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A propos de la carence des parties riches en viande des espèces du cheptel

7 habitants de Develier-Courtételle

7.5 Présentation des données : l’aire centrale du site

7.6.6 A propos de la carence des parties riches en viande des espèces du cheptel

La présence des crânes et des bas de pattes plaide en faveur d’un abattage sur place des animaux, et donc du débitage des carcas-ses. L’étude de la répartition spatiale des restes fauniques semble appuyer ce postulat par la localisation d’aires de dépeçage à la périphérie des zones d’habitat tandis que les rejets culinaires ont été retrouvés à proximité des lieux de consommation (CAJ 17, chap. 6).

Les carnivores et les suidés ont participé à la destruction d’une partie des restes osseux en brisant les plus gros et en ingérant une part des rejets, en particulier les petits os des pattes comme les sésamoïdes ou les os du carpe ou du tarse. Mais il n’est pas possible de leur imputer l’ensemble de ce déficit. Si l’on consi-dère la quantité d’ossements, parfois très volumineux (os de bovins et d’équidés), que représentent les squelettes de l’ensem-ble des individus abattus, les chiens et les porcs ne devaient pas être assez nombreux pour faire disparaître ces lots d’os man-quants. De plus, le déficit est continu et systématique pour cha-que espèce domesticha-que consommée, ce qui implicha-que un choix délibéré.

On peut supposer un commerce de laitage et de viande vers des marchés ou des foires avoisinants ou évoquer des redevances à un seigneur, une abbaye ou un monastère. Les restes osseux ne peuvent répondre à ces questions en suspens. Mais les deux pro-positions sont valables selon le statut social des villageois.

7.7 La morphologie

La hauteur au garrot est l’une des données morphologiques que l’on peut proposer à partir des restes osseux. Cette observation permet d’établir une comparaison entre les espèces, d’un site à l’autre, et d’observer d’éventuelles variations géographiques ou chronologiques.

7.7.1 Les bovins

Les bovinés sont les animaux qui nous ont fourni le plus d’élé-ments métriques utilisables (fig. 165). Dans ces présentations, mâles et femelles ont été réunis ; en effet si un certain nombre de métapodes ont permis de déterminer le sexe des animaux, pour d’autres il y avait litige. D’autre part quelques hauteurs ont été calculées à partir des os longs des membres qui ne permettent pas leur attribution à un mâle ou à une femelle. Bien que, dans cha-que secteur, cha-quelcha-ques individus paraissent sortir du lot, on note qu’une grande majorité n’atteint pas 120 cm.

Notre animal ne mesurant que 95 cm au garrot n’est pas un cas unique (fig. 166), puisqu’on retrouve pour la période des 7e-9e

siècles des individus dont la taille se situe autour de 93 cm en Tchécoslovaquie (Audoin-Rouzeau 1991). Plus près de notre région, H. R. Stampfli (1981) décrit le squelette d’une femelle de boviné, trouvé au 19e siècle dans la région de Bienne (BE), datant probablement du Moyen Age sans plus de précision, dont la taille se situait autour de 90 cm.

Si l’on resitue l’ensemble de ces données dans le contexte du Haut Moyen Age, on observe une certaine relation entre les statures des bovins de Develier-Courtételle et celles évaluées sur d’autres sites. Le site de Courtedoux, Creugenat (Putelat 2004 ; 7518 restes déjà étudiés sur un corpus total de 11 500) se situe à peu de distance de notre site et son fonctionnement s’établit selon la même chrono-logie. Charavines (Isère, F ; Olive 1993), site de l’An Mil, représente une période charnière. Pour cette comparaison toutes les données du site de Develier-Courtételle sont rassemblées (fig. 167). On constate une certaine homogénéité entre toutes ces réponses.

Partie orientale Partie occidentale Aire centrale

(8 ind.) (25 ind.) (3 ind.)

Etendue 108 -125 cm 95 -127 cm 110 -130 cm

Moyenne 115 cm ± 5,32± 5,32 114 cm ± 7,23± 7,23 119 cm ± 10,15± 10,15

Fig. 165 Distribution de la hauteur au garrot des bovins dans les différentes parties du site.

Develier-Courtételle (6e-8e s.)

Courtedoux,

Creugenat (6e-8e s.) Charavines (11e s.) (36 ind.) (11 ind.) (22 ind.)

Etendue 95 -130 cm 105 - 125 cm 101 - 119 cm

Moyenne 114 cm ±7,05± 7,05 110 cm ±5,02± 5,02

Fig. 167 Hauteur au garrot des bovins de Develier-Courtételle et de deux sites de comparaison.

7.7.2 Les équidés

Pour les équidés les hauteurs se distribuent entre 132 et 144 cm, mais on trouve un sujet dépassant 150 cm dans la partie orientale (fig. 168). Il est possible par ailleurs que soient mélangés des res-tes de chevaux à proprement parler et des resres-tes d’hybrides comme le mulet, mais la taille ne devrait pas vraiment les séparer. Etant donnée la contemporanéité du fonctionnement des sec-teurs, la moyenne des données rassemblées permet de comparer les tailles des équidés du site avec celles d’autres sites. La moyenne obtenue se place à 139 ± 4,98 cm (15 mesures).

Pour la période romaine, dans la région de Martigny (VS) on note, entre le 2e et le 4e siècle, des hauteurs un peu plus importan-tes avec une moyenne de 147 ± 5,5 cm (6 mesures ; Olive 2003b). Au 2e siècle, dans la basse vallée du Rhône, les statures sont plus proches de celles de Develier-Courtételle puisque la moyenne

ment à un bélier. Il n’est cependant pas certain que tous les ovins fussent porteurs de cornes. Pour la chèvre il est difficile de porter un jugement sur une ou deux données, il ne s’agit donc que d’une indication. Nous savons par ailleurs que ces chèvres portaient des cornes en forme de sabre (fig. 106), caractéristique qui se retrouve à l’époque romaine comme au Moyen Age dans les régions alpi-nes. Nous pouvons également observer sur les représentations médiévales des caprinés d’une grande ressemblance avec ce type de caprins (fig. 169).

7.7.4 Les porcs

La morphologie des porcs est pratiquement impossible à appré-hender, les animaux étant le plus souvent abattus avant que les os de leur squelette ne soient totalement épiphysés. Ceci est un handicap majeur à la reconstitution de leur stature et, dans le cas présent, s’ajoute la grande fragmentation de tous les éléments. Deux mesures seulement nous permettent d’approcher cette thé-matique : 75 et 76,5 cm pour des porcins dont nous ne connais-sons pas le sexe. Ces données cependant s’intègrent dans la moyenne des porcs de Charavines (11e siècle) qui se situe autour de 75 cm. Les individus recensés en Valais aux 2e et 3e siècles se positionnent entre 75 et 81 cm. La hauteur moyenne des porcins du Nord de la France, entre les 6e et 9e siècles, est de 72 cm. On note donc une grande ressemblance dans le format des cochons domestiques pour les différentes régions citées. L’espèce porcine est l’une des plus malléables et l’allure des porcs médiévaux ne correspond pas vraiment à celle d’aujourd’hui. La documentation à notre disposition les montre de temps en temps roses mais aussi de couleur brune ou noire, les soies sont souvent abondantes, quelquefois frisées, le plus souvent raides formant parfois « une sorte de crinière hérissée sur le dos ». La tête est plutôt allongée et le profil est soit droit, soit subconcave ; les oreilles sont géné-ralement dressées. Les membres sont assez fins et la queue peu « tirebouchonnée » (Laurans 1975) (fig. 170).

Fig. 168 Distribution de la taille des équidés dans les différentes parties du site.

Fig. 169 Chèvre

mé-diévale, avec cornes en sabre. (The four

seasons of the house of Cerruti, Edit. Ar-noldo Mondadori, 1984).

s’établit à 141 ± 8,20 cm (13 mesures ; Olive 2002). Pour une période s’étendant du 9e au 11e siècle, deux hauteurs, 135 et 139 cm, sont fournies sur le site de Vuillonnex, Saint Mathieu (GE) (Olive, à paraître) et pour l’ensemble du Haut Moyen Age en France du Nord la moyenne des tailles des chevaux est de 141 cm (Clavel 2001).

7.7.3 Les caprinés

Le petit bétail a fourni peu de possibilités pour la reconstitution des hauteurs. La taille des ovins se rapporte essentiellement aux brebis : 59, 60, 61 et 62, cm. Pour les caprins nous obtenons 70 cm pour un bouc et 69 cm pour une femelle.

Quoique très ponctuelles, ces données peuvent soutenir quel-ques comparaisons. Ainsi pour la période romaine trouve-t-on également en Valais des moutons d’une hauteur de 61 cm environ et des chèvres dont la taille avoisine 68-69 cm. A Sézegnin (GE) dans l’habitat occupé entre le 4e et le 8e siècle, nous trouvons des moutons dont la taille se situe entre 59,5 et 60 cm et des chèvres hautes de 69 et 71 cm (Voser 1985). A Lyon au 7e siècle, la hauteur de deux brebis se situe à 63 cm (Olive 2001). Dans le Nord de la France les moutons du Haut Moyen Age mesurent environ 61 cm (Clavel 2001) et à Charavines (11e siècle) entre 55 et 60 cm, tandis que la chèvre paraît plus petite sur ce dernier site avec 62-63 cm. Il semble que les ovinés n’aient pas subi de grandes variations de taille au cours des siècles. Grâce aux restes crâniens, nous avons la preuve qu’à Develier-Courtételle certains moutons étaient armés, en particulier dans l’aire centrale où un fragment crânien porte les bases de chevilles osseuses assez robustes appartenant

probable-Fig. 170 Un aspect du porc médiéval, 1491.

(Jo-hannes de Cuba, « Hortus sanitatis », Jacob Mey-denbach, Mainz).

Fig. 174 Traces d’usure sur l’articulation d’une vertèbre lombaire de bovin.

Fig. 175 Usure anormale sur des troisièmes molaires supérieures de bovin.

7.7.5 La volaille

Il est difficile d’approcher la morphologie des poules. Les don-nées métriques sont très lacunaires. Seuls deux os des extrémités des ailes (carpo-métacarpes) et trois os des bas de pattes (tarso-métatarses) sont entiers. L’habitat de Sézegnin est le seul qui procure quelques données de comparaison pour cette période (fig. 171).

Fig. 171 Données métriques des gallinacés de Develier-Courtételle comparées à celles de Sézegnin. GL : grande longueur ; Dt : diamètre transverse.

Fig. 172 Métacarpe normal (A) et métacarpe présentant un net élargissement de la partie distale (B).

Fig. 173 Anomalies pathologiques sur des premières phalanges de bovin. A droite, une phalange « normale ».

Develier- Courtételle Sézegnin Carpo-métacarpe GL : 37,0 -39,0mm Dt distal : 7,0 - 8,0mm GL : 35,0 -35,2mm Dt distal : 6,7- 8,0mm Tarso-métatarse GL : 62,0 -78,0 - 81,0mm Dt diaphyse : 5,0 -7,0 - 6,0mm Dt distal : 11,0 -13,0 -13,0mm GL : 83,5mm Dt diaphyse : 6,0mm Dt distal : 8,5mm 7.8 La pathologie

Aucun traumatisme n’a été relevé, mais la grande fragmentation des os longs est un lourd handicap pour cette observation. Les seules pathologies osseuses retrouvées concernent les bœufs pour lesquels on note surtout des pathologies liées à l’âge et au travail, comme cet élargissement de la partie distale des méta-podes surtout caractéristique des bœufs tirant des chariots ou la charrue (fig. 172), ou bien diverses anomalies sur les premières phalanges (fig. 173). Ces pathologies sont connues et retrouvées régulièrement sur les os de bovins (Bartosiewicz et al. 1997). D’autres pathologies sont plus difficiles à définir, ainsi les traces laissées sur la surface articulaire d’une vertèbre lombaire de bovin (fig. 174). Ce sont de fines cannelures très rapprochées, peut-être provoquées par un déplacement de la vertèbre attenante.

10 mm

10 mm

A B 50 mm

Fig. 177 Divers ossements ayant subi les morsures plus ou moins appuyées des chiens : os de bovin (A-E) et métacarpe d’ovin (F).

Fig. 176 Troisièmes molaires supérieures de bovin (fig. 175) : usure normale

(A) et anormale (B).

Par ailleurs on retrouve une anomalie dentaire très particulière sur plusieurs troisièmes molaires supérieures, provenant d’individus différents issus des fermes orientales et occidentales. Il s’agit d’une usure singulière du dernier lobe. La dent est normalement usée sur la surface occlusale du lobe médial, tandis que la surface occlusale du lobe distal n’est manifestement pas totalement abrasée et forme ainsi une pointe très agressive (fig. 175). La troisième molaire inférieure présente trois lobes sur lesquels reposent les deux lobes de la troisième molaire supérieure. Les deux faces occlusales, supérieure et inférieure, sont en phase, le frottement des deux surfaces donne une table d’usure plus ou moins plane et en principe les dents présentent des usures comparables (fig. 176A). Dans le cas présent le dernier lobe de la troisième molaire supérieure forme une pointe acérée (fig. 176B).

Cette anomalie peut être le fait d’une malformation du maxillaire ou de la mandibule inférant un mauvais système de mastication. On peut encore évoquer la possibilité de l’absence du troisième lobe de la dent inférieure, ce qui laisse la partie distale de la dent supérieure sans appui et donc sans possibilité d’usure.

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