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Qualité du service récréatif et diversité naturelle : analyse de la demande en forêt publique par la

Carte 1 Répartition géographique du nombre d’hectares de forêt par habitant en Aquitaine CemOA

5. Qualité du service récréatif et diversité naturelle : analyse de la demande en forêt publique par la

Méthode des Programmes

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5.1. Description de la zone d’étude

Comme on l’a vu au chapitre précédent, les forêts littorales sont parmi les espaces les plus fréquentés du massif Aquitain. Pour mémoire, rappelons que 61% des Aquitains fréquentent la plage durant leur temps libre et que 23% de la population déclare explicitement se rendre sur des espaces où la plage côtoie la forêt. D’une façon générale, ceci illustre l’attractivité forte de ces espaces « mixtes » (cf. supra). Ces forêts appartiennent à l’Etat et sont gérées par l’Office National des Forêts. En Gironde, elles couvrent 20.441 hectares et s’étirent sur 87 kilomètres de côte (soit 86% du linéaire non urbanisé)92. Elles sont gérées dans une optique multifonctionnelle où les fonctions de protection (en particulier des sols) et de production sont nécessairement perçues en adéquation avec l’accueil du public (ONF 1996b, 2006). Cette fonction sociale se traduit notamment à travers le traitement paysager des peuplements et l’aménagement d’équipements récréatifs. Dans ce cadre, on cherche d’ailleurs à concentrer la fréquentation des zones bien délimitées (Illustration 1), certaines pouvant accueillir près de 500.000 visites sur les seuls mois de Juillet et Août (Dehez et Lyser 2007). En Gironde, ces aménagements sont financés dans une politique spécifique : la politique des « Plans Plages ». Instaurée avec la MIACA au début des années quatre vingt, cette politique vise à créer et entretenir des sites où l’accueil du public est pensé dans un environnement naturel de qualité, en assurant la sécurité des individus et le respect des autres fonctions de la forêt (ONF 1996b, Métayer 1999). Ces sites sont gérés de façon globale, i.e. en articulant les trois espaces de loisirs que sont la forêt, la plage et la baignade dans l’océan. La plage et la qualité de l’eau font ainsi l’objet de mesures complémentaires

91 Les résultats des chapitres 5 et 6 ont été fournis par Bénédicte Rulleau (Rulleau 2008) dans le cadre de sa thèse

de Doctorat en Sciences Economiques.

92 Il s’agit (du Nord au Sud) des forêts domaniales de la Pointe de Grave, du Flamand, d’Hourtin, de Carcans, de

Lacanau, du Porge, de Lège et Garonne et de La Teste.

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(nettoyage, sécurité, surveillance de la qualité de l’eau). La figure suivante résume le schéma général d’un site « Plan Plage » en Gironde.

Illustration 1 Schéma d’un « Plan Plage » (ONF 1996a)

14 sites sont actuellement entretenus dans le cadre de ce dispositif, lequel constitue finalement une véritable offre de services récréatifs de la part des pouvoirs publics. Divers organismes et échelons territoriaux sont concernés (communes, Département, Région, Etat, Europe), soit au

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titre de la réalisation des opérations, soit au titre de financeurs (Dehez 2003a). L’expérience récréative s’appuie donc sur trois milieux naturels originaux.

Dans ce chapitre, nous analyserons donc cette offre de services récréatifs à travers les trois dimensions que représentent la mise en valeur des trois espaces précédents (la forêt, la plage, l’océan). Même s’ils sont abordés en articulation les uns avec les autres (Métayer 1999), chaque milieu fait l’objet d’une gestion spécifique. Dans cet exemple, ils représenteront les trois principaux attributs du service (qui définissent sa qualité), soit autant de programmes pour l’analyse de la demande avec la Méthode des Programmes.

Dans la partie précédente, nous avons vu que cette méthode vise à évaluer le Consentement-À- Payer (CAP) des consommateurs pour les différentes composantes d’un bien ou d’un service environnemental et à étudier les possibles relations de complémentarité/substitution existant entre ces dernières. La méthodologie se base entre autres sur une enquête auprès des utilisateurs, enquête reposant sur la constitution de scénarios hypothétiques construits en faisant varier le niveau des attributs. Les personnes interrogées sont dès lors amenées à réaliser des arbitrages entre le prix d’une politique de maintien de la qualité de l’environnement et les attributs qui la composent.

5.2. Cadrage théorique

Lors de l’enquête, chaque enquêté i s’est vu offrir le choix entre une politique s de maintien des conditions d’accueil sur un, deux ou trois espaces et proposée à un prix et la situation de référence. Sept choix étant proposés, = à 7. Nous allons par ailleurs considérer que la politique s et la situation de référence procurent respectivement à l’enquêté les niveaux d’utilité

et . La fonction d’utilité indirecte ainsi notée (avec = ou s) dépend des caractéristiques du scénario choisi h et des caractéristiques socio-économiques (dont le revenu

) de l’enquêté.

dans une enquête par choix dichotomique, la réponse de l’enquêté ne donne pas directement la valeur de son CAP pour s ( ) mais indique s’il est supérieur ou non au prix auquel cette

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dernière lui a été proposée (Cameron 1988b). En d’autres termes, on observe une variable qualitative (Hanemann et Kanninen 1996) binaire telle que :

= ≥

 

= <

Ce procédé évite les biais de troncature des méthodes antérieures telles que celle proposée par Bishop et Heberlein (Bishop et Heberlein 1979) et dans lesquelles l’enchère était considérée comme la limite supérieure du CAP des enquêtés (Cameron et James 1987a). La probabilité d’accepter (de refuser) une offre est dès lors égale à la probabilité que soit supérieur (inférieur) à (Freeman 1993)

La modélisation de ces choix dichotomiques en évaluation contingente fait l’objet d’un large débat dans la littérature économique (McConnell 1990, Hanemann et Kanninen 1996, Whitehead 2001). Deux approches principales ont été proposées afin d’estimer la probabilité de répondre « oui » (notée !

(

= =

)

! ) : celle de Hanemann (Hanemann 1984a) qui suppose que les enquêtés acceptent de payer pour une politique A si l’utilité qu’elle leur procure est supérieure à leur utilité dans la situation de référence et celle de Cameron et James (Cameron et James 1987a) postulant que leur réponse sera négative si leur CAP pour A est supérieur au coût auquel elle a été proposée93. À l’heure actuelle, la question de la préférence pour une méthode est loin d’être tranchée. Dans ce rapport, nous présentons les résultats obtenus avec la formalisation de Hanemann (Hanemann 1984a). D’autres modèles ont été testés que nous ne détaillerons pas ici. Pour plus d’informations, nous renvoyons notamment à (Rulleau 2008). Pour mémoire, l’encadré 4 propose quelques éléments de comparaisons entre les deux approches (extrait de (Rulleau, Dehez et al. 2009a))

93 On pourra citer également la « fonction de variation » de (McConnell 1990), réécriture de l’équation proposée

par Cameron et James, qui présente l’avantage d’autoriser une interprétation des coefficients en lien avec la théorie économique (Whitehead 2001). Très largement minoritaire dans la littérature, elle ne sera pas discutée ici.

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La modélisation des choix dichotomiques en évaluation contingente fait l’objet d’un large débat dans la littérature économique (Hanemann et Kanninen, 1999 ; McConnell, 1990 ; Whitehead, 2001). Deux approches principales ont été proposées : celle de Hanemann (MH) (1984) qui suppose que les enquêtés acceptent de payer pour une politique A si l’utilité qu’elle leur procure est supérieure à leur utilité dans la situation de référence et celle de Cameron et James (CJ) (1987a) postulant que leur réponse sera négative si leur CAP pour A est supérieur au coût auquel elle a été proposée. A l’heure actuelle, la question de la préférence pour une méthode est loin d’être tranchée. D’un point de vue théorique, la principale différence entre l’approche de MH et celle de CJ réside donc dans le type de fonction de réponse qu’elles supposent (McConnell, 1990), c’est àdire dans l’interprétation de la réponse donnée par les enquêtés (oui/non). Si la première définit la forme de la fonction d’utilité afin d’obtenir la fonction de demande, la seconde part directement de la fonction d’évaluation (cf. encadré 4). Selon Cameron (1988), les coefficients proposés par CJ ont une signification sur le plan économique alors que la spécification de MH permettrait uniquement des interprétations « qualitatives » de l’effet d’un paramètre sur la probabilité de choix. Ce dernier point a été nuancé par Whitehead (2001). Les différences de fonction de réponse ont en outre des conséquences sur l’intégration du terme d’erreur puisque ce dernier apparaît dans la fonction d’utilité chez MH alors qu’il intervient dans la fonction d’évaluation chez CJ (Hanemann et Kanninen, 1999). Pourtant, sous certaines conditions de distribution des choix (en l’absence de termes d’erreur (McConnell, 1990) par exemple), les deux modélisations conduisent à estimer la même fonction (Hanemann et Kanninen, 1999). Privilégier l’une plutôt que l’autre relèverait alors d’une simple « question de style » (McConnell, 1990). Dans la pratique, les comparaisons empiriques arrivent pourtant à des résultats contradictoires puisque Whitehead (2001) a démontré que les estimations de CAP issues des deux modélisations diffèrent alors que Rambonilaza et al. (2007) arrivent à la conclusion inverse. Reste que l’approche de MH, plus facile à mettre en œuvre (Whitehead, 2001), est la seule applicable dans des évaluations opposant plus de deux niveaux de qualité environnementale (Hanemann, 1984), comme c’est le cas avec la MCMA notamment. Sur le plan économétrique, la procédure de CJ n’est utilisable que dans le cadre de régressions binomiales alors que MH autorise l’utilisation de spécifications modélisant de manière plus réaliste le comportement des consommateurs tels que les modèles Probit bivariés ou les modèles Probit à effets individuels aléatoires. Surtout, la comparaison des niveaux d’utilité initial et final permet d’inférer le CAP pour la situation de référence et l’approche de MH est, en ce sens, mieux adaptée au format de réponse dichotomique. Enfin, cette méthode est la seule à garantir des estimations non biaisées lorsque des procédures de génération de données manquantes (non réponse à la question sur les revenus par exemple) sont utilisées (Whitehead, 2001). Dans une perspective multi économiques des agents (Whitehead, 2001). Incluant ainsi plus de variables explicatrices que les méthodes précédentes telles que celles proposées par Bishop et Heberlein (1979) ou Sellar et al. (1985) (Cameron, 1988), elle ne surestime pas l’importance d’un seul facteur (Cameron et James, 1987a) (avec les risques que ce paramètre ait été mal choisi) et se révèle compatible avec la théorie de l’utilité (McConnell, 1990). Par ailleurs, l’inclusion des caractéristiques personnelles rend ce modèle plus adapté aux éventuels transferts de bénéfices (Whitehead, 2001).

encadré 4 Modélisation des choix dichotomiques en évaluation contingente : les modèles