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Le processus de construction identitaire de l’enfant immigrant – le besoin

2. LE CONTEXTE SOCIOSCOLAIRE

2.1. Le processus de construction identitaire de l’enfant immigrant – le besoin

Sans devoir passer directement par une conceptualisation de la construction identitaire, le recours aux recherches indique clairement différentes difficultés et adaptations douloureuses des nouveaux arrivants. Ainsi peut-on arriver à parler de difficultés d’acculturation accompagnées du processus migratoire, ou même de crises identitaires des individus (Roy, Legault et Rachédi, 2000). Ces aspects seront conceptualisés dans le deuxième chapitre. Afin de garantir une bonne compréhension du lecteur, quelques précisions s’imposent pourtant dès maintenant.

Ainsi, le psychologue Jean-Claude Métraux (2011) décrit l’enfant immigrant comme pris entre deux mondes, celui de sa culture d’origine (implicitement, celui de la socialisation primaire par ses parents) et celui de la socialisation par la société d’accueil et l’institution de l’école. Cette tension de l’individu a aussi été exploitée à travers un grand nombre de recherches à travers le monde que nous documenterons dans cette section.

Partagé entre son milieu d’appartenance d’origine et la société d’accueil, l’immigrant peut faire face à des chocs culturels et des crises identitaires, éléments donnant notamment naissance à une remise en question et au développement de stratégies identitaires. Des recherches, notamment les travaux de Berry (1997) et de Camilleri (1989; 1990 ; Camilleri et Malewska-Peyre, 1997), ont conceptualisé des difficultés vécues durant leur intégration dans de nouveaux environnements. La dénomination des résultats de recherches décrivant de telles stratégies identitaires selon le contexte nous semble ici pourtant moins pertinente. Comme nous nous intéressons dans ce mémoire à la socialisation par l’environnement-école, nous retirerons plutôt ici que la distinction des différentes stratégies se fait suite à un processus identitaire d’appartenance et de différenciation par l’individu et par rapport à son environnement. Par la suite, l’apparition de crises identitaires et le recours à des stratégies respectives dépendent de l’accueil du nouvel arrivant, des degrés de sentiments d’appartenance et des possibilités de pouvoir se distinguer. L’humain, tout en cherchant à se différencier, a besoin d’un groupe où il se sent chez lui (Gohier 1993, p.28).

Un projet d’immigration amenant à un processus de remise en question des valeurs peut ainsi s’occuper de tensions identitaires douloureuses. Phinney et ses collaborateurs (Phinney, 1996 ; Phinney, Ferguson et Tate, 1997; Roberts, Phinney, Masse, Chen, Roberts et Romero, 1999) parlent d’un questionnement du jeune immigrant sur son identité ethnique et qui influencera encore fortement l’estime de soi: « once ethnic identity is achieved, minority youth

tend to enjoy higher self-esteem, better relations with parents and peers and more positive views of their own and other ethnicities » (Phinney, 1996, p. 187). Selon la recherche de Phinney,

Horenczyk, Liebkind et Vedder (2001), un contexte de développement d’une forte identité ethnique, en congruence avec une forte présence d’une identité nationale (c’est-à-dire de la société d’accueil) serait le plus propice pour faire face à une adaptation de l’individu immigrant et qui ne menacerait pas son bien-être.

Ainsi, l’environnement est un élément-clé quant à la qualité d’intégration du nouvel arrivant. Des difficultés d’acculturation et crises identitaires surgissent avant tout suite à la rencontre des nouvelles coutumes, normes et valeurs3 et dépendamment de l’environnement en provoquant des sentiments d’appartenance et de différenciation. Comme l’ont documenté un grand nombre de recherches, l’école et la société d’accueil constituent des agents de socialisation principaux et la place qui y est accordée pour l’individu influencera par la suite les sentiments de l’élève nouvellement arrivé.

De plus, en faisant recours à des méthodes quantitatives ou qualitatives, un grand nombre de travaux psychologiques, notamment ceux de Phinney et de ses collaborateurs (Ibid.; Phinney, 1996; Phinney et al., 1997; Roberts et al., 1999) et ceux de Camilleri (Camilleri, 1989 ; 1990 ; Camilleri et Malewska-Peyre, 1997), cherchent à mieux connaître la construction identitaire de l’immigrant. Ils s’intéressent au bien-être du jeune face à son environnement et par conséquent, ses choix d’action et de réaction face à une confrontation à un nouveau milieu social.

3 De manière générale, nous définissons une norme comme une attente d’un comportement social généralisé (Habermas, 1981a, p. 127). Celle-ci est ainsi le critère de différentes valeurs culturelles et sociales (Ibid., p. 133), attitudes fondamentales qui influencent de manière explicite ou implicite les attitudes et comportements face à une action. Les règles, quant à eux, se réfèrent à l’explicitation intersubjective d’une position à suivre quant au respect d’une valeur et norme. Selon Habermas, qui part des théories de Wittgenstein (Ibid., 1981b, p.34), agir face à une règle signifie prendre position par ‘oui’ ou ‘non’ face à un comportement guidé par une règle.

En effet, un grand nombre de recherches se sont penchées sur l’environnement scolaire dans lequel vit l’élève immigrant, et ceci avant tout à partir d’entrevues ou de questionnaires. Ceux-ci ont servi à mieux connaître les besoins et le bien-être de différents agents dans un environnement particulier, tel que l’école dans la recherche de Steinbach (2010a; 2010b).

Il semble donc y avoir un grand intérêt au sein de la communauté scientifique pour une problématique de l’intégration des jeunes immigrants. Ces recherches s’intéressant au vécu des élèves immigrants, à leurs besoins et défis d’intégration, une grande importance d’action a été accordée à la société d’accueil et aux institutions, ce que les différentes recommandations et débats politiques avaient déjà annoncé préalablement. L’importance particulière accordée à l’école nous amène maintenant à poser un regard plus poussé sur les recherches à propos de cette institution, en constatant que le vécu d’adaptation et d’intégration y prend une place majeure.