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Différents éléments peuvent participer à la pertinence des activités d’enseignement liées à l’écriture et stimuler les élèves dans leur apprentissage. Hormis la véracité de ce qui est enseigné – que nous prenons comme prémisse et dont nous ne discuterons pas ici –, les activités visant l’apprentissage de l’écriture devraient s’inscrire dans un projet d’écriture significatif comportant des consignes bien précises.

Plusieurs didacticiens, dont Chartrand (2006), Masseron (2008), et Dolz, Noverraz et Schneuwly (2001), proposent d’inscrire l’apprentissage de l’écriture dans de réels projets d’écriture. Différentes descriptions du projet d’écriture ont été proposées par des didacticiens. Nous retenons celle de Masseron (2008) :

Le projet d’écriture longue se décline de la manière suivante : conduire les élèves à la formulation d’un projet de travail collectif et complexe, étalé dans le temps, négocié au fil de son avancement lors des séances de conseil, co-évalué (la table de lecture des textes produits) et finalement diffusé auprès d’un public élargi qui ne soit pas les seuls membres de la classe concernée par le projet. (p. 83)

L’un des avantages du projet d’écriture longue est de rapprocher les élèves de situations d’écriture authentiques, ce qui contribue à donner plus de sens à leur apprentissage. La situation d’écriture doit ainsi être la plus authentique possible pour que les élèves puissent se représenter une véritable situation de communication avec un destinataire (différent de son enseignant) et un but bien précis. Pour ce faire, l’étape de l’édition et de la publication n’est pas à négliger selon Boudreau (1995). L’édition n’apparait pas dans les modèles du processus d’écriture présentés dans le cadre théorique et conceptuel, puisque cette dernière est davantage de l’ordre du commercial que du processus cognitif dans lequel s’engage le scripteur92

. Elle permet la diffusion du document aux destinataires.

Soulignons toutefois que si le projet d’écriture longue comporte de nombreux avantages pour l’apprentissage de l’écriture, l’enseignement peut être laborieux. Bucheton (2014) souligne qu’il s’agit d’« une pédagogie difficile qui demande beaucoup de travail de la part des enseignants et qui peut dériver, par exemple, dans la perte ou la dilution des savoirs, l’absence d’objectivation des savoirs manipulés. Elle requiert une dialectique difficile entre la gestion des imprévus, les ajustements que provoque immanquablement tout projet et la nécessité d’exercices routiniers pour stabiliser les connaissances rencontrées » (p. 14).

Pour que les élèves aient toutes les informations nécessaires à la réalisation d’un projet d’écriture, Chartrand (2000) et Reuter (2000) proposent de rendre le plus clairs possible les objectifs d’apprentissage et les consignes d’écriture données aux élèves. Pour ce faire, les paramètres de la situation de communication doivent être connus des élèves si l’on veut les amener à se les approprier et à en tenir compte dans leurs écrits. De la même manière, les critères d’évaluation gagnent à être connus. Sur quoi les élèves devront-ils travailler précisément? La clarification des

consignes d’écriture est liée au contrat didactique et à l’établissement d’un climat sécurisant : les attentes de l’enseignant doivent être claires pour les élèves93

.

Clarifier les consignes d’écriture n’est pas synonyme d’imposer toutes les contraintes d’écriture pouvant être liées à la situation de communication (genre produit, intention d’écriture, destinataire, sujet, point de vue, longueur du texte, etc.). Pour que les élèves s’investissent dans le projet d’écriture, ce dernier doit les intéresser. L’une de suggestions de Reuter (2000) est de donner des choix aux élèves, plutôt que de leur imposer toutes les contraintes. L’enseignant pourrait, par exemple, indiquer le genre de textes et le destinataire aux élèves et leur laisser le choix du sujet du texte. Cela permet en outre de mettre les élèves dans une situation de communication qui se rapproche davantage de la réalité d’un scripteur expert : même s’il peut y avoir des contraintes, le scripteur doit faire différents choix guidant son écriture94.

Travailler en interdisciplinarité pour montrer l’utilité de l’écriture

Au secondaire québécois, les élèves apprennent dans le cadre de disciplines scolaires bien circonscrites, que ce soit le « français » – qui renvoie en fait à plusieurs disciplines dont la grammaire et la littérature – les mathématiques, l’histoire, etc. Cette manière de diviser les apprentissages comporte une lacune : celle de ne pas faire apparaitre clairement pour les élèves les liens qui peuvent exister entre ces différentes disciplines scolaires. Les élèves peuvent croire à tort que l’apprentissage de l’écriture n’est nécessaire que pour la classe de français.

Pour pallier ce problème, plusieurs didacticiens proposent que les enseignants de français travaillent conjointement avec les enseignants d’autres disciplines (Masseron, 2008; Chartrand, 2000; Lecavalier et Brassard, 1995). Cela peut s’avérer bénéfique, puisque les élèves verront plus aisément que leur compétence scripturale peut et doit « dépasser » la classe de français. Plus encore, de véritables projets d’écriture menés avec les élèves permettent de les mettre en réel contexte de communication afin qu’ils puissent prendre conscience de l’utilité sociale de l’écriture95

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93 Concernant cette orientation didactique, voir p. 80.

94 Ces choix participent à la motivation liée à la communication écrite. Lorsqu’il écrit, le scripteur le fait dans le cadre d’un cadre énonciatif particulier qui lui confère la pertinence et la nécessité de produire un discours écrit. À ce sujet, voir le modèle de Hayes et Flower de 1980 dans le cadre théorique et conceptuel (p. 23).

95

Par exemple, l’écriture d’un rapport de recherche scientifique dans le cadre du concours national Expo- Sciences, projet pouvant être mené de concert avec l’enseignant de sciences, met les élèves dans un réel contexte de communication : de vrais évaluateurs jugeront de la pertinence du projet, entre autres avec le texte que les élèves rédigeront.

Plane (2002) souligne que l’interdisciplinarité amène les élèves à réfléchir à leurs pratiques langagières : « l’activité de production langagière de l’élève se trouve orientée vers une double finalité qui déborde le champ strict du français, celle de la construction cognitive de l’élève en tant que sujet épistémologique, et celle de sa construction sociale en tant que membre d’une communauté » (p. 8). Les projets d’écriture proposés aux élèves gagnent ainsi à s’inscrire dans des projets interdisciplinaires, faisant intervenir des enseignants d’autres disciplines scolaires que le français.

Critère 2 : Favoriser une évaluation formative permettant une réelle situation