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La pertinence du concept de représentation pour comprendre les rôles dans l’entreprise

3. Processus et modélisation de la prise de rôle

Contrairement à un organisme biologique tel que le corps humain, auquel on compare parfois les organisations sociales, les entreprises ne sont pas constituées de « cellules » totalement prises dans leur rôle prédéfini naturellement. Allport a développé la notion d’inclusion partielle pour expliquer l’implication segmentée des individus dans les groupes qu’ils construisent219.

Il peut paraître difficile de ne s’engager que partiellement dans son rôle professionnel. Les entreprises recrutent le plus souvent en demandant un investissement maximal de l’individu dans son activité, afin que celle-ci soit génératrice de succès. Pourtant, les tensions de rôle que

216 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 186

217 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 190

218 KAHN R.L. et alii, 1964, in KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 192

nous venons d’évoquer sont issues d’affrontements entre le rôle que l’entreprise attend de ses acteurs et la personnalité de ces derniers, entre les contradictions que portent les injonctions managériales diverses, entre les souhaits individuels et les objectifs collectifs, etc.

La manière dont se conçoit le rôle finalement mis en œuvre permet vraisemblablement de faire la lumière sur de tels dysfonctionnements, tout en constituant le socle d’un modèle expliquant le « cycle de vie » du rôle organisationnel.

a. Le processus de prise de rôle.

Lorsqu’une organisation souhaite définir et communiquer son rôle à l’un de ses membres, elle entre dans un « processus cyclique continu par lequel chaque personne est socialisée

dans un rôle organisationnel, informée de l’acceptabilité de son comportement de rôle, et corrigée si nécessaire220. » On s’extrait volontairement d’un lien simpliste émetteur-récepteur

de rôle, pour prendre en compte un feedback permanent entre les protagonistes. Il n’y a pas symbiose, au sens biologique, au sein de l’organisation, étant donné que les comportements individuels et groupaux ne sont pas motivés par un résultat physiologique immédiat ni par l’instinct. Il se développe tout un processus d’apprentissage des attentes des autres, d’acceptation de ces attentes et de réponse comportementale. Plusieurs phases doivent être distinguées.

(1) La phase de transmission du rôle.

Un ensemble de rôle est constitué pour tout rôle organisationnel. Cet ensemble regroupe les personnes qui ont, peu ou prou, une influence sur la définition a priori du rôle de l’individu concerné. Il ne s’agit pas particulièrement d’un groupe défini de manière formelle, mais d’un « cercle » de personnes ayant un poids sur la personne détentrice du rôle. Katz et Kahn les nomment les émetteurs de rôle (role senders)221.

Comment procèdent-ils pour émettre ou transmettre un rôle a priori à une personne donnée ? Au préalable, chacun de ces émetteurs de rôle perçoit la performance souhaitable du rôle à sa façon, selon des critères personnels. Il en attend des conséquences de diverse nature, et jugera de la bonne tenue du rôle en fonction de l’obtention de ces conséquences. Autrement dit, chaque émetteur de rôle construit des représentations de ce que doit être le rôle en question, qui sont des attentes de rôle222. Elles comprennent des préférences en termes de comportements, de manière d’agir, de résultats atteints, de caractéristiques personnelles

220 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 172

221 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 175

développées. Elles ne se restreignent pas à la description du travail concerné, tel que le décrit formellement l’organisation, mais sont plus générales. Elles peuvent par exemple inclure les récompenses que pourrait obtenir le détenteur du rôle, sous forme de progression sociale, de développement personnel, etc.

De telles attentes de rôle sont communiquées de plusieurs façons. Il peut s’agir d’instructions formelles, telles qu’une définition de poste, de discussions entre plusieurs personnes, avec des collègues par exemple, etc. Il peut aussi s’agir d’actes de communication plus variés, et qui ne sont pas de type informationnel. Cela peut être par voie d’influence comportementale, d’exemplarité dans les gestes, etc.

En fait, les modes de transmission du rôle envisagé et des attentes qui lui sont attachées varient à l’aune de critères qui permettent la mesure de la communication et de l’influence, d’une manière générale : on peut mesurer le signe (prescription ou prohibition), la magnitude (ou force d’influence), la spécificité (concret ou abstrait, global ou détaillé) ou encore

l’intensité (liberté de choix ou rigidité imposée à la personne cible).

Pour Katz et Kahn, l’un des points cruciaux du processus est que, par delà le mode ou le canal de communication, les activités définies par un rôle émis soient effectivement soutenues par les attentes des émetteurs, qui en sont donc la source. Seules les attentes effectivement communiquées à la personne visée constituent le rôle émis (sent role)223.

(2) La phase de réception du rôle.

Dans un second temps, il semble que l’individu concerné, nommé la personne focale, prenne en compte ces attentes émises sous forme de rôle à condition qu’elles soient exprimées clairement. Cela signifie qu’elles doivent être transmises sous forme de comportements à adopter, et non en terme d’injonctions visant les idées ou les cognitions224. Formulé de manière simple, on pourrait dire que « agissez comme ceci » l’emporte sur « pensez comme cela ». De plus, l’expression de l’attente doit être continue et persistante, de manière à susciter un processus d’apprentissage pour être admise et se matérialiser en actes.

Intervient également la notion de légitimité dont est porteur l’émetteur de rôle. La personne focale peut plus ou moins accepter que soit émettrice de son rôle telle ou telle personne. Elle peut ainsi l’admettre d’évidence de la part de son hiérarchique, mais ne pas accepter qu’un collègue lui prodigue des conseils sur la manière de réaliser ses tâches. La légitimité est l’une des sources substantielles de la capacité de commandement d’un individu : « la force de

223 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 175, d’après les travaux de ROMMETVEIT R., Social Norms and Roles, University of Minnesota Press, Minneapolis, 1955

l’émission du rôle avec les possibilités de sanctions sont une base majeure pour obtenir l’accomplissement des attentes d’une organisation formelle225. »

Cela signifie que si les attentes exprimées au travers du rôle émis sont perçues comme illégitimes ou trop coercitives, elles peuvent engendrer de fortes résistances, en lieu et place de l’accord tacite du salarié. Les résultats seront différents voire opposés à ceux souhaités par l’organisation226. Répété sur de nombreuses personnes un grand nombre de fois, un tel processus est à l’origine de nombreux comportements non souhaités par elle, mais qui n’en sont pas moins persistants, et considérés parfois comme acquis, au même titre que des usages ou des règles informelles.

Sur un autre plan, la perception par la personne focale du rôle émis est soumise à plusieurs facteurs : les caractéristiques objectives de la situation au moment de la réception, la nature des tâches à accomplir, l’expérience acquise par l’individu, etc. En effet, une personne expérimentée peut par exemple « importer » ses pratiques d’une organisation à l’autre ; cela peut être un biais, cela peut aussi rendre opérationnel plus rapidement le salarié en question.

Doivent également être pris en compte le processus de socialisation inhérent à l’organisation, la nature de l’organisation, les conditions de son appartenance, ainsi que le « bagage cognitif » de l’individu (formation, culture, etc.), ou encore l’ensemble des valeurs et des attentes qu’il a accumulé. Un individu a une représentation de lui-même en tant que personne et en tant que professionnel. Il est donc naturellement enclin à agir dans un sens qui nourrit cette identité bipolaire, voire multipolaire. Pour ce faire, il s’inscrit dans un parcours professionnel, accepte un poste en fonction du fait qu’il pense être à même d’en tenir le rôle efficacement, et en fonction du potentiel perçu du poste à répondre à ses attentes. Il est alors prêt à accepter l’autorité légitime, à répondre à ses attentes, quand bien même d’autres personnes ne comprendraient pas l’intérêt ou la nature de ses actes, au regard de leurs propres valeurs. Les célèbres expériences de Milgram (1963), montrant la soumission de volontaires aux injonctions données par un scientifique d’administrer des chocs électriques à d’autres personnes, en est une parfaite illustration227.

b. Le modèle épisodique de rôle.

Finalement, les deux auteurs rassemblent les concepts qu’ils ont décrits en un modèle qualifié d’épisodique, en ce sens qu’il se renouvelle régulièrement, et qu’il convient de le considérer à un moment donné, dans le « cycle de vie » du rôle. Il se présente ainsi :

225 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 176

226 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 178

Figure 1.08. Le modèle épisodique de rôle de Katz et Kahn (1966, p. 182).

Dans ce modèle, l’ensemble constitué des émetteurs de rôle se bâtit une série d’attentes de

rôle, autant de standards d’évaluation appliqués au comportement de la personne focale quant

au rôle qui lui est destiné. Ces attentes correspondent à un rôle finalement émis, mais perçu sous une autre forme éventuelle par la personne cible, ce que les auteurs nomment le rôle

reçu, et qui inclut les émissions de rôle de la personne envers elle-même. Enfin, elle retraduit

en comportements cet ensemble complexe d’informations.

Il s’agit d’une « séquence ou d’un épisode de rôle » complet. Les concepts notés « I » et « II » dépendent des cognitions, motivations et comportements des émetteurs de rôle ; les deux suivants dépendent de la personne focale. On constate également la symétrie entre les phases complémentaires de cognition (« I » et « III ») et de comportement (« II » et « IV ») des deux parties en présence : « les phases I et III représentent des processus de perception,

de cognition et de motivation, des processus internes à la personnes », tandis que « les phases

II et IV représentent des actes et des comportements » consécutifs aux phases I et III, respectivement228.

La flèche « 2 » représente, quant à elle, « le processus par lequel l’émetteur de rôle (a)

estime le degré d’adéquation qu’il a apparemment induit de la part de la personne focale, et (b) se prépare à initier un autre cycle229. » Il s’agit donc d’un feedback concernant la

conformité du rôle réalisé par rapport aux attentes exprimées, à un moment donné, et qui peuvent affecter lesdites attentes par la suite.

228 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 182

229 KATZ D., KAHN R.L., op. cit., 1966, p. 183

Émetteurs de rôle Attentes Perception du comportement de la personne focale ; évaluation Rôle émis Information ; tentatives d’influence Personne focale Rôle reçu Perception du rôle, et perception de l’émission du rôle Comportement de rôle Conformité ; résistance ; "effets colatéraux" 1 I II III IV 2

Daniel Katz et Robert L. Kahn tiennent, à propos de leur modèle, à préciser plusieurs points importants à leurs yeux. Tout d’abord, leur modélisation ne représente qu’une abstraction réductrice de processus plus complexes et récurrents qu’ils n’apparaissent ici. Le traitement des attentes de rôle est également simplifié : il n’existe pas dans les faits un émetteur ni un ensemble homogène d’émetteurs, cohérent dans leurs attentes, dans leur capacités d’influence ni dans leur expression. Enfin, on exclut les effets du contexte organisationnel, qui affecte nécessairement l’émission comme la perception des rôles.

Ceci justifie qu’ils ajoutent par la suite trois catégories de facteurs d’influence :

‰ Les facteurs organisationnels : ils agissent sur les attentes de rôle. Ils comprennent la technologie, la structure, la politique de l’entreprise, le système de récompense, etc.

‰ Les facteurs personnels : il s’agit, pour eux, de la propension des individus, à se comporter de différentes manières. Certains traits de personnalité facilitent ou bloquent l’évaluation et les comportements des émetteurs de rôle, d’une part, tandis que les perceptions du rôle sont affectées par ces mêmes caractéristiques, d’autre part.

‰ Les facteurs interpersonnels : la qualité de la relation entre les émetteurs et le récepteur du rôle entre en ligne de compte, tant pour influencer le rôle émis que le rôle perçu. En retour, le comportement de rôle joue sur les relations entre les deux parties.

Figure 1.09. Le modèle théorique des facteurs impliqués dans la prise de rôles organisationnels (Katz D. et Kahn R.L., 1966, p. 187).

Émetteurs de rôle

Attentes Rôle émis

Personne focale

Rôle reçu Comportement de rôle 1 3 2 Facteurs organisationnels A Attributs personnels B Facteurs interpersonnels C 6 9 4 8

Dans cette version dynamique du modèle présenté dans la figure précédente, on voit l’influence des facteurs cités ci-dessus. Ils ne représentent pas, selon les auteurs, des événements momentanés, mais des états stables dans le temps, du point de vue de l’individu, de l’organisation, et des relations interpersonnelles. Cette stabilité, soulignent-ils, permet de traiter de tels facteurs indépendamment des personnes constituant l’ensemble émetteur de rôle. Le rôle émis influence le rôle perçu (flèche 1), et le comportement de rôle influence, par une sorte de réaction, les attentes des émetteurs de rôle pour le cycle suivant (flèche 2). Les facteurs organisationnels influent eux-mêmes sur les attentes des émetteurs de rôle, ce que peut modifier le comportement de rôle (flèche 3). Les attributs personnels (flêche 4) ou les facteurs interpersonnels (flèche 6) peuvent agir sur les perceptions des émetteurs de rôle, tandis que le comportement de rôle de la personne focale peut influer sur les attributs personnels ou les facteurs interpersonnels (flèches 8 et 9).

En s’appuyant sur leurs propres travaux et sur les contributions plus anciennes d’autres chercheurs, Daniel Katz et Robert L. Kahn ont pu concevoir un modèle de rôle qui fait encore référence en la matière. Il permet de mieux comprendre comment un rôle organisationnel peut être conçu puis attribué à une personne, ou à un ensemble homogène de professionnels au sein d’une entreprise par exemple. Il met en évidence la prise de rôle par la personne cible, aboutissant à la réalisation d’un ensemble de tâches et de comportements liés au rôle attribué. Il conduit également à tenir compte de différents facteurs susceptibles de modifier les différentes représentations du rôle en question.

L’intérêt du modèle consiste en ce qu’il dessine en quelques traits le canevas des rôles détenus par les uns et les autres dans un système social complexe, comme l’est une entreprise. Les influences réciproques des individus et des groupes, vus comme des sous-systèmes plus ou moins formels, apparaissent alors. Néanmoins, bien qu’elle l’annonce, cette vision de la conception et de la prise de rôle met peu en valeur la capacité des individus à agir sur leur rôle et sur son évolution.

Or, c’est l’apport que peut avoir le concept de représentation sociale que de poser sur cette lecture une interprétation complémentaire à celle-ci. D’une part, une organisation définit des rôles par rapport aux attentes qu’elle exprime, ce qui se traduit par certaines représentations a

priori des rôles à exercer.

D’autre part, les acteurs organisationnels développent une certaine idée du rôle qu’ils veulent et/ou doivent tenir. Sachant cela, il nous paraît dès lors cohérent de voir en quoi ces deux types d’approches différentes peuvent se confronter ou se compléter, dans la vie quotidienne de l’entreprise.

B. Différentes représentations d’un rôle dans l’entreprise.

Une entreprise n’est pas une construction sociale comme les autres. Elle a mis en place une structure hiérarchique et fonctionnelle spécifique, dont l’étude occupe tout un pan des sciences de gestion. Tel n’est pas notre but. En revanche, nous pouvons dire que, si dans un groupe démocratique il peut se manifester une coalition des membres pour définir les rôles de chacun de façon stable, l’entreprise fonctionne souvent d’une autre manière : les dirigeants définissent les rôles et se font forts de les faire accepter par les salariés de l’entreprise.

Elle est une organisation hiérarchisée et structurée comme telle. Elle met en place un système dominant de statuts et de positions hiérarchiques, et un système de rôles qui lui est soumis. C’est l’occasion ici de voir ce qu’entend l’entreprise par le terme de rôle, l’importance qu’elle peut lui attacher, et le poids que peut avoir chaque acteur dans la conception de son propre rôle ou de celui des autres.

I. Les rôles vus par les dirigeants de l’entreprise : une représentation de l’excellence.

L’interprétation tayloriste ou mécaniste de l’organisation montre la structure de l’entreprise comme un système hiérarchique et fonctionnel de statuts, assimilables dans ce cas aux rôles prescrits à chacun, du fait de la nature rationnelle du système. Dépassant cette vision dans laquelle les salariés n’ont pas d’interactions imprévues entre eux, les théories de type structuro-fonctionnaliste reprennent néanmoins l’idée d’une intégration normative de l’action, au sein d’un système de rôles prédéfinis par les dirigeants de l’organisation. La théorie des rôles suit cette approche, en cadrant la pratique de tout acteur de l’entreprise dans des normes de valeurs et de comportements. Ces normes façonnent le rôle individuel en s’appuyant sur les attentes des partenaires et sur les valeurs intégratives de l’organisation.

Une certaine culture de l’excellence, diffusée largement par la littérature managériale des années 80-90, a eu une influence déterminante sur les managers et les entreprises en général, et sur la fonction commerciale en particulier. Elle montre assez bien tout ce que l’entreprise peut attendre de ceux qui acceptent d’assumer les rôles qu’elle a définis.

Les injonctions orales ou écrites qui s’appuient sur cette culture ont permis de définir dans un certain nombre de cas ce qui serait « un excellent cadre, (…) un professionnel du

management230. » Il ne s’agit pas seulement de descriptions formelles des tâches qui

fonderaient les rôles des salariés. Ces injonctions sont des formes de pressions socioprofessionnelles. Elles constituent une source importante de légitimité pour l’acteur et pour son identité professionnelle, comme pour son rôle organisationnel. Mais ces démarches plus normatives que prescriptives ne sont pas fondées scientifiquement.

Pour les illustrer, une entreprise dans la grande distribution décrit ainsi ce que doit être un

« bon professionnel » : « Pour être reconnu comme professionnel, il est nécessaire de développer une haute qualité de travail, savoir employer des compétences multiples et hétérogènes, atteindre les objectifs tout en "exprimant des qualités esthétiques" (contrôle de soi, gestes spontanés et naturels, etc.), ce qui le différencie de l’agent ordinaire231. »

On voit dans cette injonction écrite diffusée au sein d’un grand groupe de services que le rôle attendu par la hiérarchie s’exprime bien par :

‰ des tâches réalisées de façon calibrée,

‰ des comportements plus ou moins normés,

‰ des compétences très larges.

Le modèle de rôle professionnel est devenu dans les années 80 un idéal-type de comportement de l’acteur professionnel232. Il s’appuie sur des schémas socio-cognitifs qui délimitent les décisions que les acteurs peuvent prendre au quotidien de façon optimale. Ces schémas sont à l’origine d’un certain nombre d’heuristiques. Ces démarches mentales, synthétiques et habituelles, commandent les décisions et les comportements du professionnel expérimenté. Mais le degré de liberté qui lui reste est extrêmement réduit, même si l’on met en cause la rationalité limitée dudit acteur, qui le contraindrait dans la construction de schémas nouveaux et complexes233.

Selon V. Degot, un personnage de fiction personnifie ce rôle idéal de manager, à la fois dilettante et expert talentueux, bardé de connaissances tout autant que d’expérience au plus haut niveau : le héros de roman et de cinéma James Bond. L’image que le public en a cristallise toutes les qualités et capacités que l’on pourrait souhaiter posséder en tant que professionnel. Il est l’archétype d’un tel rôle : il sait constamment décider et « agir dans un

espace de multi-finalités » face à un environnement des plus turbulents, qu’il affronte avec

231 D’après DEGOT V., op. cit., 1990

232 DEGOT V., op. cit., 1990

des formes de réponses prescrites, sans subir aucune des tensions de rôles diverses sous