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Les protéines antivirales induites par les interférons de type

IV. Les interférons de type

IV.2. Les protéines antivirales induites par les interférons de type

La liaison des IFNs de type 1 à leur récepteur initie une cascade de signalisation induisant l’expression de plusieurs centaines de gènes possédant un élément de réponse aux IFNs dans leur région promotrice [De Veer et al. 2001]. Ces gènes codent pour des protéines impliquées dans divers mécanismes cellulaires : le remodellage du cytosquelette, l’apoptose ou encore la régulation d’événements post-transcriptionnels ou des modifications post- traductionnelles [Sadler et al., 2008]. De plus, certaines de ces protéines induites par les IFNs de type 1, comme la GTPase MxA, le couple OAS/RNase L, la PKR et l’ISG15, ont démontré des fonctions d’effecteurs antiviraux chez des souris délétées pour ces gènes.

IV.2.1. La protéine MxA

Les protéines Mx font partie de la superfamille des grandes GTPases. Chez l’Homme, seules deux GTPases Mx existent : MxA et MxB. Ces protéines sont exprimées par de nombreuses cellules des tissus périphériques, comme les hépatocytes, les cellules endothéliales ou les monocytes [Sadler et al., 2008 ; Fernández et al., 1999]. Chez l’Homme, MxA et MxB sont toutes les deux cytoplasmiques, mais seule MxA possède une activité antivirale. La protéine MxA est retrouvée à proximité du réticulum endoplasmique [Accola et al., 2002]

elle forme de larges complexes oligomériques [Kochs et al., 2002]. Cette localisation sub-

cellulaire de MxA lui permet de surveiller les mécanismes d’exocytose et le trafic vésiculaire : elle peut ainsi capturer des composants viraux essentiels [Kochs et al., 1999]. La cible principale des protéines Mx semble être des composés viraux présentant une structure homologue aux nucléocapsides [Kochs et al., 1999]. La protéine MxA possède deux domaines, CID (pour central interacting domain) et LZ (pour leucine zipper), qui sont indispensables pour la reconnaissance de certaines cibles virales et le blocage du transport intracellulaire (Figure 33).

Figure 33 : Mécanisme d’action de la protéine MxA. D’après Sadler et al., Nat. Rev. Immunol., 2008.

IV.2.2. La voie des OAS et de la RNaseL

Les 2’-5’oligoadénylate synthétases (OAS) sont des enzymes responsables de l’inhibition de la synthèse protéique en présence d’ARNs doubles brins (ARNdb) viraux.

Purifiées à partir de cellules traitées à l’IFN, les OAS démontrèrent la capacité de synthétiser de petits oligomères d’adénylate liés en 2’-5’. Ces oligomères d’adénylate (trimériques ou de plus grande taille) se lient à une endo-ribonucléase latente, la RNase L. Cette interaction entraîne une dimérisation de la RNase L aboutissant à son activation. Il en résulte une dégradation des ARNs viraux et cellulaires (Figure 34) [Hovanessian et al., 2007]. Les OAS sont constitutivement exprimées par la cellule, à un faible niveau, et servent de senseurs aux ARNdb viraux. Chez l’Homme, les gènes OAS qui ont été identifiés localisent sur le chromosome 12 [Hovnanian et al., 1998]. Il existe 3 gènes codant pour les formes majeures

d’OAS : le gène OAS1 qui code pour les petites isoformes de 40-46 kDa, le gène OAS2 qui code pour les isoformes moyennes de 69-71 kDa et le gène OAS3 qui code pour la grande isoforme de 100 kDa. A côté de ces formes majeures, il existe un gène codant pour une OAS- like (OASL) [Sarkar et al., 2004]. Pour chacun des gènes OAS des épissages alternatifs produisent de nombreuses isoformes qui diffèrent par leurs extrémités C-terminales. De plus, chaque isoforme d’OAS présente des caractéristiques propres qui font sa singularité

[Hovanessian et al., 2007] :

(1) Les gènes OAS1 et OASL ne possèdent qu’un seul domaine d’homologie OAS, alors que les gènes OAS2 et OAS3 possèdent respectivement 2 et 3 domaines OAS. (2) Seules les formes OAS1, OAS2 et OAS3 sont capables de synthétiser des oligomères d’adénylate. Le domaine OAS de la forme OASL est quant à lui inactif. (3) La protéine OASL est retrouvée sous forme monomérique, OAS1 sous forme tétramérique, OAS2 sous forme dimèrique et OAS3 sous forme trimérique.

(4) La longueur des oligomères d’adénylate synthétisés varie en fonction des isoformes [Marié et al., 1997]. Seuls les oligomères produits par les isoformes d’OAS1 et d’OAS2 possèdent la capacité d’activer la RNase L.

(5) La forme OAS3 est plus sensible à l’activation par les ARNdb (1µg/ml) que les formes OAS1 et OAS2 (100 µg/ml) [Marié et al., 1997].

(6) La localisation sub-cellulaire varie en fonction des isoformes d’OAS. Les isoformes d’OAS3 sont majoritairement associées aux ribosomes, alors que les isoformes d’OAS1 et d’OAS2 sont en plus retrouvées avec les mitochondries et les fractions nucléaires [Besse et al., 1998 ;Hovnanian et al., 1998].

Plus récemment, un rôle non-enzymatique des OAS a été identifié. Le gène OAS1 code pour 3 isoformes : E16, E17 et E18. L’isoforme E17 serait impliqué dans des phénomènes d’apoptose. Cette isoforme contient un domaine BH3 capable d’interagir avec les protéines

anti-apoptotiques de la famille Bcl-2. En effet, la forme E17 colocalise dans la cellule avec Bcl-2, mais surtout co-immunoprécipite avec Bcl-2 et BclXL. De manière surprenante, cette action pro-apoptotique de l’isoforme E17 ne nécessite pas d’oligomérisation, ni la présence d’ARNdb, d’activité enzymatique ou de la RNase L [Ghosh et al., 2001].

Figure 34 : La voie antivirale OAS1-RNase L. D’après Sadler et al., Nat. Rev. Immunol., 2008.

IV.2.3. La protéine kinase PKR

Comme les OAS, la protéine kinase régulée par les ARNs (PKR) est une protéine qui inhibe de la synthèse protéique. Cette kinase cytoplasmique est constitutivement exprimée, à un niveau basal, dans tous les tissus. Son expression est augmentée par les IFNs de type 1 [Samuel et al., 2001]. En conditions « normales », la PKR est majoritairement retrouvée sous une forme monomérique inactive repliée sur elle-même. La présence de ligands activateurs, tels que des ARNdb viraux ou des molécules polyanioniques [Nanduri et al., 2000], induit un changement conformationnel de la protéine qui expose alors son domaine kinase situé en C-terminal [Gelev et al., 2006]. Une fois dépliée, la PKR s’homodimérise et s’autophosphoryle sur plusieurs résidus [Devy et al., 2005]. C’est cet homodimère phosphorylé qui constitue la forme active de la PKR.

La PKR appartient à la famille des protéines kinases qui répondent aux stress environnementaux en régulant la synthèse des protéines. La principale activité antivirale de la PKR passe par la phosphorylation du facteur de transcription EIF2α [Devy et al., 2005], ce qui entraîne la séquestration du facteur limitant EIF2β, un facteur d’échange de nucléotides guanyliques. L’inhibition du recyclage du GDP a pour conséquence d’empêcher l’initiation de la traduction [Sadler et al., 2008].

Figure 35 : Mécanisme d’action de la PKR. D’après Sadler et al., Nat. Rev. Immunol., 2008.

IV.2.4. Le facteur ISG15

L’expression du gène codant pour l’ISG15 est aussi fortement activée par les IFNs de type 1 lors d’une infection virale. Ce motif peptidique, qui est un homologue de l’ubiquitine, intervient dans un phénomène appelé l’ISGylation (Figure 36) [Loeb et al., 7806]. Les phénomènes d’ubiquitylation régulent de nombreux aspects de la réponse immune. Il n’est donc pas surprenant de retrouver un motif peptidique, dont l’expression est régulée par les IFNs, possèdant une fonction similaire à celle des ubiquitines [Liu et al., 2005]. Comme dans les phénomènes d’ubiquitylation, plusieurs protéines interviennent au cours des processus d’ISGylation. L’enzyme HBE1L à l’activité E1-like active l’ISG15. Puis, deux enzymes E2- like, UBCH6 et UBCH8, servent de transporteurs pour les molécules d’ISG15 activées. Enfin, HERC5 et TRIM25, homologues de l’E3 ubiquitin-ligase, vont coupler l’ISG15 aux protéines

cibles [Sadler et al., 2008]. Au moins 158 protéines sont des cibles potentielles de l’ISGylation. De plus, de nombreux substrats d’ISGylation possèdent des fonctions importantes dans la réponse aux IFNs de type 1 (comme JAK1, STAT1, MxA, PKR, RNase L …) [Zhao et al., 2005]. Contrairement à l’ubiquitylation, l’IGSylation n’entraîne pas une dégradation de la protéine, mais mime une activation induite par l’ubiquitylation. En effet, l’IGSylation prévient la dégradation d’IRF3 ce qui augmente l’induction de l’expression de l’IFNβ. Par ailleurs, l’ISGylation peut moduler l’activité enzymatique soit positivement, soit négativement.

Figure 36 : Mécanisme de l’ISGylation. D’après Sadler et al., Nat. Rev. Immunol., 2008.