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LA NATURE DE L’ÉPISTÉMOLOGIE TRADITIONNELLE

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1.3.3 LE PROBLÈME DE L’ONTOLOGIE DANS LA NATURE DE l’ÉPISTÉMOLOGIE TRADITIONNELLE

1.3.3.1 L’investigation épistémologique traditionnelle et son improbable ontologie.

Traditionnellement, l’ontologie est considérée comme la science formelle de déterminations abstraites de l’être en général. Elle se révèle une science ou un savoir « de ce

qui est » tout autant qu’une science ou un savoir de « qu’est-ce qui est ». En ce sens, l’ontologie est à la fois une science de l’existant et une science de l’essence. L’ontologie en philosophie est ainsi la partie de la métaphysique qui se consacre à la connaissance de la réalité, c’est-à-dire aux propriétés d’être réel. L’ontologie est ainsi l’un des objets privilégiés de la connaissance de notre connaissance et de l’épistémologie en tant qu’elle doit légiférer sur la valeur ou non du réalisme. Par ailleurs, si l’objet de l’ontologie est identifié traditionnellement au concept aristotélicien de "l’être en tant qu’être" présenté dans la

Métaphysique, le terme quant à lui n’apparaît qu’au XVIIe siècle dans le Lexicon

Philosophicum de Rudolf Göckel53.

Au cours du XXe siècle, la définition de l’ontologie se modifie sous l’influence de la théorie générale de l’objet développé par Meinong, puis avec Quine qui la définit comme la classification des entités primitives d’une théorie au moyen de critères logiques d’engagement ontologique. Quine déploie ainsi une conception de l’ontologie qui cherche à décrire l’ultime structure de la réalité, en des termes combinant une approche physicaliste dont l’objet est la constitution de la matière et une approche naturaliste dont l’objet est le comportement des organismes et une méthode emprunte aux sciences de la vie54. De ce fait, la philosophie de Quine est en partie analogue à l’activité de la science. La conception d’une épistémologie naturelle conduit à une naturalisation de l’épistémologie qui est à la fois empirique et scientifique, car elle se fonde sur une certaine évidence des sens pour affirmer ce qui existe et produire des théories à l’instar des sciences de la nature55. C’est pourquoi on peut parler dans la philosophie de Quine d’un projet de naturalisation de l’épistémologie. Malgré sa critique

53 Frédéric Nef, Traité d’ontologie pour les non philosophes (et les philosophes), Paris, Folio Gallimard, 2009, p. 20 Voir également, Achille C. Varzi, Ontologie, Paris, Éditions Ithaque, 2010, p. 30

54 W.V.O. Quine, Le mot et la chose, trad. franç. J. Dopp & P. Gochet, Paris, Champs Flammarion, 1999, p. 307. 55 Joseph Vidal-Rosset, « Pour introduire à la lecture de Quine », Lire Quine. Logique et ontologie, Éditions de l’éclat, 2006.

145 des deux dogmes de l’empirisme contemporain56, Quine prétend que la réalité des entités postulées dans les théories de la connaissance, afin de rendre compte de l’expérience est réductible aux données sensorielles, constitue les données de l’expérience comme l’expérience d’un donné. Selon Quine, ce donné fonde notre faculté d’organiser la connaissance au moyen du schème conceptuel. Notre connaissance des objets résulte ainsi d’inférences produites à partir de ce donné et l’ontologie peut être relative au cadre théorique qui la supporte et organise la connaissance57. Pour Quine, nous pouvons adopter une ontologie comme nous acceptons une théorie scientifique qui présente le schème conceptuel le plus simplifié afin d’intégrer et d’organiser les fragments désordonnés de l’expérience brute58. Ceci le conduit à affirmer l’idée selon laquelle les objets physiques sont des entités postulées, produit d’un réductionnisme qui se propose de rendre compte de manière simplifiée du flux de l’expérience59.

Contemporain de Quine, Clarke se confronte lors de son étude de la nature de l’épistémologie traditionnelle à une définition générale de l’ontologie comprise comme la science ou le savoir qui permet d’appréhender la réalité de la réalité, et ce, de la manière la plus abstraite et la plus générale. Plus précisément, Clarke se confronte non pas à une « une

ontologie visant à la description unique des traits les plus généraux du réel, mais plutôt [à] un

ensemble de réflexions et d’analyses visant à construire des représentations du réel relatives à nos manières de l’appréhender »60. Pour ces raisons, Clarke interroge les présupposés ontologiques des épistémologues traditionnels. En particulier, les présupposés de leurs discours sur le réel et par voie de conséquence ce qui légitime ces philosophes à faire usage de tels ou tels concepts, comme par exemple celui de sense data. Ceci conduit Clarke à analyser pourquoi les ambitions épistémologiques des philosophes traditionnels reposent apparemment sur les mêmes revendications au savoir que les non-philosophes. Cependant, le lexique épistémique des épistémologues diffère de celui des non-philosophes, car le langage philosophique de la perception et de la connaissance du réel se différencie du langage non philosophique. En digne héritier de Wittgenstein, Clarke affirme que nous n’inférons aucunement l’existence des objets de l’existence d’objets particuliers, mais que notre connaissance de leur existence résulte d’un processus analytique et descriptif dont

56 D’une part, le clivage entre les vérités analytiques, indépendante des faits et les vérités synthétiques, dépendantes des faits, de l’autre, le réductionnisme consistant en la croyance de l’adéquation de la logicité du langage avec l’expérience immédiate.

57 W.V.O. Quine, Relativité de l’ontologie et autres essais, Editions Aubier Flammarion, 2008.

58 W.V.O. Quine, « De ce qui est », Du point de vue logique, trad. franç. P. Gochet, Paris, Vrin, 2003, p. 44 59 Idem, p. 46.

146 l’instrument est le langage. La connaissance des objets physiques ne peut ainsi en aucune manière être le produit de données sensorielles comme le prétend le sens commun ordinaire. Mais également comme l’affirment les différentes formes d’empirisme qui prétendent quant à elles justifier rationnellement l’existence de ces sense data au moyen d’une conception toute particulière de ce que serait le common sens. Plus encore, Clarke reproche à Austin d’avoir succombé à l’explication de la conception empirique du sens commun. Selon Clarke, malgré ses critiques de l’épistémologie des théoriciens des sense data, Austin accepte implicitement les croyances fondamentales du sens commun, c’est-à-dire que les objets physiques existent et que nous pouvons le savoir puisque nous pouvons les voir et les toucher. La philosophie du langage ordinaire d’Austin n’offre ainsi aucune conception de la connaissance ou du savoir véritablement alternative à la connaissance empirique. Pour Clarke la pensée d’Austin ne se confronte pas à la spécificité de la nature de la connaissance empirique : ses présupposés. Aussi, Clarke est-il légitimement conduit à invalider les prétentions de l’épistémologie traditionnelle tout autant que leurs procédures d’exemplification de ce qu’est voir et savoir dans la philosophie d’Austin. Pour ces raisons, Clarke conclut son étude et sa thèse sur la nécessité d’être en mesure de caractériser la dimension de non-règle qui préside à la connaissance et qui prévaut dans la vie quotidienne. Selon Clarke, les exemples proposés tant par les épistémologues traditionnels que par la philosophie d’Austin ne constituent pas de réels exemples de la manière dont nous sommes conduits à rendre compte en terme de véridicité de la connaissance61. Les représentations et les exemplifications tant graphiques ou spatiales que grammaticales induites respectivement par l’épistémologie traditionnelle et par la philosophie d’Austin se révèlent impropres à expliquer pourquoi et comment voir et savoir peuvent être vrais, bien qu’essentiellement indépendants de règles formelles. Selon Clarke, la valeur de vérité qui préside dans les représentations de ce que sont les concepts voir et savoir en philosophie et dans les théories de la connaissance, constitue une dimension de règle qui ne correspond aucunement à la réalité effective de nos expériences de ce qu’est voir et savoir, expérience foncièrement indépendante de cette dimension. Une dimension de non-règle préside à notre expérience de voir et savoir dans la vie quotidienne et à notre capacité de dire si ce que nous voyons ou savons est conforme ou non. Si, Clarke n’a pas encore caractérisé la nature de cette dimension de non-règle qui prévaut dans la vie quotidienne, ses constatations le conduiront dans son article "Seeing Surfaces and Physicals Objects", à soutenir la thèse suivante : nous ne disons pas ce que nous voyons, mais, au contraire, nous voyons ce que

147 nous disons. Dans ce même article, Clarke opposera le sens commun philosophique (SCph) de la connaissance empirique au sens commun ordinaire (SCord)62 des non-philosophes afin d’expliquer et d’illustrer la nature divergente des lexiques de la perception et de la connaissance au sein de ces différents registres épistémologiques63. Si, nous reprenons la distinction husserlienne entre "ontologie formelle" dont l’objet est l’étant en général et "ontologie matérielle" dont l’objet renvoie à des aspects particuliers ou à des représentations de la réalité au sein de théories déterminées, Clarke étudiera l’ontologie matérielle du sens commun des hommes ordinaires versus l’ontologie matérielle du Common sens déployée par l’épistémologie traditionnelle des philosophes.

1.3.3.2 A quelle ontologie répond la thèse des sense data ?

Selon Hacker, la plupart des philosophes d’Oxford se confrontent à la philosophie du point de vue du "langage ordinaire" après avoir étudié les humanités classiques, c’est-à-dire après avoir été sensibilisé au langage non philosophique64. Strawson explique ainsi que l’analyse de nos pratiques linguistiques est la meilleure voie, sinon l’unique, afin d’obtenir de féconds résultats en philosophie. En conséquence, pour la philosophie du langage ordinaire, la recherche du vrai en philosophie devrait consister pour le moins, à rechercher dans l’être vrai des choses qui devraient exister, ce qui devrait faire ou rendre vrais les énoncés du langage65. Mais l’étude de notre environnement ontologique est-elle réductible aux seules analyses linguistiques ou langagières de nos énoncés épistémologiques sur ce qu’est dire voir et dire savoir ? Telle est la profonde question posée par Clarke tout au long de son analyse de La

nature de l’épistémologie traditionnelle. Elle est reprise et approfondie dans ses deux articles ultérieurs en mettant l’accent sur le fait de savoir, si les philosophes et les non-philosophes dans leurs revendications épistémologiques respectives se réfèrent ou non au même mobilier ontologique.

La question ontologique « qu’est-ce qui existe ? » est formulée par Clarke au moyen d’une réflexion sur la philosophie de la perception, notamment en évaluant la pertinence de la

62 T. Clarke, Le legs du scepticisme, § Au-delà de l’ordinaire. 63 T. Clarke, Le legs du scepticisme.

64 Peter Hacker, Wittgenstein’s Place in Twentieth-century Analytic Philosophy, Oxford University Press, 1996. 65 Achille Varzi, Ontologie, trad. franç J. M. Monnoyer, Paris, Les Editions d’Itaque, 2005, p. 42.

148 théorie des données sensorielles. Les différents arguments pro ou contra relatifs à l’existence des entités philosophiques que sont les sense data conduisent Clarke à poser la question du statut ontologique des données sensorielles. Clarke s’interroge sur cette nécessité philosophique de postuler l’existence des phénomènes physiques en caractérisant la réalité des phénomènes perceptifs au moyen des sense data. Clarke est ainsi conduit à interroger l’ontologie du common sens postulée par les philosophes empiristes face à une possible ontologie du sens commun déployée par la Mundus Epistemology Investigation des non-philosophes. L’analyse des arguments d’une philosophie de la perception en faveur de la connaissance empirique amène Clarke à poser le problème des relations qui existent entre un objet X et les parties qui le composent. L’étude de l’usage du terme « surface » pour désigner « ce que nous voyons d’un objet physique », l’étude de l’emploi du mot « morceaux » afin de désigner une partie de « fromage grignoté », conduisent Clarke à se confronter au domaine de la méréologie, c’est-à-dire la théorie des relations parties-tout66. Cette confrontation à la méréologie, l’un des pans majeurs de l’ontologie classique, cristallise le problème des caractéristiques de la croyance de la connaissance empirique selon Clarke. La polémique épistémologique entre les philosophes qui pensent que seulement une partie d’un objet physique peut-être vue et ceux, au contraire, qui pensent que l’objet physique en son entier est vu. Cette polémique épistémologique constitue le nexux du problème onto-logique auxquelles conduisent les croyances primordiales du common sens de la connaissance empirique67. Pour Clarke, l’origine de cette polémique réside dans le fait de croire que :

- nous pouvons savoir qu’il existe des objets physiques dans le monde, - nous pouvons voir (et toucher) les objets physiques,

- nous pouvons savoir qu’il existe des objets physiques puisque nous pouvons les voir (et les toucher).

Cette polémique est constituée par un raisonnement ou un syllogisme formé par deux prémisses conduisant à une conclusion logiquement impliquée par les deux propositions qui ont précédé. Un syllogisme est, selon Aristote, un discours dans lequel, certaines choses étant posées, quelque autre chose en résulte nécessairement par cela seul qu’elles sont posées68. Nous savons l’existence de X or, nous pouvons voir X donc nous pouvons savoir l’existence de X car nous pouvons le voir.

66 T. Clarke, La nature de l’épistémologie traditionnelle et T. Clarke, Voir les surfaces et les objets physiques. 67 Id.

149 Le fait d’être en capacité de voir (proposition majeure) nous assure le savoir de l’existence d’objets physiques (proposition mineure) qui conduit au fait que nous puissions être en mesure de savoir que ces objets existent, car nous pouvons les voir (conclusion). L’assemblage des croyances du sens commun philosophique conduit à établir un raisonnement sous le mode d’un syllogisme catégorique qui affirme la certitude de notre savoir de l’existence d’objets physiques. Le fait de savoir qu’il existe des objets physiques et que nous pouvons voir ces mêmes objets physiques implique alors que nous pouvons savoir qu’il existe de tels objets, car nous pouvons les voir. Selon Clarke, ce syllogisme est constitué par l’assemblage de ces croyances primordiales de la connaissance empirique. Cet assemblage raisonné de croyances explique la raison d’être de l’argument en faveur de l’existence de données sensorielles qui est une réponse aux différentes questions que posent ces croyances, c’est-à-dire une sorte d’examen critique de la valeur de ces croyances, mais qui n’est pas reconnue comme telle par l’épistémologie traditionnelle69. Ces croyances primordiales composent le syllogisme à l’origine de l’argument de l’existence de données sensorielles et légitiment en retour, l’ensemble des polémiques épistémologiques qui ont trait à la philosophie de la perception.

Par conséquent, les partisans de la théorie des données sensorielles tout autant que leurs contradicteurs partagent un même présupposé, celui de la véracité du syllogisme formé par les croyances fondamentales de la connaissance empirique. Selon Clarke, l’ensemble des philosophes de la perception partage implicitement ce présupposé qui n’est pas reconnu comme tel, lorsque tenants et adversaires des données sensorielles se confrontent afin de rendre compte de la nature de la perception d’objets physiques. Les polémiques épistémologiques des philosophes quant à savoir ce qui est vu réellement d’un objet physique sont le symptôme de la croyance en la véracité du syllogisme constitué par les croyances de la connaissance empirique. Plus encore, les épistémologues traditionnels partagent l’idée que la connaissance est caractérisée comme un système d’éléments logiquement structuré qui peut être vérifié dans l’expérience.

Les uns comme les autres admettent une certaine caractérisation des relations à établir entre la connaissance empirique et sa justification ou ses preuves70. C’est pourquoi le vérificationnisme est la pierre d’achoppement autour de laquelle s’affrontent les tenants et les adversaires de la théorie des données sensorielles. Car le vérificationnisme est le présupposé commun d’une conception satisfaisante de la signification cognitive partagée par les uns

69 T. Clarke, La nature de l’épistémologie traditionnelle, p. 4 et 5.

150 comme par les autres, selon Clarke. La tâche de l’épistémologie traditionnelle consiste alors à rendre compte des rapports entre la connaissance et les stimulations sensorielles sur le mode descriptif afin de justifier et de fonder la connaissance empirique. Cette prétention à fonder philosophiquement la connaissance est ce que rejettera Quine dans un célèbre article71. Pour ce dernier, l’épistémologie ne peut ni justifier notre connaissance à partir de l’expérience, ni produire une telle justification, à partir de concepts et d’énoncés d’observation, au moyen de définitions et de déductions formelles qui constitueraient les concepts et les énoncés scientifiques72. Si pour Quine, notre connaissance surpasse constamment l’expérience qui fait qu’il est impossible d’en produire une justification empirique définitive73, pour Clarke, une justification empirique définitive de la connaissance est en quelque sorte dénuée de fondement. Car nos énoncés cognitifs et descriptifs sont préalablement constitués par le langage et non par l’expérience. Clarke soutient la thèse selon laquelle le langage prévaut sur l’expérience afin d’établir la véridicité de la signification des énoncés cognitifs. En conséquence, nous ne disons pas ce que nous percevons de l’expérience, mais au contraire, nous percevons l’expérience par rapport à ce que nous en disons. La thèse clarkienne présente une conception du langage qui est tout à la fois un instrument discursif et une pratique dont la finalité d’usage vise un objectif précis : instituer la signification de nos énoncés cognitifs.

Dans une veine toute wittgensteinienne74, Clarke critique et dénonce les ambitions philosophiques des théories de la connaissance qui prétendent justifier idéalement au moyen du vérificationnisme la connaissance empirique, en dehors de toute prise en considération des contextes d’usage du langage de la connaissance. L’étude de l’épistémologie traditionnelle est également une critique sur le risque d’hypostasier la signification de nos énoncés cognitifs, par exemple, lorsque les philosophes s’interrogent sur la signification de « ce qu’est voir un

objet physique », l’objet dans sa totalité ou une partie de sa surface. Ces polémiques issues des différentes argumentations et procédures vérificationnelles produites par la théorisation des philosophes de la perception n’aboutissent qu’à masquer la signification réelle et ordinaire, c’est-à-dire contextualisée de ce qu’est voir un objet physique. Les théories de la connaissance proposent des procédures abstractives de la connaissance empirique, c’est-à-dire décontextualisées par principe de ce qui situe ordinairement ce qui fait l’objet d’une connaissance spécifique. Hypostasiée, car décontextualisée, la signification des énoncés

71 W. v. O. Quine, « L’épistémologie naturalisée », Relativité de l’ontologie et autres essais, Paris, Éditions Aubier Flammarion, 2008, p. 83-105.

72 D. Chapuis-Schmitz, Idem, p. 50.

73 W. v. O. Quine, « Sur les systèmes de monde empiriquement équivalents », Philosophie des sciences, (dir.) S. Laugier et P. Wagner, Vol.2, Paris, Folio essai Gallimard, 2002, p. 114-138.

151 cognitifs des épistémologues traditionnels conduit à ne plus prendre en compte la particularité des contextes et des usages spécifiques du langage de la connaissance et de la perception. Retenant les leçons d’Austin données dans le cadre des conférences Williams James à Harvard, Clarke reconnaît l’idée selon laquelle dire c’est également faire, car un même énoncé peut caractériser de manière distincte sa signification selon l’usage qu’il en est fait. Ceci conduit Clarke à expliquer que les prétentions épistémologiques des philosophes sont également situées et contextualisées, car elles ambitionnent de présenter une vision théorique, caractéristique éminente de la philosophie, qui prétend réellement rendre compte de la connaissance ordinaire. Clarke n’oppose pas de manière simpliste l’ambition et les revendications épistémologiques des philosophes à celles supposées naïves des non-philosophes ou hommes ordinaires. Clarke ne propose pas une hiérarchisation axiologique de ces prétentions à la connaissance, mais il propose une explication aux revendications toutes spécifiques des épistémologues traditionnels quant à établir le bien-fondé de leurs recherches philosophiques sur la nature de la connaissance et de la perception. Selon Clarke, les épistémologues traditionnels veulent rendre compte des investigations épistémologiques de la