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Moyens expérimentaux

2.1 Accusé EDM3, levez-vous !

2.1.2 Propriétés mécaniques statiques

Isotropie La société POCO précise que l’EDM3, comme tous ses graphites de la gamme EDM, a un facteur d’anisotropie δ compris entre 0,97 et 1,03 [59]. Il s’agit du rapport des valeurs longitudinale Xl et transverse Xtde la même grandeur mécanique X. Un δ égal à 1 signifie une isotropie parfaite. Cette donnée est très importante car elle orientera par la suite le choix du modèle numérique. Elle est étayée par la micro-scopie de surface de la figure 2.1 dont l’orientation des pores ne présente à première vue aucune direction privilégiée. Elle est surtout confirmée par les essais de traction et de compression en contrainte uniaxiale réalisés dans les années 90 au CEA [84] dont un exemple est donné en figure 2.3 et les résultats résumés en table 2.1. D’après ceux-ci, δ est compris entre 0,86 et 1,09. C’est un peu moins bien que ce qu’annonce POCO mais nous autorise à considérer sans risque que le matériau est isotrope.

Compactage et viscosité Nous avons fait réaliser des essais de compression confinée sur EDM3 – donc en déformation uniaxiale – au centre CEA du Ripault. L’objectif de ces essais était triple :

— obtenir une courbe de compression à bas et moyen niveau qui servirait de point de départ à la constitution d’une équation d’état pour la simulation numérique ;

Figure 2.3 – Données expérimentales de la contrainte appliquée en fonction de la déformation lors d’une compression et d’une traction sur EDM3 dans le sens

longi-tudinale. Essais réalisés à 20◦C [84].

Table 2.1 – Grandeurs mécaniques de l’EDM3 obtenues par essais de traction et de compression. Sont présentées les valeurs obtenues lors des essais faits par le CEA [84]

ainsi que les données issues de la documentation du matériau [59]. CEA POCO

Module de Young E (GPa)

→← // 11,2

1110,7

←→ // 1212,2

Contrainte à rupture σr(MPa)

→← // 140 131144 ←→ // 71,7 6368 Déformation à la rupture ǫr (%) →← // 7,4 -⊥ 8,6 ←→ // 1,21,1 Coefficient de poisson ν 0,3

-— mettre en évidence un éventuel phénomène de compactage très courant pour les matériaux poreux, c’est-à-dire une augmentation permanente de la densité après compression ;

— constater une éventuelle viscosité du matériau en variant la vitesse de défor-mation.

La figure 2.4 présente deux compressions confinées, l’une simple (essai CC2) et l’autre cyclée (CC4), dans le plan contrainte-déformation. Le pilotage en déplacement était indisponible pour raisons techniques donc c’est le pilotage en effort (6923 N.min−1) qui a été utilisé. À la fin de chaque cycle de chargement-déchargement, on constate que la densité revient à une valeur proche de sa valeur initiale ce qui signifie que le matériau ne se compacte que très peu. Cependant, les hystérésis partielles indiquent qu’une part importante de l’énergie de déformation est consommée.

Figure 2.4 – Résultats en contrainte-déformation des essais de compression confinée simple (CC2) et de compression confinée cyclée (CC4) sur EDM3.

Une autre compression (CC3) a été menée à une vitesse d’effort plus de dix fois su-périeure à la précédente (90 000 N.min−1) afin d’estimer l’effet de la vitesse de défor-mation sur la réponse du matériau. La figure 2.5(a) compare les résultats obtenus lors de CC2 et CC3. Le lecteur objectera certainement que, compte tenu du pilotage en ef-fort, la vitesse de déformation ˙ǫ n’est pas constante au cours de la déformation. C’est d’ailleurs ce que montre la figure 2.5(b). Mais nous pouvons tout de même statuer car pour toute valeur de déformation, ˙ǫ varie d’environ un ordre de grandeur d’un essai à l’autre. Ainsi, la différence de contrainte à ǫ = 0,25 est d’environ 15% pour ˙ǫ passant de 10−4 à 10−3 s−1. Cela suggère une viscosité non négligeable, confirmée par d’anciens essais de compression – en contrainte uniaxiale cette fois-ci – réalisés au CEA [84], d’autant plus que les vitesses de déformation subies par un matériau sous IHV peuvent atteindre 105ou 106s−1.

(a) Comparaison des essais CC2 et CC3. (b) Vitesses de déformation lors de CC2 et CC3.

Figure 2.5 – Effet de la vitesse de déformation sur la réponse de l’EDM3 lors d’une compression confinée.

Weibull En section 1.3, nous avons évoqué le modèle d’endommagement pour ma-tériaux fragiles de Grady [55] se basant sur la théorie probabiliste de Weibull [69]. Celle-ci repose sur une loi de Poisson à deux paramètres k et m, appelés respective-ment paramètre et module de Weibull. Elle permet d’estimer la probabilité de rupture Pr d’un matériau soumis à une contrainte de traction uniaxiale σ par l’équation :

Pr=1−exp  − σ σ0 m avec σ0= E kVf (2.3)

où E est le module de Young et Vf le volume efficace, c’est-à-dire le volume équivalent soumis à la contrainte maximale. Une méthode simple pour déterminer k et m est la régression linéaire [88, 89]. Elle utilise le fait qu’appliquer deux fois le logarithme à l’équation 2.3 la transforme en une relation linéaire fonction de ln σ :

ln  ln  1 1− Pr  =mln σ−mln σ0 (2.4)

Ainsi, m est la pente et−ln σ0l’ordonnée à l’origine. Une série de n essais de traction ou de flexion quatre points doit fournir autant de valeurs différentes de contrainte à la rupture σ. En classant celles-ci dans l’ordre croissant, on peut approcher la probabilité de rupture du matériau, lorsqu’il est soumis à la contrainte de rang i, par l’estimateur de probabilité suivant :

Pi = i−0,5

n (2.5)

21essais de flexion quatre points ont été commandés au CEA du Ripault. Les résultats obtenus ont permis de tracer la courbe de la figure 2.6(a). La regression linéaire ap-pliquée à la totalité des données – hors extremum – permet de déterminer un premier jeu de paramètres de Weibull Wcdont les valeurs de m et k sont données en table 2.2.

Cependant, il apparaît clairement que les résultats ne sont pas homogènes et qu’il existe deux groupes se recouvrant légèrement dont chacun peut fournir son propre jeu de paramètres, qu’on nomme Wd1 et Wd2 (cf. table 2.2). En terme de porosité, cela signifie que la population de défauts se scinde en deux distributions de Poisson. La figure 2.6(b) le prouve, où le nombre cumulé de pores en fonction de leur taille issu de la figure 2.1 et tracé en log-log, présente deux tangentes distinctes.

(a) Régression linéaire. (b) Distribution des porosités.

Figure 2.6 – Détermination expérimentale des paramètres de Weibull de l’EDM3 par la méthode de la régression linéaire.

Table 2.2 – Trois jeux de paramètres de Weibull, selon si l’on considère une seule distribution de défauts (Wc) ou deux distributions distinctes (Wd1et Wd2). Le volume

efficace Vf utilisé pour le calcul de k a été estimé à 17,8 mm3.

Wc Wd1 Wd2

m 11,9 8,8 27,8

k(m−3) 2,02.1033 2,90.1026 3,89.1067

Ultrasons Des analyses ultrasonores ont par ailleurs été menées au CEA [84] afin de mesurer les vitesses des ondes longitudinales cl et transversales cs à température ambiante. Leurs valeurs permettent de déterminer celles des constantes élastiques de l’EDM3 dont les principales sont présentées en table 2.3. Notons que par cette méthode, le module de Young et le coefficient de Poisson sont légèrement différents, bien que proches, de ceux déterminés par essais de traction et compression.

Table 2.3 – Valeurs des vitesses d’onde et des constantes élastiques usuelles dans le graphite EDM3. cl et cs ont été mesurés par ultrason à température ambiante [84].

Les autres sont calculées à partir d’une densité de 1754 kg.m−3.

Vitesse des ondes (m.s−1)

Longitudinales cl 2950 Transverses cs 1690 Son c0 2212 Bulk cb 2678 Modules (GPa) Young E 12,58 Compression K 8,58 Cisaillement G 5,01 Longitudinal F=K+43G 15,26 Coefficient de Poisson ν 0,26

Dureté Signalons enfin que la dureté Shore de l’EDM3 a été testée par POCO et que sa valeur est de 73 SSH [59], soit une dureté Rockwell d’environ 52 HRC.