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En vrac : impacts, matériaux et modèles

1.3 Modèles numériques usuels

1.3.3 Modèles pour matériaux poreux

Modèle de Thouvenin Le plus simple des modèles poreux est probablement le mo-dèle de Thouvenin [75]. On pourrait le qualifier de géométrique, car il consiste tout simplement à modéliser géométriquement un matériau poreux comme un ensemble de plaques fines du matériau dense séparées de vide. Le rapport des volumes est ajusté afin que la densité globale soit équivalente à la densité initiale du poreux. Ori-ginellement conçu pour des chocs de plaques soutenus sur des métaux poreux – alu-minium, cuivre, nickel et uranium – il a notamment été testé pour des chocs lasers sur aluminium [76]. Il a aussi été évalué positivement pour des chocs de plaques sur le graphite et notamment l’EDM3 [77]. Son intérêt se limite toutefois aux pressions in-férieures à la transition de phase graphite-diamant car le modèle suppose la symétrie de l’Hugoniot et de l’isentrope de détente du matériau solide, ce qui n’est peut-être pas vrai au-delà de cette transition. De plus, son incapacité à modéliser les vitesses d’ondes acoustiques et les phénomènes de compaction partielle le rend inefficace aux basses pressions. Enfin, son caractère géométrique le limite à l’étude de cas 1D sans endommagement.

Modèle P-alpha Le modèle P-α est certainement le plus connu des modèles pour matériaux poreux. Introduit pour la première fois par Herrmann [78], il a notamment été conçu pour palier aux lacunes du modèle de Thouvenin aux basses pressions. Pour cela il introduit une courbe de compactage plastique permettant de passer de l’état initial poreux à l’état densifié, ce dernier étant représenté par l’équation d’état

du matériau dense P = f(vs,e), avec P la pression hydrostatique et où vs et e sont respectivement le volume et l’énergie interne spécifiques. Dans la partie poreuse, les retours à pression nulle après compaction se font suivant des surfaces élastiques défi-nies de la manière suivante :

P= fv

α,e avec α= v

vs (1.7)

où f est la même fonction que pour l’équation d’état du dense, α la distension, v le volume spécifique courant et vsle volume spécifique du solide dans les mêmes condi-tions d’énergie et de température. Cela revient à négliger la contribution de l’énergie de surface des porosités à l’énergie interne spécifique, ce qui est une hypothèse forte. Notons qu’une légère modification de ce modèle a été proposée par Carroll and Holt [79] sans toutefois apporter la consistance thermodynamique qui manque à l’origi-nal. De plus, c’est un modèle gourmand en ressources de calcul et qui nécessite de nombreuses donnés expérimentales pour établir la courbe de compactage exprimée comme α = g(P,e) fermant le système. Sur ces points, une amélioration du modèle appelée ǫ-α a été proposée par Wünnemann et al. [80] et semble donner de bons ré-sultats pour les impacts sur du sable. Néanmoins, le principal défaut de ces modèles est qu’ils négligent la partie déviatorique du tenseur des contraintes, ce qui peut être tout à fait discutable, particulièrement dans la partie poreuse.

Modèle POREQST Le modèle POREQST a été mis au point par Seaman et al. [81]. Son fonctionnement sera détaillé en section 3.2, mais nous donnons ici quelques in-formations le concernant. Il fait lui aussi appel à une courbe de compactage plastique et à des surfaces élastiques de détente et de recompression. Cependant, celles-ci sont définies plus simplement par une équation d’état de Mie-Grüneisen. Cela permet de s’affranchir du calcul de la distension par l’intermédiaire d’un algorithme en le rem-plaçant par le calcul analytique d’une porosité intermédiaire. Cette simplicité fait que sa consommation de ressources informatiques est moins lourde que celle de P-α. PO-REQST introduit une courbe de ré-ouverture de pores décrivant le comportement par-ticulier du poreux en traction – diminution simultanée de la pression et de la densité. Ce modèle que l’on pourrait qualifier de modèle d’ingénieur repose sur un nombre limité de paramètres ayant tous un sens physique, certains étant déterminables au premier ordre par des essais statiques. Plusieurs modèles pour matériaux poreux re-posent peu ou prou sur les mêmes principes que POREQST. On citera par exemple les modèles ARMOR [82] et KST [83] qui ont donné de bons résultats sur géomatériaux et bétons. Tout comme POREQST, ils ont l’avantage d’être compatibles avec la prise en compte du déviateur des contraintes et de l’endommagement, ce que nous verrons plus tard.

1.4 Conclusion

Ce chapitre nous a permis de présenter les impacts hypervéloces et leurs applications qui vont de la formation des planètes, à l’étude des blindages en passant par la pro-tection des engins spatiaux. C’est cette dernière application qui nous intéresse plus particulièrement.

Nous avons ensuite vu ce qui caractérise les matériaux fragiles et poreux auxquels appartient l’isographite EDM3 qui fait office de matériau école dans cette étude. Celui-ci sera présenté plus largement au chapitre suivant.

Enfin, nous avons brièvement discuté les points forts et les lacunes de différents mo-dèles numériques conçus pour représenter le comportement des matériaux poreux et ou fragiles. Il ressort qu’aucun d’entre eux n’est parfait dans le sens où aucun n’est à la fois léger, rigoureux thermodynamiquement et capable de gérer la porosité et la fragilité. Néanmoins, certains d’entre eux seront utilisés par la suite.