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L’ancre face au droit de divulgation et de paternité

Titre I : La liberté de constituer une ancre

Paragraphe 1 L’ancre face au droit de divulgation et de paternité

267. La divergence entre les deux systèmes est surprenante car la sacralisation de l’auteur constitue pourtant un intérêt intellectuel pour les chercheurs et le public. En effet, le droit de divulgation (I) permet à l’auteur de contrôler les modalités de la première communication de son œuvre qui peuvent être riches de sens.

268. En outre, l’apposition du nom d’un auteur sur une œuvre (II), offre des clés de lecture du travail effectué en permettant de la contextualiser. Il est ainsi plus facile de comprendre les évolutions intellectuelles et artistiques à partir de la Renaissance, où les auteurs signaient leurs œuvres, qu’au Moyen-Âge où ils ne mentionnaient que rarement leurs noms. Le droit moral présente donc un intérêt intellectuel pour le public car il permet de comprendre l’origine des œuvres ainsi que leur objectif intellectuel.

I) Le droit de divulgation de l’œuvre

      

493

A.F. ABBOTT, « Copyright Chief’s Dismissal Sends Bad Signal To Creatives », The Hill, 31 octobre 2016.

494

A. ORLOWSKI, « Exit Through The Gift Shop ? US Copyright Chief Was Assigned To Shop Till,

269. Le droit de divulgation consiste à réserver à l’auteur le choix des modalités de la communication de son œuvre au public495. Le terme de divulgation vient du latin vulgus qui signifie la foule496. Il s’agit donc d’un droit tourné vers la relation entre l’auteur et son public, alors que les droits patrimoniaux se limitent à des considérations économiques.

270. Cette prérogative n’est pas mentionnée dans la convention de Berne. Les États membres n’ont donc pas l’obligation de l’introduire en droit interne. L’adhésion des Etats- Unis à la convention de Berne n’a par conséquent pas permis aux droits français et américain de converger sur cette prérogative. Les Etats-Unis n’ont donc pas eu besoin d’intégrer le droit de divulgation dans le Visual Artists Rights Act497. La question de l’application du droit de divulgation oppose donc les systèmes protecteurs des prérogatives morales des auteurs, c’est à dire les droits continentaux, et les systèmes protecteurs des intérêts économiques des auteurs que sont les Etats-Unis et l’Union Européenne.

271. Le droit français connaît le droit de divulgation depuis l’arrêt Whistler498 du 14 mars 1900 dont la solution a été confirmée dans l’arrêt Camoin du 6 mars 1931499. Le législateur l’a consacré dans la réforme de 1957500. Depuis la codification de 1992, le droit de divulgation a été intégré à l’article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle qui énonce que « l'auteur a seul le droit de divulguer son œuvre ». Il y est précisé que « l’auteur détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celles-ci ». L’auteur de son vivant a le droit discrétionnaire501 de décider des modalités de la divulgation de son œuvre502. Le droit de divulgation consiste donc à communiquer son œuvre à la foule.

272. L’auteur d’une œuvre peut donc, en France, décider des modalités de divulgation de ses œuvres. Les auteurs américains ne jouissent pas de prérogatives similaires mais ils pourront recourir à un équivalent fonctionnel en opposant leurs droits patrimoniaux. Les

      

495

Article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle : « Sous réserve des dispositions de l’article L. 132-24, [l’auteur] détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci ».

496

P.Y. GAUTIER, « Propriété littéraire et artistique », op. cit., p. 201, 190.

497

17 U.S.C. 106(A).

498

Cass. civ., 14 mars 1900, Eden c. Whistler, D. 1900, 1, p. 497, note M. PLANIOL.

499

CA Paris, 6 mars 1931, « Les grands arrêts de la propriété intellectuelle », Dalloz, 2003, n°8, comm. Gleize et Lacour.

500

Article 19 de la loi n°57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique.

501

Trib. civ. Seine, 10 juillet 1946, Rouault c. Vollard », D., 1947, p. 98, obs. Desbois.

502

Cass. civ. 1re, 29 novembre 2005, Le Groumellec c. Binoche », Bull. civ. I, n°457, p. 383 ; F. POLLAUD-DULIAN, « Le droit d’auteur », op. cit., 790.

auteurs pourront en effet opposer les droits qu’ils tiennent de la section 106 du Copyright Act lorsqu’un tiers communique l’œuvre au public en opposant notamment le droit de

performance ou de display. Ainsi, là où le droit français permet d’opposer les droits

patrimoniaux et moraux, le droit américain n’offre que des prérogatives patrimoniales. Cette limitation du droit américain a des conséquences dans l’étendue de cet équivalent fonctionnel. Les auteurs ne pourront pas s’opposer en droit américain à une divulgation qu’ils n’auraient pas souhaitée par un cessionnaire de leurs œuvres alors qu’ils en auront la possibilité en droit français.

273. La doctrine française s’est opposée sur la question de savoir si le droit de divulgation s’épuise à la suite de la première divulgation503. En cas de réponse positive les auteurs conserveraient le droit de déterminer les conditions de communication d’une œuvre au public sur un nouveau medium. La jurisprudence a été incertaine sur la question, retenant parfois la thèse de la divulgation limitée aux modes de divulgation acceptés par l’auteur504 ou la thèse de l’épuisement sans réserve505. Cependant, l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 11 décembre 2013506 que le droit de divulgation s’épuise « par le premier usage qu’en fait l’auteur ». Un hyperlien ne procéde donc pas à la divulgation à un public nouveau. Cette solution est logique dans la mesure où l’internet constitue un espace unique il n’y a pas lieu de considérer qu’il puisse y avoir de semi-divulgation507 une fois que l’œuvre a été téléchargée en ligne. Le principe de la semi-divulgation doit par conséquent être écarté. Le droit français autorise donc les créateurs d’ancres à reproduire une œuvre déjà présente sur internet sans avoir à solliciter l’autorisation de divulguer l’œuvre. Aucun arrêt français n’est venu préciser cette position en matière d’ancres de liens, mais il est tout à fait probable que les juges hexagonaux trancheront dans le sens de l’absence de violation du droit de divulgation dès lors qu’elle a déjà été divulguée sur internet. Cette approche nous paraît philosophiquement juste car, bien qu’elle fasse fi des différences culturelles au sein d’une société, elle présente l’avantage de postuler le caractère universaliste de la culture et s’avère par là même démocratique.

      

503

P. Sirinelli, « Le droit moral de l’auteur et le droit commun des contrats », op. cit., p. 26 et s. : l’épuisement est limité aux modes de divulgations acceptés par l’auteur ; M. VIVANT, J.-M. BRUGUIERE, « Droit d’auteur », op. cit., p. 383, 454 : retient que le droit de divulgation s’épuise à partir du fait matériel de publication.

504

CA Paris, 4e ch., 23 juin 2000 : Prop. intell., n°1, 2001, p. 60, obs. Lucas.

505

CA Paris, 4e ch., 14 février 2001 : Prop. intell., n°1, 2001, p. 64, obs. Lucas.

506

Cass. civ. 1e, 11 décembre 2013, n°11-22522 et 11-22031.

507

274. La jurisprudence belge, dont les solutions sont souvent proches de celles retenues en France, a eu l’occasion de se pencher sur cette question. En effet, le tribunal de grande instance de Bruxelles a statué en référé - juge de l’évidence - dans une affaire opposant la société Google et la société Copiepresse508. Il a jugé que la société Google ne viole pas le droit de divulgation lorsqu’elle utilise les œuvres de la société Copiepresse, dans la mesure où elles se trouvent déjà sur le web. Internet serait donc un espace commun et unique sur lequel il n’est pas possible de divulguer plusieurs fois. Les droits français et belge limitent donc le droit de divulgation à un usage unique sur chaque medium. Étant donné que le droit de divulgation peut constituer une limite au droit à la culture du public en ce qu’il limite la circulation des œuvres, cette solution doit être approuvée car elle limite un contrôle disproportionné sur les œuvres. Les systèmes protecteurs des seuls droits patrimoniaux arrivent à une solution similaire mais selon un raisonnement différent. Une œuvre divulguée sur internet est considérée comme ayant été communiquée à l’ensemble des internautes et ne souffre aucune divulgation ultérieure. Néanmoins, l’approche européenne n’est pas complétement opposée à celle en vigueur aux Etats-Unis, elle s’avère seulement plus nuancée.

275. La jurisprudence américaine adopte une approche uniquement patrimoniale mais elle a quand même eu l’occasion de rejeter la notion de semi-divulgation. Il a ainsi été retenu dans l’arrêt Harper & row, Publishers, Ins. v. Nation Enters509 que « under ordinary circumstances,

the author’s right to control the first public appearance of his undisseminated expression will outweigh a claim of fair use510 ». L’arrêt a ainsi retenu que la publication régulière par extraits

des mémoires du président Ford, qui étaient sur le point d’être publiées, constituait une contrefaçon car elle ne bénéficie pas de l’exception de fair use à cause de l’absence de publication de l’œuvre. L’approche diffère profondément de celle adoptée en droit français. En effet, le droit américain sanctionne la reproduction de l’œuvre et adopte une lecture plus

      

508

TI Bruxelles, 5 sept. 2006, no 2006/9099/A ; voir Jacob J. et Dumont L., « Google face aux éditeurs

de presse belges », RLDI, 21, 2006, 640 ; P. Van den Bulck, « Google ‘Actualités’ : l'adaptation belge de la défaite de Goliath », RLDI, 22, 2006, no 681.

509

Harper & row, Publishers, Ins. v. Nation Enters, 471 U.S. 539, 555 (1985).

510

« En temps normal, le droit de l’auteur à contrôler la première apparition au public de son expression gardée secrète fera obstacle à une demande d’application de l’exception de fair use » (traduction libre).

rigide de l’exception de fair use au lieu de sanctionner en soi la divulgation sans l’autorisation de l’auteur.

276. Les auteurs pourront en outre rechercher l’application du droit de distribution afin d’obtenir un équivalent limité au droit de divulgation. Ce droit permet à l’auteur de contrôler la première vente ou le premier transfert de titularité de son œuvre, par location ou par prêt511. Il a ainsi été retenu que viole le droit de distribution l’internaute qui rend accessible au public une copie non autorisée par son auteur en permettant aux internautes de la télécharger512. Les auteurs pourront donc s’opposer à ce qu’un internaute crée une ancre à partir d’une œuvre qu’ils n’ont pas encore distribuée. Il ne s’agit cependant pas d’une alternative exacte au droit de divulgation car le droit américain ne divise pas entre les publics et ne connaît donc pas la notion de semi-divulgation513. Le droit de distribution ne sera en pratique que rarement opposable. Il serait en effet nécessaire de créer l’ancre reproduisant l’œuvre non encore distribuée - ce qui sera rarement le cas - avant que la page liée ne la reproduise. Cette hypothèse aura rarement l’occasion de s’appliquer en pratique. Les droits patrimoniaux américains n’offrent donc pas une protection aussi large que le droit de divulgation français.

277. Il en résulte que les droits français, européen et américain, même s’ils abordent la question à partir d’angles différents, considèrent l’internet comme un espace unique514 et assurent à l’auteur une forme de contrôle sur la première communication de son œuvre au public. La mise en ligne d’une œuvre sur internet épuise donc le droit de l’auteur d’interdire son utilisation par des tiers sur ce medium. Le créateur d’une ancre pourra par conséquent utiliser une œuvre mise en ligne sur internet sans violer le droit de divulgation. En revanche, si l’œuvre n’a pas été mise en ligne, la reproduction constituera une violation du droit de divulgation en France alors qu’elle sera autorisée aux Etats-Unis. Le public français sera également privilégié dans sa compréhension des œuvres grâce au droit de paternité.

      

511

« To distribute copies or phonorecords of the copyrighted work to the public by sale or other

transfer of ownership, or by rental, lease, or lending ».

512

Playboy Ents. v. Church of Jesus Christ of Latter-Day Saints, 118 F.3d 199 (4th Cir. 1997).

513

D. CANTOR, « How Many Guests May Attend a Wedding Reception Before Ascap Shows Up ? Or,

What Are the Limits of the Definition of Perform ‘Publicly’ Under 17 U.S.C. 101 ? », 27 Colum. J.L.

& Arts 79, automne 2003.

514

II) Ancre et droit de paternité

278. Le respect du nom de l’auteur est apparu de facto au début de la Renaissance. Dans un premier temps, le nom de l’auteur était déterminé par l’usage et n’était pas toujours mentionné. Cependant, au 16e siècle, le nom de l’auteur prend une dimension plus officielle notamment grâce à l’invention de l’imprimerie qui en assure une présentation stéréotypée515. La technique a donc favorisé l’établissement d’un lien entre l’auteur et son œuvre. Le nom est dès cette époque perçu comme un moyen d’appréhension de l’œuvre. Ainsi, de nombreux auteurs mentionnent leur appartenance géographique ainsi que leurs traits de caractères qui peuvent changer en fonction du public auquel ils s’adressent. Les auteurs, et notamment Érasme516, prennent conscience à cette époque de leur paternité et commence ainsi à germer une conception de ce qui est devenu le droit moral de paternité517. Néanmoins, le droit de paternité a attendu plusieurs siècles avant d’être juridiquement protégé.

279. Il a notamment bénéficié d’une reconnaissance internationale en 1928 lors de la révision de Rome de la convention de Berne. L’article 6bis de la convention de Berne fait donc obligation aux États membres de respecter le droit de paternité des auteurs. Les droits français et américain sont donc tenus d’inclure le droit de paternité des auteurs. Cependant, les droits français et américain divergent profondément sur cette question.

280. Le droit français a adopté, à l’inverse du droit américain qui ne le reconnaît toujours pas, une conception jusnaturaliste du droit de paternité. Il est considéré en France comme un droit inné518 de l’auteur lié à son acte de création intellectuelle. Le droit français se place donc, à la différence du droit américain, dans le sillage de Kant. L’auteur avait en effet relevé dans « De l’illégitimité de la contrefaçon des livres519 » que « l’écrit d’un autre est un discours d’une personne et celui qui l’édite ne peut parler au public qu’au nom de cet autre, et il ne peut dire de lui-même autre chose sinon que l’auteur tient au public le discours suivant par

      

515

I. DIU, E. PARINET, « Histoire des auteurs », op. cit., p. 48.

516

Dans sa traduction du nouveau Testament Érasme a tenu à mentionner son nom. Voir ÉRASME, « Correspondances », lettre 373.

517

I. DIU, E. PARINET, « Histoire des auteurs », op. cit., p. 49.

518

A. et H.-J. LUCAS, « Traité de la propriété littéraire et artistique », Litec, 2e édition, 2001, p. 327, n°402.

519

E. KANT, « De l’illégitimité de la contrefaçon des livres », in Éléments métaphysiques de la doctrine du droit, édition Auguste Durand, 1785.

son intermédiaire ». Il y a donc chez Kant l’idée qu’une œuvre véhicule un message qui est propre à son auteur que nul ne peut s’approprier. La paternité de l’œuvre était donc déjà perçue comme l’origine intellectuelle de l’œuvre qui ne pouvait être trahie par des tiers à l’auteur. Le respect de la paternité d’une œuvre se justifie donc vis à vis de l’auteur - qui jouit d’un jus personalissimum520 - mais également du public. Le droit de paternité de l’auteur bénéficie en effet au public dans la mesure où il peut prendre connaissance d’un discours sans erreur sur son origine, ce qui s’avère souvent fondamental dans la compréhension d’une œuvre. Le droit américain se place en revanche dans une dynamique économique et en aucun cas jusnaturaliste.

281. Le droit américain ne reconnaît traditionnellement aucune protection pour les droits moraux et notamment pour le droit de paternité. Ce rejet des prérogatives morales, issu en partie d’une traduction malheureuse en moral rights521 - qui laisse entendre que ces droits ont une dimension morale - a notamment justifié la réticence du législateur américain à ratifier la convention de Berne. En outre, la faible reconnaissance des droits moraux dans le VARA est en partie due au fait que le copyright ne constitue pas - à l’inverse du droit français - un droit de l’Homme mais un droit d’inspiration positiviste522. Enfin, le copyright américain tient son fondement de la même clause constitutionnel523 que le droit des brevets, ce qui implique une confusion entre les philosophies des deux droits faisant obstacle à la reconnaissance des droits moraux. Le champ d’application du VARA est par conséquent limité à celui établi par le Congrès.

282. La jurisprudence américaine n’a pas eu l’occasion de se prononcer sur l’applicabilité du Visual Artists Rights Act à l’internet. Une partie de la doctrine américaine524 considère néanmoins qu’il y a lieu d’appliquer ses dispositions à l’internet en se fondant sur l’arrêt Carter v. Helmsley-Spear, Inc.525 qui a retenu que le Visual Artists Rights Act s’applique aux indépendamment du support de l’œuvre. L’arrêt s’est ainsi fondé sur un rapport de la Chambre des Représentants relatif au Visual Artists Rights Act 526 retenant que le medium était       

520

E. KANT, « De l’illégitimité de la contrefaçon des livres », op. cit., p. 274.

521

R. ROSENTHAL KWALL, « Copyright and the Moral Right : Is an American Mariage

Possible ? », Vanderbilt Law Review, janvier 1985, note 6.

522

Wheaton v. Peters, 33 U.S. 591, 8 L. Ed. 1055, 1834 U.S. LEXIS 619 (U.S. 1834).

523

U.S. Const. art. I, §8, cl. 8.

524

N. BROWN, « VARA Rights Get Second Life », Journal of High Technology Law, 2011.

525

John Carter v. Helmsley-Spear, Inc., 71 F.3d 77 (2d Cir. 1995).

526

sans importance et que les fichiers numériques, notamment des peintures, pouvaient jouir de la protection du droit moral. Le Visual Artists Rights Act ne pourra cependant pas s’appliquer à des reproductions d’une œuvre matérielle car il ne s’applique qu’aux originaux. La lecture libérale d’une partie de la doctrine américaine est sans doute erronée car les œuvres susceptibles de bénéficier de la protection sont toutes matérielles - ce qui devrait faire obstacle à leur protection par le VARA sur internet - et parce que le législateur de l’époque n’avait certainement pas pensé étendre l’application de la loi au numérique. Or, cette réglementation est particulièrement détaillée. Il doit par conséquent être retenu que la liste des critères de protection est exhaustive et doit être comprise strictement. Les auteurs américains devront donc chercher des équivalents fonctionnels aux droits moraux français dans les prérogatives patrimoniales de la section 106 voire dans le Lanham Act relatif au droit des marques.

283. Les deux droits divergent d’autant plus que le droit français a adopté une approche globale du droit de paternité en y incluant tous les attributs de la personnalité. Ainsi, le corollaire du droit au nom est établi à l’article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle qui établit le droit au respect de la qualité de l’auteur. Il ne s’agit pas de « jugements subjectifs laudatifs527 », mais de références à la condition sociale et juridique de l’auteur tels que les titres528, grades, distinctions ou les fonctions présentes ou passées529. Le droit américain n’assure aucune protection de la condition sociale et juridique des producteurs et a

fortiori des auteurs. La divergence ne pouvait être plus grande entre les deux systèmes.

284. Ainsi, ce ne sont pas simplement deux droits qui s’offrent à l’examen, mais plus généralement deux philosophies de la création, de la culture et de la place de l’auteur dans la société. Le créateur de lien peut violer le droit de paternité de l’auteur en s’abstenant de la mentionner (A) ou en mentionnant une paternité erronée (B).

A) L’absence de mention du nom de l’auteur

      

527

P. SIRINELLI, Lamy droit des médias et de la communication : Lamy 2000, n°124-155.

528

CA Paris, 27 septembre 1996 : D. 1997, somm. p. 94, obs. Colombet.

529

285. L’absence de mention du nom de l’auteur reçoit un traitement différent pour les liens manuels (1) et automatiques (2), alors que les préjudices pour l’auteur et le public sont similaires dans les deux cas.

1) Les liens créés manuellement

286. Le droit de paternité vise à assurer le respect du « lien naturel530 » qui existe entre l’œuvre et son auteur. Or, le lien de paternité doit être compréhensible pour le public qui est également le bénéficiaire de ce droit. Il en résulte que la mention du nom de l’auteur doit se trouver à proximité immédiate de l’œuvre afin que la liaison soit évidente. Malgré l’avantage