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II. Les facteurs de susceptibilité à la sclérose en plaques

II.2. Les facteurs environnementau

II.2.2. Les risques environnementau

2.2.2. L’exposition lumineuse et la vitamine D

L’augmentation de la prévalence de la SEP avec l’éloignement progressif hors des régions équatoriales du globe [Kurtzke et al., 2000] a rapidement suggéré l’implication de facteurs environnementaux. L’un des facteurs environnementaux directement associé avec cet effet latitude fut l’exposition lumineuse. En effet, les régions équatoriales reçoivent une intensité lumineuse plus importante et de plus longue durée que les régions australes. Dans ce sens, une étude montra que l’intensité lumineuse d’une zone était inversement corrélée avec la prévalence de la SEP [Van de Mei et al., 2001].

Le rôle possible de la vitamine D (VD) dans la susceptibilité à la SEP fut pointé du doigt [Goldbers et al., 1974] lorsque les travaux de l’équipe du Dr Holick montrèrent que la l’exposition au soleil était le principal élément régulant la concentration de cette vitamine

[Holick et al., 2008]. Pour beaucoup de personnes, l’exposition au soleil est la source majeure de VD. Dans les régions de fortes latitudes, les radiations solaires en hiver sont trop faibles pour permettre une synthèse suffisante de VD [Stewart et al., 2009]. Chez l’Homme, la production de la forme active de la VD se fait au niveau de la peau à partir d’un dérivé du cholestérol. La forme pré-VD nécessite un clivage par les rayons ultraviolets B du soleil pour devenir biologiquement active (Figure 24) [Smolders et al., 2008]. Sans réellement le démontrer, quelques rares et anciennes études essayèrent de montrer que les faibles taux de VD sériques pouvaient favoriser une plus grande susceptibilité à la SEP. D’autres études montrèrent que les patients souffrant de SEP présentaient un taux sérique en VD plus faible que des personnes issues d’une population témoin [Ozgocmen et al., 2005 ; Orton et al., 2008 ; Correale et al., 2009].

Cependant, ces études furent contredites par d’autres, et ne purent jamais démontrer que le faible taux en VD pouvait être la cause de la SEP et non une conséquence de la maladie (problèmes ambulatoires ne favorisant pas les sorties à l’extérieur par exemple) [Van der Mei et al., 2007]. Une étude pratiquée sur un très grand nombre de personnes vivant dans

l’hémisphère Nord montra qu’il y avait significativement moins de personnes atteintes de SEP nées au mois de Novembre, mais significativement plus lorsqu’elles étaient nées au mois d’Avril. Cette observation que le mois de naissance et le risque de développer une SEP pourraient être associés implique une interaction avec l’environnement. Une hypothèse serait que « l’effet mois de naissance » est lié à la concentration sanguine en VD chez la mère, qui varie au cours des saisons [Willer et al., 2004].

La VD peut aussi être absorbée via la nourriture. Sous cette forme, le clivage par l’exposition au soleil n’est plus nécessaire. Cependant, son apport est limitée à la consommation de rares aliments comme les poissons gras, les champignons de type shiitaké, et le contenu de l’estomac des rennes, donc autant dire restreint aux poissons gras pour la majorité d’entre nous [Ebers et al., 2008]. Chez l’animal, dans le modèle EAE, l’injection intra- péritonéale quotidienne de la forme active de la VD [Muthian et al., 2006] ou la complémentation de l’alimentation en VD [Spach et al., 2006] sont capables de diminuer significativement les signes cliniques de la maladie. Une étude réalisée sur des souris délétées pour le récepteur à la VD montra que ce récepteur était indispensable pour l’effet protecteur de la VD dans l’EAE [Meehan et al., 2002]. Chez l’être humain, une étude américaine s’intéressa à une cohorte de femmes supplémentées dans leur régime alimentaire avec un complément multivitaminé, contenant de la VD. Cette cohorte présentait un risque 40% plus faible de développer une SEP que les femmes non complémentées [Munger et al., 2004]. Cependant, l’effet des autres vitamines contenues dans le complément alimentaire ne pouvait pas être exclu. La même équipe suggéra plus tard l’effet réel de la VD seule, en démontrant qu’une forte concentration sanguine en VD était associée à un risque moindre de développer une SEP

[Munger et al., 2006]. Des études pratiquées sur des populations dont l’alimentation comprenait des aliments naturellement riches en VD (Finlandais, Inuits) suggèrent que cette hygiène alimentaire pourrait expliquer la faible incidence de la SEP dans cette population [Ebers et al., 2008].

Pre-Vitamin D 1.25(OH) D Vitamin D UV-light Skin Diet Active Metabolite Pre-Vitamin D 1.25(OH) D Vitamin D UV-light Skin Diet Active Metabolite

Figure 24 : Métabolisme de la vitamine D. D’après Smolders et al., J. Neuroimmunol., 2008.

Le récepteur de la VD fait partie de la superfamille des récepteurs aux stéroïdes. Une fois lié à la forme active de la VD, il peut se fixer au niveau des éléments de réponse à la VD en amont de nombreux gènes. La découverte de l’expression du récepteur à la VD dans les monocytes, les cellules présentatrices de l’antigène (APC) et les lymphocytes activés suggère un effet de la VD sur le système immunitaire [Veldman et al., 2000 ; Chen et al., 2007]. Plusieurs études mettent en évidence un modèle suivant lequel la VD serait capable d’orienter la réponse immunitaire vers une réponse anti-inflammatoire [Smolders et al., 2008]. La VD inhiberait la polarisation des lymphocytes T CD4+ vers un profil cytokinique Th1 (IFNγ et TNFα) [Muthian et al., 2006] et favoriserait une polarisation vers un profil cytokinique Th2 (IL- 4, IL-5 et IL-13) [Boonstra et al., 2001]. Plus important, la VD pourrait induire des lymphocytes T régulateurs produisant de l’IL-10 et du TGFβ[Dong et al., 2003].

2.2.3. La cigarette

Bien que la cigarette ne puisse pas expliquer le gradient de latitude observé dans la SEP ainsi que la modification du risque de développer la maladie lors de migrations, cette habitude sociale a souvent été testée comme un facteur de risque. Déjà en 1965, un article présentait la cigarette comme un possible facteur de risque [Antonovsky et al., 1965]. Par la suite, des études plus récentes démontrèrent aussi un risque augmenté de développer une SEP dans la population de fumeurs comparé à une population de non-fumeurs [Hernan et al., 2005 ;

Pekmezovic et al., 2006]. Le regroupement des données de plusieurs études prospectives rend compte d’un risque relatif poolé 1,25 (P < 0,01) fois plus important chez les fumeurs que chez les non-fumeurs [Hawkes et al., 2007]. Par ailleurs, la cigarette aggraverait les symptômes de SEP et serait aussi capable d’accélérer le passage de la forme RR-MS vers la forme SP-MS

[Hernan et al., 2005]. La cigarette contient plus de 4 500 composés qui peuvent expliquer une susceptibilité accrue à la SEP, mais aussi la progression plus rapide de la maladie chez les fumeurs. Certains de ces composés sont connus pour avoir un effet neurotoxique : c’est le cas de l’oxyde nitrique (NO). Il est connu que fumer augmente le niveau de NO plasmatique

[Zhou et al., 2000]. Il est raisonnable de penser que cette augmentation se fait aussi au niveau du

SNC et des lésions de démyélinisation. Dans le SNC, les neurones sont des cellules qui sont très sensibles à la présence de NO [Kapoor et al., 2003]. Le NO peut ainsi conduire à une dégénérescence axonale ou à un blocage du signal électrique. Enfin, la cigarette, de par son grand nombre de composés, affecte le système immunitaire [Stämpfli et al., 2009], la perméabilité de la BBB [Hawkes et al., 2007] et le risque de développer plus d’infections virales et bactériennes [Stämpfli et al., 2009]. Cependant, les résultats d’association entre la cigarette et la SEP doivent être interprétés avec beaucoup de précautions [Hawkes et al., 2005]. En effet, cette association n’est pas retrouvée dans toutes les études [Warren et al., 1982 ; Casetta et al., 1994]. Ces contradictions dans l’association peuvent être dépendantes de problèmes dans la méthodologie, comme l’homogénéité des cohortes étudiées ou l’absence de corrections statistiques. Ainsi l’effet de la cigarette sur le développement de la SEP, et l’effet possible du tabagisme passif attendent toujours une confirmation [Sundström et al., 2008]. Enfin, une association claire de la cigarette comme facteur impliqué dans la récente augmentation de l’incidence de la maladie chez les femmes n’a toujours pas été démontrée.