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Les débuts du processus d'intégration économique européenne entre « défi américain » et stratégie des champions nationaux américain » et stratégie des champions nationaux

L'intégration économique européenne des débuts à la « relance » des années quatre-vingt : la transition vers l'Europe du « big business »

2. Les débuts du processus d'intégration économique européenne entre « défi américain » et stratégie des champions nationaux américain » et stratégie des champions nationaux

Après avoir joué un rôle déterminant dans le lancement du processus d'intégration économique européenne durant les années cinquante, les États-Unis reviennent à partir de l'entrée en vigueur des traités de Rome à une politique européenne plus soucieuse de leurs intérêts économiques. Les préoccupations géopolitiques du département d’État passent au deuxième plan, au profit des

154 Monnet, 1976, pp. 446-450.

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préoccupations des départements du Trésor et du Commerce. La crainte d'une Europe communautaire tentée par la fermeture à l'égard des États-Unis se substitue à la crainte de voir l'Europe se fragmenter. La dimension de concurrence transatlantique prend désormais le dessus au détriment de l'attitude américaine bienveillante de la précédente période.

L'une des conséquences de cette modification de la politique européenne des États-Unis est la perte d'influence des réseaux euro-fédéralistes structurés autour de Monnet. Cette perte d'influence est évidente dès les négociations des traités de Rome. Alors que Monnet insiste surtout sur le traité de l'Euratom, qu'il envisage comme l'amorce d'une politique européenne de l'énergie, sur une politique commune dans le domaine des transports et sur un renforcement substantiel des institutions supranationales en même temps qu'il est peu enthousiaste au sujet de l'union douanière156, le résultat va en grande partie à l'encontre de ses préconisations. Cependant, le fait que le schéma de libéralisation commerciale qui prévaut à la fin des années cinquante est celui de la « petite Europe » du marché commun, avec des provisions pour des politiques communes en matière de politique de la concurrence et de politique commerciale extérieure, au détriment de la « grande Europe » prônée par la Grande Bretagne à travers sa proposition de zone de libre échange (qui voit le jour à travers la constitution de l'Association Européenne de Libre Échange – AELE), permet la constitution d'une bureaucratie supranationale relativement autonome qui n'aura de cesse de proposer des politiques communes à partir des années soixante.

La perte d'influence du courant euro-fédéraliste favorise l'affirmation de tendances de défense des intérêts nationaux au sein du marché commun naissant. Pour faire face au défi que constitue l'élimination progressive des protections tarifaires, les gouvernements des États-membres poursuivent une stratégie de renforcement de leurs propres firmes industrielles nationales.

2.1 Les États-Unis reviennent à une politique européenne centrée sur la défense de leurs intérêts économiques

Aussi tard que 1959-1960, l'attitude des États-Unis reste marquée par la prédominance de considérations géopolitiques. L'union douanière proposée en 1956 par le rapport Spaak poursuit, du point de vue de l'ouverture commerciale des économies européennes, dans la voie ouverte par la CECA. L'attitude de l'administration Eisenhower est la même que celle de l'administration Truman à propos de

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la CECA. Malgré les inquiétudes des exportateurs américains sur le caractère discriminant du marché commun, l'administration décide que l'initiative doit être appuyée, les éventuels contentieux économiques devant être réglés une fois la CEE en place dans le cadre du GATT157. En même temps, la même administration est hostile à l'égard de la proposition britannique de zone de libre échange englobant les pays de l'OECE158, un projet pourtant moins discriminant à l'égard des exportateurs américains et plus conforme à l'objectif de libéralisation commerciale multilatérale que le marché commun. En effet, alors que les deux projets consistent en une libéralisation commerciale préférentielle entre leurs membres et, donc, discriminante à l'égard des États-Unis, le traité de Rome prévoit de surcroît un tarif extérieur commun, dont l'effet est de relever le tarif effectif que les exportations américaines doivent franchir pour pouvoir entrer sur les marchés des pays européens les plus libres-échangistes qui absorbent la plus grande part des exportations américaines en Europe, en l'occurrence l'Allemagne et la Belgique159.

Sur le plan financier et monétaire, les États-Unis maintiennent tout au long des années cinquante leur position sur la convertibilité des monnaies européennes établie depuis 1947160. Ils soutiennent jusqu'à sa fin (1958) l'UEP, et refusent d'appuyer les revendications d'un retour à la convertibilité des pays européens qui commencent à accumuler des excédents en son sein, à savoir l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas. Ils s'opposent aussi aux propositions britanniques de même nature, suscitées par la volonté des banquiers de la City de rétablir le rôle de place financière internationale de Londres. Enfin, lorsque l'UEP prend fin en 1958, seule l'Allemagne libéralise l'ensemble des mouvements de capitaux et pas seulement les transactions de la balance courante, comme c'est le cas dans les autres pays européens. L'administration américaine ne s'y oppose pas ; au contraire, elle considère que le risque de mouvements spéculatifs déstabilisants reste important et que cela justifie le droit des pays membres du FMI à avoir recours à des contrôles de capitaux.

Or, à partir de la mise en place du marché commun, et à mesure que les déséquilibres de la balance des paiements américaine s'accentuent durant les années soixante, l'attitude américaine va évoluer.

2.1.1 La réaction américaine à la création puis au premier élargissement de la CEE

La CEE représente un défi pour les industriels américains dans la mesure où elle risque de créer

157 Lundestad, 1997, pp. 86-87.

158 Dinan, 2006, pp. 31-37.

159 Dür, 2010, p. 103.

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une diversion commerciale à leur détriment et au profit des industriels européens, lesquels désormais n'auront plus à franchir de mur tarifaire pour exporter dans les autres pays de la CEE. De surcroît, la Politique Agricole Commune (PAC), obtenue par la France comme un moyen de favoriser la modernisation de son secteur agricole, à la fois crée des barrières supplémentaires pour les exportations agricoles américaines et engendre une production européenne excédentaire qui viendra concurrencer les produits américains sur les marchés tiers à l'exportation161.

Les grandes firmes américaines réagissent à cette menace de deux façons, ce qui reflète l'ambiguïté de leur attitude à l'égard de la CEE. En effet, au moment des négociations du traité d'union douanière, celles-ci n'y sont pas unanimement opposées. Elles considèrent, certes, que le risque de diversion commerciale au détriment de leurs exportations est un inconvénient majeur, mais en même temps elles voient d'un bon œil, notamment celles qui sont déjà implantées en Europe comme les firmes pétrolières et automobiles, la création d'un grand marché intégré162.

Leur première réaction, donc, est de demander à la nouvelle administration de réagir sur le front de la politique commerciale163. L'administration Kennedy obtient une large délégation de pouvoirs de la part du Congrès en 1962 (à travers le Trade Expansion Act) et propose des négociations multilatérales dans le cadre du GATT, ainsi que l'élimination des tarifs dans les secteurs où le commerce américano -européen (Grande Bretagne comprise) dépasse 80% du commerce mondial. Ces secteurs concernent des produits de technologie avancée dans lesquels les firmes américaines ont des avantages compétitifs164. Les négociations du « Kennedy Round » débutent en 1964 et sont conclues en 1967, seulement après des concessions importantes de la part des États-Unis, ce qui illustre le poids croissant de la CEE dans le système commercial international165. Outre ces négociations, l'administration Kennedy prend des mesures sectorielles, comme le relèvement des tarifs pour certains produits comme le verre et surtout la volaille, ce qui déclenche des représailles européennes dans la séquence restée connue sous le nom de « guerre du poulet »166, le premier affrontement commercial américano-européen de l'après-guerre.

Pour l'administration Kennedy, cette stratégie commerciale vise également à enrayer les déséquilibres croissants de la balance des paiements américaine. Ceux-ci existent depuis le début des années cinquante, mais c'est seulement à partir de la fin de la même décennie qu'ils prennent une ampleur suffisamment importante pour préoccuper l'administration fédérale. Outre les transferts pour financer la

161 Dür, 2010, pp. 104-105.

162 Wilkins, 1996, pp. 351-359.

163 Dür, 2010, pp. 106-112.

164 van der Pijl, 2006, p. 73.

165 Dür, 2010, pp. 126-130.

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présence militaire américaine en Asie de l'Est et en Europe, la création de la CEE y est pour quelque chose. En effet, la deuxième réaction des grandes firmes américaines est de sauter le mur tarifaire et d'investir directement au sein de la CEE. Le stock des investissements directs américains passe de 2,1 milliards à 6,5 milliards de dollars en 1964 et à 12.2 milliards en 1969167. Cette augmentation se fait aux dépens de la Grande Bretagne. La proportion des flux d'investissements américains en Europe destinés aux pays de la CEE passe de 43% en 1960 (environ le même niveau qu'en 1950) à 64% en 1970168.

Cette ruée des grandes firmes américaines en Europe durant les années soixante suscite la crainte que l'industrie européenne sera bientôt dominée par elles. Cette crainte est très clairement exprimée par le journaliste et dirigeant du Parti Radical Jean-Jacques Servan-Schreiber. Dans son célèbre ouvrage de 1967 intitulé Le Défi Américain, celui-ci prévient que « la troisième puissance industrielle mondiale, après les États-Unis et l'URSS pourrait bien être dans quinze ans, non pas l'Europe mais l'industrie

américaine en Europe »169. Le poids des firmes américaines est particulièrement important dans les secteurs de haute technologie. Dans le secteur informatique, en 1965, dans le seul marché européen, la part de marché d'IBM s'élève à 62%170. Servan-Schreiber souligne le « gap technologique » et le déficit des politiques publiques européennes par rapport aux pratiques américaines en matière de recherche scientifique, d'éducation supérieure et de soutien multiforme (financements publics de la recherche industrielle, marchés publics réservés aux firmes domestiques, adaptation des normes réglementaires) aux industries à forte intensité technologique171. Le défi que pose aux gouvernements européens l'afflux d'investissements américains en Europe est donc celui d'une politique industrielle cohérente capable de préparer l'industrie européenne à affronter la concurrence américaine dans les secteurs de haute technologie. Dès ce moment-là, une rivalité industrielle s'installe entre l'Europe et les États-Unis.

Le caractère antagonique sur le front commercial et industriel de la relation entre les États-Unis et la nouvelle Europe se confirme durant les années soixante-dix, en particulier à l'occasion du premier élargissement de la CEE et des accords commerciaux préférentiels signés entre la CEE et les pays membres de l'AELE, les pays méditerranéens et les anciennes colonies172. Bien que les craintes suscitées par ces accords soient d'une moindre intensité que celles suscitées par l'entrée en vigueur de la CEE, elles restent de même nature. Comme durant les années soixante, l'administration américaine met en œuvre une stratégie commerciale visant à convaincre les européens d'abaisser les barrières tarifaires que doivent

167 van der Pijl, 2006, p. 94.

168 Wilkins, 1996, p. 357.

169 Servan-Schreiber, 1967, p. 17.

170 Ibid, p. 68.

171 Ibid, pp. 74-88.

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franchir les exportations américaines pour entrer en Europe. Dans un premier temps173, en août 1971, l'administration fédérale adopte des mesures ad hoc, notamment une surcharge de 10% sur tous les produits devant s'acquitter de droits de douane pour entrer aux États-Unis, ce qui contrevient aussi bien à la lettre qu'à l'esprit des accords du GATT. Cette dernière mesure fait partie d'un ensemble de mesures destinées à enrayer le déclin économique relatif des États-Unis, l'autre mesure célèbre étant la suspension unilatérale de la convertibilité or du dollar, qui annonce la fin définitive du système monétaire international de Bretton Woods. Elle préfigure également une clause (la Section 301) comprise dans le Trade Act adopté en 1974 par le Congrès qui autorise le président américain de prendre des mesures de représailles contre des partenaires commerciaux considérés comme déloyaux. La Section 301 initie donc une réorientation de la politique commerciale américaine qui abandonne progressivement l'attachement strict au multilatéralisme promu par Washington à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Une dynamique de rivalité commerciale s'installe également alors entre États-Unis et Europe (et entre États-Unis et Japon) qui à partir des années quatre-vingt va alimenter un processus de régionalisation de l'économie mondiale ainsi qu'un processus de « libéralisation compétitive »174.

Les mesures ad hoc prises par l'administration américaine n'apportant pas de résultats (la CEE refuse de faire des concessions), les États-Unis initient en 1973 un nouveau round de négociations multilatérales, le Tokyo Round. Ces négociations sont conclues en 1979 de la même façon que les négociations précédentes, puisque les États-Unis sont amenés à faire des concessions plus importantes que la CEE pour obtenir un accord175.

2.1.2 Le front monétaire et financier de la rivalité atlantique

Malgré la conclusion du Kennedy Round en 1967, la diversion commerciale engendrée par la création de la CEE et la ruée des firmes américaines en Europe ont des conséquences importantes sur le système monétaire international. Plus généralement, c'est le déclin économique relatif des États-Unis qui remet en cause l'ordre international de Bretton Woods.

La puissance industrielle et commerciale des États-Unis décline rapidement durant les années soixante. La part américaine dans la production manufacturière des dix principaux pays industrialisés

173 Ibid, pp. 142-145.

174 Je traite ces questions dans le chapitre 2.

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passe de 61,9% en 1950 à 43,6% en 1970176. La part américaine des exportations mondiales passe, en à peine cinq ans, de 25% en 1964 à 10% en 1969177. En 1971, pour la première fois depuis 1893, les États-Unis enregistrent un déficit de leur balance commerciale178 en même temps que la guerre du Vietnam contribue à accroître le volume des transferts financiers vers l'étranger destinés à financer les engagements militaires américains. De surcroît, l'administration Johnson s'engage dans une série de programmes sociaux à partir de 1964 qui impliquent une politique fiscale expansionniste, rajoutant aux pressions qui affaiblissent le dollar. En effet, les administrations Kennedy et Johnson, soutenues par les dirigeants industriels du CED et contre l'avis des banquiers de Wall Street179, n'entendent pas mener une politique orthodoxe impliquant des hausses de taux d'intérêts et des réductions dans les dépenses publiques pour enrayer la spéculation contre le dollar qui s'installe dès le début des années soixante. Elles préfèrent avoir recours à des contrôles sur les mouvements des capitaux, ce qui les rapproche de la pratique dans les pays européens, Allemagne exceptée. Kennedy tente même d'imposer des contrôles sur les investissements étrangers des firmes industrielles mais doit reculer en 1962 face à l'opposition des industriels et du département du Commerce180.

Or, l'accumulation des dollars en dehors des États-Unis fragilise de plus en plus l'ordre monétaire international mis en place à Bretton Woods. Dès 1960, la valeur des dollars détenus à l'étranger dépasse pour la première fois celle des réserves américaines en or et en 1969, ces dollars repr ésentent près de deux fois la valeur des réserves en question, de sorte à ce que les États-Unis sont techniquement, selon les termes de l'accord de Bretton Woods, insolvables181. En effet, au taux de change dollar/or fixé à Bretton Woods (35 dollars l'once d'or), le Trésor américain ne serait pas en mesure de convertir toutes les réserves en dollars détenues à l'étranger si jamais les banques centrales détentrices en formulaient la demande. Une crise du dollar est dès lors déclenchée ; la première attaque spéculative contre le dollar a lieu dès octobre 1960182.

Les déséquilibres croissants de la balance des paiements américaine alimentent donc un deuxième front de rivalité transatlantique. Les gouvernements européens, en particulier le gouvernement français, perçoivent le refus des États-Unis de prendre des mesures d'ajustement pour enrayer la spéculation contre le dollar comme un comportement abusif qui leur permet d'exploiter le statut du dollar en tant que

176 Parboni, 1981, p. 8.

177 van der Pijl, 2006, pp. 95-96.

178 Dür, 2010, p. 144. Selon Dür, la comptabilité nationale américaine sous-estime le volume des importations. Il est possible que la balance commerciale américaine ait été déficitaire dès 1966.

179 Helleiner, 1994, pp. 84-87.

180 Ibid, p. 88.

181 van der Pijl, 2006, p. 95.

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principale monnaie de réserve internationale. Ils s'inquiètent aussi des pressions inflationnistes dans leurs propres économies qui en découlent183. Alors que les États-Unis réagissent en exigeant de la part de l'Allemagne une plus grande participation dans le financement de la présence militaire américaine sur son sol184, la France gaulliste réagit dès 1962185 en dénonçant le « privilège exorbitant » que constitue pour les États-Unis le fait d'émettre la principale monnaie de réserve internationale, et réclame une réforme du système monétaire international. De Gaulle va même jusqu'à inciter les pays de la CEE à convertir leurs réserves en dollars, mais n'est pas suivi.

Cette situation débouche en 1971 à la décision unilatérale de l'administration Nixon d'annuler la convertibilité or du dollar et de laisser celui-ci se déprécier. Comme le fait remarquer Geir Lundestad, « these measures signaled that the United States was paying much more attention to its more narrowly defined economic interests than it had done earlier »186. La fin de la convertibilité or ne fait en réalité qu'entériner la situation qui s'était développée durant les années soixante187, mais n'en constitue pas moins une affirmation de la détermination américaine d'exploiter au maximum le rôle du dollar en tant que monnaie de réserve internationale. De fait, la nouvelle situation qui émerge de fait est un système monétaire international organisé autour d'un étalon dollar.

Tout au long des années soixante-dix la politique monétaire internationale des États-Unis va être de laisser le dollar se déprécier et de refuser de prendre des mesures macroéconomiques restrictives. Ce « benign neglect » s'appuie sur deux éléments.

D'abord et tout simplement, c'est la découverte par l'administration américaine du degré auquel elle peut exploiter sans rien risquer son « privilège exorbitant » monétaire. En l'absence d'un autre actif financier capable de concurrencer le dollar en tant qu'instrument de réserve, celui-ci s'impose naturellement.

Le deuxième élément est le recours croissant aux marchés financiers internationaux. Suite à l'introduction des contrôles sur le mouvement des capitaux par l'administration Kennedy, les banquiers de Wall Street se tournent de plus en plus vers le marché des eurodollars. Ce marché se développe à Londres depuis que le gouvernement britannique, sous la pression des banquiers de la City, décide en 1962 de libéraliser entièrement les activités financières en monnaies étrangères188. Les banques de Wall Street délocalisent leurs activités internationales à Londres, où elles découvrent que celles-ci ne sont pas

183 Helleiner, 1994, p. 90.

184 Lundestad, 1997, p. 91.

185 Loriaux, 1991, pp. 184-189.

186 Lundestad, 1997, p. 98.

187 La conversion des dollars en or est suspendue dès 1968.

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soumises aux réglementations restrictives en vigueur dans leur marché domestique. L'administration Johnson encourage par ailleurs les firmes multinationales industrielles américaines à avoir recours à ce marché pour financer leurs investissements internationaux. Ainsi, « the influx of U.S. banks and multinational industrial corporations transformed the Eurodollar market from a short-term money market into a full-fledged international capital market serving needs that had previously been met by the New York market »189. En particulier, le marché des eurodollars, n'étant pas régulé, est très attractif pour les investisseurs privés. Cela permet à l'administration américaine d'y avoir recours pour fina ncer ses déficits externes croissants et d'ajourner la décision douloureuse d'ajuster son économie à travers des mesures macroéconomiques restrictives190. Ce recours au marché des eurodollars va encourager les États-Unis à modifier durant les années soixante-dix leur position concernant le système financier international et à adopter une attitude très libérale visant à encourager le développement des marchés financiers internationaux et la libéralisation des mouvements de capitaux, en effet revenant à leur position de 1945/7191. L'administration américaine considère dès lors la mise en place d'un ordre financier international libéralisé comme une source de puissance financière puisque « The dollar's position as a world currency […] would be preserved and reinforced […] because U.S. financial markets and the Eurodollar market would still be the most attractive international markets for private and public investors. […] The unique depth and liquidity of U.S. financial markets also ensured that private investors, if given

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