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Le but de cette première phase de la recherche est d’identifier quels facteurs influencent les attitudes des enseignants envers l’intégration scolaire d’élèves en classes ordinaires du niveau primaire et comment leurs attitudes varient en fonction de ces facteurs. Le plan de recherche ne contient qu’un seul temps de mesure, mais teste deux hypothèses (voir section 7.1). Bien que des analyses statistiques distinctes doivent être menées pour vérifier chacune des hypothèses, l’idée principale commune aux deux hypothèses est d’analyser un modèle qui explique au mieux la variation de la variable dépendante (VD), sachant que toute sa variation ne peut être expliquée (Méot & Bonin, 2005, p. 669). La première hypothèse (H1) cherche à vérifier si les attitudes des enseignants varient en fonction de la nature des besoins éducatifs particuliers des élèves intégrés. La variable dépendante (VD) est constituée à partir des scores moyens aux différentes dimensions de l’échelle ATIES. Cette hypothèse requérant un test intrasujet, il a été décidé de mener une analyse de variance à mesures répétées. Habituellement utilisé lorsque des sujets sont évalués à partir de la même échelle à trois occasions ou plus, soit lorsque le plan de recherche contient différents temps de mesure, ce test peut également être employé pour comparer les réponses des participants à plusieurs questions ou items différents, pour autant que ces questions soient mesurées en utilisant la même échelle de réponse (Pallant, 2010, pp. 258-259). Dans cette étude, les moyennes obtenues aux différentes dimensions de l’échelle ATIES déterminées par les analyses factorielles (voir sections 7.2.4.7 et 7.2.4.8) sont donc comparées. Cette technique permet de déceler s’il existe des différences significatives entre les scores moyens aux quatre dimensions de l’échelle ATIES, soit entre les attitudes des enseignants vis-à-vis de l’intégration scolaire selon la nature des besoins éducatifs particuliers des élèves intégrés.

La seconde hypothèse de recherche (H2) présuppose que les attitudes des enseignants envers l’intégration scolaire sont influencées par certaines caractéristiques des enseignants. Elle cherche donc à vérifier les effets de différentes variables sur un critère (les attitudes) et exige un test intersujet. Dans ce cas, l’analyse de régression linéaire multiple (RLM) a été retenue (Field, 2009 ; Méot & Bonin, 2005). L’analyse de régression linéaire multiple est en effet privilégiée lorsque les variables explicatives (ou prédicteurs) sont continues ou dichotomiques, fortement corrélées avec la variable dépendante, mais sans être corrélées trop fortement entre elles (multicolinéarité) (Field, 2009 ; Méot & Bonin, 2005 ; Tabachnick & Fidell, 2007). Dans cette étude, deux variables sont mesurées au niveau continu (expérience de l’intégration, nombre d’années de pratique de l’enseignement). Toutefois, l’expérience de l’intégration sera dichotomisée afin de vérifier si l’expérience ou non de l’intégration scolaire influence les attitudes des enseignants et non pas si leurs attitudes varient en fonction du nombre d’années d’expérience de l’intégration scolaire. En effet, les enseignants interrogés n’ont qu’en moyenne 2.75 (francophones) ou 3 années (germanophones) d’expérience de l’intégration et rares sont les enseignants qui ont expérimenté l’intégration scolaire durant de nombreuses années :

pour rappel, le mode est équivalent à zéro chez les francophones et à 2 chez les germanophones (voir section 7.4.1). La variable sentiment de compétence perçu, mesurée sur le niveau ordinal (5 niveaux), sera traitée comme une variable continue (Davison & Sharma, 1990). Ensuite, les variables catégorielles mesurant la formation continue et l’expérience du contact (fréquence) ont été catégorisées de manière à être dichotomiques : avec ou sans formation continue dans le domaine du handicap et/ou de l’intégration scolaire, avec ou sans expérience du contact avec des personnes en situation de handicap.

En RLM comme en analyse de variance, plusieurs erreurs sont à éviter. Les solutions de régression étant extrêmement sensibles aux combinaisons de variables qu’elles incluent, ces erreurs sont essentiellement liées aux questions de spécification du modèle (Field, 2009 ; Tabachnick & Fidell, 2007). La première erreur est en lien avec le manque de variables explicatives incluses dans le modèle. En effet, si des variables explicatives importantes, ayant un effet potentiel sur la VD, ont été oubliées, « les estimations des divers coefficients sont biaisées et manquent donc de validité » (Méot & Bonin, 2005, p. 678). Pour s’en prémunir, il s’agit de vérifier le R2 du modèle à l’issue des analyses pour chaque échantillon. Si ce dernier est trop faible, il s’agira d’interroger l’absence de certaines variables explicatives dont l’importance a été sous-estimée.

La seconde erreur réside, au contraire, dans l’intégration d’un nombre trop important de variables explicatives dans le modèle, dont certaines n’ont pas d’effet sur la VD. En effet, cela peut mener à « un manque de précision des estimations pour les VI qui ont un intérêt véritable dans la problématique considérée » (Méot & Bonin, 2005, p. 678). Pour cette raison, l’option s’est portée sur une analyse de régression progressive, avec la méthode descendante (backward). Cela permet d’obtenir un compte rendu des effets le plus précis possible. Le second avantage lié à l’élimination des variables explicatives non significatives est que cela contribue à résoudre le problème de la présence de multicolinéarités entre les variables explicatives (Méot & Bonin, 2005).

La troisième erreur serait d’inclure dans le modèle de régression des prédicteurs corrélés avec des variables externes (Field, 2009). Les variables externes sont des variables qui n’ont pas été incluses dans le modèle de régression, mais qui influencent la variable dépendante. Il s’agit donc de vérifier qu’aucune variable externe n’est corrélée avec aucune variable incluse dans le modèle et d’insérer toutes les variables d’influence.

Afin de prévenir ces trois types d’erreurs liées à la spécification des modèles de régression, une importance particulière a été portée au choix des variables indépendantes à inclure dans l’analyse (Tabachnick & Fidell, 2007, p. 122). Pour ce faire, des analyses descriptives corrélationnelles ont été menées au préalable des analyses de régression afin de sélectionner avec parcimonie les variables à

insérer dans les modèles. Si cela n’est pas nécessaire pour les variables théoriques70 faisant consensus dans la littérature (Fortin, 2010), cela est particulièrement important pour les trois variables pour lesquelles les résultats de recherche sont inconsistants : le nombre d’années de pratique de l’enseignement, le degré d’enseignement et le sexe de l’enseignant.

Outre l’attention accordée à la spécification des modèles de RLM, les hypothèses fondamentales aux modèles de régression seront également examinées, afin de vérifier que les estimations obtenues possèdent de bonnes qualités et peuvent être généralisées à la population cible (Field, 2009 ; Méot & Bonin, 2005 ; Tabachnick & Fidell, 2007) :

l’absence de multicolinéarité entre les variables explicatives (r < .9 et statistiques de colinéarité : tolérance et facteur d’inflation de la variance [VIF]) ;

 l’indépendance des résidus (absence de corrélation) à l’aide du test de Dubin-Watson (valeurs équivalentes ou proches de 2, mais pas plus petites que 1 ou plus grandes que 3) ;

 la distribution normale des résidus (moyenne équivalente ou proche de zéro) ;  la linéarité (nuage de points non courbe) ;

 l’homoscédasticité (homogénéité ou égalité des variances des résidus).

Enfin, des analyses des résidus seront également menées, afin d’identifier de potentielles valeurs extrêmes dans les observations, celles-ci étant reconnues comme pouvant influencer fortement les résultats des analyses de régression (Tabachnick & Fidell, 2007).

Cette section a présenté les processus de décision ayant mené au choix des tests statistiques permettant de vérifier les hypothèses de recherche. En résumé, il a été décidé, pour la première hypothèse, de mener une analyse de variance à mesures répétées et, pour la seconde hypothèse, une analyse de régression multiple. Les conditions exigées par ces tests paramétriques71 (distribution normale, homogénéité des variances) ont été contrôlées systématiquement (Eagly & Chaiken, 1993) et corrigées lorsque cela était nécessaire. Les résultats de ces tests sont présentés dans la section suivante.

70Ces variables sont : le sentiment de compétence perçu à enseigner à des élèves avec des besoins éducatifs particuliers,

l’expérience de l’intégration scolaire, la formation continue dans le domaine du handicap et/ou de l’intégration scolaire et l’expérience du contact avec des personnes en situation de handicap en dehors du contexte professionnel.

71En se basant sur les résultats de Davison et Sharma (1990), Eagly et Chaiken (1993) notent que des tests paramétriques

peuvent être employés pour autant que la variable dépendante soit mesurée sur un niveau ordinal continu qui augmente de manière monotone, ce qui est le cas des échelles de mesure de type Likert de l’ORI et de l’ATIES, ainsi que celle mesurant le sentiment de compétence perçu (variable indépendante).