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Une protection non attributive de propriété circonscrite à un symbole

CHAPITRE 1 STRUCTURATION DE LA PROTECTION JURIDIQUE AUTOUR

B. Matérialisation de la protection des propriétés olympiques au sein d’un

1. Une protection non attributive de propriété circonscrite à un symbole

Réceptacle d’un contenu des plus succincts, l’objet (a), les effets (b) ou encore l’agencement (c) de l’arrangement de Nairobi méritent quelques observations.

a. Article 1 : l’objet du Traité

« Enfin, après des années d’efforts, le CIO a réussi à faire protéger le symbole olympique par un Traité interétatique conclu à Nairobi le 26 septembre 1981. » 100 Si cette déclaration semble a priori remplie de satisfaction, il apparaît bien que M. Straschnov, ancien conseiller juridique du CIO ne se faisait pas d’illusion quant à la portée du texte.

En effet, s’il rappelle bien qui si les dispositions de l’article 1 du traité imposent des obligations réfléchies à chaque État signataire. Ces dernières se résumant en une obligation de refus ou d’invalidation d’enregistrement du symbole comme marque, quel qu’en soit le but en l’absence d’autorisation par le CIO ; exigence doublée d’une interdiction lorsque la visée est mercantile101. Le juriste tchèque ajoute également que « cette protection s’étend au symbole stricto sensu, c’est-à-dire aux cinq anneaux entrelacés ainsi qu’à tout signe contenant le symbole. »102 Il précise également qu’un

doute subsiste sur l’identité de la personne juridique devant prendre la défense du signe ; le CIO ou l’État, le texte s’en remettant au droit interne de chaque État. Il nous paraît déjà difficilement concevable qu’un instrument aspirant à une protection homogène puisse renvoyer dès ses premières lettres à des usages nationaux, morcelant ab initio son pouvoir de ralliement.

b. Article 2 : Les effets du Traité

De plus, l’article 2 du Traité précise l’absence d’effet rétroactif de ce dernier, légitimant ainsi les usages antérieurs du signe, quand bien même ils iraient à l’encontre de la lettre de l’accord. En somme, en appliquant le principe général de droit de la non-

100 Straschnov, supra note 10 à la p 1.

101 Traité de Nairobi concernant la protection du symbole olympique, TRT/NAIROBI/001, 26 septembre

1981, article 1.

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rétroactivité103. À l’égard d’un tiers, cette situation se comprend tout à fait. À l’égard des CNO un peu moins.

Effectivement, dans l’ordre juridique olympique, le CIO se plaçant au-dessus des branches nationales du Mouvement, n’aurait-il pas été judicieux d’introduire un effet rétroactif à l’attention des comités nationaux s’étant fait reconnaître la propriété dudit signe sur leur territoire, à l’image des Nord-Américains ? En l’absence de telles dispositions à valeur impérative, nul ne s’étonnera du fait que ces derniers ne ratifièrent pas ce concordat, même en l’absence d’une telle disposition104. Ceci constitue selon nous l’un des premiers échecs du Traité dans sa mission d’unification sur lequel nous reviendrons ultérieurement. Par ailleurs, on soulignera la présence au sein de cet article d’une exception, d’interprétation stricte, bénéficiant aux médias dans le cadre de leur mission d’information sur l’Olympisme.

c. Article 4 : l’agencement du Traité avec l’ordre juridique international

Cette dernière disposition sur laquelle nous marquerons l’arrêt a :

Pour but essentiel d’affirmer la priorité des règles de la CEE105 sur les dispositions du Traité, mais il est permis de dire qu’elle est plutôt académique puisque ce n’est pas l’autorisation ou la non-autorisation par le CIO d’exploiter commercialement son symbole ou un signe le contenant qui violera le Traité de Rome ou influera sur la libre circulation des marchandises ou services entre les pays de la CEE.106

Nous estimons, que l’indication de la primauté du Traité européen sur celui de Nairobi constituât une main tendue vers les États membres ou prochainement invités à rejoindre

103 « Principe traditionnel de Droit transitoire [...] s’entend[ant] seulement aujourd’hui [comme] l’impossibilité de remettre en cause les conséquences déjà produites par des situations en cours » Cornu,

supra note 36 à la p 684.

104 « Predictably, given the exclusive rights assigned by Congress to the United States Olympic Comitte regarding the words “Olympic” [...] as well as Olympic-related symbols by [...] the Amateur Sports Act, the delegate from the U.S. government [...] did not sign the treaty, refusing to state a rationale for his position. » Barney, Wenn et Martyn, supra note 83 à la p 159.

105 " Il a institué la Communauté économique européenne (CEE) qui réunissait six pays (la Belgique, l’Allemagne, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas) pour parvenir à l’intégration et à la croissance économique grâce aux échanges. [...] Il a instauré un marché commun basé sur la libre circulation des marchandises, des personnes, des services, des capitaux [...] Le traité de Rome a été modifié à plusieurs reprises, et il est désormais connu sous le nom de «traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. " Office des publications, Synthèse du Document - Traité instituant la Communauté économique européenne

(traité CEE), 14 mars 2017, en ligne : <http://eur-lex.europa.eu/legal- content/FR/ALL/?uri=LEGISSUM:xy0023>.

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la construction européenne, de telle sorte que ces derniers pourraient ratifier l’accord kényan sans contrevenir à leurs intérêts.

Toutefois, ni le Royaume-Uni ni la France pour ne citer qu’eux ne saisiront cette occasion, préférant s’en remettre à une loi nationale propre aux marques, ou encore à leur droit commun des contrats pour assurer le salut du signe olympique placé entre les mains de comités nationaux. En définitive, à l’heure actuelle devant le faible nombre de « grands États »107 répondant à l’appel lors de l’énumération des signataires du traité, on peut raisonnablement conclure que ce dernier ne constitue finalement qu’un trompe-l’œil à la valeur plus morale que juridiquement efficace.

De fait, la prochaine sous-section s’attachera à décortiquer la teneur de ces législations vers lesquelles ont préféré se tourner la plupart de ces grands États à travers les exemples français, américains, britanniques dans une moindre mesure.