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La professionnalisation des dirigeants bénévoles de la FFT, vers une génération plus technicienne

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Tableau n° 1 : Les cultures identitaires des dirigeants bénévoles de la FFE

Chapitre 2. La professionnalisation des dirigeants bénévoles de la FFT, vers une génération plus technicienne

Après l’approche historique que nous avons conduite précédemment, ce deuxième volet de notre étude sur la fédération de tennis se propose d’analyser plus en détail les conditions de la professionnalisation des bénévoles élus qui la dirigent. Dans un premier temps, notre intention est de nous intéresser aux relations parfois conflictuelles entre les dirigeants bénévoles et les enseignants professionnels de tennis. Si cette étude peut sembler s’éloigner de notre thème de recherche, elle se justifie pourtant par l’intérêt que suscite le point de vue des syndicats dont la liberté d’expression rompt avec le devoir de réserve affiché par un certain nombre de salariés fédéraux. Notre intention est de montrer que les relations entre bénévoles et salariés sont devenues depuis longtemps des relations professionnelles employeurs/employés conférant aux dirigeants bénévoles le statut de patrons et de chefs d’entreprise. Dans un second temps, nous aurons recours pour l’essentiel à nos questionnaires pour montrer que la professionnalisation autorise l’identification de deux profils ou cultures bénévoles. Leurs différences sont générationnelles. Elles sont liées à leur degré de professionnalisation. Il convient pour cela de tester nos hypothèses de départ postulant l’émergence d’un bénévolat beaucoup plus impliqué techniquement et professionnellement dans le milieu du tennis institutionnel et présentant des trajectoires d’engagement militant autres que celles des dirigeants traditionnels jusque là en place. Enfin, la dernière partie sera consacrée à une réflexion sur la capacité du monde sportif et tennistique à concilier deux modèles d’organisation distincts, deux logiques de fonctionnement devant articuler tradition et modernité, respect des valeurs identitaires et nécessité d’adaptation au changement.

Pour réaliser cette étude, nous avons adopté une démarche méthodologique d’investigation similaire à notre précédente étude de cas. En complément de notre recherche documentaire, nous avons procédé à quatre entretiens exploratoires. Tous nos entretiens exploratoires se sont déroulés au siège de la fédération ou de la ligue régionale. La fédération étant très bien structurée et l’organigramme très détaillé, nous avons pu contacter facilement nos différents interlocuteurs, tous exerçant des responsabilités importantes au sein de la fédération. Certains ont été des pratiquants de haut niveau. Le guide d’entretien a repris les thèmes dominants retenus pour la précédente étude de cas. Ces thèmes étaient l’approche historique des institutions,

les rôles et jeux des acteurs institutionnels, la compétition et ses finalités, le domaine de la formation et de l’enseignement et enfin un thème relatif à l’évolution de la fédération. Nous avons complété ces quelques thèmes généraux par d’autres questions pouvant nous aider à relancer les débats. Chaque entretien a duré entre une heure et une heure trente et a été enregistré. Après retranscription intégrale des entretiens, nous avons réalisé des résumés et des analyses longitudinales et transversales qui nous ont permis de construire une grille d’analyse dans laquelle des thèmes ont pu être identifiés (la structure interne de l’institution, la stratégie des acteurs, l’identité des dirigeants et le processus de prise de décision). Pour les entretiens principaux (réalisés pendant le troisième trimestre 2002), nous avons contacté des dirigeants ou ex-dirigeants élus de la fédération mais aussi les représentants syndicaux des enseignants dont les relations avec la fédération apparaissaient conflictuelles. Le choix d’ouvrir notre panel d’interviews aux principaux représentants syndicaux n’était pas anodin et s’expliquait à la fois par le besoin de rompre avec le consensus général qui semblait s’affirmer entre les dirigeants élus en poste (nous verrons d’ailleurs que ce consensus ne s’établit qu’avec les dirigeants actuellement en poste mais pas avec ceux qui ont quitté leurs fonctions électives il y a quelques années) et à la fois parce qu’il nous semblait que les relations souvent tendues entre syndicats et dirigeants fédéraux pouvaient constituer une illustration des tensions dues au processus de professionnalisation de la fédération. Les entretiens ont eu lieu soit au siège fédéral (dans les bureaux des interviewés), soit dans des lieux publics (brasseries, terrasses de café).

Dans le plan d’entretien, nous avons retenu deux consignes, une relative aux stratégies et positions des acteurs et des groupes d’intérêt dans un contexte d’entrepreneurisation fédérale, l’autre relative à leurs domaines d’intervention, à la gestion des licences et à l’organisation des compétitions et des formations. Notons que nous avons effectué, à la fin de notre analyse, un entretien complémentaire. Cet entretien plus ou moins formel a eu pour objectif d’enrichir la compréhension des données recueillies précédemment et de vérifier la crédibilité de nos interprétations et analyses des faits. Après les entretiens principaux, nous avons procédé à l’envoi des questionnaires. Le questionnaire comportait douze questions réparties en deux grandes parties571. Pour constituer l’échantillon, nous sommes remonté jusqu’à 1989, ce qui correspond aux quatre dernières olympiades. Au total, 234

571 Une partie relative aux rapports entre l’acteur et sa fédération et une partie portant sur le statut social de l’individu. Notons que nous avons posé une question ouverte dite d’opinion relative au jugement porté par les personnes interrogées sur leur fédération.

questionnaires ont été envoyés par courrier (en réalité, nous en avons envoyé 276 mais 42 sont revenus en raison d’adresses erronées) sur une base de sondage estimée à 300 membres. Le taux de retour est néanmoins élevé puisqu’il atteint 49,1 %. L’échantillon se compose de 115 dirigeants bénévoles fédéraux572. Tous sont ou ont été membres d’un bureau de ligue et membres de l’assemblée générale de la fédération. Parmi ceux-ci, on compte 45 personnes siégeant ou ayant siégé au comité directeur de la fédération et 36 présidents ou anciens présidents de ligue.

1. Du monde sportif au monde du travail, une évolution des rapports entre les acteurs

Les entretiens exploratoires ont pour objectif d’orienter notre domaine de recherche. Comme pour notre étude précédente, nous en avons réalisés quatre durant l’été 2002. Trois des personnes contactées sont des administrateurs salariés de la fédération. Le quatrième interviewé est un responsable administratif d’une ligue de tennis. Au vu des informations collectées dans ce contexte général de forte professionnalisation, il est possible de positionner plusieurs groupes d’acteurs dont les intérêts divergent. Ce sont ces groupes d’intérêt aux logiques, stratégies et profils différents que nous allons étudier maintenant.

1.1. Un pouvoir bénévole réellement fort mais des relations entre groupes d’intérêt peu développées

Ces premières observations sont issues de l’analyse thématique des entretiens exploratoires qui nous permet de distinguer les groupes d’acteurs ou groupes d’intérêt évoluant dans la fédération. Il y a premièrement l’ensemble des acteurs salariés et bénévoles qui oeuvrent au sein de l’institution fédérale. Pour eux, l’objectif de la fédération est de promouvoir le tennis par les compétitions mais aussi d’augmenter le nombre de ses licenciés. Cela passe par le contrôle d’un des tournois les plus prestigieux au monde ; celui de Roland Garros dont une partie des recettes permet d’aider les ligues et les

572 Il s’agit à 92 % d’hommes. Ce pourcentage est proche de celui de l’ensemble des hommes composant notre liste initiale. Ils sont âgés entre 50 et 74 ans. Il apparaît qu’une forte proportion de notre échantillon est aujourd’hui retraitée puisqu’on en dénombre plus de 60 %. Les questionnés en situation de salariés sont un bon quart puis viennent ensuite ceux qui exercent une profession libérale (ils ne sont que 10 %).

clubs. Parmi ces dirigeants, nous rapportent nos différents interlocuteurs, il semble que ceux élus et composant la direction politique de la fédération sont davantage des retraités et des fonctionnaires. Ils auraient accentué leur contrôle sur l’institution et dans une moindre mesure sur les dirigeants salariés de la fédération.

Les ligues sont « le relais de la fédération auprès des clubs »573. La décentralisation de la fédération leur reconnaît une grande autonomie de fonctionnement. Cela étant, elles dépendent de la fédération sur le plan financier. Comme la fédération, leur politique est celle de la recherche de licenciés. Les dirigeants de ligues sont des présidents ou anciens présidents de clubs souvent en poste depuis longtemps.

Deuxièmement, on trouve les grands joueurs professionnels rassemblés au sein de l’ATP et troisièmement les organisateurs de tournois professionnels. Tous sont des professionnels dont la principale motivation est économique. « Les gens qui pèsent, ce sont les dirigeants, les directeurs de tournois et les joueurs »574, souligne un responsable de la fédération. Les relations entre les dirigeants fédéraux et les dirigeants de l’ATP sont peu développées (si ce n’est à travers Roland Garros et la Coupe Davis) tant la logique

« associative » des dirigeants fédéraux semble éloignée de la logique

« business » des promoteurs professionnels. Pour un des nos interviewés, « l’association des joueurs a un peu plus une connotation business que n’a pas vraiment la fédération »575. Quatrièmement, il y a les enseignants et éducateurs de tennis dont les intérêts sont défendus par deux organisations syndicales. « Les relations sont assez difficiles, (…) entre les dirigeants et les syndicats qui s’entendent pas du tout »576. Si leurs intérêts peuvent sur certains points converger, les difficultés de leurs relations semblent relever plus de conflits de personnes. Il faut souligner que les liens entre les dirigeants bénévoles et les enseignants sont de plus en plus des liens de travail, des liens entre employeurs et employés qui priment, semble-t-il, sur le projet associatif fédérateur. Cette première enquête qualitative nous permet en définitive de situer quatre groupes d’acteurs dont les relations entre eux restent peu étendues. Les dirigeants bénévoles apparaissent comme des acteurs déterminants au sein de la fédération dont ils définissent seuls les grandes orientations politiques. A la fédération, ils sont les employeurs d’une équipe importante de permanents

573 Entretien n° 15.

574 Entretien n° 12.

575 Entretien n° 13.

576 Entretien n° 12.

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