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La protection des intérêts du public grâce aux ancres

Titre I : La liberté de constituer une ancre

Chapitre 2 La protection des intérêts du public grâce aux ancres

186. Le droit d’auteur et le copyright conservent les stigmates d’approches technicistes qui ont profondément marqué leurs contours. L’Union Européenne est allée plus loin que les Etats-Unis dans ce mouvement techniciste en établissant une réglementation ad hoc des bases de données qui a vocation à s’appliquer notamment aux ancres de liens (Section 1).

187. La France est en revanche allée plus loin que les Etats-Unis dans la conception romantique du droit d’auteur en conférant des droits moraux qui auront vocation à s’appliquer aux hyperliens (Section 2).

Section 1 : La création d’une base de données ou d’une compilation par les liens

188. Les bases de données de liens s’avéreront particulièrement utiles pour les internautes afin qu’ils ne se perdent pas dans le dédale de l’internet. Il est fait recours aux bases de données dans tous les domaines d’activité. Elles s’avèrent être des outils indispensables à la recherche, à la culture et à la science. Les bases de données sont au carrefour de nombreux intérêts économiques, scientifiques et culturels et sont de la plus haute importance pour les sociétés occidentales326. L’accès aux bases de données est donc fondamental pour les sociétés de la connaissance. Concomitamment, les producteurs de bases de données ont besoin d’un régime juridique leur permettant d’assurer un retour sur investissement afin de continuer la création et le développement des bases de données. Les internautes et les producteurs ont donc des intérêts en conflit.

189. Ce conflit interroge sur le contour à donner au droit d’auteur et au copyright. En effet, les contenus des bases de données peuvent n’être que des informations brutes non protégeables. Le risque est ainsi de favoriser le monopole économique des créateurs de bases

      

326

National Research Council, « Committee for a Study on Promoting Access to Scientific and

Technical Data for the Public Interest, a Question of Balance : Private Rights and the Public Interest in Scientific and Technical Databases », The National Academies Press, 1999, accessible à

de données et de limiter ainsi l’accès aux informations. Une société mettant un prix sur l’information instaure de ce fait un frein à leur libre circulation, ce qui risque d’entraîner un appauvrissement intellectuel ainsi qu’une forte limite à la recherche327. Un juste équilibre doit être trouvé entre la protection des intérêts économiques et la juste rémunération des investissements financiers et humains d’un côté, et la libre circulation des idées et des informations de l’autre.

190. La fonctionnalité des hyperliens constitue en revanche une aubaine pour les chercheurs et les créateurs de bases de données qui y trouvent un moyen supplémentaire de lier des bases de données entre elles328. Cela permet d’améliorer l’accès aux informations. Les liens se trouvent donc mêlés au conflit entre la libre circulation des informations - dans la mesure où ils facilitent leur accès - et les intérêts économiques liés à la constitution des bases de données car ils peuvent causer une perte de revenus pour le producteur. Les hyperliens permettent donc la création de bases de données numériques et peuvent également constituer des bases de données.

191. La convention de Berne329 avait déjà intégré la nécessité de la protection des anthologies dès 1886330 qui constituent une forme de base de données. Cette solution pouvait apparaître satisfaisante à la fin du 19e siècle mais l’avénement du numérique et le développement de la société de la connaissance ont provoqué un regain d’intérêt pour la protection des bases de données. Les accords ADPIC331 ont ainsi permis en 1994 la protection des bases de données à l’échelle mondiale. Le traité ADPIC ne change pas la substance de la       

327

P. SAMUELSON, « Challenges in Mapping the Public Domain - Threats and Opportunities », 66 Law & Contemp. Probs. 147, hiver-printemps 2003 ; S. DUSSOLIER, « Étude exploiratoire sur le droit d’auteur et les droits connexes et le domaines public », OMPI, 30 avril 2010, p. 14.

328

National Research Council, « Committee for a Study on Promoting Access to Scientific and

Technical Data for the Public Interest, a Question of Balance : Private Rights and the Public Interest in Scientific and Technical Databases », The National Academies Press, 1999, 34, accessible à

http://www.nap.edu/books/0309068258/html/ (dernier accès : 8/07/2015).

329

Article 2.5 de la convention de Berne : « les recueils d’œuvres littéraires ou artistiques tels que les encyclopédies et anthologies qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles sont protégés comme telles, sans préjudice des droits des auteurs sur chacune des œuvres qui font partie de ces recueils ».

330

E. BATALLER I RUIZ, « El Derecho Sui Generis sobre Bases de Datos – Génesis, Evolución y

Perspectivas », Thomson Reuters, 2009, p. 53.

331

Article 10.2 de l’accord ADPIC : « les compilations de données ou d’autres éléments, qu’elles soient reproduites sur support exploitable par machine ou sous toute autre forme, qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles seront protégées comme telles. Cette protection, qui ne s’étendra pas aux données ou éléments eux-mêmes, sera sans préjudice de tout droit d’auteur subsistant pour les données ou éléments eux-mêmes ».

convention de Berne mais ses dispositions s’avèrent plus précises en ce qu’elles disposent explicitement qu’une base de données numérique peut être protégée.

192. Par la suite, en 1996, le traité OMPI a inclu la protection des compilations et des bases de données. Le critère de protection était l’originalité et aucun régime dérogatoire n’était prévu. Ainsi, le mouvement international de protection des bases de données s’avère limité par le recours au critère de l’originalité alors que de nombreuses bases de données ne font pas preuve d’originalité et ne pourront donc pas bénéficier de la protection par le droit d’auteur. L’OMPI a par conséquent annoncé qu’elle allait continuer ses travaux afin de proposer un traité international relatif à la protection des bases de données332 et ce, malgré l’échec d’un accord en 1996333 et en 2002334 dû notamment à l’opposition des cercles scientifiques. Les États membres - dont la France et les Etats-Unis - sont donc pour le moment simplement tenus d’appliquer le droit d’auteur aux compilations originales.

193. La règle de l’originalité est comprise de façon relativement similaire335 en Europe et aux Etats-Unis. Le critère de protection est l’empreinte de la personnalité336 en droit européen alors que le droit américain applique le critère de l’originalité337 - qui se définit comme la création indépendante dotée au moins d’un quantum modeste de créativité338. La différence d’approche n’a que de rares conséquences339. Les juges donc rencontrent des difficultés

      

332

OMPI Doc. CRNR/DC/88, 20 décembre 1996.

333

OMPI, « Conférence diplomatique sur certaines questions de droit d’auteur et de droits voisins », CRNR/DC/100, 20 décembre 1996, p. 1.

334

Lors de la session de 2002 il a été fait remarqué que l’introduction d’une protection sui generis serait superflue étant donné que d’autres mécanismes juridiques permettent d’assurer la réservation des bases de données et qu’une telle protection freinerait le développement des pays du Sud. Voir OMPI, « Étude sur la protection des bases de données non originales », SCCR/7/3, 13-17 mai 2002. Les sessions suivantes des 7 et 9 juin 2004 et des 21 et 23 novembre 2005 n’ont pas permis de trouver un accord.

335

K. HARIANI, A. HARIANI, « Analyzing ‘Originality’, in Copyright Law : Transcending

Jurisdictional Disparity », 51 IDEA 491, 2011.

336

CJCE, 16 juill. 2009, aff. C-5/08, Infopaq : Comm. com. électr. 2009, comm. 97, C. Caron ; JCP G 2009, n° 39, note L. Marino ; Propr. intell. 2009, n° 33, p. 378, obs. V.-L. Bénabou ; RIDA 2010, n° 226, p. 401, obs. P. Sirinelli.

337

Feist Publications, Inc. v. Rural Telephone Service, 499 U.S. 340, 111 S.Ct. 1282, 113 L.Ed.2d 358 (1991).

338

Feist Publications, Inc. v. Rural Telephone Service, 499 U.S. 340, 111 S.Ct. 1282, 113 L.Ed.2d 358 (1991).

339

Pour la divergence sur la protection des titres en France et l’absence de protection aux Etats-Unis voir n°110 s.

similaires dans l’application du droit d’auteur et du copyright à cause des particularités des bases de données340. Face à cette difficulté, les jurisprudences ont réagi de façons différentes.

194. En Europe, la CJUE341 a introduit un critère unique - en retenant le même critère de l’originalité dans les directives 91/250, 96/9, 2001/29/CE et 2006/116342 - pour les œuvres des beaux arts et les bases de données comme l’a fait l’arrêt Feist343 aux Etats-Unis344.

195. Bien qu’ils soient particulièrement bas, les seuils d’originalité font obstacle à la protection de nombreuses bases de données. L’union Européenne a par conséquent instauré - à l’inverse des États-Unis - un régime ad hoc de protection des bases de données visant à mettre fin aux distorsions dans le commerce entre les États membres et à protéger les intérêts financiers des investisseurs ainsi que ceux des utilisateurs345. Elle visait aussi à compenser l’abandon de la théorie de la sweat of the brow en Angleterre qui assurait la protection des bases de données346. L’article 1.2 directive définit la base de données comme « un recueil d'œuvres, de données ou d'autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d'une autre manière ». La directive a été transposée en droit français dans la loi n°98-536 du 1er juillet 1998. L’article L. 112-3 alinéa 2347 du Code de la propriété intellectuelle a repris quasiment mot pour mot les termes de la directive. Cette définition est très large et pourrait avoir pour

      

340

A. LUCAS, « « Droits des producteurs de bases de données », JCl. Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1650, 17 mai 2015, 11.

341

CJCE, 4e ch., 16 juillet 2009, aff. C-5/08, Infopaq International A/S Danske Dagblades Forening.

342

CJCE, 4e ch., 16 juillet 2009, aff. C-5/08, Infopaq International A/S Danske Dagblades Forening, 35.

343

Feist Publ'ns, Inc. v. Rural Tel. Serv. Co., 499 U.S. 340, 111 S. Ct. 1282, 113 L. Ed. 2d 358, 1991 U.S. LEXIS 1856, 18 U.S.P.Q.2D (BNA) 1275, 59 U.S.L.W. 4251, Copy. L. Rep. (CCH) P26,702, 91 Cal. Daily Op. Service 2217, 121 P.U.R.4th 1, 91 Daily Journal DAR 3580, 18 Media L. Rep. 1889, 68 Rad. Reg. 2d (P & F) 1513 (U.S. 1991).

344

Pour la jurisprudence américaine en revanche trois éléments sont réunis, à savoir l’assemblage d’éléments préexistants, de faits ou de données ; la sélection, la coordination ou l’arrangement de ces éléments et la création par sélection, coordination, arrangement, d’une œuvre originale. Le second élément est considéré comme le critère clé.

345

Commission européenne, « First evaluation of Directive 96/9/EC on the legal protection of

databases », 12 décembre 2005, p.4, accessible à

http://ec.europa.eu/internal_market/copyright/docs/databases/evaluation_report_en.pdf (dernière visite: 7/07/2014).

346

P.J. CARDINALE, « Sui Generis Database Protection : Second Thoughts in the European Union

and What it Means for the United States », 6 Chi.-Kent J. Intell. Prop. 157, printemps 2007, 157-158.

347

« On entend par base de données un recueil d'œuvres, de données ou d'autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen ».

conséquence de placer toutes les bases de données dans le giron de la directive. Le législateur européen a cependant introduit un critère supplémentaire.

196. La protection sui generis n’est accordée qu’aux bases de données qui sont le fruit d’un investissement substantiel de la part du producteur. L’investissement doit être financier, matériel ou humain et doit s’avérer substantiel348. Il s’agit donc d’un droit de économique349, portant sur l’interdiction de l’extraction ou de la réutilisation du contenu de la base350, et visant à protéger les investissements351 des producteurs de la base de données et non pas des éléments qu’elle contient. Cette approche est étrangère au droit commun du droit d’auteur ainsi qu’au copyright américain. La directive 96/9/CE introduit donc une logique nouvelle qui renverse des siècles d’évolution du droit d’auteur. En effet, la lettre de Louis XVI du 6 septembre 1776352 retenait que l’acte créatif est prééminent par rapport à l’investissement financier et les droits français et américain se sont inscrits dans cette approche. Le droit sui

generis des bases de données constitue donc une excroissance surprenante du droit d’auteur

tendant vers les droits de propriété industrielle353. C’est la raison pour laquelle la réglementation sui generis a été placée, au sein du Code de la propriété intellectuelle, à la fin du livre sur le droit d’auteur comme une transition vers les droits de propriété industrielle. Le législateur italien a adopté une approche philosophiquement similaire en plaçant les dispositions relatives à la protection sui generis354 à la suite de celles concernant le droit commun du droit d’auteur355 et avant les articles concernant notamment les mesures techniques de protection356.

      

348

Article L. 341-1 du Code de la propriété intellectuelle ; M. VIVANT, J.M. BRUGUIÈRE, « Droit

d’auteur et droits voisins », op. cit., p. 200, 208.

349

Commission des Communautés Européennes, « Livre vert : Le droit d’auteur et les droits voisins dans la Société de l’Information », 19 juillet 1995, Com (95) 382 final, 84.

350

Article L. 341-1 s. du Code de la propriété intellectuelle.

351

C. LE GAL, N. MARTIN, « Droit des bases de données et parasitisme », RLDI, janvier 2006, n°339, p. 13.

352

F. Rideau « Commentary on the La Fontaine case (1761) », in Primary Sources on Copyright (1450-1900), L. Bently & M. Kretschmer, 2008.

353

La réglementation sui generis a par ailleurs été placée, au sein du Code de la propriété intellectuelle, à la fin du livre sur le droit d’auteur comme une transition vers les droits de propriété industrielle.

354

Titolo II bis - Disposizioni sui diritti del costitutore di una banca di dati (artt. 102-bis - 102-ter).

355

Titolo I - Disposizioni sul diritto d'autore (artt. 1 - 71-decies) Titolo II (artt. 72 - 102).

356

Titolo II ter - Misure tecnologiche di protezione. Informazioni sul regime dei diritti (artt. 102- quater - 102-quinquies).

197. Les Etats-Unis ont en revanche connu une évolution opposée au droit européen. En effet, alors qu’ils protégeaient initialement les œuvres dont la création était le fruit d’une « sweat of the brow357 » comme au Royaume-Uni - c’est à dire des efforts de l’auteur sans

considération pour l’originalité - l’arrêt Feist358 a introduit le critère de l’originalité pour la protection des œuvres et a par conséquent écarté a théorie de la sueur du front. Le critère de l’originalité est désormais considéré comme un fondement constitutionnel. Le droit européen a donc connu un mouvement inverse à celui du droit américain en limitant initialement la protection aux œuvres originales puis en ajoutant une autre forme de protection aux bases de données indépendamment de leur originalité. En effet, suite à l’introduction d’un critère harmonisé de l’originalité, le législateur européen a voulu ne pas faire perdre toute protection aux créations protégées dans les pays de common law par cette théorie359. Il ne s’agit cependant pas d’un équivalent exact étant donné que le seuil de protection de la directive européenne s’avère plus élevé que celui de la sweat of the brow.

198. Cette divergence entre les droits européen et américain n’est pas prête de se résorber. Certains projets ont tenté d’introduire en droit américain des réglementations permettant de protéger plus largement les bases de données. Le premier projet dit HR 354360 a été introduit par le House Judiciary Committee par le député Coble en 1999 et visait à interdire les utilisations pouvant causer des dommages au marché du producteur ou à des marchés dérivés. Le second projet est dit HR 1858361 a été introduit par le député Bliley en 1999 et visait à autoriser toutes les utilisations de bases de données à l’exception des usages commerciaux en situation de concurrence directe avec une base de données originale. Le Congrès a rejeté les deux propositions de lois. Il est peu probable qu’un changement intervienne malgré la condition de réciprocité que la directive Européenne362 a introduit pour la protection des bases

      

357

« La sueur du front » (Traduction libre).

358

Feist Publ'ns, Inc. v. Rural Tel. Serv. Co., 499 U.S. 340, 111 S. Ct. 1282, 113 L. Ed. 2d 358, 1991 U.S. LEXIS 1856, 18 U.S.P.Q.2D (BNA) 1275, 59 U.S.L.W. 4251, Copy. L. Rep. (CCH) P26,702, 91 Cal. Daily Op. Service 2217, 121 P.U.R.4th 1, 91 Daily Journal DAR 3580, 18 Media L. Rep. 1889, 68 Rad. Reg. 2d (P & F) 1513 (U.S. 1991).

359

Commission européenne, « First evaluation of Directive 96/9/EC on the legal protection of

databases », 12 décembre 2005, p.9, accessible à

http://ec.europa.eu/internal_market/copyright/docs/databases/evaluation_report_en.pdf (dernière visite: 7/07/2014).

360

Collections of Information Antipiracy Act, 19 janvier 1999.

361

Consumer and Investor Access to Information Act, 19 mai 1999.

362

de données. Les Etats-Unis ne reproduiront pas pour les bases de données ce qu’ils ont fait pour la durée de la protection des œuvres363 lorsqu’ils ont copié le modèle européen364.

199. Les différents régimes de protection se limitent cependant au contenu de la base de données. La protection est accordée à la contribution du producteur de la base de données et les contenus préexistants à la base de données bénéficient ainsi d’une double protection par le droit sui generis et par le droit d’auteur s’il s’agit d’œuvres marquées par l’empreinte de la personnalité de leurs auteurs. C’est ainsi l’arrangement qui est protégé et non le contenu365 qui reste la propriété de l’auteur original366. Cela permet de ne pas permettre d’appropriation du travail d’autrui ni de créations ou de données relevant du domaine public. Cela étant, bien que les producteurs de bases de données ne bénéficient d’aucun droit de propriété sur les contenus qu’ils intègrent, ils jouissent d’un contrôle sur l’accès aux œuvres.

200. Certains sites internet proposent des listes de liens organisées qui sont le fruit d’investissements substantiels et qui peuvent également faire preuve d’originalité. Ces listes peuvent bénéficier d’une protection (Sous-Section 1). Leur utilisation par des tiers sera par conséquent limitée (Sous-Section 2).

Sous-Section 1 : La création manuelle ou automatique d’une liste de liens

201. Lors de la rédaction de la convention de Berne en 1886 la question n’était pas encore soulevée de savoir si une entité autre qu’humaine pouvait bénéficier d’un droit de propriété intellectuelle. Le droit d’auteur, le droit sui generis et le copyright s’appliquent donc, selon des critères différents, aux créations humaines et par conséquent aux listes de liens créées manuellement (Paragraphe 1).

202. Le développement de formes d’intelligences artificielles avec la création d’algorithmes oblige à repenser le rapport à la création dans la mesure où les créateurs automatiques de liens       

363

Copyright Term Extension Act.

364

M. LANDAY, « Fitting United States Copyright Law Into The International Scheme : Foreign And

Domestic Challenges To Recent Legislation », 23 Ga. St. U. L. Rev. 847, été 2007, 859.

365

L. Lee Stapleton, « E-Copyright Law Handbook », Aspen Publishers, 2003, § 10.02[B].

366

sont en mesure d’établir des listes raisonnées de liens (Paragraphe 2). L’application du droit d’auteur, du droit sui generis ainsi que du copyright pose ici plus de difficultés. Le droit est cependant réfractaire à l’idée qu’une entité non humaine puisse jouir de droits.

Paragraphe 1 : La constitution manuelle d’une liste d’ancres

203. Les bases de données peuvent bénéficier en Europe et aux États-Unis de la protection par le droit d’auteur et le copyright (I). En revanche, le droit sui generis est limité aux bases de données produites sur le territoire européen (II). Les deux protections sont cumulables mais elles s’appliquent à des éléments différents.

I) La protection d’une base de données par le droit d’auteur et le copyright

204. Les juges français et américains ont eu l’occasion de se prononcer sur la protection d’une base de données par le droit d’auteur et il ont pu protéger ces créations lorsqu’elles s’avéraient originales.

205. Le droit européen applique le droit d’auteur aux œuvres qui « constituent une création intellectuelle propre à leur auteur367 » et a donc adapté le critère de l’originalité aux bases de données. Les bases de données bénéficient donc d’une conception minimaliste368 de l’originalité. La méthode contraste avec celle adoptée aux Etats-Unis car la jurisprudence a établi le standard de l’originalité dans l’arrêt Feist369 concernant la protection des bases de données. Il n’y a donc pas de distinction entre le régime de protection des œuvres relevant du droit commun et les bases de données. Le droit européen requière par conséquent des auteurs

      

367

Article 3 de la directive 96/9/CE.

368

G. KOUMMANTOS, « Les bases de données dans la directive communautaire », RIDA 1/1997, p. 93.

369

Feist Publ'ns, Inc. v. Rural Tel. Serv. Co., 499 U.S. 340, 111 S. Ct. 1282, 113 L. Ed. 2d 358, 1991 U.S. LEXIS 1856, 18 U.S.P.Q.2D (BNA) 1275, 59 U.S.L.W. 4251, Copy. L. Rep. (CCH) P26,702, 91 Cal. Daily Op. Service 2217, 121 P.U.R.4th 1, 91 Daily Journal DAR 3580, 18 Media L. Rep. 1889, 68 Rad. Reg. 2d (P & F) 1513 (U.S. 1991).

d’apporter la preuve de l’existence d’un apport intellectuel370, c’est à dire un effort personnalisé dépassant la mise en œuvre d’une logique contraignante371 ». Le critère est donc assez similaire à celui retenu dans l’arrêt Feist du niveau minimal de créativité. La