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1.2 Les bandes ventriculaires

1.2.1 Propriétés géométriques

Fig. 1.7 – (a) Représentation schématique du larynx et certaines des grandeurs mesurées par tomographie laryngée par Agarwal & al. [3], 2003, Agarwal [2], 2004 (d’après Agarwal & al. [3], 2003, Agarwal [2], 2004)) ; (b) Description schématique de la géométrie du larynx utilisée dans notre étude (cv : cordes vocales, bv : bandes ventriculaires).

système de coordonnées cartésiennes (x,y,z).

L’emploi de l’imagerie par rayonnement X dans l’étude de la physiologie phonatoire a conduit à des observations relatives aux modifications de l’image ventriculaire (Husson[92], 1962, Hollien & Colton[88], 1969, Wilson[216], 1976, Sundberg[187], 1974) et à une évaluation objective de ses dimensions (Agarwal & al.[3], 2003, Agarwal [2], 2004). D’autres techniques ont pu être utilisées pour mesurer les dimensions caractéristiques des bandes ventriculaires et du ventricule de Morgagni. Les mesures effectuées sur des larynx humains fraichement excisés par Furmanik & al.[61], 1976 (comme cité dans Agarwal & al.[3], 2003, Agarwal[2], 2004) ont estimé l’espace séparant les bandes ventriculaires hbv (cf. figure 1.7) entre 6.5mm et 6.0mm pour les hommes et les femmes, respectivement. Néanmoins, les seules données disponibles dans la littérature sur les dimensions de l’image ventriculaire pendant la phonation ou la respiration sont issues d’enregistrements par rayons X du larynx (radiographiques, laminographiques ou tomographiques1

). Nous rappelons dans la suite un aperçu du protocole de ces études expérimentales puis détaillons les mesures déduites de ces enregistrements.

Base de données d’images radiographiques

Les enregistrements laminographiques du larynx dans le plan coronal effectués par Hollien & Colton

[88], 1969 visaient l’estimation de l’épaisseur du muscle vocal, avec diverses combinaisons d’intensité vocale et de fréquence sur des sujets non chanteurs. 44 clichés (28 pour quatre sujets masculins et 16 pour trois sujets féminins) et 26 clichés (11 pour quatre sujets masculins et 15 pour deux sujets féminins) de la voyelle [a] à différentes fréquences en mécanismes laryngés M1 (180Hz pour les hommes et 261Hz pour les femmes) et M2 (352Hz pour les hommes et 674Hz pour les femmes) respectivement, ont été réutilisés à des fins exploratoires de la géométrie ventriculaire par Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal [2], 2004.

Les enregistrements laminographiques du larynx dans le plan coronal réalisés par Wilson [216], 1976 visaient l’étude de l’influence de la voyelle, l’intensité et la hauteur sur la forme de la cavité laryngée chez les chanteurs. Huit clichés acquis sur des cantatrices (deux sopranos, une mezzo-soprano et une alto) produisant la voyelle [a] à des intensités et fréquences différentes (329Hz-392Hz, piano et 659-784Hz, forte) ont été utilisés par Agarwal & al. [3], 2003 et Agarwal [2], 2004. Quatre clichés acquis sur deux ténors (196Hz piano et 392Hz forte) ont été exploités.

Kitzing & Sonesson[101], 1967 ont enregistré des coupes radiographiques latérales de la région du cou pendant les phases respiratoire (fin de l’expiration) et phonatoire (voyelle [ae] à trois différentes hauteurs et à une intensité de conversation usuelle) sur 41 locuteurs masculins divisés en deux groupes A et B, chargé chacun de produire des sons de fréquences différentes.

Dimensions des bandes ventriculaires

En moyennant toutes les mesures extraites des observations anatomiques obtenues par laminographie laryngée frontale chez Hollien & Colton[88], 1969 et Wilson[216], 1976, Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal

[2], 2004 trouvent :

Pour des locuteurs non-chanteurs

– une ouverture ventriculaire hbv moyenne de 5.46mm (± 1.67mm) ; – un diamètre ventriculaire dbv moyen de 5.54mm (± 1.29mm). Pour des locuteurs chanteurs

– une ouverture ventriculaire hbv moyenne de 4.68mm (± 0.82mm) ; – un diamètre ventriculaire dbv moyen de 2.15mm (± 0.44mm).

1

cf.chapitre 2 §2.1.1 Méthodes d’exploration in-vivopour le détail de ces techniques d’imagerie par rayonne-ment X

Ces résulats concordent globalement avec une étude antérieure (Scherer[173], 1981) suggèrant que hbv

en phase phonatoire est compris entre 2mm et 7mm. On remarque en particulier la différence de diamètre des bandes ventriculaires mesurée pour des sujets non-chanteurs et des sujets chanteurs (excédant une diminution de moitié). Il est envisageable que la capacité vocale de l’individu influe sur sa configura-tion ventriculaire et que les chanteurs possèdent une configuraconfigura-tion laryngée étroite, et une constricconfigura-tion ventriculaire plus marquée.

D’autre part, les clichés tomographiques obtenus par A. Djian et R. Husson de 1951 à 1960 (Husson

[92], 1962), relatifs à une même voyelle et une même hauteur sur différents sujets, montrent une grande variabilité inter-individuelle de l’image ventriculaire. En comparant ces tomogrammes sur un individu donné, Husson [92], 1962 montre également une large diversité de géométries ventriculaires en fonction de l’intensité de la pression sous-glottique. Nous détaillons dans la suite les variations inter- et intra-individuelles observées chez Agarwal & al. [3], 2003 et Agarwal [2], 2004 selon le genre et la hauteur du son.

Influence du genre : homme/femme

Des clichés obtenus par Hollien & Colton [88], 1969 sur les locuteurs non chanteurs, Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal [2], 2004 mesurent un diamètre dbv significativement plus élevé de 49% chez les hommes (valeurs comprises entre 2.3mm et 10.6mm (valeur moyenne de 6.35mm)) que chez les femmes (valeurs comprises entre 2.1mm et 8.2mm (valeur moyenne de 4.25mm)) et, de manière moins significative, une ouverture ventriculaire hbv plus élevée de 39% chez les hommes (valeurs comprises entre 2.3mm et 8.3mm (valeur moyenne de 6.1mm, contre 6.5mm d’après les mesures obtenues sur des larynx excisés chez Furmanik & al.[61], 1976)) que chez les femmes (valeurs comprises entre 2.0mm et 7.0mm (valeur moyenne de 4.4mm, contre 6.0mm d’après les mesures obtenues sur des larynx excisés par Furmanik & al.[61], 1976)).

Bien que cette tendance se maintienne, cette différence diminue chez les locuteurs chanteurs, avec dbv

plus élevé de 13% chez les ténors (valeurs comprises entre 1.4mm et 3.1mm (valeur moyenne de 2.32mm)) que chez les cantatrices (valeurs comprises entre 1.1mm et 3.1mm (valeur moyenne de 2.06mm)) et hbv

plus élevé de 27% chez les hommes (valeurs comprises entre 4.0mm et 6.8mm (valeur moyenne de 5.5mm)) que chez les femmes (valeurs comprises entre 3.2mm et 5.6mm (valeur moyenne de 4.3mm)) (Wilson[216], 1976).

Influence de la hauteur

Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal[2], 2004 ont globalement mesuré des dimensions de bandes ventri-culaires plus grandes en mécanisme M1 (registre modal) qu’en mécanisme M2 (falsetto) dans l’expérience de Hollien & Colton [88], 1969 mais aucune différence statistiquement significative n’a été trouvée. La plus grande différence entre les registres a été atteinte dans l’évaluation de l’ouverture ventriculaire hbv

chez les locutrices, plus grande de 34% environ en mécanisme M1 qu’en mécanisme M2. Chez les sujets chanteurs, une influence significative de la hauteur tonale a été observée sur l’image ventriculaire, avec hbvplus grande de 12% dans les sons graves que dans les sons aigus (Wilson[216], 1976, Agarwal & al.[3], 2003, Agarwal[2], 2004). Ce résultat suggère une adduction ventriculaire plus marquée pour la production des sons aigus.

Dimensions du ventricule de Morgagni

La géométrie du ventricule de Morgagni pendant la phonation est évidemment directement reliée aux positions occupées par les cordes vocales et les bandes ventriculaires. En moyennant toutes les mesures extraites des observations anatomiques obtenues par laminographie laryngée frontale chez Hollien & Col-ton[88], 1969 et Wilson[216], 1976, Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal[2], 2004 trouvent :

Pour des locuteurs non-chanteurs

– une hauteur de ventricule hventricule moyenne de 15.73mm (± 3.54mm) ; – une longueur de ventricule Lventriculemoyenne de 4.70mm (± 1.19mm). Pour des locuteurs chanteurs

– une hauteur de ventricule hventricule moyenne de 12.95mm (± 1.01mm) ; – une longueur de ventricule Lventriculemoyenne de 3.68mm (± 0.79mm).

Ces résulats concordent globalement avec une étude antérieure (Scherer [173], 1981) suggèrant que hventricule en phase phonatoire est compris entre 5mm et 18mm et que la longueur du ventricule est comprise entre 1mm et 6mm (Scherer [173], 1981, Agarwal & al. [3], 2003, Agarwal [2], 2004). Ils sont également comparables aux estimations de Kitzing & Sonesson[101], 1967 (cf. tableau 1.1) et de Sundberg

[187], 1974 estimant une longueur Lventriculed’environ 4mm (dans un larynx long de 26mm et de section 0.52cm2 en moyenne Sundberg[187], 1974). Sundberg[187], 1974 évalue la section du ventricule à 1.4cm2

et sa contenance volumique en air à 0.56cm3.

En négligeant la différentiation homme/femme sur des sujets non-chanteurs (respectivement chan-teurs), Agarwal & al. [3], 2003 et Agarwal [2], 2004 ont mesuré une hauteur de ventricule hventricule

moyenne environ 2.9 (respectivement 2.8) fois plus grande que l’espace moyen entre les bandes ventri-culaires hbv; ils ont ainsi également mesuré une longueur de ventricule Lventricule atteignant environ 85% (respectivement 78%) de hbv, genres confondus ou non. Compte tenu de la similarité des rapports Lventricule/hbv et hbv/hventricule pour les sujets, indépendamment de leur genre et de leur capacité vo-cale, Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal[2], 2004 suggèrent une généralisation faisant de ces quotients des nombres caractéristiques de la phonation.

On remarque que les dimensions du ventricule de Morgagni sont plus petites chez des sujets chanteurs que chez les sujets non entrainés. Ce résultat conforte les observations de Husson[92], 1962 selon lesquelles le ventricule disparait sur les tomogrammes des chanteurs lyriques des deux sexes au cours de réalisations puissantes en intensité. Dans ces cas particuliers, chaque bande ventriculaire forme un bourrelet solide-ment accolé à la corde vocale homolatérale, sans ligne horizontale de séparation bien visible, en accord également avec certains tracés laminographiques de Wilson[216], 1976. Grâce à une visualisation radiogra-phique du ventricule en phase respiratoire, Flach[55], 1964 a observé une hauteur moyenne de ventricule hventricule plus élevée chez les chanteurs doués d’une meilleure qualité vocale (Kitzing & Sonesson[101], 1967). Ces études soutiennent donc l’hypothèse que les chanteurs utilisent davantage les variations de leur espace ventriculaire et accompagnent leur geste phonatoire d’une contraction de la cavité laryngée.

En plus de l’influence du comportement vocal de l’individu, Husson[92], 1962, Hollien & Colton[88], 1969, Wilson[216], 1976, Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal[2], 2004 distinguent un ventricule de Morgagni plus ou moins profond selon les sujets, leur origine, le sexe et la hauteur du son.

Influence de l’origine ethnique

Loth [121], 1931 (comme cité dans Agarwal & al. [3], 2003 et Agarwal [2], 2004) a classifié la forme géométrique des ventricules de Morgagni selon trois types. Il montre une distinction entre les sujets euro-péens et les afro-américains et suggère que cette distinction peut contribuer à une différence de capacité vocale selon l’origine de l’individu.

Influence du genre : homme/femme

Malgré de grandes variabilités inter- et intra-individuelles, Husson [92], 1962 observe que la femme possède des ventricules plus spacieux et mieux définis que l’homme et suggère que sa musculature laryngée moins massive soit à l’origine de cette distinction. Agarwal & al.[3], 2003 et Agarwal[2], 2004 trouvent, à partir des tracés de Hollien & Colton [88], 1969, une estimation de Lventricule significativement plus grande de 41% chez les hommes (valeurs comprises entre 3.7mm et 7.5mm (valeur moyenne de 5.3mm)) que chez les femmes (valeurs comprises entre 2.3mm et 5.7mm (valeur moyenne de 3.75mm)), et des

estimations de hventricule comparables, dans un écart relatif de 5% (valeurs comprises entre 9.6mm et 23.0mm chez les hommes (valeur moyenne de 16.0mm)).

Cette tendance se confirme dans l’analyse des tracés laminographiques saisis par Wilson [216], 1976 chez des chanteurs : Lventricule est plus élevé de 41% chez les hommes (valeurs comprises entre 3.3mm et 6.1mm (valeur moyenne de 4.57mm)) que chez les femmes (valeurs comprises entre 2.2mm et 4.2mm (valeur moyenne de 3.23mm)), et hventricule est plus élevé de 11% chez les hommes (valeurs comprises entre 10.8mm et 15.6mm (valeur moyenne de 13.9mm)) que chez les femmes (valeurs comprises entre 11.2mm et 13.20mm (valeur moyenne de 12.48mm)).

Indépendamment de l’entrainement vocal, les bandes ventriculaires sont donc plus éloignées des cordes vocales pour les hommes que pour les femmes.

Influence de la hauteur

Agarwal & al. [3], 2003 et Agarwal [2], 2004 ont mesuré une longueur de ventricule Lventricule plus élevée de 32% en mécanisme M1 qu’en mécanisme M2 chez les hommes non-chanteurs enregistrés dans l’étude Hollien & Colton [88], 1969. Les données extraites de Wilson [216], 1976 ont également suggéré qu’avec la hauteur, les hommes tendaient à réduire l’espace entre cordes vocales et bandes ventriculaires, Lventricule. Les variations des dimensions du ventricule de Morgagni ont également été quantifiées par Kitzing & Sonesson[101], 1967, comme l’illustre le tableau 1.1.

Groupe expérimental Respiration 100 Hz 125 Hz 225 Hz 300 Hz 325 Hz hventricule, valeur moyenne (mm) A 14.9 15.3 - - 20.6 -B 13.0 - 16.6 20.9 - 20.4 Lventricule, valeur moyenne (mm) A 2.3 3.3 - - 3.6 -B 2.6 - 4.4 5.1 - 3.8

Tab. 1.1 – Hauteur et longueur moyennes du ventricule de Morgagni en phases respiratoire et phonatoire à différentes hauteurs tonales, d’après les mesures radiographiques de Kitzing & Sonesson[101], 1967. Les groupes A et B sont des sujets masculins (41 au total), chargés de produire la voyelle [ae] à trois hauteurs différentes.

Les résultats de Kitzing & Sonesson[101], 1967 (cf. tableau 1.1) montrent que le ventricule de Morgagni s’allonge et s’élargit avec la fréquence du son, de la même manière que les cordes vocales (Hollien & Moore

[90], 1960). Ils suggèrent que hventricule est plus petit en phase respiratoire (14mm en moyenne) que la longueur des cordes vocales dans la même direction (15.5mm), et que ces grandeurs sont comparables en phonation. En phase phonatoire, Kitzing & Sonesson[101], 1967 montrent ainsi un allongement maximal du ventricule de 60%, contre 25% d’allongement reporté pour les cordes vocales. Ils mesurent une longueur de ventricule Lventricule d’environ 2mm en respiration, contre 4mm pendant la phonation de la voyelle [ae] à 300Hz environ.

Les données physiologiques typiques pour un homme adulte en phonation, extraites de ces études par imagerie aux rayons X et utilisées comme référence de la géométrie laryngée dans la suite de ce mémoire, sont résumées dans le tableau 1.2.

Plages de valeurs Valeur moyenne Diamètre glottique, dcv 3 - 9mm 4mm Diamètre ventriculaire, dbv 1.1 - 10.6mm 5mm Epaisseur des CV (selon z), Wcv 14 - 22mm 20mm Epaisseur des BV (selon z), Wbv - 20mm Espace glottique, hcv 0 - 3mm 1mm Espace ventriculaire, hbv 0 - 9mm 5mm Longueur du ventricule, Lventricule 3.3 - 7.5mm 5mm Hauteur du ventricule, hventricule 9.6 - 23mm 16mm Hauteur de la trachée, h0 18 - 22mm 20mm Ratio caractéristique hbv/Lventricule 0 - 2.7 1 Ratio caractéristique hbv/hcvmax 0 - 3 1.6 Ratio caractéristique hbv/hventricule 0 - 0.9 0.3

Tab. 1.2 – Tableau récapitulatif des grandeurs physiologiques d’un larynx humain chez un individu adulte masculin en phonation parlée et chantée. Données caractéristiques obtenues chez Hollien & Colton [88], 1969, Wilson[216], 1976, Kitzing & Sonesson [101], 1967, Hirano & al. [84], 1983, Pelorson & al. [147], 1994, Henrich [76], 2001, Vilain[210], 2002, Agarwal & al. [3], 2003, Agarwal [2], 2004.