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L’épreuve du feu : expériences 1D « Une quête commence toujours par la chance du débutant

4.1 Construction d’un modèle dédié

Comme nous l’avons vu au chapitre 2, les valeurs des grandeurs mécaniques de l’EDM3 peuvent varier selon le mode de caractérisation utilisé. Nous choisissons d’uti-liser principalement les données obtenues lors des analyses par ultrasons. Cependant, la valeur de la contrainte à la rupture est une moyenne issue des essais de traction du CEA. Ces choix sont résumés en table 4.1.

1. Une partie de ce chapitre a été publiée dans les actes d’un congrès [77].

Table 4.1 – Principales caractéristiques mécaniques de l’EDM3 tirées du chapitre 2. Densité (kg.m−3) Poreux ρ0 1754 Dense ρs 2250 Porosité γ0(%) 22 Vitesse du son c0(m.s−1) 2212 Modules (GPa) Compression K0 8,58 Cisaillement G0 5,01 Longitudinal F0=K0+43G0 15,26 Contrainte de traction à la rupture σr (MPa)70

Coefficient de Poisson ν 0,26

Figure 4.1 – Représentation du modèle POREQST adapté à l’EDM3. Les surfaces élastiques intermédiaires ainsi que les surfaces de compactage et de réouverture des pores sont représentées en contrainte-densité, tandis que la surface du matériau dense

est en pression-densité. Cette dernière n’apparaît pas complètement.

4.1.1 Représentation

En compression Le modèle POREQST de l’EDM3 est présenté en figure 4.1 dans le plan pression-densité – ou contrainte-densité selon les cas – pour une énergie interne nulle. Sauf indication contraire, il est tel qu’utilisé dans la suite de cette étude.

Contrairement à la description du chapitre précédent, l’équation d’état du matériau dense n’est pas une Mie-Grüneisen mais la table américaine SESAME 7832 du carbone

– représentée ici en pression-densité. Elle est mieux adaptée aux très fortes pressions car elle tient compte de la transition graphite-diamant située entre 18 et 28 GPa. La courbe de compactage est issue de l’essai de compression confiné CC1. À la diffé-rence de CC2, CC3 et CC4 que nous avons présentés au chapitre 2, il a été piloté en déplacement et non pas en effort. La vitesse de déformation était donc constante au cours de l’essai, ce qui est plus cohérent pour son utilisation dans le modèle. Toutefois, l’utilisation d’une courbe statique dans un modèle dynamique fait l’hypothèse d’une viscosité négligeable, ce qui pourrait ne pas être le cas.

La surface élastique initiale du poreux, vue au chapitre précédent en figure 3.1, est définie à partir du module de compression K0 et de l’équation 3.12. Mais sur la fi-gure 4.1 – et uniquement ici – K0a été remplacé par le module longitudinal F0 afin de la représenter elle aussi dans le plan contrainte-densité.

Nous nous proposons d’étudier deux variantes distinctes de POREQST. La première, qui correspond à la version originale de POREQST, utilise en compression comme en traction la surface élastique initiale pour modéliser la réponse mécanique du poreux soumis à des faibles pressions. La courbe de compactage est donc légèrement modifiée pour n’être utilisée qu’au-delà d’une contrainte de 130 MPa. La seconde a pour objectif de mieux représenter le comportement non-linéaire de l’EDM3 en-dessous de cette valeur. La courbe de compactage est alors utilisée dans son intégralité, neutralisant la surface initiale du poreux en compression. Cette dernière reste toutefois active en traction. Nous verrons par la suite que chaque version présente des avantages et des inconvénients selon la sollicitation étudiée.

En traction Si l’on suit la logique initiale du modèle POREQST, lorsque l’on entame une traction sur un volume de matériau vierge, la valeur absolue de la contrainte doit augmenter jusqu’à atteindre la réouverture des pores puis diminuer. Or, ce n’est pas ce qui a été constaté lors de l’essai de traction du chapitre 2. Pour représenter la fra-gilité du matériau, nous interdisons la réouverture des pores en faisant l’hypothèse d’une courbe contrainte-déformation linéaire jusqu’à la contrainte de rupture expéri-mentale. Cette dernière est donc favorisée au dépend de la déformation à la rupture. Et la différence entre déformation uniaxiale (essai de traction) et contrainte uniaxiale (POREQST) ainsi que l’influence de l’élastoplasticité dans le modèle sont négligées. Ainsi, l’intersection de la surface de réouverture de pore et de la surface élastique initiale à énergie nulle représente la résistance à la traction du matériau. D’après la version modifiée de l’équation 3.12, ses coordonnées (ρr; σr) sont telles que :

σr= F0 ρr

ρ0 −1 

D’après l’équation 3.20, le coefficient directeur de la droite de réouverture de pore σrr = σll est donc égal à −40,09.103 Pa.m3.kg−1. Cela fixe son intersection avec l’équation d’état du dense à la valeur σl ∼ −95MPa, paramètre d’entrée de POREQST.

4.1.2 Déviateur des contraintes

Limite élastique Comme nous l’avons évoqué au chapitre précédent, Hésione limite la valeur du déviateur des contraintes par le critère de plasticité de Von-Mises. Dans POREQST, il est possible de faire évoluer la valeur seuil de ce critère – c’est-à-dire la limite élastique. À cette fin, nous utiliserons deux jeux de paramètres LE1 et LE2 donnés en table 4.2. Pour le poreux, c’est l’équation 3.15 et les valeurs de Y0 et Ys qui la déterminent. Quant à elle, Ys varie linéairement en fonction de la pression hydrostatique, jusqu’à atteindre 5 GPa à P= 25GPa, puis reste constante.

Table 4.2 – Deux jeux de paramètres différents pour décrire la limite élastique de l’EDM3 dans le modèle POREQST.

LE1 (GPa) LE2 (GPa)

Y0 0,085 1

Ys(P=0) 0,085 1,5

Ys(25 GPa) 5 5

Le jeu de paramètres LE1 est construit à partir de données d’essais statiques. Ainsi, la limite élastique Y0s’exprime de la façon suivante :

Y0 = 1−

1−ν σLEH (4.2)

Or, sur la figure 4.1, la limite élastique de Hugoniot σLEH est matérialisée par la jonc-tion entre la surface élastique initiale du poreux et la courbe de compactage, soit 130MPa. Dans ce cas, Y0 vaut 85 MPa.

LE2 résulte d’une construction arbitraire visant à ce que la limite élastique intervienne le moins possible dans la partie poreuse du modèle. Par conséquent, sa valeur est tou-jours supérieure ou égale à la contrainte du point de consolidation – environ 1 GPa – qui marque l’intersection de la courbe de compactage et de l’équation d’état du dense à énergie nulle.

Module de cisaillement Le module de cisaillement est décrit dans la table 4.3 d’une manière tout à fait identique à la limite élastique. C’est l’équation 3.16 qui le détermine

dans la partie poreuse. G0 est déduit des analyses par ultrasons du chapitre 2. Gs évolue linéairement par morceau en fonction de la pression hydrostatique jusqu’à atteindre 280 GPa pour P=27,5 GPa puis reste constant. Son ajustement a été réalisé antérieurement sur des données de chocs de plaques afin de reproduire fidèlement la vitesse des ondes de détente en fonction de la pression [127]. Sa brutale augmentation entre 18 et 27,5 GPa est due à la transition graphite-diamant.

Table 4.3 – Jeu de paramètres pour décrire le module de cisaillement de l’EDM3 dans le modèle POREQST.

Gs(P=0) Gs(18 GPa) Gs(27,5 GPa)

(GPa) 20 50 280

4.1.3 Énergie interne

Jusqu’à présent nous n’avons pas abordé la question de la troisième dimension, c’est-à-dire de l’énergie interne. En ce qui concerne le matériau dense, celle-ci est prise en compte dans la table SESAME 7832. Pour le matériau poreux, elle est gérée par les fonctions de ramollissement fi(e)qui apparaissent au chapitre précédent. Dans notre cas, elles sont toutes identiques et valent 1 lorsque e vaut 0, et 0 lorsque e est égale à l’énergie de fusion à pression nulle ef = 8.106 J.kg−1. Entre les deux, nous utilisons une interpolation linéaire. C’est une description sommaire mais suffisante dans notre cas où le matériau ne s’échauffe que très peu ou très localement et qui a le mérite de la simplicité.

Avant de passer à la simulation d’impacts hypervéloces, le modèle de comportement adapté à l’EDM3 que nous venons de développer doit être en grande partie validé sur des expériences simples, donc 1D. C’est tout l’objectif de ce qui suit, que ce soit en ce qui concerne la propagation des ondes de choc ou l’endommagement.