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L’offre de services et les coûts directs

De nouveau, la référence à la théorie micro économique standard peut être faite. En effet, la théorie du producteur est employée notamment par (Robinson 1967, McConnell 1985b, Cullen et Familton 1987, Loomis et Walsh 1997b). Ici, on part du principe qu’un propriétaire désireux d’offrir un service récréatif mobilise à cet effet des ressources xi (éventuellement acquises à un

prix wi) et effectue un calcul économique avec une logique d’optimisation. S’il s’agit d’un profit

économique et que la variable de contrôle est le niveau de fréquentation F, le calcul est le suivant :

. i i

i

Max p F

x w

où p est le prix par visite.

Rappelons que F est déterminée par une fonction bien particulière qui associe simultanément les inputs du producteur xi et ceux du visiteur (cf. supra).

On dispose alors des trois options que sont la technologie, les coûts et les profits pour étudier ce comportement. Mais comme le font remarquer (Bowes et Krutilla 1989), l’absence de prix de marché joue nettement en faveur des coûts qui fournissent plus d’information que la technologie. En outre, cette approche est valable aussi bien pour le propriétaire public que privé.

L’analyse des coûts a particulièrement été développée par (Loomis et Walsh 1997b), et plus récemment reprise par (Dehez 2003a). Le principe de base est assez simple : dès l’instant qu’on affecte des ressources (sols, main d’œuvre, matériel) à un objectif d’accueil du public, apparaît un coût direct implicitement lié à une offre de service récréatif. Dans cette perspective, on suppose l’existence d’une fonction de coût CD résultat d’un processus de minimisation sous contrainte14, soit

14 Même si la contrainte technologique intègre des éléments de la fonction de demande d’après l’hypothèse de

« coproduction ». CemOA : archive ouverte d'Irstea / Cemagref

( , , i, ) CD q F w X avec . . ( , , , ) i i i i MIN

w x s c H q F w X

En théorie, cette fonction devrait au moins faire figurer les caractéristiques du service q, la fréquentation F, le prix des inputs wi, ainsi que les facteurs fixes à court terme X15.

Diverses restrictions sur CD sont envisageables en fonction des relations qui existent entre les caractéristiques q et la fréquentation F. A titre d’illustration, une fonction séparable en q et F correspond à une situation où le fait d’ouvrir un site n’a aucune répercution sur l’offre de caractéristiques initiales. En d’autres termes, la décision d’aménager un espace induit des coûts fixes quel que soit le degré d’usage (même nul) 16. Dès lors, l’effet d’un changement de caractéristiques q (perçu comme une variation de la qualité) peut être illustré à travers une translation de la fonction d’offre.

CD(F,q1) Fréquentation Coûts marginaux CD(F,q2) CD(F,q1) Fréquentation Coûts marginaux CD(F,q2) CD(F,q1) Fréquentation Coûts marginaux CD(F,q2) Fréquentation Coûts marginaux CD(F,q2)

Figure 5 Amélioration de la qualité et déplacement de la fonction d’offre

(Loomis et Walsh 1997b) rappellent l’importance de la question basique des rendements d’échelle. Lorsque les coûts fixes sont associés à des coûts de capacité, notée Q, la taille du site

15 Tels que les sols.

16 Par exemple, l’entretien des sentiers de randonnée est indépendant du nombre de randonneurs. D’un point de

vue mathématique, la dérivée croisée

2 CD q F ∂ ∂ ∂ est nulle. CemOA : archive ouverte d'Irstea / Cemagref

(mesurée par le nombre de places de parking, les emplacements de camping, etc.) devient une variable de contrôle déterminante. Assez classiquement, la taille optimale Q* est donnée par la relation17 CD CD F Q Q δ δ = ∀ avec F<Q

Des rendements croissants (consécutifs à des coûts fixes importants par exemple), i.e.

CD CD

F

Q Q

δ

δ ∀ ,

plaident pour une utilisation à pleine capacité des sites. Dans la pratique, l’hypothèse doit être nuancée car, même si les coûts fixes sont fréquents (étude, acquisition du foncier, création des équipements et des routes d’accès), il y a sans doute des pertes d’efficacité à fonctionner à grande échelle (au niveau de la surveillance et de sécurité notamment). Dès lors, la fonction schématique « en U » n’est peut être pas si caricaturale que cela. En outre, les auteurs précédents raisonnent généralement ex ante, c'est-à-dire lorsque la taille du site n’est pas encore définie (i.e. avant sa construction). Sur un site déjà aménagé, il existe des coûts d’ajustement aussi bien à la hausse qu’à la baisse18. Cette question de la taille optimale est une composante essentielle de l’analyse de l’offre car la demande affiche des variations saisonnières marquées (voir chapitre 4). Elle intervient également dans la réflexion sur la tarification (Dehez 2003a).

Le temps est un autre aspect important de l’analyse, via la durée de vie des équipements. Cet effet apparaît plus nettement lorsqu’on utilise la formule des annuités constantes. Ainsi, pour un investissement initial I ayant la durée de vie D, l’annuité équivalente A est

17

Qui renvoie également à la mesure de l’efficacité d’utilisation du capital {Picard, 1998 #216), soit CD Q CD Q δ δ

18 La destruction des équipements (une réduction de la capacité) a un coût !

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1 (1 ) D i A I i − = ⋅ − +

où i est le taux d’intérêt.

On remarque immédiatement que

0

A D δ δ <

Si la durée de vie D est impactée par l’effort d’entretien CE, avec

0

CE D δ

δ > ,

alors un arbitrage entre coûts de fonctionnement et coûts d’investissement se dessine. En théorie, la durée de vie optimale D* est celle qui minimise le cout total (I+CE). Dans le cas d’un réseau de pistes cyclables installées en forêt, (Dehez 2003a) a ainsi montré que le passage d’une durée de vie de 20 ans (entretien actuel) à une durée de vie infinie (i.e. avec renouvellement continu des équipements) réduisait le coût en capital de 45%. Appliqué aux 161 kilomètres de pistes de l’étude, ceci aboutit à une baisse de 274.815€ (€2008)19.

D’autres variables interviennent certainement mais, faute de références empiriques, on en reste aujourd’hui au stade des conjonctures. Nous pensons notamment aux variables d’environnement telles que le milieu naturel (peuplements, présences d’autres écosystèmes non forestiers), l’exposition au risque (incendie, érosion, glissement de terrain) ou encore les conditions météorologiques. A tout le moins, les travaux menés sur les espaces naturels ou agricoles sont une source d’inspiration utile (CELRL 1995). De même, la nature des formes fonctionnelles est sujette à caution bien que (Loomis et Walsh 1997b) admettent que des relations linéaires sont souvent de bonnes approximations. C’est d’ailleurs l’approche développée par (Dehez 2003a) pour l’étude des coûts d’entretien des sites « Plan Plages » installés en forêt domaniale de

19 L’actualisation du coût des équipements a été réalisée à l’aide d’un indice spécifique élaboré pour l’occasion à

partir de l’indice TP01 du bâtiment. Vu la nature des opérations en effet, le recours à l’indice du pouvoir d’achat (fourni par l’INSEE) ne nous a pas semblé pertinent.

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Gironde20. A partir d’un échantillon constitué de 8 sites et 11 années d’observation (1988-1999), l’auteur estime la fonction de coût de fonctionnement suivante21 :

C=1.839.S+10.647.L+0,0132.F

où S est la surface aménagée en forêt, L la longueur de la fenêtre littorale et F la fréquentation (nombre de visites par an). A titre d’illustration, le Tableau 7 décrit les opérations qui constituent ce coût direct.

20 Cette politique d’accueil du public en forêt sera précisée en partie 2.

21 Les valeurs ont été converties en Euro 2008 à l’aide du même indice.

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