existence d’une véritable cohérence de l’assemblage sur le plan chronoculturel détectable au regard des aspects technologiques des pâtes céramiques. Depuis plusieurs années, de nouvelles voies sont explorées et abordent la technologie culturelle, en d’autres termes l’expression de facettes identitaires et sociales dans les processus tech- niques par l’analyse des savoir-faire et la caractérisation physico-chimique des productions céramiques (Arnal et

al., 1991 ; Binder et Échallier, 1991 ; Échallier et Thiercelin,

1991 ; Coll., 1994 ; De Crits, 1994 ; Dietler et Herbich, 1994 ; Convertini, 1996, 1998 ; Durrenmath, 1998, 2001, 2005 ; Gosselain, 2002 ; Di Pierro et al., 2005 ; Livingstone Smith

et al., 2005 ; Rodot et al., 2005; Martineau et al., 2007). Notre

examen caractérise ici les cortèges céramiques d’un point de vue essentiellement typologique. La qualité des produc- tions céramiques et les méthodes d’analyses sont en effet importantes et notre étude est menée sur un matériel très fragmentaire. Plus de 92 % des tessons récoltés, soit 8 399 éléments, ont une longueur maximale inférieure à 5 cm (fig. 2) et seulement 56 éléments sont plus grands que 7 cm. Dès lors, nous ne pouvons raisonnablement pas accéder de manière satisfaisante aux différentes étapes de la chaîne opératoire d’un point de vue technologique (préparation de la pâte, ébauchage, préformage, traitement de finition, cuisson…) et à la question des matières premières comme l’ont proposé plusieurs auteurs (Colas, 2000 ; Giligny, 1993, 1997 ; Roux et Courty, 1998 ; Martineau et Pétrequin, 2000 ; Martineau, 2000, 2006 ; Gelbert, 2003, 2005 ; Roux et Bril, 2002 ; Roux 2007 ; Giligny et Mery, 2010). Plutôt qu’un véritable examen technologique, nous livrons donc une approche préliminaire macroscopique (œil nu et loupe binoculaire), laquelle a l’avantage de dresser un premier état de la série et permet de mettre en évidence d’éventuelles tendances. Ceci étant, l’accent sera toutefois porté dans cette contribution à la technologie des décors imprimés et incisés.

Les pâtes sont très indurées et incluent un dégraissant extrêmement fin. Des sables sont utilisés, dans lesquels sont ponctuellement présents des grains de quartz. Des dégraissants de coquilles pilées de mollusques sont aussi un des composants caractéristiques des pâtes : il s’agit sans aucun doute de Melania et de bivalves pouvant provenir des sources d’argile même ou bien des dépôts lacustres voisins. Une étude quantitative menée sur les pièces céramiques de la campagne de 1996, soit 2 879 tessons, indique que l’association des deux matériaux, dégraissants de sables et dégraissants de coquilles, domine dans les pâtes céramiques (36,9 % des pièces), au même titre que l’utilisation de dégraissants de sable seul (49,4 %).

Les récipients sont montés aux colombins superposés les uns aux autres de façon oblique. Les jointures entre les colom- bins se font en biseau. C’est du moins ce dont témoignent de multiples tranches dans lesquelles est lisible la superposition des cylindres allongés aplatis ne semblant que rarement dépasser un demi-centimètre d’épaisseur en moyenne et aussi les cassures horizontales qui suivent très souvent la ligne de jointure se trouvant entre deux colombins. Plus encore, la paroi interne de certains tessons, mal voire pas lissée au niveau des jointures entre deux boudins de pâte, présente parfois des ondulations très nettes permettant de distinguer leur superposition (fig. 3).

Dans la technique de montage aux colombins, une des étapes peut consister en la conception du fond avec des

Longueur maximale Effectifs % <3 cm 4 353 47,8 3<5 cm 4 046 44,5 5<7 cm 649 7,1 >7 cm 56 0,6 Total 9 104 100 % 0 10 20 30 40 50 60 <3 cm 3<5 cm 5<7 cm >7 cm

Fig. 2 —

Longueur maximale des pièces céramiques, effectifs et pourcentages (DAO J. Cauliez).

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colombins ou à l’aide d’une motte. À partir de ce fond, les différents boudins d’argile sont ensuite posés les uns sur les autres jusqu’à la formation de la lèvre. En général, le fond constitue alors la partie la plus épaisse du récipient, comme c’est le cas sur les 46 fonds recensés dans la collection dont l’épaisseur dépasse le plus souvent le centimètre (fig. 4). Les récipients d’Asa Koma sont tous, sans exception, à fond arrondi. Occasionnellement, le fond présente au centre une proéminence liée à la technique de montage au colombin enroulé en spirale puis lissé et associé à d’autres colom-

bins pour réaliser la panse. Ce type de fond peut montrer l’avantage de participer à la stabilité du vase en le fichant notamment plus facilement dans le sol sableux grâce à un appendice légèrement pointu.

Les parois ainsi réalisées connaissent dans la collection des épaisseurs relativement standardisées (fig. 5). Les épais- seurs moyennes se situent presque exclusivement entre 0,6 et 1 cm, de 0,8 à 1 cm correspondant aux mesures les plus courantes en représentant près de 60 % de la série. Les parois sont donc relativement épaisses, surtout compte tenu de la

Fig. 4 — Le fond arrondi des vases. En bas à droite, récipient doté d’une proéminence sur le fond, issue du montage aux colombins et pour faciliter la pose du vase (clichés S. Le Bozec/DAO J. Cauliez).

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taille réduite des récipients reconstitués lorsque le profil le permettait (cf. infra). Les parois très épaisses de plus d’un centimètre composent quant à elles près de 18 % des vases, ce qui conforte l’impression globale de contenants ramassés. Enfin, seulement près de 2 % de la production est caracté- risée par une grande finesse des parois. Malgré des épaisseurs importantes, les parois sont très régulières, même s’il est possible de constater toutefois que les soins se sont surtout concentrés sur la surface externe. Le mode de traitement prédominant est le lissage avec près de 44 % des tessons répertoriés. Dans certains cas, le polissage semble avoir été pratiqué, comme l’indiquent environ 4 % du cortège (fig. 6). Les surfaces internes paraissent moins soignées et laissent quelques fois apparaître des stries horizontales fines et irrégulières imprimées au cours d’un lissage plus rapide.

Les surfaces externes arborent des couleurs réparties entre différentes nuances de brun, de noir et, de façon anecdotique, de rouge (fig. 6). Près de 87 % du stock montrent des colorations dérivées du brun. Pour les couleurs jaune et orangé, seulement 5 % de la collection sont diagnostiques. Les

couleurs grise ou noire sont elles aussi rares dans l’assem- blage puisque finalement reconnues sur 5,4 et 2,7 %. Selon toute logique, les couleurs des deux faces se correspondent très régulièrement. Quant aux couleurs identifiées dans la tranche, la tendance s’oriente inversement vers des pâtes assez sombres grises (13,6 %) ou noires (49 %) ce qui, cou- plé aux observations faites sur les surfaces, traduirait une cuisson à tendance oxydante incomplète (Balfet, 1989, p. 67). La cuisson réductrice est toutefois attestée par quelques pièces dont les surfaces et le cœur sont de couleur noire.

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