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III. Traitement et pharmacogénétique de la sclérose en plaques

III.1. Les traitements de fond disponibles en

III.1.3. L’anticorps monoclonal natalizumab

Le natalizumab fait partie de ces nouveaux traitements utilisés dans la SEP qui ont une action très spécifique. Le natalizumab est un anticorps recombinant humanisé dirigé contre une intégrine présente à la surface des leucocytes (Figure 30). Autorisé aux Etats-Unis en novembre 2004, le natalizumab fut rapidement retiré du marché en février 2005 après que 2 patients aient développé une leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP). En 2006, cet anticorps fut de nouveau autorisé aux Etats-Unis et en Europe dans le traitement des formes RR-MS chez les patients ne tolérant pas les immuno-modulateurs traditionnels

[DeAngelis et al., 2008].

Le traitement par natalizumab consiste en des injections intraveineuses mensuelles de l’anticorps. Deux études cliniques de phase III, l’étude AFFIRM [Polman et al., 2006] et l’étude SENTINEL [Rudick et al., 2006], confirmèrent l’excellente efficacité du natalizumab dans le

traitement des formes RR-MS. Le natalizumab diminuait significativement la progression du handicap, mais aussi le taux annuel de poussées de 68%. Le nombre de patients n’ayant pas présenté de poussées était plus important dans le groupe traité par le natalizumab que dans le groupe traité avec le placebo (77% contre 56%). Par ailleurs, sur 2 ans, cet anticorps réduisait de 83% l’apparition de nouvelles lésions dans le SNC et de 92% l’apparition de lésions inflammatoires par rapport au placebo [Polman et al., 2006]. Des résultats cliniques et radiologiques comparables furent obtenus avec la thérapie combinant l’IFNβ et le natalizumab [Rudick et al., 2006]. Par ailleurs, il fut confirmé que la thérapie par ces deux agents

était plus efficace qu’une monothérapie par IFNβ.

Le natalizumab est dirigé contre la chaîne alpha 4 de l’intégrine α4β1, connue aussi sous le nom de VLA-4 (pour Very Late Activating antigen-4) et exprimée à la surface de tous les leucocytes (excepté les neutrophiles) [Rommer et al., 2008]. Cet anticorps n’est pas un anticorps déplétant mais il empêche l’interaction de VLA-4 avec ses ligands. Les ligands connus de VLA-4 sont VCAM-1 (pour Vascular Cell Adhesion Molecule-1) et la fibronectine présents à la surface des vaisseaux sanguins. Ces molécules de surface interviennent dans le mécanisme de sortie de la circulation sanguine des leucocytes. Ainsi, dans la SEP, le natalizumab empêcherait la migration des leucocytes du sang périphérique vers le SNC, via la BBB [Stüve et al., 2008]. En effet, une étude démontra une diminution du nombre de leucocytes (lymphocytes T CD4+, T CD8+, lymphocytes B et plasmocytes) dans le LCR de patients SEP traités par natalizumab par rapport à des patients SEP non traités

[Stüve et al., 2006]. Par ailleurs, il fut observé une augmentation du nombre de lymphocytes dans le sang des patients traités, un nombre qui diminuait lentement au cours des mois suivant l’arrêt du traitement.

Le traitement par natalizumab semble être relativement bien toléré puisque chez la majorité des patients, peu d’effets délétères sont observés. Cependant, trois cas graves de LEMP furent rapportés dans des études cliniques de phase III. Ces cas correspondaient à deux patients SEP traités par l’immuno-modulateur IFNβ en combinaison avec le natalizumab

[Kleinschmidt et al., 2005 ; Langer-Gould et al., 2005], et à un patient souffrant de la maladie de Crohn sous traitement par natalizumab en combinaison avec des immunosuppresseurs [Van Assche et al., 2005]. Deux des trois cas de LEMP se révélèrent mortels. La LEMP est une

maladie rare causée par le virus JC appartenant à la famille des Polyomavirus. Cette maladie a pour particularité de se développer chez des personnes immuno-déprimées, telles que des personnes infectées par le VIH ou sous traitement immuno-suppresseur. L’apparition de cas

de LEMP dans le traitement par natalizumab fut mise sur le compte d’une immunosuppression locale du SNC conférée par l’anticorps. Cependant, cette association ne put être clairement démontrée. A l’heure actuelle, 9 nouveaux cas de LEMP ont été rapportés au cours d’un traitement de la SEP par natalizumab. On estime que le risque est de 1,2/10 000 patients traités.

Figure 30 : Les différents types d’anticorps monoclonaux utilisés en thérapie. La partie animale (noire)

composant l’anticorps passe de 100% (souris), à 25% (chimérique), puis à 3% (humanisé) et 0% (humain). D’après Rommer et al., J. Neurol., 2008.

III.1.4. La mitoxantrone

Initialement, la mitoxantrone (MTX) était utilisée dans le traitement de divers cancers (leucémies, lymphomes, cancers du sein…). Depuis 2000, la MTX est la seule molécule approuvée aux Etats-Unis et dans certains pays européens comme traitement des formes progressives de SEP (PP-MS et SP-MS) et des formes à poussées (RR-MS) évoluant rapidement [Fox et al., 2006]. La MTX est un immunosuppresseur dérivé de l’anthracycline qui

s’insère dans l’ADN par des liaisons hydrogènes, ce qui a pour conséquence de conduire à des repliements et à des cassures de l’ADN.

Plusieurs études cliniques, réalisées à différentes phases du processus d’autorisation de la MTX comme traitement de la SEP, confirment son efficacité. Une étude de phase III, réalisée sur une période de 2 ans, se proposa de tester l’efficacité de l’injection trimestrielle de MTX, à la concentration de 5 ou 12 mg/m2, par rapport à un placebo [Hartung et al., 2002]. L’injection de MTX améliora sensiblement l’évolution globale de la SEP par rapport au placebo. Une efficacité accrue fut observée pour la concentration de 12 mg/m2. Seul 8% des patients traités par la MTX à 12 mg/m2 présentaient une augmentation d’au moins 1 point à l’EDSS contre 25% chez les patients traités avec le placebo. De plus, 57% et 36% des patients traités respectivement par la MTX à 12 mg/m2 ou par le placebo ne développaient pas de

présentes dans le SNC par rapport au placebo [Krapf et al., 2005]. Par ailleurs, en fonction de l’analyse pratiquée, il fut observé de manière significative ou non, une diminution du nombre de lésions inflammatoires. L’efficacité de cette molécule fut prouvée à la fois dans le traitement des formes RR-MS agressives, et dans celui des formes SP-MS. Il fut également suggéré que l’effet bénéfique de la MTX persistait pendant 12 mois après l’arrêt du traitement.

La MTX est un immunosuppresseur qui agit sur une longue période de temps. In vitro, la MTX inhibe la maturation des cellules dendritiques et la prolifération des lymphocytes activés. Ce mécanisme semble principalement être la conséquence de l’apoptose induite par la MTX sur les cellules dendritiques, les lymphocytes T et les lymphocytes B [Neuhaus et al., 2005]. Par ailleurs, un autre mécanisme d’action de la MTX serait d’inhiber les capacités migratoires des lymphocytes T CD4+, des T CD8+ et des monocytes. Ainsi, la MTX inhiberait l’expression de métalloprotéases par ces cellules inflammatoires ce qui empêcherait leur entrée dans le SNC et leur migration à l’intérieur du tissu [Kopadze et al., 2006]..

Cependant, le traitement par la MTX n’est pas sans danger. En effet, cette molécule est séquestrée dans les tissus profonds et s’y accumule. Bien qu’elle soit lentement relâchée dans la circulation sanguine pendant la phase terminale de son élimination, la MTX est moins concentrée dans le sang que dans les tissus [Fox et al., 2006]. L’utilisation de la MTX présente des risques délétères cumulés tels que des risques d’infections et cardiaques augmentés. En effet, des patients ayant reçu une dose cumulative de MTX inférieure à 100 mg/m2 ont moins de risque d’avoir des dysfonctions cardiaques (mesuré par la fraction d’éjection ventriculaire) que des patients ayant dépassé ce seuil (pourcentage de risque égal à 1,8% pour moins de 100 mg/m2 par rapport à 5% pour plus de 100 mg/m2) [Ghalie et al., 2002]. Même si, dans cette étude, l’analyse statistique par régression ne démontra pas de relation significative entre la quantité de MTX accumulée et l’incidence des dysfonctions cardiaques, il est aujourd’hui conseillé de ne pas dépasser une dose cumulative de MTX équivalente à 140 mg/m2, ou une durée de traitement supérieure à 3 ans [Fox et al., 2006]. Par ailleurs, cette molécule peut entraîner l’apparition d’aménorrhées secondaires, souvent définitives, chez les femmes de plus de 35 ans ainsi que l’apparition de leucémies.